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Art et Culture

Dix ans après sa disparition: Sembène porté en modèle à la jeune génération
Publié le lundi 12 juin 2017  |  Enquête Plus
Ousmane
© Autre presse par DR
Ousmane Sembène, le père du cinéma africain, décédé le 9 juin 2007




Rappelé à Dieu le 9 juin 2007, le cinéaste, scénariste, Ousmane Sembène est porté, hier à Thiès, en modèle à la jeunesse sénégalaise. Selon le ministre de la Culture et de la Communication, Mbagnick Ndiaye, Ousmane Sembène est ‘’toujours vivant’’.

Il fut un citoyen du monde entier. Né le 1er janvier 1923 à Ziguinchor, Ousmane Sembène a vécu au Sénégal, en Afrique et dans le monde. De Ziguinchor à Marseille (France), en passant par Ouagadougou (Burkina Faso), le romancier sénégalais a, de son vivant, milité pour la renaissance de l’Afrique. C’est pourquoi il a été porté hier en modèle à la jeunesse sénégalaise, en marge de la cérémonie officielle du dixième anniversaire de son rappel à Dieu. D’ailleurs, Mbagnick Ndiaye soutient que son œuvre et son legs ‘’doivent être perpétués’’ au profit des générations futures. ‘’Ousmane Sembène vit encore parmi nous grâce à son œuvre et à son génie créateur incommensurables. Il est entré dans l’immortalité par la qualité et la quantité de livres et films qu’il nous a laissés, et qui transcendent notre cadre spatial et temporel.

Créer, disait Sembène Ousmane, ‘’c’est participer à l’évolution de la masse (…)’’, témoigne le ministre de la Culture, venu présider la cérémonie. Avec la disparition physique de Sembène, rappelle Mbagnick Ndiaye, c’est une voix ‘’écoutée et respectée’’ du cinéma et de la littérature qui était éteinte. ‘’Mais j’ose croire que les valeurs qu’il a incarnées, ses messages délivrés, gardent toujours toutes leurs résonances et leurs actualités auprès des générations futures’’, laisse-t-il entendre. Avant d’ajouter qu’il faut penser à ‘’rééditer’’ les œuvres de Sembène afin que la jeune génération puisse en bénéficier. ‘’Sembène porte haut l’étendard de la culture voire du cinéma africain. Nous lui serons toujours reconnaissants. L’Etat du Sénégal prendra tous les engagements pour accompagner les organisations qui perpétuent l’œuvre et la pensée de Sembène Ousmane’’, promet le ministre Mbagnick Ndiaye.

‘’Tous responsables de son héritage en péril’’

Pour sa part, le Professeur Alpha Amadou Sy, président de la Communauté africaine de culture/Section sénégalaise (Cacsen), soutient qu’on ne ‘’peut pas refaire l’Afrique sans les Africains’’. ‘’Ce message est fondamental dans la mesure où, au moment où nous pensons à refaire l’Afrique, il faut un ancrage dans nos cultures pour nous ouvrir aux autres et cela est important. Et de ce point de vue, le colloque de novembre prochain que nous aurons sur Sembène Ousmane aura comme fonction fondamentale de revisiter le passé mais aussi, de nous montrer en quoi aujourd’hui l’œuvre de Sembène demeure actuelle. Nous sommes les cosignataires et les héritiers de cette œuvre monumentale’’, déclare l’écrivain. Revenant sur la reconnaissance de l’État du Sénégal envers Ousmane Sembène, le philosophe indique que des efforts ont été consentis dans ce domaine.

En revanche, il révèle que c’est ‘’insuffisant’’. ‘’Comparaison n’est pas raison et aujourd’hui on le sait, nul n’est prophète chez soi. Mais quand on prend le cas du Burkina Faso, il y a une rue dédiée à Sembène Ousmane, une salle de cinéma, une avenue, une chambre. Il y a même une statue de Sembène Ousmane (Ndrl : à la place des cinéastes). Je crois que sous ce rapport, nous avons encore à faire.

Nous regardons Saint-Louis, Thiès, Ziguinchor, Dakar ; pas un site, pas une rue ; que dire ? Pas une ruelle pour le père du cinéma sénégalais. C’est une honte pour le Sénégal et l’Afrique’’, se désole le Pr Alpha Amadou Sy. Qui souligne par ailleurs, qu’il n’est pas tard ‘’d’y remédier et on doit y remédier impérativement’’. ‘’ Notre vœu fondamental, c’est qu’au terme de la commémoration qui va durer un an, on puisse dire que l’avenue telle le monument tel, le site tel porte le nom de Sembène Ousmane. Sur l’héritage de Sembène en péril, nous sommes tous responsable, qu’on soit citoyen ou État. On ne doit pas attendre que l’autre fasse. Nous devons nous battre pour le récupérer, le consolider mais également nous battre pour que les jeunes puissent se l’approprier. Et c’est important, pas pour Sembène, encore moins pour les artistes mais pour le Sénégal et pour l’Afrique’’, préconise le président de la Cacsen.

‘’Retrouver la pipe de Sembène’’

De son côté, la Directrice de Daaray Sembène (Maison de la pédagogie et de l’image), Hadja Mai Niang, soutient que sur le plan scientifique, l’œuvre de Sembène ‘’va bien’’, aussi bien le livre que le film. Cependant, elle précise que le combat de tous, c’est de la rendre populaire. ‘’La perpétuité de l’œuvre de Sembène laisse encore à désirer. Sembène demeure encore un pionnier du cinéma africain. Personne ne peut le nier’’, informe l’écrivaine-cinéaste. Le Dr Hadja Mai Niang a profité de cette tribune pour un plaidoyer pour la prise en charge de la production de Sembène. ‘’A Galle Ceddo, dans sa maison à Yoff, il y a les documents de Sembène Ousmane qui s’écroulent avec la maison. La maison est en ruine. Que l’Etat prenne en charge l’héritage de Sembène Ousmane parce que c’est un héritage non seulement technique, mais culturel également.

En Europe, les manuscrits de Victor Hugo sont exposés, étudiés dans les universités. Allez chez Sembène Ousmane, c’est comme si ce n’était pas important alors que le matériel qui s’y trouve devrait être dans des musées’’, plaide-t-elle. Poursuivant son propos, la ‘’fille adoptive’’ de Sembène invite l’État du Sénégal à ‘’chercher et trouver la pipe emblématique’’ du célèbre écrivain sénégalais. ‘’Je demande solennellement à l’Etat du Sénégal de faire une prospection dans tous les lieux où se trouvent les œuvres de Sembène Ousmane, de les récupérer pour en faire un musée. C’était un grand travailleur et je pense que son travail ne doit pas être vain.

J’ai vu une ou deux pipes après sa mort. Je demande à l’Etat de chercher où se trouve la pipe emblématique de Sembène Ousmane. Je pense qu’il la trouvera pour l’exposer ensuite dans un musée. C’est une pipe emblématique et peut être derrière cette pipe, il y a de l’art et des choses à dire’’, prône Hadja Mai Niang.

On ne peut pas faire le présent sans penser au passé, comme disait l’autre. Et on ne peut pas parler non plus de la littérature africaine sans penser à Sembène Ousmane. Auteur du célèbre roman ‘’Les bouts de bois de Dieu’’, le ‘’Tirailleur sénégalais’’ qui, de son vivant, militait pour la bonne cause, repose depuis dix ans au cimetière musulman de Yoff.
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