SociétéTabaski 2018 - Rareté et cherté de l’aliment de bétail, non disponibilité des aliments subventionnés, pénurie d’eau ...: Des vendeurs de moutons dans le désarroi
L’Aïd-al-Kabir ou Aïd-al-Adha, plus connue sous l’appellation de Tabaski, c’est dans moins d’une semaine. En perspective de cette fête du mouton, des points de ventes à Dakar affichent presque le plein, avec l’arrivée de plus en plus des troupeaux de béliers qui commencent à inonder le marché. Toutefois, les éleveurs et vendeurs de moutons sont confrontés à d’énormes difficultés liées à la rareté et la cherté de l’aliment de bétail, la non disponibilité des aliments subventionnés et des dons en produits d’hygiène du ministère de l’Elevage et des Productions animales, mais aussi au manque d’eau que vivent, depuis plus de trois mois, Dakar et sa banlieue.
Amoins d’une semaine de la fête de l’Aïd-al-Kabir ou Aïdal-Adha, appelée Tabaski au Sénégal, les différents points de vente sont de plus en plus inondés de moutons. Mieux, au-delà de ses points règlementaires, un peu partout dans les rues de Dakar, des tentes servant de bergeries provisoires regorgent de béliers. Cependant, ses éleveurs et propriétaires de bétail vivent un véritable calvaire lié à l’alimentation mais aussi à l’entretien de ces animaux. Ils se plaignent des dépenses supplémentaires occasionnées par ses impairs et qui impactent nécessairement sur le prix des moutons, cette année. Trouvé à Fass, assis avec sa canne à la main, Omar Mbengue, un vieux vendeur de moutons nous renseigne: «depuis près de quinze ans, chaque approche de Tabaski nous venons ici à Fass Niary Tally vendre nos moutons. Mais, cette année, nous vivons une situation particulière et préoccupante. Nous sommes confrontés à beaucoup de difficultés», ajoute-t-il. En effet, ils sont obligés d’acheter chaque jour des dizaines de baril d’eau à 1000 F Cfa l’unité, à cause de la pénurie du liquide précieux. «C’est pour abreuver le bétail mais aussi l’entretenir notamment laver les moutons». A cela s’ajoutent la rareté mais aussi la cherté des aliments pour le bétail. Non seulement le prix des aliments de bétail a considérablement augmenté mais ils peinent même à en trouver. Actuellement, «le sac de paille d’arachide qui était vendu à 6000 F Cfa est à 8000 F Cfa aujourd’hui alors qu’un sac est utilisé pour nourrir 10 béliers par jour.» Pire, ces vendeurs de moutons sont obligés de recourir à l’aliment de bétail des grands meuniers qui se vend à 16.000 F Cfa le sac de 50 kg car le sac d’aliment du pays qui s’échangeait à 8000 F Cfa est devenu introuvable. «On a de l’argent, mais on ne voit pas suffisamment d’aliment (de bétail, ndlr) pour s’en procurer. Par conséquent, nous limitons les repas des bêtes», nous a confié Omar Mbengue.
LES ELEVEURS ATTENDENT TOUJOURS LES DONS DE PRODUITS D’HYGIENES ET LES ALIMENTS SUBVENTIONNES DU MINISTERE DE L’ELEVAGE
Comme si ces difficultés ne suffisent pas, les éleveurs et vendeurs attendent toujours l’appui du ministère de tutelle. «Même les dons que nous recevions du ministère de l’Elevage et des Productions animales, pour ce qui est des détergents, eau de javel et autres produits, tardent à être mis à disposition cette année», nous confient-ils. Quid de l’aliment de bétail subventionné ? «Nous n’avons pas encore vu l’aliment de bétail qui était subventionné à 4200 voire 4300 F Cfa le sac par le ministère de l’Elevage», se désolent ils. Selon eux, à l’accoutumée, on les trouvait dans leurs tentes pour leur proposer les sacs d’aliment subventionnés. Mais, cette année, ce sont eux qui se déplacent pour s’en procurer, ce qui n’est pas de tout repos. En dehors de la paille d’arachide et de l’aliment de bétail, les vendeurs et éleveurs doivent aussi chercher du «niébé» et du maïs pour renforcer l’alimentation des béliers. Or, toutes ses dépenses, ont un impact sur le sur le prix du mouton que les acheteurs jugent trop cher. Et c’est presque la même situation qui prévaut chez les vendeurs de moutons qui habitent à Dakar. Autre quartier, même réalité. Ces vendeurs qui campent tout au long de la Zone A, sous des tentes «diourgui» érigées avec l’aide d’un groupe de minoterie spécialisé dans la production d’aliments de volaille et de bétail, entre autres, se plaignent eux aussi. Ils déplorent leurs conditions de travail «précarisées» qu’ils sont surtout par la pénurie d’eau à Dakar. Pour ce jeune vendeur, Pape Cheikh, c’est uniquement l’amour d’être éleveur qui le retient dans le métier. Il y a également le vœu de perpétuer l’héritage de ses parents qui ont toujours pratiqué l’élevage chez-eux. «Ce n’aurait pas été la passion que j’éprouve en m’occupant des moutons, j’arrêterai. Et, si on devait prendre en compte tout ce que l’on a dépensé pour chaque mouton, les prix vont être aberrants.»
LES CLIENTS SE FONT DESIRER
L’autre souci des vendeurs et éleveurs de moutons en cette veille de Tabaski, c’est la clientèle se fait toujours rare. «Nous ne voyons presque pas de clients.» A les en croire, les rares acheteurs qui viennent leurs proposent des prix qui les font courir directement à leur perte, se plaignent-ils. Toutefois, à défaut d’acheter, «les clients viennent marchander et promettent aussitôt après de revenir. Mais nous ne les revoyons plus.» Ces vendeurs laissés à leur propre sort ou presque, lancent un appel solennel au gouvernement. «Vraiment, nous lançons un appel aux autorités compétentes pour qu’il nous viennent en aide car, dès lors qu’elles auront résolu le problème de l’eau ce sera un grand soulagement pour nous autres éleveurs.»