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Au Sénégal, verdicts dans le procès d’un vaste projet terroriste
Publié le vendredi 20 juillet 2018  |  LeMonde.fr
Reprise
© aDakar.com par SB
Reprise du procès en appel de Khalifa Sall
Dakar, le 19 juillet 2018 - Le procès de Khalifa Sall devant la Cour d`appel de Dakar a repris ce lundi après une semaine de suspension.
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La justice sénégalaise a acquitté l’imam Ndao et condamné à vingt ans de prison son disciple Matar Diokhané accusé d’avoir voulu créer un califat ouest-africain basé en Casamance.

Le verdict est tombé, suivi d’acclamations religieuses traduisant un soulagement général. Des dizaines de talibé (étudiants coraniques) se sont prosternés dans l’immense salle 4 du palais de justice de Dakar, clamant les bras au ciel « Allahou Akbar ! ». Jeudi 19 juillet, l’imam Alioune Ndao, poursuivi au Sénégal pour « apologie du terrorisme », « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste » et « blanchiment de capitaux », a été innocenté de presque tous les chefs d’accusation qui l’accablaient.
Le juge Samba Kane a retenu celui de « détention d’arme de deuxième degré », en référence au pistolet et aux cartouches retrouvés à son domicile en 2015 et pour lesquels il est condamné aujourd’hui à un mois de prison avec sursis. L’imam, critiqué pour ses prêches radicaux et que les enquêteurs accusaient d’être l’idéologue d’une cellule terroriste prenant racine en Afrique de l’Ouest est désormais libre. Le parquet avait requis une peine de trente ans.

Califat ouest-africain

Sur les 29 accusés qui comparaissaient avec lui pour terrorisme supposé depuis le 9 avril devant la chambre criminelle à formation spéciale, 15 ont été acquittés, soit 7 de plus que la demande formulée par le procureur général. La plupart avaient été arrêtés lors d’une vaste opération antiterroriste menée au mois d’octobre 2015, qui visait à lutter contre des chefs religieux diffusant « des prêches de haine » dans leurs mosquées sénégalaises. Trois autres accusés ont été condamnés par le tribunal correctionnel à quinze ans de travaux forcés, six autres à dix ans et trois à cinq ans.

En saisissant du matériel informatique, les enquêteurs de la division des investigations criminelles (DIC) et de la section de recherches de la gendarmerie (SR) avaient pu déceler dans des conversations sur des messageries sécurisées, des indices supposant un projet terroriste d’envergure : la création d’un califat ouest-africain basé en Casamance, dans le sud du pays, et étendant ses ramifications dans les pays voisins, Gambie, Guinée et Guinée-Bissau. Un projet qui aurait reçu le soutien de la secte djihadiste nigériane Boko Haram et de l’organisation Etat islamique (EI).

Disciple de l’imam Ndao et « cerveau » de ce projet, Matar Diokhané est devenu, au cours du procès, l’accusé principal. Connu des services de police, il avait été précédemment mis sous surveillance pour avoir organisé en 2015 le départ d’une vingtaine de ses compatriotes pour rejoindre les rangs de Boko Haram au Nigeria, où ils avaient suivi des formations paramilitaires et participé à des combats. Aujourd’hui, il a été condamné à la plus lourde peine : vingt ans de prison ferme pour « actes de terrorisme ». Une condamnation motivée notamment par son rôle central en tant que combattant et recruteur.

Matar Diokhané a ainsi coordonné l’engagement de jeunes disciples de l’imam Ndao sur « les fronts de Libye, de Syrie, du Nigeria et du Niger », pour le compte d’organisations terroristes telles Al-Nosra, l’EI et Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI).

Bénédiction divine
« La cour n’a pas encore communiqué les motifs de cette décision, qui nous semble nébuleuse, avance Alassane Cissé, avocat de Matar Diokhané. Dans cette affaire, on a motivé de manière inédite l’association de malfaiteurs pour en faire un crime d’acte de terrorisme. Cette décision est d’autant plus caustique que le procureur avait abandonné ce chef d’accusation pour ne retenir que la complicité d’infraction. » L’avocat souhaite faire appel de la décision.

Dans la défense de l’imam Ndao, on accueille l’acquittement comme une bénédiction divine. « Dieu nous a permis d’avoir la quiétude pour mener ce combat et obtenir sa libération, lance Me Moussa Sarr, coordinateur de la défense d’Alioune Ndao. Nous avons toujours dit que, dans ce dossier, il n’y avait pas de faits infractionnels, que de simples allégations. Le parquet n’a apporté aucune preuve matérielle. C’est normal que la justice innocente mon client. » En détention préventive depuis deux ans, l’imam Ndao va recouvrer sa liberté et pouvoir retourner à ses enseignements religieux dans sa daara (école coranique).
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