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Aboutissement des plaintes contre l’etat du senegal devant la cour de justice de la cedeao : des juristes affichent leur pessimisme
Publié le mercredi 23 aout 2017  |  Sud Quotidien
Palais
© Autre presse par DR
Palais de justice de Dakar




Même si les recours prévus par la coalition Mankoo Taxawu Senegaal (Mts) et le mouvement Y’en a marre et ses alliés au niveau des juridictions supranationales sont jugés recevables, il n’en demeure pas moins que leur chance de réussite reste minime. C’est le sentiment des juristes contactés par la Rédaction de Sud quotidien hier, lundi 21 août. En effet, là où le professeur en Science juridique et politique à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad), El Hadj Iba Barry Kamara brandit la faiblesse des motifs pour annuler les élections, son collègue à l’Ucad, non moins Docteur en droit public, Dr Oumar Sow soulève aussi les motifs évoqués par le Chef de l’Etat, Macky Sall dans son recours auprès du Conseil constitutionnel. Toutefois, les deux juristes semblent diviser sur l’applicabilité des sentences de la Cour de justice de la Cedeao, tout comme sur les étapes nécessaires avant de saisir une juridiction supranationale, dans ce cas d’espèce.

La coalition Mankoo Taxawu Senegaal (Mts) à sa tête le maire de Dakar, Khalifa Sall, tout comme le mouvement Y’en a marre et compagnie, s’engagent-ils dans un combat perdu d’avance, notamment avec les plaintes annoncées contre l’Etat du Sénégal au niveau des juridictions supranationales ? L’on est tenté de répondre par l’affirmatif, au vu des différentes analyses et commentaires faits par les spécialistes en droit. En effet, après le «droit de l’hommiste», Me Assane Dioma Ndiaye de la Ligue sénégalaise des droits humains (Lsdh), qui estime que «la réflexion n’est pas mûre», concernant la plainte citoyenne envisagée par les «demandeurs» c’est au tour des professeurs en science juridique et politique d’exprimer leur réserve quant à l’aboutissement desdites plaintes.

Le professeur en Science juridique et politique à l’Ucad, El Hadj Iba Barry Kamara soutient que «c’est un peu compliqué» de voir aboutir les requêtes du Mts, notamment l’annulation du vote dans certains départements. Cela, justifie-t-il, «il faudrait que ces élections soient carrément annulées et qu’on les reprenne». Qui plus est, renchérit-il, «pour une annulation de l’élection, il faut des motifs très graves et incontestables». Donc, il pense en fait que ces manquements notés lors du scrutin ne peuvent pas «à même aboutir à une annulation des élections». Cela, même s’il admet par ailleurs que les plaintes du Mts et de Y’en a marre sont recevables, d’autant plus que la Cedeao est compétente en matière de droit de l’homme et d’élection.

Même son de cloche pour son collègue Docteur en droit public, Oumar Sow, qui soutient aussi que le recours de Y’en a marre «n’a pas pour but de faire annuler le vote, car la Cour de justice de la Cedeao n’a pas cette compétence». D’autant plus que, selon lui, c’est le droit interne qui organise les élections au Sénégal, non sans faire le parallélisme avec l’affaire Karim Wade où la Cour de la Cedeao s’était déclarée incompétente face à la requête des avocats de la défense, notamment sa demande de faire déclarer l’inconstitutionnalité de la Crei. Même s’il précise qu’il ne peut préjuger de la décision du juge, il trouve quand même que par rapport au principe de la contradiction «les chances de voir condamné l’Etat du Sénégal me semblent assez minces». Pour cause, l’enseignant en droit public à l’Ucad estime que l’Etat du Sénégal peut bien soulever «la saisine du Conseil constitutionnel par le Président de la République» qui, dans sa requête, avait justifié son recours pour éviter que des citoyens ne soient privés du droit de vote du fait des retards et des dysfonctionnements sur le processus de distribution des cartes biométriques Cedeao.

Il en déduit alors que «le juge peut dire que, finalement, les citoyens qui sont défendus par Y’en a marre pouvaient bien voter, donc leur droit n’était pas violer».

Cela, même s’il trouve que le recours de Macky Sall n’est pas conforme à l’esprit de la Constitution telle qu’amendée par le référendum du 20 mars 2016.

Maintenant, si l’Etat est déclaré coupable, pour lui, «la décision ne sera que symbolique», car l’élection est passée.
Quid cependant de l’applicabilité des décisions prises contre l’Etat du Sénégal, si toutefois il est déclaré coupable de violation des droits des citoyens par la Cour de justice de la Cedeao ? Sur ce point, les juristes semblent partager. En effet, le professeur El Hadj Iba Barry Kamara estime en fait que «ce sont des sanctions éminemment politiques» et que «la Cedeao n’a aucun pouvoir de coercition par rapport à un Etat parti». Il a ainsi rappelé qu’il y a eu des précédents où l’Etat a brandi sa souveraineté nationale pour refuser d’appliquer les décisions de la Cour. Pour lui, «c’est ça l’une des faiblesses des organisations internationales». Le Docteur Sow ne le voit pas de cet œil et soutient que même si la souveraineté de l’Etat est souvent avancée, il n’en demeure pas moins que dans le traité de la Cedeao, il est prévu des sanctions pour ces situations. Il révèle qu’en réalité, en cas de non respect de la sentence de la Cour, la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la Communauté peut décider notamment de la suspension de l’octroi de tout nouveau prêt et de toute nouvelle assistance par la communauté, tout comme le rejet de la présentation de candidatures aux postes statutaires et professionnels, ainsi que la suspension du droit de vote et la suspension de la participation aux activités de la Communauté, etc.

Il faut en outre noter que les juristes semblent aussi diviser sur la nécessité d’épuiser les recours internes avant de saisir la Cour de justice de la Cedeao. Quand le professeur Kamara soutient la nécessité de saisir les juridictions compétentes internes avant de porter l’affaire devant une juridiction supranationale, concernant le cas de Y’en a marre et compagnie, Dr Sow pense le contraire.

Pour ce juriste-consultant, l’amendement du protocole, en cas de violation des droits humains, permet à tout citoyen de saisir directement la Cour de la Cedeao, citant en exemple l’affaire de la Gambie où le président Yahya Jammeh voulait amender cette disposition.
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