Partir travailler dans l'humanitaire et plus précisément faire du bénévolat dans un orphelinat est ici un prétexte pour prendre le large.
Sophie et sa meilleure amie Pamela décident d’aller à la découverte de ce charmant pays qu'est le Sénégal.
Pamela rentre seule en France pour Noël, sans son amie Sophie que toute la famille attend pour le dîner traditionnel.
Un message de Pamela aux parents de Sophie va transformer ce Noël en cauchemar. Leur fille a disparu dans Dakar, peut être capturée par des intégristes ou autres forces obscures.
Toute une famille se mobilise pour prendre le premier avion à destination de Dakar. Le père Antoine, la mère Virginie, son mari Gabriel, leur fille Chloé, le grand-père maternel René, la femme d'Antoine, Fanny, leur fils Paul et leur petit chien minuscule au pelage fauve et aux oreilles pointues, prénommé Minou.
Cette famille "recomposée" et ce voyage inattendu vont nous offrir des scènes cocasses, des situations singulières, des surprises, des drames, le tout enrobé dans une réflexion profonde et déployé dans une écriture fluide, captivante avec des portraits saisissants des différents protagonistes de ce mélodrame.
Ce voyage inopiné qui réunit deux "rivales", deux maris, deux familles que tout oppose mais ayant le même but : retrouver la fille adorée pour les uns, le fruit des plaisirs volés pour l’une qui est du voyage malgré elle, la demi-sœur pour d’aucuns, la petite fille...., va revêtir une atmosphère pesante de "paix armée."
Dakar bariolé s'offre à eux dès leur arrivée à l'aéroport Léopold Sédar Senghor avec des scènes qui nous rappellent certaines images de Dakar l'Ineffable de Feu Oumar NDAO, cet éminent professeur, homme de culture, trop tôt parti....
Le quartier du Dieu Peul recherché longtemps par le GPS, finit par s'ouvrir à eux... Ils étaient à la recherche de l'hôtel Les Flamants roses, là même où résidait leur fille Sophie..... Un hôtel charmant dirigé de main de maître par la battante Soukeyna, épaulée par sa fille Oulimata, celle-là même qui porte dans ses gênes le sens du refus et de l'honneur d'Aline Sitoe Diatta. Ici au Flamants roses, " le Parisien" déclame des poèmes de Paul Eluard et de Verlaine et nous rappelle que le poète n’a pas de frontières parce qu’il s’adresse à ce qu’on a de plus beau et, reprenant Verlaine, il lance à l’endroit de Oulimata : « Me font rire, pleurer et rire, parler sans avoir rien à dire ». Tout un charme !!!
L'hospitalité des lieux relègue au second plan l'inconfort des premiers jours et au rythme d’une vie partagée pleine de surprises, des complicités insoupçonnées quelques jours auparavant naissent chassant les idées surfaites des uns et des autres construites naguère autour d’un certain ressentiment. Le tact de Gabriel est à l’œuvre dans cette communauté hétérogène….
Dans la recherche effrénée de leur fille menée à pas de charge, les parents parcourent Dakar qui n'offre ici que son côté hideux : désordre, insalubrité, indiscipline des automobilistes, "agression" des vendeurs ambulants, hôpitaux engorgés....etc. Le charme de notre capitale n’est qu’entr’aperçu et pourtant le sourire constamment affiché par tous ceux qu’ils rencontrent devait orienter leur perception sur cette valeur fondamentale qui fait aussi notre richesse à savoir qu’ici les gens sont pauvres mais n’ont pas la misère dans l’âme contrairement à eux là-bas qui ont tout sauf le bonheur… Peut-être, c’est cela qu’a découvert Sophie en organisant sa disparition avec la complicité de son amie Pamela et ainsi couper les amarres avec une société dans laquelle elle ne trouve pas ses repères et qui ne répond plus à ses aspirations parce que demeurée trop rigide, voire ankylosée…
Les charmes du pays s'offrent à eux. Certains découvrent et même réapprennent les mélodies du coeur, remerciant Sophie au passage de les avoir attirés dans ce pays lointain, leur donnant ainsi l'occasion de rencontrer la vie ou de renouer avec des sentiments qu'ils croyaient éteints en eux....
"Le chemin parcouru est plus important que le but à atteindre" nous dit l'auteure. Tout de ce livre est dans cette phrase...
Ce roman, déployé sur 442 pages est un délice. A lire absolument…..
Karine SILLA est dramaturge, scénariste et réalisatrice franco-sénégalaise. Elle est l’auteure de deux autres romans Monsieur est mort et Autour du soleil.