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Le procès de la Caisse d’avance à mi-parcours
Publié le vendredi 16 fevrier 2018  |  Enquête Plus
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© aDakar.com par DF
Les maires des villes de Dakar et Montréal signent une convention
Dakar, le 11 Octobre 2015 - La ville de Dakar et la ville de Montréal signent une convention. Cet accord de partenariat vise à bâtir des relations étroites, à poursuivre des objectifs de croissance et développement mutuels. Photo: Khalifa Ababacar Sall, maire de Dakar
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Le procès intenté à Khalifa Sall va durer le temps d’une rose par comparaison à celui de Karim Wade. Les plaidoiries commencent aujourd’hui dans l’affaire de la caisse d’avance, mais le fond du dossier et la procédure des exceptions n’étaient pas de tout repos.

Le 7 mars 2017, le doyen des juges d’instruction inculpe Khalifa Sall ainsi que Mbaye Touré pour ‘‘association de malfaiteurs’’, ‘‘détournement de deniers publics et escroquerie portant sur les deniers publics’’, ‘‘faux et usage de faux dans des documents administratifs’’, ‘‘blanchiment de capitaux’’ et ‘‘complicité de faux et usage de faux en écriture de commerce’’ portant sur les sommes versées à la caisse d’avance de la Ville de Dakar. Il s’agirait, selon l’IGE, de 1,8 milliard de francs CFA au total. Le parquet accuse Khalifa Sall d’avoir été au centre d’un système de fausses factures. Quant à la défense, cette caisse ‘‘fonds politiques’’ et cette affaire ont un soubassement politique. Le 14 décembre 2017, le procès s’ouvre sans tenir ses promesses : il est aussitôt ‘‘renvoyé d’office au 3 janvier en audience spéciale’’, décide le président du Tribunal, Magatte Diop.

Malick Lamotte en selle

Le 3 janvier 2018, les initiés étaient peu surpris du renvoi de l’affaire, pour le 23 du même mois, puisque la rumeur d’une substitution de juges, la veille, était bien avérée. L’affaire de la caisse d’avance de la Ville de Dakar sera désormais jugée par Malick Lamotte et non par le président sortant de l’UMS, Magatte Diop, qui avait présidé l’audience de décembre.

Le président du Tribunal de grande instance de Dakar, qui a déjà en charge le dossier de l’imam Ndao, remplace celui de la 2e Chambre correctionnelle de Dakar, qui devient son assesseur, ‘‘pour une sérénité des débats’’, nous avait soufflé un avocat du pool de la défense. Hamath Sy complète le trio au détriment des magistrats Pape Abdoulaye Dondé et Elisabeth Thiam. Pour montrer que ce procès n’est pas comme les autres, dans la foulée, le parquet bouge aussi. Le procureur de la République de Dakar ‘‘himself’’, Serigne Bassirou Guèye, remplace au pied levé son substitut Aly Ciré Ndiaye. Ce dernier avait présidé la première audience, le 14 décembre, avant que des critiques des avocats adverses fusent contre le maître des poursuites et sa capacité à traiter un dossier d’une telle envergure.

Constitution partie civile Ville de Dakar (Vdd)

Le 15 janvier dernier, c’est la surprise pour tout le monde : la Ville de Dakar adopte une délibération (58 voix pour, 1 contre) pour se constituer partie civile. Pour les avocats de l’Etat, c’est une manœuvre dilatoire destiné à retarder le plus tard possible le passage au fond du dossier. Mais selon Moussa Sow, président de la commission administrative et juridique de la Vdd, commis par le Conseil municipal, l’article 1er du Code général des collectivités locales, reprenant le principe constitutionnel de la libre administration des Collectivités locales, consacre la personnalité morale de celles-ci. En tant que personne morale de droit public, la Vdd serait habilitée à intenter toute action en justice au nom de la collectivité. ‘’Sous ce rapport, la ville doit se constituer partie civile dans l’affaire dite de la caisse d’avance. En effet, cette affaire concerne la Ville de Dakar tant par la qualité des prévenus que par la nature des accusations portées contre eux. Cette constitution permet à la Ville de Dakar d’être partie au procès et, à ce titre, d’avoir accès au dossier, d’intervenir dans le procès et d’exercer toute voie de recours’’, s’est-il justifié.

Me Diouf éconduit deux fois du procès

La robe noire qu’on qualifie à tort ou à raison de ‘‘tonitruant’’ manquera ce procès. Le député du peuple comme il aime se définir, a été victime des fonctions politiques qu’il a eu à occuper. Me Diouf a été ministre de la République du Sénégal, deux fois député élu à l’Assemblée nationale. Sa mise à l’écart a été motivée par l’Article 11, alinéa 7 et 8 de la loi du 8 juillet 2009 qui stipule : ‘‘Les avocats, anciens fonctionnaires ou agents quelconques de l’Etat ou d’une collectivité publique ou territoriale décentralisée, ne peuvent accomplir contre ou pour l’Etat, les administrations relevant de l’Etat et les collectivités publiques ou territoriales décentralisées aucun acte de la profession pendant un délai de trois ans à dater de la cessation légale et effective de leurs fonctions’’.

Une ‘‘exclusion’’ définitive à l’initiative du barreau du Dakar, le 1er fevrier dernier, que l’avocat aurait causé lui-même. Après une première éjection dans ce dossier comme conseil de Khalifa Sall, la parade pour Me Diouf est toute trouvée : sa constitution par la Ville de Dakar. Mais l’avocat a, lors d’une de ses interventions, défendu le maire de Dakar, estime le juge Lamotte qui saisit le Bâtonnier. ‘‘Nous lui avons fait comprendre que c’est le même texte qui interdisait de se constituer pour M. Sall qui lui interdisait également de se constituer partie civile pour la mairie de Dakar. Il a compris. Pour la suite du procès, vous ne le verrez pas comme avocat pour la mairie. C’est une question de déontologie et le conseil a l’obligation de veiller à cela. Le respect de nos règles, c’est d’abord la protection de l’avocat’’, a déclaré le secrétaire général du Conseil de l’ordre des avocats Me Ibrahima Ndiéguène, au nom du bâtonnier Me Mbaye Guèye.

Rejet des exceptions

Le jour suivant, vendredi 2 février, c’est la fin de la phase des exceptions. Après deux jours de suspension, le juge Malick Lamotte rejette toutes les exceptions de nullité soulevées par le pool d’avocats de la défense. Le dossier Khalifa Sall et ses coprévenus sera jugé dans le fond. Le tribunal se déclare compétent. Les demandes de liberté provisoire, le sursis à statuer, les exceptions préjudicielles, la Cour des comptes comme juridiction compétente au lieu du TGI...sont écartés par Malick Lamotte. Le procès pouvait alors passer à la phase des débats de fond. Me Khassimou Touré, avocat de la défense et frère du prévenu Mbaye Touré, s’offusque de cette décision. ‘‘Il y a des voies de recours qui nous sont offertes, pour demander l’annulation d’une décision qui ne nous satisfait pas. Nous allons les emprunter. Nous sommes des professionnels et nous entendons le demeurer. La tendance que prend actuellement la procédure ne nous convainc pas’’, lance-t-il en sortie d’audience alors que son collègue défendant les intérêts de l’Etat, Me Baboucar Cissé, estime que ‘‘le tribunal n’a fait qu’appliquer le droit. Il est temps d’aborder le fond de ce dossier, parce que, de l’autre côté, on ne voulait pas aller au fond. On voulait abroger le procès. Le dossier est très clair’’.

Khalifa Sall : ‘‘Libérez-les et jugez-moi’’

Quand la politique entre par la porte, le droit sort par la fenêtre. Bien sûr le président Malick Lamotte a tout fait pour que les débats n’empruntent pas une voie de règlements de comptes politiques. Mais difficile d’occulter cette dimension, surtout si c’est le prévenu principal lui-même qui se charge de la ramener. Khalifa Sall est sans ambages sur les motivations de ce procès : elle est politique. Le maire en veut pour preuve les propositions qui lui ont été faites, dit-il, par des fidéicommis du pouvoir alors qu’il était déjà en détention. Le lundi 5 février 2018, presque une année après son incarcération (7 mars 2017), les premières paroles du maire de Dakar sont celles d’une tribune politique. ‘‘Je suis ici monsieur le juge, car j’ai dit non à une offre politique. On m’a fait deux propositions en juin 2012 et en septembre 2012 et j’ai refusé et depuis, on a cherché à me déstabiliser. Et aujourd’hui, on passe par mes collaborateurs qui sont innocents (...).

Ces messieurs et cette dame n’ont rien fait. Libérez-les et jugez-moi tout seul’’, a-t-il déclaré avant d’ajouter trois jours plus tard la même remarque : ‘‘Si j’avais accepté l’offre qu’on me proposait, je n’aurais pas comparu devant cette barre. Même à la veille de ce procès, ils sont venus me demander d’accepter l’offre, parce que, disaient-ils, l’Etat est un rouleau compresseur qui va t’écraser. Mais j’ai refusé, car j’estime qu’il n’y a que Dieu qui peut écraser quelqu’un’’, avait alors déclaré le principal prévenu le jeudi 8 février, répondant à l’interrogatoire d’un de ses avocats. La suite des débats se passera entre un agent judiciaire de l’Etat pugnace dans sa volonté d’établir les manœuvres fictives à la mairie et une défense tout aussi déterminée dans sa volonté de présenter cette caisse d’avance comme des fonds politiques. Limitées par le juge lors des interrogatoires, les avocats s’en donneront à cœur joie dès aujourd’hui pour leurs plaidoiries.
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