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Macky Sall et le dialogue politique: Dites El Maestro !
Publié le jeudi 7 septembre 2017  |  Enquête Plus
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© aDakar.com par DF
Le président de la République a effectué la prière de l`Aïd El Kébir
Dakar, le 2 septembre 2017 - Le chef de l`État Macky Sall a effectué la prière de la Tabaski à la Grande mosquée de Dakar. La prière a été dirigée par l`Imam Ratib El Hadj Alioune Moussa Sambe. Des membres du gouvernement ont également prié à la grande mosquée.




Ancien élève de Me Abdoulaye Wade, Macky Sall a appris comment réguler le climat politique sous nos cieux. Selon ses convenances, il peut soit relever la température à son paroxysme, soit l’abaisser jusqu’à son plus faible niveau. Souvent au détriment de l’opposition qui n’y voit que du feu. Du moins jusque-là !

Le dialogue est en vogue. National ou politique ? Tout le monde y va de son commentaire. Le président Macky Sall, lui, bat en retraite, juste après avoir jeté le ‘’cadeau empoisonné’’ au milieu de la jungle politique. Pendant que certains fauves au flair avisé posent leurs conditions, d’autres saluent l’initiative. Ils promettent de donner suite à l’appel du président de la République. Ce dernier avait, dans le passé, déclaré le 28 mai comme journée du dialogue national.

C’était au lancement du premier dialogue de grande envergure, le 28 mai 2016. Le Sénégal sortait juste des consultations référendaires du 20 mars 2016. Le président Macky Sall avait réussi, malgré la levée de boucliers de presque toute l’opposition et d’une bonne partie de la société civile, à faire passer ses 15 projets de révision de la Constitution. Dans la foulée, il obtenait le précieux sésame de faire un mandat de sept ans, au lieu des cinq qu’il avait promis devant Dieu et la République. C’était au grand dam de ses détracteurs qui n’avaient plus que la rue publique pour ruminer leur colère.

Mais l’ancien disciple d’un certain Me Abdoulaye Wade n’en avait cure. Macky Sall a toujours les choses en main. Il impose son rythme à toute la classe politique. Dialoguant quand ça lui chante, il accélère dès qu’il peut. Ainsi en a-t-il été lors de la réactivation de la Cour de répression de l’enrichissement illicite (CREI), de l’adoption de l’Acte III de la décentralisation, du Plan Sénégal émergent (PSE), de la mise en place du HCCT, de la réforme du Code des marchés publics, etc. Pour ces questions importantes, il n’avait pas senti le besoin de s’assoir autour d’une table avec son opposition, encore moins avec la société civile. En solo, il réussissait ainsi à imposer ces réformes majeures.

Une opposition aux intérêts divergents

Consciente de ses faiblesses, la minorité se radicalise et sonne la mobilisation de ses troupes. Des forces que l’on croyait irréconciliables avaient fini de taire leurs divergences pour se battre sur un seul front. Leur objectif : la défense de la République. Sentant le danger, ayant besoin d’apaiser le climat politique qui montait sans cesse dans le ciel dakarois, le président Sall reprend l’initiative et sonne la trêve en appelant au dialogue national une opposition aux intérêts divergents.

En effet, pendant qu’Idrissa Seck manœuvrait pour le leadership de l’opposition, le Parti démocratique sénégalais se battait surtout pour la libération de son candidat Karim Wade.

Macky Sall saisit le contexte pour vendre ses concertations. L’opposition vole en éclats. Le PDS décide de s’agripper à la perche. C’était, pour lui, une aubaine pour parler de son projet phare : la libération de son candidat au président du Conseil supérieur de la magistrature. Ce dernier avait l’occasion, d’une part, de se débarrasser de la patate chaude réclamée, entre autres, par le Groupe consultatif des Nations Unies, d’autre part, d’instaurer un climat politique apaisé sans lequel la mise en œuvre du Plan Sénégal émergent qui lui est si cher pourrait être anéantie.

Le dialogue national avait eu lieu sans la participation de plusieurs partis significatifs. Il a été sauvé par la participation du PDS. Oumar Sarr, à cette occasion, dénonçait un ‘’harcèlement des membres de l’opposition’’, ‘’des militants du PDS jetés en prison’’. Il disait : ‘’Cela ne va pas dans le sens de l’approfondissement de la démocratie.’’ Il fustigeait également les restrictions sur les droits à la marche, demandait la révision de l’article 80 du Code pénal. ‘’Nous savons que vous êtes le président de la République. Mais vous n’êtes quand même pas un roi. L’offense au chef de l’Etat est un délit suranné qu’il faut modifier. Notre candidat est injustement maintenu en prison par une juridiction spéciale qu’il faut supprimer’’.

Par ailleurs, le maire de Dagana n’avait pas manqué d’égratigner certains transhumants présents dans la salle. ‘’Ce n’est pas normal que seuls les opposants soient inquiétés par la justice. Dès qu’on rejoint les prairies marrons, on est sauvé’’, avait-il lancé avec un sourire narquois.

Ce dialogue avait fini de réveiller les démons de la division chez les opposants. Idrissa Seck, qui avait boycotté la rencontre, parlait de ‘’deal’’ et non de dialogue national.

En tout cas, de cette conférence, l’opinion ne retient qu’une décision majeure qui s’en est suivie. Il s’agit de la libération controversée de Karim Wade comme cela a été demandé par Oumar Sarr et d’autres leaders comme Me El Hadj Diouf. En effet, cinq jours après le lancement du dialogue national, Macky Sall avait annoncé sur les ondes de la Radio France internationale l’éventualité d’une grâce pour Karim Wade. Depuis lors, presque toutes les autres questions sont restées en suspens. Ce qui renforce la thèse du deal avancé par certains.

Un an plus tard, le 28 mai dernier, le dialogue, pourtant institutionnalisé, n’a pas eu lieu. En lieu et place, c’est une guerre totale entre l’opposition et le pouvoir autour du processus électoral. Une question fondamentale sur laquelle pouvoir et opposition peinent encore à s’entendre.

Pourtant, l’espoir était grand, suite à la rencontre entre les deux camps tenue le 1er décembre 2016 au palais de la République. Contrairement à la première qui avait vu une division sans précédent de l’opposition politique, cette dernière avait mobilisé toute la classe politique. Au terme de cette rencontre avec le chef de l’Etat, les deux parties avaient salué le bon déroulement des consultations et les accords sur plusieurs points essentiels.

Mais, conscients que de simples accords de principe ne sauraient suffire pour garantir des élections libres, démocratiques et transparentes, les amis de Mamadou Diop Decroix avaient demandé et obtenu la mise en place d’un comité de veille et de suivi du processus électoral.

L’attitude cavalière du gouvernement

Ainsi, grâce au dialogue, les élections législatives de 2017 étaient parties comme sur des roulettes. Tout se passait si bien. Jusqu’au jour où devait être installé le fameux comité de veille et de suivi. Le gouvernement renouait avec son attitude cavalière. L’opposition était surprise de voir dans la salle le pôle des indépendants. Elle soutenait qu’il ne devait y avoir à la table des négociations que la majorité, l’opposition et les non-alignés. ‘’Le ministre de l’Intérieur, regrettait Déthié Fall, a convoqué un quatrième pôle, celui des Indépendants, sans pour autant se concerter avec l’opposition, alors que lors de la revue du Code électoral, on avait donné une définition aux indépendants. Est indépendant celui qui n’est pas dans une formation politique ou qui a quitté un parti politique, il y a au moins un an’’. Alors que ceux qui étaient là-bas pour représenter ce pôle-là sont des responsables de partis politiques’’.

Fort de cet argumentaire, le responsable de Manko Wàttu Senegaal dénonçait un coup fourré d’Abdoulaye Daouda Diallo et réclamait son départ. Voilà pourquoi, disait-il, ‘’nous avons demandé à nos représentants de quitter la salle. De par cet acte, nous disons que le ministre de l’Intérieur a pris sur lui-même l’engagement de rompre le consensus qu’on avait eu avec le président de la République, le 1er décembre 2016. Ceci ne fait que confirmer tout le mal soupçonné sur Abdoulaye Daouda Diallo, dans sa manière de gérer le processus électoral. Nous jugeons qu’il n’est pas assez neutre pour organiser des élections libres et transparentes dans ce pays’’.

En ces termes, refaisait donc surface cette vieille doléance des opposants de Macky Sall. A partir de cette date, le dialogue était complètement rompu. L’opposition occupe la rue publique. Abdoulaye Daouda Diallo déroule le programme du chef de l’Etat. La suite, tout le monde l’a vécue. Le Sénégal s’est profilé vers l’une des élections les plus ‘’chaotiques’’ de son histoire.

Macky Sall félicite son ministre de l’Intérieur d’avoir organisé ces élections au sortir desquelles il a gagné 125 sièges sur les 165 de l’Assemblée nationale.

L’histoire aura montré que Macky Sall sait surtout dialoguer quand il est en position de force. Ou bien quand il n’y a pas d’enjeu électoral très proche. C’est ce qui ressort de ses deux premiers face-à-face avec les acteurs politiques. Au lendemain des élections législatives, il est revenu à la charge. Appelant au dialogue la classe politique. La seule différence est que cette fois-ci, le PDS, premier parti de l’opposition, n’est plus demanderesse comme lors de la première fois. D’ailleurs, en 2016, lors du dialogue national, Oumar Sarr disait : ‘’Nous nous félicitons de ce dialogue et espérons qu’il aboutira à des résultats positifs pour la classe politique et pour le peuple sénégalais. C’était une attente générale, mais mieux vaut tard que jamais. Le gouvernement gouverne, l’opposition s’oppose, mais un dialogue permanent doit exister entre les acteurs politiques.’’

Cette fois-ci, c’est le même PDS qui pose des préalables. Entre-temps, bien entendu, Karim Wade n’est plus en prison. Les Khalifistes, dont le leader s’est retrouvé à sa place, vont-ils l’entendre de la même oreille que les libéraux ? Même si Barthélemy Dias pose, lui, comme condition préalable à tout dialogue la libération de son mentor. Comme quoi, les temps ont changé. Et en politique, il ne faut jamais dire jamais.
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