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Traque aux opposants… Après Aïda Mbodj, Sonko et Khalifa, à qui le tour ?
Publié le mardi 4 septembre 2018  |  Walf Fadjri L’Aurore
Macky
© Présidence par DR
Macky Sall rencontre la diaspora sénégalaise au Québec
Quebec, le 9 juin 2018 - Le président de la République Macky Sall est arrivé au Canada pour prendre part au Sommet du G7. Le chef de l`État du Sénégal a également rencontré la diaspora sénégalaise établie au Québec.
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Dans la stratégie de liquidation des opposants, Khalifa Sall ne sera ni le premier ni le dernier. Le décret, arme de dissuasion massive en main, l’option de taper sur les têtes qui dépassent n’épargnera aucun mal-pensant titulaire d’une charge publique en conflit avec les idéaux du pouvoir.

Sous le règne de Macky, quand on est opposant et dirigeant de collectivité locale ou haut fonctionnaire, «les emmerdes, ça vole en escadrille», pour paraphraser Jacques Chirac. Les lois et les décrets du remplaçant de Wade, ça décoiffe. Par conséquent, chacun, pourvu qu’il soit opposant en vue et peu ou prou irréductible, a son tour chez le coiffeur. C’est d’abord Aïda Mbodj qui sent la guillotine lui frôler la gorge, avant de la lui trancher définitivement. Députée et Présidente de Conseil départemental, elle s’est vu amputer la seconde coiffe pour, officiellement, «incompatibilité». Le ciblage et l’empressement étaient tels que les initiateurs de la mesure avaient «oublié» que des élus Apr étaient dans la même situation que la Présidente du Conseil départemental de Bambey. On rétropédale pour réparer les dégâts. Et c’est gentiment que les élus Apr en situation d’incompatibilité seront priés de libérer le chignon de trop. Pédagogie pour les partisans, répression pour les opposants. Comme une corrida espagnole, la stratégie de mise à mort est programmée à l’avance.

Quelques moments plus tard, le boa, dressé pour avaler des opposants, reprend du service. Cette fois, c’est dans la haute fonction publique que l’animal choisit de frapper. Pas dans le tas, mais de manière particulièrement ciblée, un peu comme avec les bombes à guidage laser. Fonctionnaire des impôts et leader d’un parti politique clairement estampillé opposition, Ousmane Sonko sort des cafards que le pouvoir voudrait cachés à jamais à l’opinion. Tout d’un coup, les Sénégalais, ahuris, découvrent que le moins solvable d’entre eux paie plus qu’un député qui émarge à, minimum, 1,3 million Cfa mensuels. Puis, se faisant plus d’attaque, Sonko fourre son nez dans le pétrole et le gaz, découverts au large des côtes sénégalaises. Le nouvel opposant, comme un capitaine pédalo, carbure plein régime et brasse beaucoup de vent. Si ses saillies et scoops font les choux gras de la presse et émeuvent l’opinion médusée, ils donnent des urticaires au pouvoir. Et c’est Moustapha Diakhaté, proche de Macky Sall et Président du Groupe majoritaire à l’Assemblée à l’époque des faits, qui, le premier, évoque la possibilité de révoquer Sonko pour «violation de secrets professionnels». Aussitôt dit, aussitôt fait. Le rouleau compresseur le broie de manière impitoyable. En signant le décret de révocation, le président de la République et chef de l’Apr envoie deux signaux forts. D’abord, il notifie à Sonko que s’il veut s’opposer à son pouvoir, c’est hors de l’administration centrale qu’il devra le faire. Ensuite, aux autres hauts fonctionnaires tentés de suivre les pas de Sonko, il est intimé, en sourdine, l’ordre de se boucher les oreilles, de fermer les yeux et de boucler le bec pour ne pas subir le même sort. Le stratagème semble avoir porté ses fruits vu que, depuis le précédent Sonko, aucun haut fonctionnaire n’a osé prendre la carte d’un parti d’opposition. Ceux qui veulent faire de la politique, ils savent que seul le parti au pouvoir leur offre un cadre de vie et de survie.

A l’instar de Sonko, Mme Nafi Ngom a appris à ses dépens que, même à la tête d’une autorité administrative indépendante, fût-elle l’Ofnac, on doit apprendre à rouler dans le sens voulu par le pouvoir. Voulant annoncer trop tôt la couleur, l’ancien Vérificateur général de l’Ige multiplie les sorties. Lesquelles ne sont pas du goût du pouvoir qui le lui fait savoir de vive voix. Ses crédits de fonctionnement sont bloqués puis débloqués. Munie de moyens lui permettant de souffler, Mme Nafi Ngom somme les assujettis de se conformer à la loi en déclarant leur patrimoine. Ces derniers trainent les pieds sans que leur patron ne lève le plus petit doigt pour leur ordonner d’aller dans le sens voulu par l’Ofnac, par la loi. Le pouvoir joue la montre, sachant que, tôt ou tard, le mandat de Mme Ngom arrivera à échéance. Sauf que, sans y mettre les formes, on n’attend même pas le terme du contrat pour virer l’empêcheuse de tourner en rond. A cette dernière, il est reproché deux fautes capitales donc valant décapitation. D’abord, avoir demandé que le directeur du Coud, maire de Ndioum et responsable Apr, réponde de ses fautes de gestion relevées par un rapport de l’Ofnac. Ce, après qu’une action publique aura été déclenchée contre lui par le procureur de la République, destinataire dudit rapport. Puis, d’avoir cherché à en savoir davantage sur le degré d’implication du frère du président de la République dans les ressources découvertes. C’est donc avant terme que Nafi Ngom est envoyée à la retraite. Son décret de révocation enterre en même temps l’Ofnac, maintenu en vie artificielle juste pour l’ornement de l’architecture institutionnelle.

En définitive, Khalifa Sall n’est que le énième dans le rang, mais pas forcément le dernier devant l’infernale machine à briser les carrières. Les têtes qui dépassent sont averties.

Ibrahima ANNE
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