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Enquête Plus N° 829 du 18/3/2014

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Affaire Habré:Les grandes étapes d’un procès pour 2015
Publié le mercredi 19 mars 2014   |  Enquête Plus


Hissène
© Autre presse par DR
Hissène Habré


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Prévu entre fin 2014 et «plus probablement» au courant de l’année 2015, le procès de Hissein Habré aura été un formidable feuilleton politico-judiciaire qui n’en a pas forcément fini avec ses surprises et ses rebondissements depuis treize ans.



Depuis hier lundi, les juges des Chambres extraordinaires africaines (CAE) sont à pied d’œuvre à Ndjamena pour les besoins de la troisième Commission rogatoire internationale (CRI) organisée en prélude au (futur) de Hissein Habré (HH), ancien Président de la république du Tchad. Concernée par l’étape de la procédure en cours : la Chambre africaine extraordinaire d’instruction sise au Tribunal régional hors classe de Dakar.

L’enjeu de cette CRI : c’est la dernière d’une série débutée en août 2013 et destinée à poursuivre les auditions de victimes et le recueil des témoignages autour des crimes présumés commis par le prédécesseur d’Idriss Déby entre le 7 juin 1982 (date d’arrivée au pouvoir de M. Habré, et le 1er décembre 1990 coïncidant avec sa fuite au Sénégal).

Mais s’il y a procès (la question se pose car les juges de l’instruction peuvent rendre un arrêt de non lieu et clôturer la procédure en l’absence de charges), ce serait après un marathon judiciaire et politique de vingt-trois ans sur le triangle Ndjamena-Dakar-Bruxelles.

C’est en septembre 1991 que la première salve est lancée contre Habré. Elle vient de la toute jeune Association des victimes de crimes et répressions politiques au Tchad (AVCRP) décidée à élucider la « période noire » du régime défunt. Pour cela, elle s’appuie, entre autres dossier, sur les investigations de la Commission d’enquête nationale publiée en mai 1992. Cette étude du magistrat-avocat Mahamat Hassan Abakar fait état d’au moins 40 000 morts.

Sept ans plus tard, en mai 1999, face à la complexité extrême de l’affaire, l’Ong Human Rights Watch (HRW) «entre» dans le dossier sur requête de l’Association tchadienne pour la promotion et la défense des droits de l’homme (ATPDH).

L’idée est de poursuivre Hissein Habré devant la Justice sénégalaise. Autour de Hrw, émerge une coalition où se retrouvent les Ong Raddho et l’Ondh (Sénégal), la Fidh, l’Avcrp, la Ligue tchadienne de défense des droits de l’homme (LTDH), Agir ensemble pour les droits de l’homme…

Habré obtient gain de cause…

Puis, à partir de 2000 et l’arrivée au pouvoir à Dakar de Me Abdoulaye Wade, l’affaire entre dans une zone de turbulences dont personne ne sait qu’elle va alors s’étaler sur une période de treize ans… Quand, le 26 janvier 2000, un groupe de sept victimes présumées portent plainte à Dakar contre Habré «pour actes de tortures et de barbarie et crimes contre l’humanité», il a suffi huit jours au juge d’instruction Demba Kandji pour arrêter l’ex-homme fort de Ndjamena après l’avoir inculpé.

Offensifs, les avocats de Hissein Habré saisissent la Cour d’appel de Dakar pour faire annuler l’acte du Doyen des juges d’instruction. Ils obtiennent et gain de cause et la tête du juge Kandji, défenestré pour un autre poste.

Dans un premier temps, la Cour d’appel casse l’acte d’accusation au motif que les tribunaux sénégalais sont incompétents pour juger Habré car les crimes visés n’ont pas été commis au Sénégal et sont, du reste, inconnus de l’arsenal judiciaire national. Et quand les victimes saisissent la Cour de cassation, celle-ci confirme l’incompétence des juridictions sénégalaises sur cette affaire, le 20 mars 2001.

…Wade lui demande de partir

Exaspérées, les victimes annoncent aussitôt leur intention de faire juger Habré en Belgique. Menaçant, le Président Wade, le 7 avril 2001, dit avoir demandé à Habré d’aller voir ailleurs, mais le Comité des Nations-Unies contre la torture, réceptrice d’une plainte contre le Sénégal de la part des victimes, exige que l’ancien chef d’Etat du Tchad ne quitte le Sénégal «qu’en vertu d’une procédure d’extradition» en bonne et due forme avec un Etat tiers.

C’est à cette période, précisément en mai, que l’Ong HRW «récupère à Ndjamena les archives abandonnées de la police politique de Habré, la DDS», soit «les noms de 1208 personnes exécutées ou décédées en détention et de 12 321 victimes de graves violations des droits humains.»

«Si un pays capable d’organiser un procès équitable – on parle de la Belgique - le veut, je n’y verrais aucun obstacle», répond le chef de l’Etat sénégalais à une lettre du secrétaire général de l’Onu d’alors, Kofi Annan.

Au Tchad même, alors que les juges belges prennent les devants en enquêtant sur place dans l’optique d’une extradition de HH à Bruxelles, HRW révèle, le 12 juillet 2005, la présence de «41 complices présumés de Hissein Habré (qui) occupent toujours des positions de responsabilités au sein du gouvernement et de l’administration tchadienne.»

Un mois plus tard, jour pour jour, le Président Idriss Déby Itno démet «six anciens complices présumés de HH de leurs fonctions au sein de l’appareil sécuritaire de l’Etat» et promet de faire le ménage pour le reste tout en annonçant une procédure d’indemnisation pour les victimes.

Cacophonie sénégalaise…

A Dakar, s’ouvre le 19 septembre 2005 une nouvelle bataille avec le mandat d’arrêt international du juge belge Daniel Fransen à l’encontre d’Hissein Habré, suivi d’une demande d’extradition adressée au Sénégal. HH est alors arrêté et mis en détention le 15 novembre. Mais la réponse sénégalaise ne tarde pas lorsque l’Etat du Sénégal obtienne que la Chambre d’accusation de la Cour d’appel se déclare incompétente sur la demande d’extradition belge.

Dans cette période, c’est la cacophonie dans le gouvernement sénégalais. Quand Me Ousmane Ngom, ministre de l’Intérieur, met HH «à la disposition du Président de l’Union africaine» Olusegun Obasanjo, et n’écarte même pas son expulsion vers le Nigeria, Cheikh Tidiane Gadio, ministre des Affaires étrangères, lui répond le lendemain 27 novembre en déclarant que Habré ne quittera pas le Sénégal sans une décision de l’UA à son sommet de janvier 2006… Ambiance.

«Moi maintenant, j’en ai assez…»

Après la mise en place d’un «Comité d’éminents juristes africains » à partir du 24 janvier 2006, l’UA demande le 2 juillet au Sénégal, qui l’accepte, d’organiser le procès de Hissein Habré «au nom de l’Afrique». Le 31 janvier 2007, l’Assemblée nationale élève les lois sénégalaises au diapason de la justice pénale internationale en rendant possible l’instruction locale des crimes internationaux. Une étape stratégique semble ainsi franchie.

Loin de l’appétit financier des autorités sénégalaises pour la prise en charge du procès en perspective, un groupe de quatorze victimes portent plainte pour «crimes contre l’humanité» et «crimes de torture» contre l’ancien chef d’Etat tchadien le 16 septembre 2008. Une démarche qui survient après que le Congrès du Sénégal (Assemblée nationale et Sénat) a adopté un amendement constitutionnel donnant compétence à la Justice sur des «crimes contre l’humanité perpétrés par le passé».

Sur ce front là, la défense de HH ne chôme pas. Le 18 novembre 2010, elle saisit la Cour de justice de la Cedeao qui enjoint le Sénégal de juger son client devant un tribunal «spécial ou ad hoc à caractère international.» Et trois semaines après, survient la fameuse sortie du Président Wade : «Que l’Union africaine reprenne son dossier (…) sinon Hissein Habré, je vais le renvoyer quelque part. Moi maintenant, j’en ai assez, je vais m’en débarrasser. Point final.»

Mise sous pression, l’organisation continentale s’active, mais Wade semble très déterminé à tourner la page de ce qui ressemble à un cauchemar pour lui, le panafricaniste revendiqué. «Là pour moi, c’est fini. Je suis dessaisi. Je le remets à la disposition de l’Union africaine.» Ce qui se traduit, le 24 mars 2011, par un accord sur la mise en place d’une «Cour international ad hoc». Mais les divergences demeurent entre Dakar et Addis Abeba à propos des règles de procédure de la futur Cour.

Macky Sall décisif…

Puis, entre quatre demandes d’extradition de la Belgique dont les trois ont été formellement rejetées par la Chambre d’accusation de la Cour d’appel de Dakar, un tsunami politique majeur a raison du régime de Me Abdoulaye Wade avec l’arrivée au pouvoir de Macky Sall, le 26 mars 2012.

Le nouveau gouvernement met en place un groupe de travail dont le mandat est de «réfléchir sur les modalités pratiques de préparation et d’organisation du procès de Hissein Habré, conformément aux engagements internationaux du Sénégal et avec le soutien de l’Union africaine.» L’instruction du procès est alors promise pour «avant la fin de l’année.»

Le 24 juillet, un accord avec l’UA est trouvé qui crée un Tribunal spécial dans le système judiciaire sénégalais avec des juges africains nommés par l’Union africaine sur proposition du ministre sénégalais de la Justice. Ainsi naissent les Chambres africaines extraordinaires (CAE) le 22 août 2012, avant leur inauguration le 8 février 2013 à Dakar…

Placé en garde à vue sur décision du parquet des Chambres le 30 juin 2013, Hissein Habré est inculpé et placé en détention le 2 juillet… Fin de la zone de turbulences ?

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