Elles ont été instituées pour la tenue d'un procès équitable de l'ancien président tchadien, Hissein Habré. Mais, au fil du temps, un procès en sorcellerie semble être institué contre les Chambres africaines extraordinaires (CAE) qui lèvent le masque.
Les campagnes de sensibilisation organisées de part et d'autre sur la juridiction africaine en charge du procès de l'ex-président tchadien n'ont pas encore effacé le scepticisme de certains esprits qui jugent que les Chambres africaines extraordinaires violent le droit ou sont au service des autorités tchadiennes. Or, les termes de référence relatifs au statut des Chambres africaines extraordinaires au sein des juridictions sont clairs.
Il est mentionné dans le texte que cette institution émane d'une décision de l'Union Africaine relative à la poursuite par la République du Sénégal des crimes internationaux commis au Tchad, entre le 7 juin 1982 et le 1er décembre 1990, conformément aux engagements internationaux. Il relève de leurs compétences de statuer sur les ''crimes de génocide, les crimes contre l'humanité, les crimes de guerre, la torture.''
Réparties en trois composantes, les Chambres africaines extraordinaires disposent de prérogatives qui leur sont spécifiques. En effet, selon le document de référence, ''la Chambre africaine extraordinaire d'instruction du Tribunal régional Hors classe de Dakar doit être composée de quatre juges d'instruction titulaires de nationalité sénégalaise nommés par le président de la Commission de l'Union africaine sur proposition du ministre de la Justice''.
Pour sa part, la Chambre africaine extraordinaire d'accusation de la Cour d'appel de Dakar est aussi composée de trois juges titulaires de nationalité sénégalaise et d'un juge suppléant de nationalité sénégalaise nommés par le président de la Commission de l'Union africaine sur proposition du ministre de la Justice.
Une petite différence est notée au niveau de la Chambre africaine extraordinaire d'assises d'appel. ''Elle est composée d'un président, de deux juges suppléants nommés par le président de la Commission de l'Union africaine sur proposition du ministre de la justice du Sénégal''. Mais là, ''le président de la Chambre est ressortissant d'un autre État membre de l'Union africaine''.
L'éthique préside au choix des juges
Le choix des juges se base aussi sur des critères d'éthique. ''Les juges sont choisis parmi des personnes jouissant d'une haute considération morale, connues pour leur impartialité et leur intégrité et ayant exercé des fonctions de juge pendant au moins dix ans. Les présidents des CAE d'assises et d'appel doivent réunir, en plus, les conditions requises dans leurs États respectifs pour l'exercice des plus hautes fonctions judiciaires''.
L'autre particularité de cette institution, selon le document parvenu à EnQuête, est que les victimes ont plusieurs opportunités. Parmi celles-ci, la possibilité de se constituer en partie civile. ''Lorsque l'intérêt de la justice le commande, les Chambres africaines extraordinaires peuvent exiger des victimes ou d'un groupe particulier de victimes, le choix, au besoin avec assistance de l'administrateur, d'un ou de plusieurs représentants communs. Le mandat ainsi donné peut être révoqué à tout moment''.
Les droits des accusés
Les droits des accusés ne sont pas ignorés par cette juridiction africaine. Il est stipulé en l'article 21 que : ''tout accusé a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement, sous réserve des mesures ordonnées par les Chambres africaines extraordinaires pour assurer la protection des victimes et des témoins.'' Il s'y ajoute qu'au niveau des CAE, ''tout accusé est présumé innocent, jusqu'à ce que sa culpabilité ait été établie conformément aux dispositions de présent Statut'', souligne le texte.
Une autre disposition : ''les arrêts rendus par la Chambre africaine extraordinaire d'assises d'appel sont définitifs. Ils ne sont susceptibles d'aucune voie de recours même extraordinaire''. Les CAE ont aussi la latitude de prononcer ''une peine d'emprisonnement à temps de 30 ans au plus ou une peine d''emprisonnement à perpétuité si l'extrême gravité du crime et la situation personnelle du condamné le justifient''.
''Les Chambres africaines extraordinaires sont dissoutes de plein droit une fois que les décisions auront été définitivement rendues,'' lit-on.