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Banalisation de la candidature à la présidentielle au Sénégal: La société civile livre son diagnostic
Publié le mercredi 28 fevrier 2018  |  Sud Quotidien
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© aDakar.com par DF
Vote de Amadou Bâ, tête de liste de BBY à Dakar
Dakar, le 30 juillet 2017 - Le ministre de l`Économie et des Finances Amadou Bâ a voté pour les élections législatives. La tête de liste de la coalition Benno Bokk Yaakar dans le département de Dakar garde confiance pour la victoire.
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Si les membres de la société civile, à l’instar des acteurs politiques, s’accordent tous sur le constat de la banalisation de la candidature à la présidentielle qui a pris ses marques, selon eux, depuis l’avènement du président Abdoulaye Wade à la tête du pays, il n’en demeure pas moins que les raisons, tout comme les solutions pour y remédier, divergent d’un acteur à l’autre. Au moment où Valdiodio Ndiaye du Collectif des organisations de la société civile pour les élections (Cosce) pense que le critère le plus important, pour prétendre briguer les suffrages des Sénégalais, est «l’éthique, la vision et le projet de société pour son pays», son camarade de la Commission Orientation et Stratégies du M23 (Cos/M23), Abdourahmane Sow est plutôt d’avis qu’il convient de revoir les textes pour freiner certaines «candidatures opportunistes». Il en est de même pour Djibril Gningue, Secrétaire exécutif de la Plateforme des acteurs de la Société civile pour la transparence des élections (Pacte), qui opte pour une prise de conscience de la classe politique et de la société civile pour faire face durablement à cette situation.

DJIBRIL GNINGUE, SECRETAIRE EXECUTIF DE LA PLATEFORME DES ACTEURS DE LA SOCIETE CIVILE POUR LA TRANSPARENCE DES ELECTIONS (PACTE) : «La résolution de cette question interpelle la responsabilité de toute la classe politique…»

L a fonction présidentielle est un aspect essentiel de l'ordonnancement juridique et institutionnel de l'Etat en République du Sénégal. Aussi, la légitimité populaire que le président de la République tire de son élection au suffrage universel direct, ainsi que l'étendue considérable des pouvoirs consacrés par la constitution qui lui sont conférés, confortent ce statut donné à l'Exécutif qui acquiert ainsi une nette suprématie sur les autres pouvoirs. C'est dire donc que tout est fait au plan théorique pour que la fonction présidentielle bénéficie de tout le respect et de toute la considération nécessaires de la part des citoyens, comme des acteurs politiques. Cependant, dans la pratique, force est de constater que la fonction présidentielle a de plus en plus tendance à être banalisée.

Dans la recherche des raisons qui sont à l'origine d’une telle situation dont les conséquences pour la sécurité, l'image et la renommée de notre pays sont énormes, on pourrait sans risque de se tromper retenir entre autres trois hypothèses à savoir : la compatibilité entre la fonction de président de la République et celle de chef de parti politique; le contexte historique de la transition politique durant laquelle, pour leur propre survie, les forces centrifuges, en plus d' exercer une forte influence sur la marche des choses, tentent par tous les moyens de contrôler le pouvoir, à défaut, de réunir les conditions exigées par les citoyens pour le conquérir en toute légalité ; le vide laissé par le Code électoral concernant la représentativité et la crédibilité des candidatures à la fonction suprême de président de la République. Par conséquent, ma conviction est que la résolution de cette question interpelle la responsabilité de toute la classe politique et en premier lieu celle du président de la République qui doit prendre les initiatives venues à maturité en rapport avec les acteurs politiques et la société civile afin de faire face durablement à cette situation.

VALDIODIO NDIAYE, MEMBRE DU COLLECTIF DES ORGANISATIONS DE LA SOCIETE CIVILE POUR LES ELECTIONS (COSCE) : «Un président, c’est quelqu’un qui a l’éthique, une vision et un projet de société pour son pays»

Pour analyser cette affaire, il faut le remettre dans son contexte global, c'est-à-dire, tant au niveau africain qu’au Sénégal. Nous avons remarqué qu’après les indépendances, du temps de Senghor, il y avait une certaine sacralisation de la fonction présidentielle. C’était l’ère du président providentiel. A partir de ce postulat, il y avait un accompagnement au niveau de l’administration. Sous ce rapport-là, il y avait une certaine sacralisation de la fonction présidentielle avec tous les atouts qui vont avec. Evidemment, nous avons changé de paradigme à partir de 2000, quand tout le peuple s’est mobilisé pour mettre fin au régime du Parti socialiste. Wade prônait une idée libérale, avec une certaine vision de l’Etat. Beaucoup de Sénégalais, qui avaient de l’Etat cette perception de quelque chose d’inaccessible réservée à une certaine élite, ont commencé à avoir ces ambitions, des ambitions somme toute légitimes. Nous avons même vu que progressivement, il y a un certain nombre de corps de métiers qui s’investissent pour accéder à la fonction publique. Pas la fonction publique au niveau de l’administration, mais en termes de représentativité. Progressivement, nous avons vu des maires analphabètes, etc.

Ce n’est pas une première, avec le dépôt d’un certain nombre de candidatures. Nous avons vu, lors par exemple des élections de 2012, quand Mme Diouma Dieng Diakhaté a pensé qu’elle pouvait occuper la fonction présidentielle. Cela va dans le sillage de la gestion qui a été tracée par le président Wade, avec une certaine banalisation. Mais, cela a du bien. Parce que, quand tout le monde pense qu’objectivement, ils peuvent être à des niveaux de responsabilité, c’est une forme de démocratisation de la fonction présidentielle. Et nous voyons à travers le monde que ce n’est pas juste le président qui a un certain profil qui peut faire des résultats une fois qu’il gère la fonction présidentielle. Par exemple, le Brésil a émergé avec un président qui n’avait pas de diplômes, notamment Lula. Je vais vous taquiner en vous demandant de me dire le diplôme de Paul Kagamé. Nous avons vu les prouesses qu’il a réalisées au niveau du Rwanda. Je pense qu’être président, c’est quelqu’un qui a une vision, des ambitions, et qui a une bonne organisation, une personne qui est à l’écoute du peuple.

Quand on a la volonté de servir avant de se servir, à partir de ce moment-là, c’est légitime qu’on puisse avoir l’ambition d’être président. Parce que les présidents les plus médiocres, les présidents qui ont fait des catastrophes à travers le monde, pratiquement sont de très hauts diplômés. Maintenant, pour les ministres, c’est autre chose. Parce qu’un ministre, s’il est politique, doit avoir des attributs pour pouvoir faire corps avec la vision du président. Parfois, j’entends des personnes parler de cautions pour décourager les candidatures. Ça, c’est encore pire. C’est comme si on réservait cette fonction présidentielle aux personnes riches. Je pense plutôt, au lieu de parler de caution, il faut parler de quelqu’un qui a un ancrage populaire, qui a la confiance de ses concitoyens. Si tel est le cas, pourquoi pas. Pour moi, il faut dépasser cela. C’est quelque chose dont nous avons hérité, malheureusement, de la colonisation française qui ne donne pas de grands résultats dans le fond…A priori, ce qui est important, c’est quelqu’un qui a l’éthique, qui a une vision pour son pays et qui a un projet de société très clair pour son pays. Je pense que ça, ce sont des principes fondamentaux sur les critères de choix sur lesquels doivent reposer ceux qui veulent postuler à briguer le suffrage des Sénégalais

ABDOURAHMANE SOW, COORDONNATEUR DU COS/M23 : «Il faut mettre de nouvelles lois très exigeantes qui…»

Nous savons aujourd’hui que la fonction présidentielle est une fonction qui est banalisée par rapport au type d’acteurs. C’est dû au fait que nous avons une culture de l’administration et de la responsabilité publique qui est dégarnie depuis un certain temps. Nous pouvons rappeler l’histoire du Ps avec Abdou Diouf et en ces temps-là, pour les fonctions de président de la République, de président de l’Assemblée nationale, ou en tout cas au niveau des institutions, les personnes qui occupaient ces fonctions avaient un statut. Sur le point de vue carrière, expérience, connaissance de l’Etat, il y avait un profil bien dessiné. Aujourd’hui, il faut accepter malheureusement qu’avec l’avènement du président Abdoulaye Wade, ces fonctions étaient dévalorisées par les personnes qui les ont occupées et qui ne répondaient en rien à certaines exigences qui devraient être de rigueur pour occuper certaines fonctions. Ce sont des éléments qui ont participé avec le temps au dégarnissement de ces hautes fonctions de président de la République et qui ont fait qu’aujourd’hui, tout le monde se croit présidentiable et apte à prétendre à certaines responsabilités, parce qu’il y a une certaine culture qui s’est installée au Sénégal. Une culture qui fait que c’est une forme d’ascension et c’est à la portée de tout le monde. Cela est dû à la légèreté de certaines personnes dans les fonctions administratives. Mais au-delà, il faut analyser la chose autrement, il y a un aspect en jeu.

Certains acteurs profitent de l’occasion pour se saisir ou pour créer des opportunités financières. Alors, cela s’explique un peu parce que nous verrons des acteurs de second ordre et parfois même de premier ordre qui, malheureusement, ne capitalisent pas des masses populaires politiques au point de prétendre à ces fonctions de président de la République. Et vous verrez que c’est une source de division au sein de cette opposition qui risque d’avoir des conséquences désastreuses lors des présidentielles à venir. Parce que tout simplement, ce sont des gens qui ont, à côté, des intentions inavouées, sachant leur minorité, mais qui iront aux élections en tout cas pour créer des opportunités au sein des coalitions ou par rapport à leur intégration au sein du gouvernement. Il ne faut pas oublier que c’est devenu un marchandage et des opportunités pour certains prétendants qui, au-delà des préoccupations des Sénégalais qu’ils mettent en avant, ont des intentions cachées. Il y a des dispositions légales et réglementaires qui encadrent l’action politique. L’Etat doit accompagner les parties politiques à respecter les dispositions légales. Je pense que c’est une procédure qui, si elle est respectée, pourrait amener à réduire le nombre de candidats. Et aussi améliorer la législation de telle sorte qu’on puisse parvenir à restreindre les opportunités des candidatures opportunistes. Je pense que sur le plan de la législation, on pourrait améliorer les textes de telle sorte qu’on puisse réduire considérablement et dans le temps les opportunités de candidatures. Donc, il faut de la rigueur au niveau des textes et les améliorer parce que nous verrons que l’enjeu financier a pris le dessus sur l’aspect patriotique et l’engagement citoyen. Il est vrai que la Constitution permet aux Sénégalais de postuler parce que nous sommes en démocratie, mais trop de démocratie risquerait de tuer la démocratie. Il y a des conditions qui ont été établies par la loi…Nous sommes en démocratie et nous respectons les principes de liberté. Tout Sénégalais a le droit de prétendre à nous diriger certes, mais il faut qu’on se concerte avec l’opposition, avec le pouvoir pour qu’on puisse avoir un consensus. Cela nous permettrait d’avoir des orientations plus ou moins proches d’une démarche réaliste au profit de la démocratie et des partis politiques
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