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Foot - Thierno Seydi, agent de joueurs: ‘’Mettre Ismaïla Sarr dans les vestiaires de Barcelone était la meilleure façon de le tuer’’
Publié le mardi 27 fevrier 2018  |  Enquête Plus
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Après plus d’un quart de siècle dans le métier, Thierno Seydi livre sa méthode de travail. Sur un ton sec, cet agent de joueurs raconte ses relations avec ses collaborateurs, sans hésiter à dénoncer le ‘’banditisme’’ qui arrive dans le foot. Entretien avec EnQuête.

Le mercato hivernal a pris fin depuis quelques semaines (31 janvier), on peut dire que vous soufflez un peu après un travail dur...

C’est vrai qu’on sort d’un mercato assez éprouvant comme d’habitude, face à toutes les périodes de transferts, même si le mercato d’hiver est assez différent de celui d’été pour la bonne et simple raison que c’est un mercato d’ajustement. C’est des clubs qui essaient d’ajuster des effectifs, c’est aussi pour des joueurs, qui étaient en difficulté, de pouvoir bouger. Comme je l’ai dit, ce n’est pas un mercato assez important dans le calendrier du football mais il mérite d’exister.

On est dans une année de Coupe du monde. Est-ce que ce mercato hivernal est différent des autres ?

Ah oui ! Bien sûr que cette année, ça a une particularité parce que tous les joueurs en difficulté cherchaient à bouger, à avoir du temps de jeu pour toutes les sélections qui sont qualifiées pour la Coupe du monde, parce que l’avantage, c’est de pouvoir jouer. Aujourd’hui, même si ton pays est qualifié, si tu ne joues pas, tu te mets en difficulté et tu limites tes chances de participer à la grand-messe du football. Ce qui fait qu’aujourd’hui, ça a un cachet particulier parce que tous les joueurs étaient plus attentifs. Ils n’ont pas toujours mis en avant l’argent. Quatre-vingt-dix pour cent des joueurs des nations qualifiées ont surtout mis l’accent sur le fait de pouvoir avoir du temps de jeu. Donc, ça paraissant un peu éprouvant par rapport aux années précédentes. Ils étaient moins exigeants parce que ceux qui étaient en position de faiblesse dans leurs clubs, en difficulté, ont été beaucoup plus conciliables pour pouvoir repartir en raison de l’aspect sportif. Donc, on a eu moins de difficulté pour les faire changer.

Dans ces cas, l’agent, qui est un conseiller également, intervient beaucoup plus que d’habitude, n’est-ce pas ?

Oui ! Il y a deux discours à avoir dans ce cas de figure : ou le joueur reste parce qu’il est dans un bon club : son contrat, son salaire, il est tranquille ; à ce moment, il met une croix sur l’aspect sportif ; ou le joueur dit : ‘je joue au football pour vivre certains moments, comme la Coupe du monde’. Il y en a qui ont fait beaucoup d’efforts sur le plan financier pour partir en prêt et pouvoir avoir du temps de jeu. Parce que ce temps de jeu-là est la condition pour pouvoir être dans une liste des 23 pour aller faire la Coupe du monde. Mon rôle a été, à un moment donné, de leur expliquer, de savoir caler ce qu’ils privilégient. Ou ils préfèrent rester des fonctionnaires à toucher de l’argent, à attendre la fin de leur contrat pour se retrouver au carreau et avoir des regrets dans la vie et leur carrière de footballeur. Quatre-vingt-dix ou quatre-vingt-dix-neuf pour cent des joueurs ont accepté de tenter le challenge sportif parce qu’une Coupe du monde, ça ne se joue pas tous les jours.

Est-ce que c’est plus difficile de convaincre à faire un choix ?

Non, non ! Ben, c’est quand même des gens intelligents, les footballeurs, contrairement à ce que les gens pensent. Ce sont des garçons qui réfléchissent. A un moment donné, quitte à être un grand joueur, si tu as la possibilité de joueur une Coupe du monde et faire un sacrifice sur une année, je pense qu’il ne faut pas être sorti de Saint-Cyr pour pouvoir faire ce choix-là. Pour certains, ils ont bien compris le challenge d’être prêté ou transféré dans un club, qui est peut-être moins huppé, mais au moins où il joue.

Ces dernières années, on a constaté que certains joueurs vont même jusqu’à sécher les entraînements pour exiger que leur clubs les laissent partir. Ce comportement a amené des présidents de club à indexer les agents. Qu’est-ce que cela vous fait d’entendre de tels propos ?

C’est ce fameux serpent de mer qui revient tout le temps : l’agent de joueurs. Vous savez, on a tendance à nous donner un pouvoir qu’on n’a pas malheureusement, dans l’entendement des gens : l’agent de joueurs. Si j’étais aussi important ou seul décideur, j’aurais pris toute ma famille, mes neveux ou mes frères, pour en faire des footballeurs. L’agent de joueurs n’a qu’une infime incidence dans la carrière du joueur. Il est là pour conseiller, orienter le joueur pour faire le meilleur choix de carrière, ok ! Parce qu’on imagine que le joueur ne peut pas être sur le terrain et s’occuper des extras. Donc, le rôle de l’agent, c’est cela.

Malheureusement, comme je l’ai dit, on assiste à une prolifération de soi-disant agents, à une incursion des familles dans la gestion de carrière des joueurs, ce qui fait qu’il y a toujours un télescopage. Et malheureusement, ou heureusement pour certains cas, c’est le joueur qui en pâtit parce que, à un moment donné, il va avoir un dilemme entre sa famille, qui est là présente et encombrante pour lui dicter ses choix, et l’agent qui a son expertise, son savoir-faire pour essayer de l’orienter. En tout cas, moi Thierno Seydi, j’ai choisi de ne pas être l’objet qui va faire exploser une famille, parce que, à un moment donné, tu vas te retrouver entre la famille et l’agent. Et quand c’est comme ça, je préfère toujours dire : ‘choisis ta famille’. Parce que je ne permettrai pas à quelqu’un de venir exploser ma famille pour des considérations pécuniaires.

Moi, en tout cas, si cela se présente, je préfère dire toujours au joueur et le mettre à l’aise aussi : ‘choisis ton entourage, ta famille. Si demain, ils arrivent à faire de toi le plus grand joueur, tant mieux’. Mais en général, malheureusement, ce n’est pas le cas. Après, ce sont des dislocations de familles, des disputes et ça a mis en mal le socle de beaucoup de familles. C’est l’appât du gain, l’aspect pécuniaire que les gens priment. Aujourd’hui, on ne peut pas s’improviser. Moi, Thierno Seydi, je suis un agent reconnu avec tout son background, je pense que je ne vais pas me faire dicter l’orientation par une tierce personne. Quand je gère la carrière d’un footballeur, c’est parce que j’ai une expertise avérée. Ça fait 25 ans que je suis dans ce métier, j’ai eu à gérer les plus grands footballeurs africains. Donc aujourd’hui, quand j’assiste à cette incursion des familles – amis, grands frères, oncles – dans la gestion, quand c’est comme ça, je préfère tout de suite m’abstenir ou me mettre en retrait. C’est une nouvelle donne dont les agents tiennent comptent, parce que, malheureusement, c’est comme ça.

‘’On assiste à une certaine forme de banditisme qui rampe dans le football’’

Certaines personnes soutiennent que c’est la Fifa qui a occasionné tout cela…

Tout à fait ! Aujourd’hui, c’est la Fifa qui a déréglé ce métier d’agent. Ça, c’est l’une des dernières mesures prises par Platini qui a toujours été contre les agents de joueurs. Pourquoi ? Je ne sais pas quelles sont les raisons. Il en a fait son combat. Il a peut-être réussi et tant mieux pour lui. Mais c’est dommage pour le football parce qu’on assiste à une certaine forme de banditisme qui rampe dans le football. Les joueurs ne sont plus libres de choisir qui ils veulent, ils sont détenus par une forme de mafia qui ne dit pas son nom. En France, c’est récurrent d’assister à des procès ou des interpellations parce qu’il y a une forme de pression, de chantage, de racket. Quand un garçon émerge, c’est les amis du quartier qui te maîtrisent et qui t’enrôlent au détriment des familles et de l’agent qui est quand même un expert dans ce domaine. C’est une autre forme de management qui est en train de se développer parce que le métier a fondamentalement changé par rapport à quand il y avait des garde-fous. Actuellement, la porte est complètement ouverte à toute sorte d’écarts.

Vous avez dit que vous placez l’intérêt du footballeur au-dessus. On l’a constaté avec Krépin Diatta qui était sur le viseur de clubs plus huppés. Et vous, vous lui avez conseillé d’aller dans un club où il aurait plus de temps de jeu lui permettant de grandir facilement…

Vous parlez de Krépin Diatta certainement parce que c’est le dernier. Mais quand pour Ismaïla Sarr, il y a Barcelone qui arrive avec une meilleure offre après que j’ai trouvé un accord avec Rennes et que le président du FC Metz soit perturbé par cette offre mirobolante qui tombe sur son bureau, il faut avoir de la hauteur d’esprit et du recul pour ne pas faire ce choix-là. J’aurais pu tomber dans le piège du président du FC Metz qui voulait que je prenne la responsabilité d’arrêter les négociations avec Rennes. Mais j’ai refusé parce que, autant le talent de Ismaïla Sarr est indéniable, autant prendre un garçon en phase ascendante et le mettre dans les vestiaires de Barcelone était la meilleure façon de le tuer dans sa progression. J’ai fait le choix sportif. Et je pense qu’avec le recul, unanimement tout le monde me reconnaît ce succès.

Car aujourd’hui, le joueur est en train de se révéler à la face du monde. Il est resté dans sa même lancée qu’à Metz. Krépin Diatta, c’était la même chose. Il sortait d’un championnat méconnu qui est la Norvège qu’il a vraiment éclaboussé de son talent. Aujourd’hui, il est l’objet de toutes les sollicitations. Krépin, quel est son background pour le jeter dans un grand club ? Juste dire que je l’ai mis dans un club comme Manchester United ? Non ! Il est dans une phase ascendante comme Ismaïla. Aller à Bruges était le meilleur choix car il va jouer. Il lui a fallu d’ailleurs un mois de préparation parce que ça faisait un mois et demi que le championnat norvégien était arrêté. Actuellement, il a fini sa préparation individuelle. Dans les jours à venir, Krépin va intégrer l’effectif et va commencer à jouer et va exploser. Je ne serais pas surpris que ce soit la surprise du chef pour la liste des 23 parce que c’était un choix sport calculé et non pécuniaire.

‘’Je n’aimerais pas être à la place d’Aliou Cissé parce qu’il a de la matière’’

On constate que les Sénégalais intègrent de plus en plus de grands clubs qui jouent les coupes d’Europe. Quelle analyse vous en faites en tant qu’agent de joueurs ?

Le football sénégalais est dans une bonne dynamique. Regardez dans tous les effectifs, on a de bons joueurs. En plus, c’est des titulaires dans leurs clubs respectifs. Je n’aimerais pas être à la place d’Aliou Cissé parce qu’il a de la matière. Il a la possibilité d’avoir deux équipes compétitives. C’est pour cela que je lui dis bonne chance dans sa réflexion parce que ça ne sera pas évident. Mais l’émergence de tous ces talents est la résultante de tout ce qui se fait à la base ici.

Avec Diambars, Génération Foot et Dakar Sacré-Cœur, ou d’autres académies peut-être moindre dont on n’entend pas parler, il y a un travail qui est fait en amont, au fond et dans la préparation. C’est donc logique de voir ces résultats-là. Ce processus n’est qu’au début. Dans les années à venir, on aura l’occasion encore de sortir de très bons joueurs. Maintenant, le seul danger qui guette notre football, c’est cette course effrénée à l’argent. C’est vrai que l’argent est le nœud de la guerre dans toute compétition. Aujourd’hui, le football est une industrie. C’est un business. Les clubs n’ont pas les moyens de garder leurs joueurs.

Donc ils transfèrent à tour de bras. Et ces joueurs talentueux quittent ces championnats pour s’éteindre tout simplement parce qu’ils veulent toucher 4 000 voire 5 000 euros. Honnêtement, si les grandes entreprises, les bonnes volontés, les gens qui aiment le football investissent, on a les moyens de garder au moins nos garçons à un certain niveau. Et même l’Etat pourrait donner des subventions pour les garder ici et rehausser le niveau du football. Vous ne pouvez pas imaginer le nombre de joueurs qui traînent en Europe. C’est hallucinant. Je suis sollicité. Et quand je leur demande, ils disent : ‘c’est tel qui m’a amené, j’ai passé des tests, après je n’ai plus de nouvelles parce que ça n’a pas marché’. Et ça devient des cas sociaux parce qu’ils ne peuvent pas revenir et ils n’ont pas de papiers. Et le restant de ma vie, je me suis donné cette mission ; ça devient un sacerdoce pour moi. Je me battrai et je vais les dénoncer de toutes mes forces. C’est horrible, parce que c’est des rêves brisés, des familles en difficulté. Sincèrement, les gens doivent revoir beaucoup de choses.

‘’Aujourd’hui, ce n’est plus la même chose qu’il y a dix ans, c’est certain. Il y a beaucoup de rackets, à tous les niveaux : les familles, les amis, l’entourage du joueur’’

Avez-vous réussi à extirper quelqu’un de cette misère ?

Je n’ai fait que ça ; je ne vais pas citer un nom mais quand je suis en France, vous ne pouvez pas imaginer le nombre de joueurs qui me sollicitent. Certains sont en difficulté parce que, financièrement, ils n’en peuvent plus. Vous savez, l’Europe, c’est difficile. Personne ne peut entretenir qui que ce soit. Des fois, des gens arrivent à avoir ton numéro, ils t’appellent pour te poser des problèmes. Mais je ne peux pas régler tous les problèmes du monde. Ceux à qui je peux donner un coup de main, je le fais bénévolement. Beaucoup de mes interventions sont faites à titre de bénévolat, je n’y gagne rien et j’y perds souvent de l’argent. Malheureusement, les gens ont une autre idée de notre métier, ne pensant qu’à l’argent. Je n’ai plus besoin de prouver mon expertise, rien à prouver dans ce métier-là, après 27 ans. Le premier joueur que j’ai pu transférer s’appelle Lamine Sylla ‘’Karanté’’. Certains d’entre nous ne le connaissent pas, c’est l’ancien ailier droit de l’Us Gorée.

C’était en 1990 et j’étais encore étudiant. Donc, voyez-vous ? Aujourd’hui, j’ai la chance de gérer la carrière de son fils. Donc du papa, je passe aux enfants. Fondamentalement, les relations aussi changent avec les joueurs. Avant, c’étaient des amis ; après, ce sont des petits frères, des neveux ; aujourd’hui, ce sont mes enfants. Certains m’appellent ‘papa’. Dans certains cas, je suis peut-être moins enclin à accepter les caprices des joueurs parce que, des fois, j’ai des positions assez radicales. Peut-être que c’est mon background qui fait je n’ai pas cette patience à subir les caprices des joueurs. Moi, un joueur, tu restes réglo parce que tu me fais confiance, on travaille dans la sérénité. S’il n’y a pas les conditions, je te dis : ‘dégage !’ Voilà le terme que j’utilise. Si je suis sous contrat avec un joueur, et si demain il n’est pas content, je lui demande de déchirer le contrat. Tout le monde ne peut pas dire autant.

Des cas qui vous ont particulièrement agacé...

Ouh ! il y en a tout le temps mais je ne vais pas nommer parce que ce n’est pas important. Le but, ce n’est pas de stigmatiser tel ou tel. Je dis que notre métier a fondamentalement changé parce que simplement il y a une dérèglementation qui se ressent dans l’approche même du métier. Aujourd’hui, ce n’est plus la même chose qu’il y a dix ans, c’est certain. Il y a beaucoup de rackets, à tous les niveaux : les familles, les amis, l’entourage du joueur. Comme moi j’ai décidé de ne pas être racketté, je dis : mon expertise a un coût, celui qui n’est pas content peut partir sans problème.

Quel est le joueur le plus difficile à gérer ? La star, le jeune ou l’anonyme ?

La star que tout le monde connaît a été le joueur le plus facile à gérer. Vous savez, ce garçon a un tel... Didier Drogba est un joueur que j’ai récupéré quand il avait 18 ans, il en a 40 aujourd’hui. Je pense que, sur ce siècle de football, je pense que c’est l’un des joueurs les plus emblématiques que l’Afrique ait sorti et j’ai eu à le gérer de A à Z. Il va arrêter sa carrière cette année et jusque-là où je vous parle, on n’a jamais été divergents, même si on en discute. Jamais ! J’ai signé son contrat la première fois en 1996, aujourd’hui, on est en 2018, je n’ai jamais prolongé ni renouvelé mon contrat avec lui. On a marché avec confiance avec le résultat qu’on connaît. C’est vrai, la star est le plus facile à gérer. Les gens ont tendance à croire que l’agent est celui qui fait la carrière ; le meilleur agent de joueurs, c’est le joueur.

Après avoir eu un bon agent, un bon conseiller permet de pouvoir régler les problèmes, négocier de bons contrats, de bons contrats publicitaires, donner une orientation. Aujourd’hui, tu peux dire ce que tu veux parce que tu as l’expertise pour lui donner des conseils ; mais si derrière, les gens lui disent autre chose et qu’à un moment donné, le joueur est devant un dilemme, je préfère m’abstenir et lui dire de continuer avec sa famille. Parce que peut-être que Thierno Seydi sera de passage dans ta vie, mais ta famille restera. De mon expérience, de ce que j’ai vu, pour 90% des garçons ayant subi cela, c’est des regrets à la fin. Parce que tant que le citron a du jus, tout le monde l’aura ; le jour que le citron est pressé et qu’il n’y a plus de jus, on ne verra personne. C’est là que les familles commencent à se disloquer. J’en connais plein et c’est triste à dire.

Les relations avec certains de vos joueurs se sont renforcées ?

On est des familles ! Didier Drogba, j’ai été son témoin de mariage, son fils est le parrain de ma fille. On a plus que des relations d’agent-joueur. Il y a des garçons comme ça, comme Khalilou Fadiga. On est devenus amis, il y en même certains dont j’étais l’agent, que j’ai embauchés, qui travaillent avec moi. A la fin de leur carrière, je les ai récupérés pour travailler avec moi. Cela veut dire qu’au-delà de la carrière, il y a une dimension humaine qu’il faut vivre. Malheureusement, il y a beaucoup d’intox qui sont balancées à gauche, à droite, à dessein aussi... vous savez, la concurrence aussi, elle est faite pour ça. Mais honnêtement, au point où je suis, dans ma carrière d’agent, je ne serai plus celui qui va faire des concessions, ni des combines.

Ce n’est pas mon truc. Mes enfants ont un certain âge et ma hantise est que tous les matins, quand ils se réveillent et qu’ils regardent sur internet, qu’ils ne voient pas que leur papa a fait des magouilles parce que ce n’est pas comme ça que je les ai éduqués. Je fais très attention à ça. Ils grandissent et il y a des choses que je ne peux pas me permettre. Aujourd’hui, Dieu merci, dans mon métier, c’est une belle réussite. J’ai réussi à vivre de mon métier, faire vivre mon entourage, des gens qui m’aiment beaucoup, mon village. Qu’est-ce que j’attends de plus ? Celui qui veut me souhaiter quelque chose dans la vie, prie pour que mes enfants soient dans la même position à mon âge, que je les voie sur la rampe de la réussite. Je n’ai plus d’ambition si ce n’est voir mes enfants grandir dans la vie et dans de bonnes conditions.

Vous suivez les compétitions nationales du Sénégal. Est-ce que le produit (joueur) sénégalais est plus vendable aujourd’hui qu’hier ou vice-versa ?

Il est plus exportable aujourd’hui. De toute façon, regardez le nombre de joueurs sénégalais qui sont partis, qui jouent dans les grands clubs. Cela veut dire que oui. Le football sénégalais est vendable mais il faut que l’Etat essaie de voir sa politique sportive, surtout pour le football qui est un facteur de stabilité sociale, c’est l’opium du peuple et c’est dans tous les pays. Je pense que l’ancien Président Abdoulaye Wade l’a bien compris.

Comme en 2002...

Oui, il y a l’épopée de 2002 où tous les cœurs étaient unis, ça a créé un mouvement... Les autorités doivent aussi demander aux entreprises... Cette responsabilité sociale de l’entreprise, on doit l’exiger. Celles qui font des milliards de bénéfices doivent les investir dans la jeunesse, le sport et dans d’autres activités. Les enfants en ont besoin. Avant, nous, on nous interdisait de jouer au football ; aujourd’hui quand je marche à Dakar, 90% des coups de fil, ce sont des parents qui m’appellent pour que leurs enfants deviennent footballeurs alors que, avant, on se cachait pour aller jouer. On a compris que c’est un moyen de réussite parce que si un seul footballeur réussit, regardez ce que cela a comme incidence. C’est toute une famille, un village. Aujourd’hui, Bambaly est fier de Sadio Mané. Il était parti dans l’anonymat mais il a fait qu’être de Bambaly, on se tape la poitrine : ‘je suis du même village que Sadio Mané’. Je ne sais pas jouer au football mais je suis reconnu comme un enfant de Goudomp.

Je fais la fierté de mon village ; les gens sont ravis de dire : Thierno Seydi vient d’ici. Ceux de Rebeuss, où j’ai grandi, sont aussi fiers. C’est pour cela que je revendique souvent ma ‘Rebeussité’, qui est aujourd’hui un concept. Pour moi, c’est le Sénégal en miniature parce que tout le monde se regroupe. Donc, on est des porteurs de voix, on doit tirer les gens vers le haut. C’est pour cela que le gouvernement doit aider cette jeunesse. Le football est une industrie. Quand on parle du Brésil, la première chose qu’on vous dit, c’est : football. La patrie de qui ? Pelé, Ronaldinho... Le Sénégal a la chance d’avoir de très grands joueurs, il faut que l’Etat aide les clubs, les accompagne, pour qu’au moins, ces emplois qu’on crée, à défaut de les augmenter, on ne les réduise pas au néant. Comment ? Je ne suis pas un expert dans ce domaine-là. Avec le chômage criard des jeunes, le football peut sauver une bonne partie. Il faut que l’Etat réfléchisse sur comment il doit accompagner les gens.
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