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La fièvre Ebola fait ressurgir des processus sociaux latents (historien)
Publié le mardi 8 avril 2014   |  Agence de Presse Sénégalaise


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© AFP par MSF
Les Médecins Sans Frontières mettent ​​en place l`équipement de protection contre le virus de la fièvre d`Ebola


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La fièvre hémorragique Ebola, à l’image du choléra au 19e siècle, fait resurgir des "processus sociaux latents" et réveille de "veilles peurs antiques" se traduisant finalement par des changements sociaux voire une modernisation des structures sociales, soutient l'archiviste paléographe sénégalais Adama Aly Pam.

"La fermeture de la frontière avec la Guinée par le Sénégal, la mise à sac de la maison du maire accusé d'avoir abrité des malades suspects de fièvre Ebola au Mali sont autant de révélateurs sociaux qui expriment des processus sociaux latents qui vont au-delà du seul fait médical", fait observer ce docteur en histoire, dans une contribution dont copie a été transmise à l'APS, mardi.

La fièvre Eboa, dont la présence a été confirmée en Guinée le 21 mars dernier, a fait depuis près de cent morts dans ce pays frontalier du Sénégal qui a décidé de fermer ses frontières pour mieux se préserver de cette épidémie.Des cas suspects ont été recensés au Liberia, en Sierra Leone et récemment au Mali.

Depuis, cette maladie "occupe autant les discussions du corps médical impuissant que les populations désemparées dans les chaumières. Les titres enflammés de la presse sont des indicateurs de l'état d'esprit général", fait observer M. Pam, fonctionnaire de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l'Ouest (BCEAO).

"Aussi surprenant que cela puisse paraître, avance-t-il, les épidémies ont été dans l'histoire des hommes, des facteurs de changement sociaux importants et parfois elles sont à l'origine de la modernisation des structures sociales."

Selon l'archiviste paléologue, "mesurer la confrontation des hommes avec la maladie, c'est d'abord tenter de restituer le parcours et les formes de la pathologie, son interprétation médicale et l'évolution de ses représentations mentales".

"C'est aussi reconnaître les variations d'attitude envers les malades en fonction d'un environnement démographique, intellectuel mais aussi économique, politique ou religieux en perpétuelle mouvance. Aussi le regard que l'homme porte sur la santé, la maladie et la mort, est-il riche d'enseignements sur l'état de la société dans laquelle il vit", écrit-il.

"La maladie, expérience individuelle par excellence, devient inévitablement le terrain d'exercice, voire d'affrontements, de valeurs morales ou religieuses, de mythes populaires, de théories scientifiques. Cela est d'autant plus vrai que la maladie est avant tout une construction sociale avant d'être une réalité biologique", note-t-il.

"Au Sénégal, la mise en application des mesures de lutte contre les épidémies, particulièrement, celles contre la fièvre jaune et le choléra, ont laissé des traces dans le paysage urbain des villes coloniales, autant dans l'architecture que dans la topographie", soutient encore M. Pam.

"Si en Côte d'Ivoire, la fièvre jaune a poussé à l'abandon de la capitale Bassam pour Bingerville jugée plus salubre, au Sénégal, elle s'est manifestée par la ségrégation résidentielle des indigènes dans presque toutes les villes coloniales", rappelle l’archiviste.

Suivant cette logique, dans la vallée du Sénégal, le choléra "s'est présenté comme un coup de projecteur sur la scène sociale et politique en faisant resurgir à la surface des problèmes sociopolitiques latents."

"Face à l'épreuve du choléra, la réalité subjective de la conscience collective s'est exprimée avec vigueur à travers des désertions massives et l'exaltation du sentiment religieux qui s'est manifestée à travers le mouvement messianiques dans le Fouta Occidental, le mouvement Madyanké et un mouvement plus général d'émigration vers Nyoro", une région du Mali voisin, relève-t-il.

"A ce titre, insiste Adama Aly Pam, les +années du choléra+ peuvent être considérées comme celles de la +grande peur+ dans une vallée troublée par des crises multiformes. Cette peur s'est exprimée à travers de désertions massives des localités visitées par ce mal inconnu et la résurgence de mouvements messianiques et de bruits de miracles incarnés par le mouvement Madyanké dans le Fouta occidental".

"En définitive, qu'il s'agisse du mouvement Madyanké, de l'émigration vers Nyoro ou tout simplement des rumeurs de fin du monde, l'ensemble de ces phénomènes traduisent à la fois un désir d'exorciser la mort, mais également un malaise profond d'une société en crise et qui est à la recherche d'une identité culturelle menacée par l'impérialisme français dont Saint-Louis représentait la tête de pont", analyse-t-il.

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