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Noto Gouye Diama: L’autre territoire qui nourrit le Sénégal
Publié le mercredi 16 aout 2017  |  Enquête Plus
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© aDakar.com par Mc
La promotion du consommer local au coeur du "Louma agricole"
Dakar, le 3 Mai 2014- L`agence nationale d`insertion et de développement agricole (ANIDA) a ouvert, ce samedi matin, ses loumas agricoles. La grande innovation de cette année est la décentralisation. D`autres loumas (marché) ont été ouverts, outre à Dakar, à Kaolack et à Thiès.




Il y a des zones qui participent au développement économique et social du pays. Il y a des zones qui nourrissent le peuple à bas prix. Noto Gouye Diama en fait partie. Situé dans la zone des Niayes, cet espace où se côtoient producteurs maraîchers et commerçants, fait la fierté de ses habitants et des autres citoyens. EnQuête est allé à la découverte de cette ‘’commune maraîchère’’ et de son marché.

Noto Gouye Diama ! Une commune et un centre économique. Pour se rendre dans cette localité située à 23 km de Thiès, il faut un énorme sacrifice : celui du transport. Il n’est pas difficile de s’y rendre. Par contre, le voyage n’est pas du tout facile puisqu’il faut embarquer à bord d’un taxi ‘’clando-surcharge’’. Au garage de Noto, le voiture de 4 places peut transporter jusqu’à 5 personnes. C’est la règle ! ça passe ou ça casse, comme dit l’autre. Et comme la plupart des taxis ‘’clando-surcharge’’ ne sont pas en bon état, le voyage dure plus longtemps. Pour les 23 km, on pouvait faire moins d’une heure.

Mais, il faut au maximum une heure cinq minutes. Sur le chemin de la zone des Niayes de Noto, nous avons traversé la commune de Mont-Rolland, les villages de Keur Pathé Kwethe, Keur Daouda Ciss…, une zone de production de mangues. Après cette traversée, nous voilà enfin à Noto Gouye Diama, une commune ‘’maraîchère’’. Nous y sommes arrivés à 11h 07 mn en ce mardi 14 mars 2017. Sur place, c’est un autre décor qui capte l’attention du visiteur. A la descente du véhicule, nous faisons face à un vaste marché. Un périmètre à perte de vue. Il est y exposé des milliers de sacs d’oignon, de pomme de terre, de carotte, de manioc, de patate etc. C’est le point de départ d’une vie économique intense. Tout part de Noto pour polariser les autres marchés. ‘’Vous voyez tout ce stock de fruits et légumes. Dans cette seule partie du pays, on peut produire suffisamment pour tous les Sénégalais. Donc, nous devons privilégier le consommer local afin de booster la productivité. Nous pouvons y arriver. C’est juste une question de mentalité. Quand on achète un kg d’oignon marocain par exemple, on enrichit le Maroc et on appauvrit davantage le Sénégal sans se rendre compte’’, tempête Moulaye Ndiaye l’un des plus grands producteurs de la zone de Noto. Dans ce marché, il est très connu. Il produit et commercialise lui-même. ‘’Je cultive de la pomme de terre, de l’oignon, des haricots verts et d’autres variétés. Et le tout sur un espace de 5 ha. Je produis 3 à 4 tonnes de pomme de terre et d’oignon. Après la phase production, je procède à la commercialisation. Je n’attends personne pour qu’il le fasse pour moi. Après avoir écoulé tout mon produit, je peux faire un chiffre d’affaires de plus deux million de F Cfa’’, se glorifie à nouveau le producteur-commerçant.

Des obstacles au quotidien

Cependant, Moulaye Ndiaye précise que et ses camarades et lui rencontrent d’énormes difficultés dans le travail qu’ils effectuent au quotidien pour participer ‘’à l’émergence du pays’’. Dans la phase préparation soutient-il, ils tardent à recevoir les semences. En revanche, leur plus grande difficulté dit-il, c’est l’étape de la commercialisation. ‘’Chacun travaille à sa manière pour le développement du pays. Si l’Etat pouvait nous aider à moderniser ce marché, avec tous les moyens efficaces en matière de stockage et de conditionnement ça serait une bonne chose.

Mais, à notre niveau, nous faisons de notre mieux pour que le produit arrive sur le marché sénégalais ou sous-régional en bonne qualité’’, promet-il. A Noto, on cultive des centaines d’hectares de fruits et légumes, nous apprend Ousmane Guèye, un autre producteur venu livrer sa marchandise à une de ses clientes. Ainsi, il révèle par la même occasion, l’obstacle qu’ils rencontrent dans l’acheminement des marchandises au niveau du marché de Noto, car les vergers les plus proches se situent entre 4 et 5 kilomètres. ‘’Là aussi c’est un autre calvaire que nous vivons. Nous louons des charrettes pour transporter la production parce qu’il y a certaines zones qui sont très enclavées.

Les voitures ne peuvent pas s’y rendre. En transportant notre marchandise avec des charrettes, on cumule parfois beaucoup de pertes. C’est difficile. Mais, il faut faire avec puisqu’on a choisi d’évoluer dans le secteur de l’horticulture’’, souligne le natif de Thialy (Thiès). D’après Ousmane Guèye, l’Etat est en train de fournir des efforts pour accompagner les producteurs horticoles, notamment avec la subvention de l’engrais. Par contre, il trouve qu’il peut faire ‘’mieux’’. ‘’J’invite l’Etat à nous livrer les engrais et les semences à temps afin que nous puissions faire tout le travail au moment opportun. On ne va pas demander aux autorités de nous appuyer dans l’acquisition des machines. Si on le fait, l’Etat dira qu’on en demande trop. Quand on veut se lancer dans l’horticulture, il y a un minimum à faire. On ne peut pas tout attendre de l’Etat. Mais, on lui demande tout simplement de donner le nécessaire à temps’’, préconise le Thiessois.

Un point de ralliement des ‘’bana-bana’’

Le marché de Noto est un endroit indispensable, tout comme sa zone de production horticole. Il fonctionne sept jours sur sept. C’est un marché qui grouille de monde à l’image de Petersen ou Tilène de Dakar, la veille de chaque fête de Tabaski. Ici, c’est un lieu où se croisent la quasi-totalité des commerçantes ou ‘’bana-bana’’. Elles viennent de Dakar, de la Gambie, de Kaolack, Kédougou, de Tamba…, pour acheter en gros les fruits et légumes et les revendre dans leurs régions ou localités respectives. Un job qui marche bien. ‘’Machallah, mon travaille marche très bien. Chaque semaine, je quitte Dakar à la recherche des légumes.

Je détiens un magasin au marché Thiaroye et c’est là-bas que j’écoule ma marchandise. Ici, j’achète le kilogramme de la pomme de terre entre 240 et 260 F Cfa. Tout dépend de la qualité que je veux amener à Dakar. Une fois sur place, je le vends à un prix beaucoup plus élevé. Pour l’oignon, j’achète le kg à 150 F Cfa. Je gagne très bien ma vie. Je ne me plains pas’’ confie, Anta Sow. Âgée de 43 ans, cette dame au teint clair se dit fière de s’adonner à ce métier, qui selon elle, lui permet d’entretenir sa famille. Sa propre philosophie dit-elle, c’est le travail rien que le travail. ‘’Je suis mariée. Mais, je n’attends rien de mon mari. Il a son travail et j’ai le mien. Quand il part bosser moi aussi je quitte Dakar pour venir à Noto à la recherche de ma marchandise. Il est salarié. Cependant, je ne peux pas compter sur lui dans la mesure où en plus de ma propre famille, je dois aider ma mère. Avec ce travail je parviens à le faire et je rends grâce à Dieu’’, indique-t-elle, avec un brin de sourire. Avant d’ajouter qu’elle n’est pas la seule femme à braver le trajet Dakar-Noto Gouye Diama.

Il y a également d’autres mais elles sont établies au marché Castor, précise Mme Sow. Contrairement à Anta qui vient de Dakar, Alimatou elle, a quitté Tambacounda. Pour rejoindre Noto, elle doit parcourir des centaines de kilomètres, et parfois au péril de sa vie. ‘’Les conditions de voyage sont trop compliquées. Mais je tiens bon. Je viens à Noto au moins tous les 20 jours pour m’approvisionner en légumes. Sur place, j’achète de la tomate, des choux, de la salade, du piment, du manioc… Quand j’arrive à Tamba, je procède à la revente. Et j’avoue que ça marche très bien. Le marché est moins cher. Si nous ne faisons pas ce commerce personne ne le fera à notre place. C’est aussi une manière pour nous d’aider les populations parce qu’elles ont besoin de consommer les fruits et légumes de Noto’’, renchérit Alimatou soulignant que chacun a le droit de se ‘’contenter’’ de son propre job. Tôt le matin, les producteurs de cette zone maraîchère mettent leurs produits à la disposition de ces ‘’bana-bana’’ qui, à leur tour, sont chargées de les acheminer dans les autres marchés du pays.

Noto Gouye Diama est une zone qui n’est pas trop accessible pour une personne qui quitte Tambacounda par exemple. Mais, les femmes se donnent les moyens pour y accéder du fait peut-être, de la particularité de ce marché qui nourrit les populations locales et les autres sénégalais. Il suffit de venir à Noto pour rentrer avec son sac bien rempli de fruits et légumes, le tout à un prix acceptable.

SOUS˗SECTEUR DE L’HORTICULTURE

L’envol malgré les obstacles

Le sous-secteur de l’horticulture a enregistré des résultats probants ces dernières années. Selon le rapport de la campagne 2015-2016 effectué par l’Association des unions des maraîchères des Niayes (Aumn), les productions ont connu une évolution. Elles sont passées de 950 000 tonnes de fruits et légumes en 2013 à 1. 206 810 tonnes en 2016, soit un accroissement de 60%.

Ces progrès remarquables lit˗on dans le document, ont été notés grâce au dynamisme des filières carotte, oignon, chou pommé, patate douce, banane, mangue et pomme de terre. Et pourtant, il y a quelques années, la filière pomme de terre avait enregistré des contre-performances dues à ‘’un accès difficile de la semence de pomme de terre’’. Pour cette filière uniquement, les productions sont passées de 15 000 tonnes en 2013 à 29 680 tonnes en 2014 puis 52 230 tonnes en 2015. Des résultats satisfaisants qui a, par la même occasion ont permis au Sénégal en 2015, de réaliser une ‘’couverture de trois mois et 15 jours des besoins nationaux’’. D’ailleurs entre octobre 2015 et mars 2016, les producteurs ont reçu de la part de l’Etat, une subvention de 3 067 tonnes de semences, pour un montant global de 996 775 000 F Cfa.

Quant à la production de carotte, le rapport précise qu’elle est estimée à 11.500 tonnes assurant ainsi ‘’une couverture des besoins de consommation de 7 mois’’. L’oignon, une des spéculations majeures, enregistre une augmentation des volumes passant de 90 000 tonnes en 2001 à 367 500 tonnes en 2015, pour une couverture de la même durée. ‘’Ces résultats satisfaisants des filières résultent en partie de l’accompagnement de l’Etat à travers la subvention des engrais, de la semence de pomme de terre et le mécanisme de régulation du marché en vigueur depuis 1990 et formalisé à partir de 2003. Il est aussi à noter que ces filières doivent leurs performances à un savoir faire des producteurs’’, ajoute le rapport de l’AUMN, qui couvre les quatre régions de la zone des Niayes : Dakar, Thiès, Louga et Saint Louis. Elle a en son sein, 17 500 petits producteurs membres.

Pour la campagne horticole 2015-2016, la pomme de terre, oignon, le haricot et arachide vert, la tomate, la carotte, le chou, le jaxatu ou aubergine globulaire et le piment ont réalisé des performances énormes. Les productions sont estimées à 227 413 tonnes en 2016 pour un chiffre d’affaires de 45.084 875 000 F Cfa contre 205 971 tonnes en 2015 pour un montant global de 40 573 425 000 F Cfa.

Les limites d’une production

Dans la zone des Niayes, on produit beaucoup de fruits et légumes. Cependant, les producteurs y rencontrent beaucoup de difficultés. Cependant, l’AUMN estime qu’elle pouvait en faire plus si elle disposait de plus de matériels, lui permettant de mener à mener à bien sa mission. Outre le manque de professionnalisme, les producteurs sont confrontés au manque d’aire de stockage, d’équipements de tirage et de conditionnement, et même parfois au manque d’emplacement inadapté.

Dans leur rapport, les producteurs des Niayes y ont également évoqué le ‘’début tardif et la durée insuffisante’’ du gel des importations. Une problématique qui selon eux, pourrait contribuer de manière ou d’une autre, au frein de leur activité agricole pendant tout ce temps. Ils ont tenu à souligner les ‘’bas prix’’ qui leur sont très souvent proposés. Dans la phase de distribution et commercialisation, ces derniers ont mentionné la présence de ‘’beaucoup d’intermédiaires’’ et les nombreux ‘’circuits non avantageux’’. Par ailleurs, ils ont demandé aux autorités de doter les structures qui s’activent dans la production agricole, de moyens logistiques afin de les aider à faire face à leurs difficultés.
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