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Sud Quotidien N° 6277 du 31/3/2014

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Aéroprt LSS, Foire, Corniche: Dakar, ville à vendre
Publié le lundi 31 mars 2014   |  Sud Quotidien


Médina,
© Autre presse par DR
Médina, une commune de la ville de Dakar


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Un aéroport international complètement ouvert à tous les trafics fonciers alors que le projet Diass qui trace ses voies, est loin d'être bouclé. Une Foire internationale à l'intérieur de laquelle, il ne reste plus qu'un petit noyau central disponible où se bouscule le monde de passage à chaque grand évènement commercial, ce sont bien les nouvelles images de Dakar. Si vous y ajoutez un centre-ville et ses abords qui perdent chaque jour, une bonne partie de leur mémoire urbanistique, vous avez tous les ingrédients réunis pour faire de la capitale, une ville à vendre ou en vente. C'est selon… Au gré de marchés en tout genre, la cité change ainsi de cap et d'orientation sans aucune vision claire sur son futur.

L’histoire de toutes les villes du monde s’est faite autour d’une vision et de plans urbains adaptés. Londres sans Saint-James Park et Trafalgar Square avec son coq planté au-dessus de la stèle, est-ce vraiment Londres ? Place très célèbre de Westminster, curiosité des artistes et des touristes, Trafalgar Square est un lieu mythique du vieux Londres que la ville ne changerait pour rien au monde.

Autre lieu, autre réalité : New York. Un tour dans la grande ville américaine, sans passer par Central Park, pour le visiteur de passage, serait-ce véritablement un voyage touristique ? Quid de Montréal sans sa place des arts et les abords tranquilles du Saint-Laurent aux environs du boulevard de la commune ?

Toutes les villes et les cités importantes du monde ont leur place et lieu mythique et une partie de leur mémoire figée sur une partie comme cela. Mais est-ce le cas au Sénégal ? Dans les années 1970, le simple fait d’évoquer la mise sur pied du Centre international  d’échanges et la foire internationale (Cices) de Dakar qu’il abritait faisait chavirer d’envie tous ceux qui n’ y étaient jamais venus. Certains étaient encore de petits enfants, des élèves du primaire et du collège quand ils ont découvert la première fois le site de la foire en 1974.

Un monde chargé d’histoire presque balayé de la carte par la volonté d’un président de la République qu’on dit démocratiquement élu, Me Abdoulaye Wade. Bluff des temps modernes, la démocratie… Quand elle permet tous les excès en Afrique, est-ce réellement de la démocratie ? La véritable faiblesse de celle-ci est dans l’impossibilité pour nos universités à fournir au 21 ème siècle, les informations fiables à la qualité ou non des infrastructures.

Aucune grande étude sur la foire de Dakar. De rares documents disponibles sur l’aéroport. Si elles existent, ces informations sont d’une qualité certaine pour nos facultés, faute de laboratoires de recherches spécialisées sur les questions urbaines et sur l’économie de la ville. En parlant d’urbanisme, quelle est la longueur réelle de la corniche ? Sa largeur actuelle, en avez-vous une idée ? Quelle était la superficie exacte de la Foire de Dakar, à ses débuts ? Qu’en reste-t-il depuis la première édition qui s’est tenue du 28 novembre au 15 décembre 1974 ? Les plans pour le savoir existent, mais où sont-ils?

Autant de questions sans réponse aujourd’hui et qui semblent d’une grande importance. Et, pourtant, il y a au début de toute cette histoire, quelques éléments de documentation intéressante. Comme ce supplément du Monde Diplomatique consacré au Sénégal, économie en pleine construction et paru en février 1974, intitulé « Les atouts du développement » et qui a permis d’en savoir un peu plus sous la plume de Phillipe Decraene, José Alain Fralon, Jean Claude Gautron et encore Max Cerans.

La Foire de Dakar, énorme pour tous ceux qui y mettaient les pieds jusque dans les années 1980. C’était en quelque sorte l’évènement à ne pas rater. Les élèves venant de tout le pays qui visitaient pour la plupart, la ville de Dakar, pour la première fois, ne se seraient pas retrouvés plus de 30 ans après dans cet espace réservé aux différents foires et salons. La Foire comme l’aéroport de Dakar a perdu la mémoire.

Images surréalistes d’une cité qui perd son âme

Image surréaliste d’une cité qui perd son âme, Dakar ne ressemblera plus à Dakar d’ici 2030 si le processus de sabotage-construction se poursuit. Kermel et son centre presque rayés de la carte historique de la ville avec des projets immobiliers gigantesques ; il semble que les lobbies ont pris la cité au détriment des citoyens.

Au cours de la Fiara 2014 qui vient d’être clôturée, les stands intérieurs étant tous occupés, c’est au portail de l’enceinte qu’ont été déposés les nombreux exposants qui ne trouvaient pas de place. La honte pour une ville du 21 ème siècle. Plus près de là, c’est par le Président Abdou Diouf que l’occupation de la zone de l’aéroport international de Dakar a commencé.

Ministres, grands commis de l’Etat et membres d’une clientèle politique se sont bien servis. Que dire depuis que Wade, son successeur, a fait le pari d’achever ce partage pour le moins insolite autour de l’aéroport jusqu’à poser des bâtiments à quelques centaines de mètres de la piste de décollage et d’atterrissage ?
Et, ce n’est pas fini, la corniche, longtemps domaine réservé du bord de mer, perd chaque année, un bout de terre, emporté, soit par l’océan ; soit par des hommes aux appétits fonciers de plus en plus démesurés. Au su et au vu de tous, observateurs, acteurs ou non, Dakar est blessée dans son ventre tous les jours en perdant ses espaces les plus fragiles, également, ses arbres les plus anciens, (cailcedrat et figuiers, baobabs et rares tamariniers qui tiennent encore debout, dans certains quartiers). Cela ne semble pas avoir d’importance face à la logique des femmes et hommes d’affaires de la ville.

Si le massacre s’arrêtait là, ce serait mieux. Sabotée par un urbanisme sans vision et à la seule solde du pouvoir existant, depuis des décennies, la ville perd également sa mémoire à cause de la quête effrénée de logements. Autour du Stade Léopold Sédar Senghor, le Président Wade a logé une partie de ses amis politiques chargés de crier pour lui partout où ils passaient.

Aujourd’hui, Macky Sall et sa coalition au pouvoir sont bien observés avec leur plan de relogement des sans abris et des victimes des inondations. Mais, si le plan 2000 logements proposé par le gouvernement a de quoi faire peur aux défenseurs du « Dakar vert » pour la survie des derniers espaces autour de la capitale, c’est plutôt vers le centre ville et ses abords que tous les regards sont dirigés. La terre se vend cher du côté de la Corniche. Elle l’est encore plus quand on se rapproche des Almadies tout autour de l’aéroport et du bord de mer.

Conséquence, la ville disparait dans certaines de ses parties du fait de marchés sournois et très peu transparents au seul service de privés et d’investisseurs sans nom qui ne se gênent plus pour s’emparer de toutes les parties vierges laissées par les pouvoirs précédents comme la corniche, la foire, la place de Bel air etc. Quand le président Wade s’est empressé d’occuper les bases laissées par l’armée française au milieu des années 2000, c’était plus pour loger une clientèle politique qui s’impatientait, après son élection, de recevoir la récompense du vieux. Elle l’a eue. Et, le but n’était pas d’y aménager autre chose pour les citadins, mais de donner ces espaces protégés à certaines personnes qui n’ont rien à voir à avec l’histoire de la ville.

Dans cette partie de Dakar où subsistaient encore les rares reliques de la forêt dégradée Cap-Verdienne, l’immobilier a pris le pas sur tout le reste. Ne subsistent que le cimetière catholique de Bel air où dort encore un pan de l’histoire de la ville et sa légende. De Bel air, quartier tranquille de la ville, on est passé à un lieu où le bruit et l’anarchie sont devenus la norme. Loin des belles années 70 où seul le sifflement du train chargé de phosphate, d’arachide étaient les seuls moments de nuisance pour les habitants de ce coté de la ville.

Adossée sur la baie de Hann, avec sur ses berges, la plus grande Marina de la ville et son cercle voilier le plus ancien sont devenus un lieu de vie ordinaire envahi par le logement. Ce n’est pas un mal. Mais, sans voie d’accès et de passage, les seules routes restent celles qui vont au marché au poisson de Yarakh. L’autre voie de pénétration ou de sortie est la route des hydrocarbures fréquentée par des camions transportant parfois des matières dangereuses en direction du Môle 8 s’ils ne sortent du port pour l’intérieur du pays et de la sous-région. Un quartier bloqué et livré aux humeurs de la grande bleue, voici ce que sont devenus Bel air, Hann Marinas.

La Niaye presque perdue

Autre grand coin de la ville perdue pour des projets immobiliers, les Niayes. L’autoroute à péage est certes un bel ouvrage sur le chemin du prochain aéroport de Diass, mais elle a emporté une bonne partie des espaces verts, poumons de respiration de la cité. Même ouvert sur l’intérieur, avec cette grande bouche qui permet maintenant d’avaler les grands espaces de l’intérieur en quelques minutes, le péage Dakar-Diamniadio n’est pas un projet parfait. Maintenant, si cet ouvrage géant sera sans conteste le plus pertinent de la décennie 2005-2015, jusqu’à la prochaine rencontre de la francophonie, la suite est à voir si des études sérieuses ne sont pas amorcées pour empêcher l’occupation anarchique des environs.

Ce serait un gâchis si des mesures adéquates et ambitieuses d’aménegement du territoire ne sont pas entreprises. Espace envahi tout autour. Les jardins, les vergers et les champs réservés au maraichage, devraient être protégés et non livrés aux promoteurs dont la seule raison de vivre est de se faire de l’argent sur le dos des clients en demande de logements.

Le nouveau pari des autorités de se faire de l’argent en donnant la terre aux plus offrants, risque, d’emporter Dakar livrée à la vente tous azimuts des derniers bouts de terre qui lui restent. Quand les politiciens ont fini de se servir, aujourd’hui c’est au tour des privés, des administrations et du monde de la diplomatie, de se loger où ils le souhaitent.

Au cœur de New York - Central Park, un modèle d’espace vert

Une grande ville, c’est d’abord, une idée, mais surtout une vision et des plans intérieurs améliorés. L’exemple est donné par New York et son parc le plus célèbre. Central Park (littéralement « Parc central ») est un espace vert d'une superficie de 341 hectares (3,41 km?, environ 4 km sur 800 mètres), situé dans l'arrondissement de Manhattan à New York. Il constitue le plus grand espace vert de la ville de New York, si l'on ne prend en compte que les cinq grands arrondissements de la ville (borough). Achevé en 1873 après treize années de construction, Central Park représente une oasis de verdure au milieu de la forêt de gratte-ciels de Manhattan, même s'il est situé au nord de l'île où les édifices sont un peu moins élevés. Les plans ont été réalisés par Frederick Law Olmsted et Calvert Vaux également à l'origine du Prospect Park de Brooklyn.

Géré par la Central Park Conservancy (comité de sauvegarde de Central Park), le site dispose d'un budget annuel de 200 millions de dollars. Il est entretenu au même titre que les autres espaces verts de la ville par le New York city department of parks and recreation (Département des espaces verts et des loisirs de la ville). Délimitées par la 110e rue au nord, la 8e avenue à l'ouest, la 59e rue au sud et la 5e avenue à l'est, ces rues sont respectivement baptisées Central Park North, Central Park West et Central Park South, et le parc est aujourd’hui encadré par deux quartiers résidentiels : l'Upper East Side (à l'est) et l'Upper West Side (à l'ouest).

Avec 37,5 millions de visiteurs par an, Central Park est l’endroit le plus visité aux États-Unis. Son aspect naturel loin du fait du hasard, est le résultat d'un important travail paysager : le parc contient plusieurs lacs artificiels (dont le plus grand, «The Jacqueline Kennedy Onassis Reservoir» s'étend sur 0,43 km?)3. Il comporte des chemins piétonniers, deux pistes de patinage sur glace, une zone de protection de la vie sauvage et des pelouses pour pratiquer le sport et jeux de plein air. Le parc est devenu un « sanctuaire » pour les oiseaux migrateurs où de nombreux observateurs viennent les découvrir.

DES BORDS DE L'OCEAN AUX TERRES BRADEES DE YOFF - Vaste Opa sur le littoral

Dernier coin à investir, la corniche ouest. Seul domaine réservé du littoral, la corniche de Dakar est l’espace d’oxygénation de la cité pour les promeneurs du soir et du dimanche, les sportifs et autres joggers.

Loin du tumulte de la ville, elle a été longtemps préservée de toutes les formes d’occupation. Face à l’océan, la corniche est un lieu où le relief volcanique des Mamelles impose ses gros rejets de pierres qui maintiennent debout la cote, face aux assauts réguliers des vagues. En face, se tient debout l’une des îles mythiques de Dakar, la Madeleine. Terre d’accueil du Fou de Bassan, c’est la partie maritime qui reste de ce qu’était il y a quelques années encore, le parc national des íles Madeleine. Pour l’exotisme, il faut rappeler qu’il existe trois sous-espèces de Fous de Bassan (Morus bassanus) dans le monde : l’une d’elles se trouve le long de la côte sud de l’Afrique, une autre en Tasmanie et en Nouvelle-Zélande, et l’autre dans l’Atlantique Nord. Pour dire qu’il s’agit d’une espèce rare.

Depuis quelques jours, un pan de mur bloque la vue sur le bord de mer. Depuis la disparition de la partie terrestre du parc des iles de la Madeleine, un hôtel de luxe, Terrou Bi, bloque cette partie de la ville. Ensuite, c’est au tour d’un autre établissement qui arrive sur le bord de l’atlantique, Le Radisson. Aujourd hui, derrière ce nouveau pan de mur érigé du coté de l’université de Dakar, aucune plaque n’indique la nature, ni les nouveaux propriétaires du site.
Au début, une marche de la population de Fann Hock, avait sonné l’alerte sur les menaces qui pèsent sur l’avenir de cet espace du bord de mer qui sert de terrain de sport à des milliers de dakarois, le matin comme le soir. La ville doit ce parcours à Mamadou Diop, maire de Dakar de 1983 à 2000. Mais si ce petit boulevard du bord de mer, du nom de Malik Dia, un de ses anciens défenseurs, a permis de préserver ce coté de la ville, tout a commencé à être perdu avec le président Wade et sa boulimie foncière.

Aujourd’hui réservée aux sportifs, la Corniche est un endroit en sursis. Sur ces terres en friche, l’on trouve de plus en d’immeubles et des bâtiments à usage de services et encore. Depuis l’année 2012, la rumeur qu’une partie de cet endroit a été cédée à une ambassade étrangère à Dakar, a couru suivi de la colère de quelques riverains et défenseurs de la ville. L’Etat est pointé du doigt, perturbé lui aussi par ce pan de mur qui bloque la vue sur l’océan ; la mairie de la ville à qui revient la gestion du domaine foncier, déclare n’avoir rien vu venir. Abattre le mur et oublier cette histoire seraient la plus belle des issues pour cette anomalie qu’on veut transformer en affaire.

Comme la rumeur n’a jamais fondé l’information judiciaire, même si elle tend à la gonfler ou la banaliser, il est souhaitable que ce qui reste de la corniche dans ses parties les plus fragiles, soit préservé. A une certaine époque, lors du forum sur la cité qui a eu lieu en 2009 sous l’égide du Collège d’architecture et de la ville de Dakar, le nouveau maire Khalifa Sall comme une bonne partie des architectes et urbanistes présents, demandaient que l’on revienne rapidement aux réunions du Conseil national de l’Urbanisme pour protéger les espaces constructibles mais surtout non aedificandi de la cité.

En 1999 déjà, la Cellule sur la discipline nationale avait pourtant sonné l’alerte avec l’Ordre des architectes sous la houlette de Mamadou Jean Charles Tall, Annie Jouga, Cheikh Ngom et le Colonel Ndir. Lors d’une conférence publique au siège de l’Ordre, Architectes, sociologues, planificateurs et urbanistes, avaient donné le ton en dénonçant l’anarchie qui menace Dakar. Abdou Diouf et le gouvernement de Mamadou Lamine Loum avaient senti qu’on allait vers de prochains dérapages au niveau urbain avec la montée des lobbies dans la ville, pour tirer la sonnette d’alarme sur la nécessité de protéger des espaces dont la corniche en priorité. L’idée de mettre sur pied une Haute autorité sur la corniche est née de ce fait.

Les exagérations ont démarré dans le cadre du prolongement de cette même voie par Me Abdoulaye Wade à partir de 2006, dans le cadre de ses projets présidentiels. La suite sera une histoire de bradage de terrains, d’occupations des aires de promenade de cette petite voie qui sépare l’océan du continent. Et à partir du complexe médical sis juste au dessus du niveau de la mer jusqu’à la mosquée de la Divinité, c’est une vaste Offre publique d’achat (Opa) sur le littoral qui a été entamée. Une simple promenade suffit à y voir clair avec ces belles maisons qui bordent de part et d’autre le front de côte en longeant la nouvelle route sur l’aéroport.

Si le développement durable devenu un nouveau slogan pour le Président Macky Sall et son gouvernement, les écologistes et les spécialistes de l’environnement, a fait son entrée dans le langage des administrations et des ministères, il reste aujourd’hui un simple concept savant derrière lequel, on confond un ministère et ses directions. Il faut désormais aller plus loin. De durable, les approches de developpement durable ne le sont encore que de nom. Derrière les mots, se cachent en effet un énorme mensonge d’Etat inauguré par Wade et que le président Macky Sall a le devoir de rayer du vocabulaire administratif et des pratiques gouvernementales.

C’est à lui seul de dire stop à la vaste Opa sur la corniche et le littoral. En demandant l’enlèvement de ce pan de mur aux abords de l’université, il fera son premier acte durable en tant que président.

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