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Soutien à la candidature du président Macky Sall eb 2019: Momar Ndiongue et Maurice Soudieck Dionne dressent les “limites“
Publié le jeudi 2 aout 2018  |  Sud Quotidien
Audition
© aDakar.com par DF
Audition du ministre délégué chargé du Programme d’urgence de développement communautaire (PUDC) par le HCCT
Dakar, le 17 novembre 2017 - Le Haut Conseil des collectivités territoriales (HCCT) a auditionné le ministre délégué chargé du Programme d’urgence de développement communautaire (PUDC). Photo: Ousmane Tanor Dieng, président du Hcct
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Interpellés par la rédaction de Sud Quotidien sur la portée, en termes électorale, de la décision prise par la Direction du Parti socialiste (Ps) de faire du président Macky Sall son candidat à la présidentielle de 2019, le journaliste analyste politique, Momar Diongue, et l’enseignant-chercheur en Sciences politiques à l’Université Gaston Berger (Ugb) de Saint-Louis, Maurice Soudieck Dione, sont presque unanimes. Estimant que cette décision, actée lors de la réunion du Bureau politique du samedi 28 juillet dernier, «montre la cohérence de la position» d’Ousmane Tanor Dieng et compagnie. Nos deux analystes restent cependant formelles quant à la portée du point de vue électoral de ce soutien mais également le risque que le Ps encoure lors des prochaines échéances électorales notamment les élections locales, suite à ce renoncement à concourir à la plus haute fonction politique.

DR MAURICE SOUDIECK DIONE, ENSEIGNANT-CHERCHEUR EN SCIENCES POLITIQUES A L’UGB DE SAINT-LOUIS : «Un soutien difficile à évaluer en termes de représentativité électorale»

«C’est un soutien qui montre la cohésion de la coalition Bennoo Bokk Yaakaar (Bby) autour de la candidature du président Macky Sall. Mais c’est un soutien difficile à évaluer en termes de représentativité électorale pour plusieurs raisons. D’abord parce que le Ps (Parti socialiste) est divisé avec la scission initiée par Khalifa Ababacar Sall. Deuxièmement, l’élection présidentielle relève d’un très fort coefficient personnel, et donc, que l’essentiel va se jouer autour du bilan économique du président Sall quant à la prise en charge effective des préoccupations des Sénégalais, du chômage des jeunes, de la gestion des services publics comme l’eau, l’électricité, la santé, l’éducation etc. ; mais aussi de son bilan politique par rapport aux droits et libertés démocratiques de l’opposition, à l’État de droit, notamment les questions relatives à la justice ; et enfin, de manière plus générale, par rapport à l’image du président Sall».

«DES CONSEQUENCES MITIGEES POUR LE PS»

«Ce soutien semble avoir des conséquences mitigées pour le Ps, par rapport à l’orientation prise après la présidentielle de 2012. Il convient de préciser qu’il y a un effet amplificateur de quelque triomphe aux élections présidentielles pour plusieurs raisons. D’abord parce que la présidence de la République est le lieu de concentration des pouvoirs. Ensuite, les Sénégalais semblent s’inscrire dans une certaine cohérence en accordant au président nouvellement élu les autres leviers législatif et local qui lui permettent d’exercer le pouvoir. Dès lors, s’inscrire en marge de cette dynamique de victoire qui a porté le président Sall au pouvoir en 2012 pouvait être à l’origine d’une certaine marginalisation du Ps qui n’aurait pas pu engranger autant de députés et d’élus locaux obtenus sous la bannière de Bennoo bokk yaakaar, s’il était parti seul aux élections autres que la présidentielle qui se sont tenues depuis 2012. En plus, le parti a bénéficié d’autres positions de pouvoir à travers des postes ministériels, des Directions et autres. Cela a été une manière de permettre au parti de souffler, de se régénérer après une longue cure d’opposition qui a duré douze ans. C’est une solution qui peut être qualifiée de réaliste».

«LE PS COURT LE RISQUE DE PERDRE SON IDENTITE ET SA PERSONNALITE»

«Il reste que si le Ps choisit de se diluer dans Bennoo bokk yaakaar pour servir les ambitions de pouvoir du président Sall, il risque de perdre son identité et sa personnalité, en tant qu’il est le parti le plus ancien du Sénégal qui a présidé pendant quatre décennies aux destinées du pays qu’il a mené à l’indépendance. À cela s’ajoute que le Ps avait initié, avec l’Afp (Alliance des forces de progrès) et d’autres partis les Assises nationales, qui ont fait le bilan de 50 ans environ de gouvernance du Sénégal. Aujourd’hui, ce travail majeur est relégué aux oubliettes. Aucune réforme sérieuse n’a été faite pour tempérer les pouvoirs exorbitants du président de la République tels qu’ils résultent, pour l’essentiel, de la Constitution du 7 mars 1963, au sortir du conflit entre Senghor (le premier président de la République, ndlr) et Dia (Mamadou Dia, ancien président du Conseil, ndlr) et qui ont été renforcés par la Constitution du 22 janvier 2001 du président (Abdoulaye) Wade. Cette architecture institutionnelle doit être réformée car elle n’est plus en phase avec l’évolution démocratique du pays. On constate des problèmes relatifs à l’indépendance de la justice, notamment une certaine inféodation à l’Exécutif, une politisation outrancière de la lutte contre la corruption pour renforcer le pouvoir personnel, un fonctionnement clientéliste persistant du jeu politique qui plombe les perspectives de développement, etc. L’urgence des réformes est d’une acuité plus grande que jamais».

«L’AVENIR POLITIQUE DU PS SEMBLE INCERTAIN»

«Des partis comme le Ps et l’Afp, après le second tour de la présidentielle de 2012, auraient pu continuer ce travail politique autour des Assises nationales, car les différents candidats éliminés au premier tour qui ont rejoint le président Sall avaient chacun son programme, donc ce qui les a réunis, c’était de congédier le régime du président Wade. Cela aurait permis d’éviter le gigantisme politique de Bennoo bokk yaakaar, avec toutes les dérives de la majorité mécanique que cela implique. Dans cette hypothèse, le Ps, en tant que locomotive, travaillerait autour d’un leader et d’une équipe pour accéder au pouvoir sous sa propre bannière, avec d’autres forces sociales. En définitive, la position du Ps de gouverner avec le président Sall lui permet, certes, de participer à la gestion du pouvoir, mais semble affaiblir ses capacités à construire un projet politique pour constituer une alternative, même après le régime du président Sall; son avenir politique ainsi semble incertain».

MOMAR DIONGUE, JOURNALISTE-ANALYSTE POLITIQUE : «Le choix est cohérent, mais l’impact sera symbolique»

«Le soutien d’Ousmane Tanor Dieng à Macky Sall entre dans l’ordre normal des choses. A mon avis, ce soutien relève même de la cohérence pour deux raisons. D’abord, si le Parti socialiste (Ps) avait réellement l’ambition de présenter un candidat contre Macky Sall, il n’y aurait pas eu la crise avec Khalifa Sall, à l’interne du parti. Ensuite, le Ps appartient à la coalition Bennoo bokk yaakaar et il s’est engagé, à la veille des législatives du 30 juillet 2017, à souscrire à un accord de mandature qui enjambe la présidentielle de 2019 puisque l’échéance de cet accord est de 2017 à 2022. Or, il savait parfaitement que la présidentielle aurait lieu en 2019 et qu’il aurait été incohérente, de sa part, de présenter un candidat.

Il se trouve également que c’est un choix qui obéit à la raison, à la «realpolitik» parce que le Ps n’a cessé de voir son score à une élection présidentielle baisser régulièrement. Depuis 2000, il est passé de 41%, pour Abdou Diouf en 2000, à 13,50% en 2007, pour le candidat Ousmane Tanor Dieng, et à 11,30% pour ce même Ousmane Tanor Dieng lors de la dernière présidentielle en 2012. Et, ce score est celui du Parti socialiste qui regroupait l’ensemble de ses responsables dont Me Aïssata Tall Sall, Khalifa Sall et leurs partisans. Imaginez, aujourd’hui, le Ps aller à ces élections présidentielles de 2019 après le départ de ces responsables cités précédemment mais aussi après l’incohérence que constituerait une candidature d’Ousmane Tanor Dieng aux yeux des populations sénégalaises. Je pense que dans cette situation, le Ps aura même du mal à recueillir 3% des suffrages».

«IL S’AGIT D’UN SOUTIEN PLUS SYMBOLIQUE QU’ELECTORALE»

«Maintenant, électoralement parlant, je pense que l’impact de ce soutien ne sera pas considérable sur l’issue de la prochaine présidentielle. Je dirai même qu’il s’agit d’un soutien qui a d’avantage une valeur symbolique qu’une valeur électorale parce que le parti est coupé de pans entiers. C’est un soutien symbolique parce que, le président de la République a intérêt à se présenter à la prochaine élection en ayant le soutien de l’unanimité de l’ensemble des composantes de sa coalition Bennoo Bokk Yaakaar. Imaginez un Ps qui aurait accompagné le président jusqu’à maintenant et qui présentait un candidat ; ce qui ferait naître une fissure ou une fracture dans la coalition qui a existé jusque-là et ça aurait dérangé.

Par ailleurs, Macky Sall lui-même est le premier convaincu que sa coalition Bennoo bokk yaakaar a faibli. Il sait que le Parti socialiste qui l’avait soutenu entre les deux tours de la présidentielle de 2012 est aujourd’hui fragilisé et affaibli avec les départs d’Aïssata Tall Sall et de Khalifa Sall et leurs partisans. Le président Sall sait également que l’Afp (Alliance des forces de progrès) qui l’avait soutenu a été également fragilisée par le départ de Malick Gackou et consorts. Je pense que c’est la raison pour laquelle, d’ailleurs, il (le président Sall, ndlr) travaille actuellement à élargir les bases de sa coalition à ses anciens compagnons dans le Parti démocratique sénégalais (Pds) à l’image de Modou Diagne Fada, avec lequel il vient de signer un accord politique. Il en est de même des discussions en cours avec d’autres responsables politiques à l’image de Diop Sy qui serait de plus en plus proche de la coalition présidentielle. Il y a aussi des discussions qui relèvent du secret de polichinelle avec l’Ucs (Union centriste du Sénégal) du maire de Ziguinchor, Abdoulaye Baldé. Je pense aussi qu’Ousmane Tanor Dieng est, lui-aussi, conscient de cette situation de faiblesse de son parti».

«TANOR A INTERET A ETRE AVEC MACKY SALL»

«Il faut avouer que, Niasse et Tanor Dieng, leur avenir politique est derrière eux. Il y a la barrière de l’âge pour qu’ils puissent prétendre à une fonction présidentielle et puis ils sont assez conscients. Après avoir accompagné Macky Sall jusque-là, ils ne peuvent pas non plus s’attendre à grand-chose. Et, à titre personnel, je crois qu’ils ont intérêt à être avec Macky Sall. Or, le cas de Tanor, à supposer qu’il eut à soutenir la candidature de Khalifa Sall et que ce dernier gagne Macky Sall en 2019, il ne donnera pas à Tanor quelque chose de plus que ce que Macky lui donne maintenant. Il ne pourrait lui donner que la présidence d’une institution, soit le Senat, l’Assemblée nationale, le Hcct (Haut conseil des collectivités territoriales)».

«AVEC L’APR, IL NE RESTERA PLUS GRAND-CHOSE DU PS»

«Pour l’avenir du Ps, il faut dire que c’est Tanor qui joue sa dernière carte parce que lui, de toutes les façons, il va devoir passer le témoin. D’abord, il y a la barrière de l’âge et après 2019, c’est les contours d’un nouveau Ps qui se dessineront. Toutes les cartes seront redistribuées après l’élection présidentielle. Si Macky gagne, il ne se présentera pas pour un troisième mandat. A partir de ce moment-là, les partis qui l’accompagnent c’est-à-dire le Ps, l’Afp et d’autres partis sont libres de pouvoir choisir une autre voie en 2024. Il faut comprendre la démarche dans laquelle s’est inscrite Macky Sall depuis qu’il est au pouvoir. Il avait une fois dit qu’il allait réduire l’opposition à sa plus simple expression, mais il l’a réussi avec les partis alliés parce que lui, il est venu au pouvoir avec des circonstances qui lui ont été favorables. Il a un parti qu’il a créé en décembre 2008. Et, 4 ans après, il prend le pouvoir en 2012 grâce à la séparation entre l’Afp et le Ps dans Bennoo Siggil Senegaal. Il a du profiter de la situation car, il savait qu’il a un parti qui, du point de vue de la trajectoire et du vécu, prenait un certain nombre de complexe et d’insuffisances par rapport au Ps et à l’Afp. C’est pourquoi, il a entrepris cette démarche visant à caser ces partis et, à mon avis, il a réussi.

Je suis sûr qu’au sein du Parti socialiste, même s’ils ne le disent pas, avec la situation présente (départ de Khalifa Sall et Aïssata Tall Sall), il y a des responsables à la base qui ne partagent pas la position exprimée par Tanor Dieng et ça va continuer davantage à fragiliser le Parti socialiste. Avec le compagnonnage avec l’Apr, le Ps ne restera plus grand-chose parce qu’il sera fragilisée du fait des départs d’autres responsables à l’image de Khalifa Sall et Aïssata Tall Sall, du fait des décisions de Tanor Dieng et la Direction du parti».
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