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Le Soleil N° 1306 du 26/11/2013

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Dahra Djolof : immersion dans le plus grand «louma» de bétail du Sénégal
Publié le mardi 26 novembre 2013   |  Le Soleil


Bétail
© Autre presse par DR
Bétail du Sénégal


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Hier comme aujourd’hui, Dahra se confond avec l’élevage et la vente de bétail. C’est l’un des marchés le plus grand de l’Afrique de l’Ouest où les transactions culminent à un milliard de francs Cfa tous les deux dimanches. En dépit de cette manne, la ville cherche toujours le chemin de l’émergence.

Dahra Djolof. Ville sylvo-pastorale. Située à 265 km au nord-est de Dakar, Dahra est aussi une ville historique. Par sa position stratégique et son poids, cette localité avait une sorte de pesanteur sur l’empire du Djolof. Mais tout cela a aussi une histoire. Dahra a été fondé par le maître coranique, Mayoro Mbaye, aidé par ses disciplines. La ville profitera de cette rançon historique et certainement de l’influence de ses hommes politiques pour changer de statut au fil du temps.
C’est en 1990 que la localité qui était une communauté rurale, arrondissement, devient une commune. Même si elle ressemble encore à une « commune rurale ». Son développement a comme socle, le commerce du bétail. Depuis plusieurs années, Dahra est le rendez-vous des éleveurs de bœufs, de moutons, de chèvres, tous les dimanches. Leur marché hebdomadaire enregistre des affluences impressionnantes. Selon les témoignages, le marché hebdomadaire de la ville est le plus grand de l’Afrique de l’Ouest. Il joue un rôle primordial dans l’approvisionnement en bétail dans le pays et dans la sous-région. Ce dimanche 15 septembre n’échappe pas à l’affluence des grands jours. Les clients et les bergers se livrent à des marchandages çà et là. D’autres se prélassent dans les huttes de fortune. Le site ressemble fort à une étable. Les petits ruminants côtoient les vaches et les bœufs. Entre ces animaux, on chante et on vante la qualité de la marchandise. Parfois on voit d’autres esquisser des pas de danse. L’ambiance est rurale voire burlesque. Tant mieux. Ici, la concurrence est saine. Puisque les différents concurrents se connaissent.
Les dimanche, il n’est pas facile de se déplacer dans certaines artères de la ville. Les campements de fortune, les charrettes, les futs, les tas de foin contribuent à donner une excroissance temporaire à la ville. Mais le jeu en vaut la chandelle. Le marché pèse plusieurs millions de FCfa. Cette transaction a des répercussions sur le plan socio-économique. Après Touba et Mbour, Dahra est la ville la plus développée sur le plan économique et démographique, à en croire le conseiller municipal, Abdoulaye Sall. Ce retraité s’est converti en politique. Il y trouve son compte.
«Notre ville s’est bâtie sur elle-même. Nous n’avons pas attendu l’Etat pour se développer. Nous sommes fiers de nous», s’est-il glorifié. Dans son commentaire, il a ajouté que Dahra est une ville de bétail.

Commerce rentable du bétail
« Nous pouvons régler la question de l’autosuffisance en lait et en viande si l’Etat nous aide à le faire », a soutenu Abdoulaye Sall. Au milieu d’autres sexagénaires, M. Sall ne tarit pas d’éloges sur le dynamisme de la ville, des populations aussi bien de Dahra que les localités environnantes. « Nous sommes une ville émergente parce que nous progressons chaque jour », dit-il, avec conviction. Binta Sow, une tenancière d’une cantine d’habits et de produits cosmétiques ne contredit pas le retraité. Tout de même, elle pense que Dahra pouvait dépasser son stade actuel de développement au regard de ses potentialités. « Si l’argent des taxes encaissées était bien géré, la ville devrait avoir plus d’infrastructures. Elle doit bénéficier de plus de l’éclairage. Malheureusement, il n’y a rien. Même pas d’espaces pour jeunes », regrette Binta Sow. Elle ajoute : « l’éclairage public pose problème. La nuit, il fait sombre. Les gens n’osent pas sortir de peur d’être agressés. Heureusement, la gendarmerie abat un excellent travail pour sécuriser les populations », a expliqué la commerçante.
Moumadou Moustapha Ndiaye est plus formel. Si ce n’était pas la vente du bétail et de l’élevage, Dahra serait la ville la plus pauvre du Sénégal. Selon ce dernier, Dahra, malgré son riche patrimoine, bâti à partir de l’élevage, est pauvre en infrastructures. Et pour doter sa ville natale d’infrastructures, il veut qu’elle soit érigée en chef lieu de département. Ce qui lui permettra de bénéficier des mêmes avantages que les autres villes comme Linguère et Louga. M. Ndiaye a aussi invité les autorités à créer des écoles de formation dans la ville et à atténuer les déperditions scolaires. « Nous devons avoir des filières de formation sur l’exploitation et la conservation des produits laitiers », propose-t-il. Il déplore le fait qu’une grande ville comme Dahra ne dispose pas de centre de santé digne de ce nom. « Notre structure sanitaire n’a presque pas de plateau technique. Le bloc opératoire, construit il y a 56 ans, ne fonctionne toujours pas et les autorités sanitaires ne font rien pour trouver une solution à cette question », a-t-il déploré. Malgré tout, ici on croise plus d’habitants comme Ousseynou Wade, âgé de 24 ans, qui se mettent dans la peau de porte-parole de la jeunesse.
« Beaucoup de jeunes sont au chômage pourtant ils ont des diplômes. Ils méritent d’avoir un boulot », a regretté Ousseynou Wade.

MARCHE HEBDOMADAIRE
Dès les premières heures de la matinée du dimanche, des convois de charrettes, de camionnettes et de tous autres moyens de transport surchargés de passagers et de produits de toutes sortes envahissent, petit à petit, la ville de Dahra-Djoloff pour assister au « louma » de Dahra, un des plus grands marchés hebdomadaires de la sous-région et le premier foiral du Sénégal.
Les rues et places de cette localité, située en plein cœur de la zone sylvo-pastorale, peinent à accueillir tout ce beau monde de commerçants et de visiteurs venus de partout assister à ce grand marché hebdomadaire qui s’y tient tous les dimanches. Le marché du dimanche de Dahra-Djoloff a cette particularité d’être l’un des plus grands « louma » de la sous-région et le premier marché hebdomadaire du bétail en Afrique de l’Ouest.
Chaque dimanche, ce sont des milliers de bovins qui y affluent venant de toutes les régions du Sénégal, du Mali, de la Mauritanie et de la Gambie, explique Ngoye Diouf, un des commerçants établis, depuis des années, dans plus grande ville de la zone sylvo-pastorale du Sénégal, communément appelée Ferlo. Ici, toutes les races de bovins, ovins et caprins sont présentes et les prix varient selon la qualité de la marchandise proposée.
Il y a des bœufs qui se vendent à 3 millions de FCfa comme d’autres sont cédés entre 100 000 et même 65 000 FCfa. Tout dépend de l’âge et de la taille du bétail, explique M. Diouf. Généralement, les bœufs de 2 à 3 ans peuvent être achetés, ici, entre 100 et 115 000 FCfa en moyenne. Quant aux bœufs de 4 à 5 ans, ils s’acquièrent entre 225 et 250.000 FCfa. Et les bœufs de 5 à 6 ans peuvent être achetés à 300.000 FCfa ou plus. Pour nombre de commerçants interrogés, les clients viennent généralement de Touba, Louga, Saint-Louis, Kébémer et Darou Mousty, Diourbel et Mbacké. De toutes ces villes, celle de Touba et de Dakar composent la majorité des clients, en raison de leur nombre important de consommateurs qui y résident. En effet, cette ville religieuse qui compte des millions d’habitants, n’est pas très éloignée de Dahra-Djoloff. Ngoye Diouf estime que le bétail est généralement acheté pour les besoins de l’abattage, de l’embouche bovine ou simplement par des revendeurs de bétail et que la saison des pluies est la période la plus favorable pour ce genre de commerce.
Puisque les prix pratiqués sont à la portée du client du fait de la baisse des charges liées à l’entretien des animaux, dont l’eau et l’alimentation du bétail. Si les affaires marchent pour tout ce beau monde venu dans ce haut lieu de la transaction du bétail, ce n’est pas le cas pour Aly Kâ, ce « têfanké » ou commerçant de bétail qui estime que le foiral ne marche plus très bien à cause de la présence massive de ses collègues venus des pays voisins. Ces commerçants de bétail des pays voisins ont beaucoup de facilités pour acheminer leur bétail au Sénégal et plus précisément à Dahra tandis que les Sénégalais ne peuvent même pas franchir les frontières de ces pays à cause des nombreuses barrières tarifaires et non tarifaires imposées.
Pour ce dernier, ses compatriotes sénégalais rencontrent tous les problèmes du monde pour aller vendre leur bétail en Mauritanie, en Gambie et au Mali. « Nous sommes donc obligés de céder un taureau qui devait coûter 250.000 F à 200.000 F pour ne pas rentrer à la maison avec son bétail », confie-t-il. « Nous voudrions qu’on crée les conditions pour qu’on puisse accéder aux marchés mauritaniens, maliens et gambiens et bénéficier des mêmes avantages que ceux accordés, par le Sénégal, aux ressortissants des pays voisins », précise-t-il.
Un dimanche pas comme les autres
Situé sur la route nationale N°3, la ville de Dahra-Djoloff, cette deuxième métropole économique du département de Lnguère, s’illustre par ses activités commerciales et pastorales et par son dynamisme économique. Son foirail dominical constitue un haut lieu d’échanges intenses de commerce de provenances nationales et internationales.
Le boom économique de ce véritable poumon économique, peuplé de près de 40.000 âmes, est surtout lié à l’activité commerciale à travers son louma hebdomadaire ou foirail du dimanche devenu un haut-lieu du commerce du bétail de la sous-région. Le louma de Dahra est, en effet, le marché hebdomadaire le plus fréquenté du Sénégal et son foirail l’une des plus importantes en Afrique de l’Ouest. La ville s’illustre par l’implantation de grandes maisons de commerce, de banques, de mutuelles et institutions de micro-finance symbolisant son dynamisme économique. Le louma de Dahra a ainsi obligé les travailleurs des banques et de la micro-finance à faire du dimanche un jour ouvrable et vendredi est devenu, par la force des choses, jour ouvrable dans cette ville.
Ainsi, le dimanche est devenu un jour très sacré chez les habitants de Dahra si bien que personne ne souhaite organiser une cérémonie familiale ou une autre activité que celle du commerce de peur de se retrouver seul sans invités. Un patriarche nous l’a résumé, non sans humour, par cette boutade bien de chez les Dahrois : « Malheur à celui qui meurt le dimanche à Dahra. Car personne ne s’occupera de ses obsèques en raison de la forte implication des habitants de cette ville dans les activités de commerce le jour du marché hebdomadaire de ce jour». Le louma de Dahra draine du monde et tout le monde y trouve son compte. C’est pourquoi un certain nombre de métiers y font foison. On y retrouve des charretiers et des voitures de fortune appelées communément « Woppou yaha » qui signifie en pulaar « laisser passer » pour le transport para et périurbain, des petits métiers allant de la réparation à d’autres services divers offerts.
La mairie doit presque tout au marché hebdomadaire car elle récolte, chaque dimanche, 8 à 15 millions de FCfa. Dans la collecte du pactole, elle recrute des collecteurs qui reçoivent quotidiennement 5000FCfa chacun.


Mamadou SY, Eugène Kaly et Masse Ndiaye (textes)

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