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Kolda - À la découverte d’un centre d’aide juridique: Le service juridique à portée de tous
Publié le jeudi 2 fevrier 2017  |  Enquête Plus
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Pour atteindre l’objectif de vulgariser le droit et le devoir citoyen, de jeunes Koldois juristes formés dans les meilleures universités sénégalaises ou étrangères ont créé, depuis 2012, un Centre régional de gouvernance participative (CRGP). Ceci, grâce à l’appui de l’Ambassade des Pays-Bas, de l’Union Européenne et des autorités locales. Chaque jour, des centaines de citoyens s’y donnent rendez-vous afin de s’informer sur le système juridique et trouver une solution à leurs problèmes. EnQuête est allée à la découverte de ce centre.

Reportage.

Mercredi 4 janvier 2017. Il est 10 heures passées de quelques minutes. Les locaux du centre régional de gouvernance participative (CRGP) sont déjà pris d’assaut. Une foule compacte (voir photo) de citoyens squatte l’extérieur du bâtiment qui l’abrite. C’est parce que l’intérieur est bondé de monde. Depuis son ouverture, le centre reçoit en moyenne 70 à 80 visiteurs par jour. Ils viennent de tous les horizons de la région. La plupart de ces personnes sont issues de familles démunies ou sans grands moyens. « Ce centre nous édifie sur nos droits et devoirs, gratuitement. Nous, nous ne nous faisons pas prier pour exposer nos soucis. Le centre nous facilite l’accès à la justice. Car auparavant, la plupart d’entre nous n’osaient franchir la porte du cabinet d’un avocat ou du palais de justice pour deux raisons : manque d’information ou manque de moyens. Aujourd’hui, l’espoir renaît pour nous », résume un Koldois trouvé sur place.

Moustapha Sarr, mécanicien de son état, de se réjouir des efforts consentis par le centre à l’égard des populations. « Le centre m’a offert des conseils gratuits et m’a accompagné dans le cadre de la maîtrise des procédures administratives et juridiques. Aujourd’hui, je suis très satisfait », confie-t-il. Même taux de satisfaction pour son collègue Mamadou Baldé, notable du quartier Sikilo. « Avec ce centre, nous nous informons sur le système juridique afin de trouver des solutions à nos problèmes. »

‘’Informer, conseiller et régler à l’amiable’’

Le coordonnateur du centre, Ibrahima Seydi, ne dit pas autre chose. « Si les citoyens qui fréquentent notre centre sont satisfaits, c’est parce que le centre dispose d’une équipe permanente de juristes formés dans les meilleures universités sénégalaises ou étrangères qui leur rendent gratuitement service. » L’équipe du centre, renseigne-t-il, est composée de natifs du terroir qui connaissent parfaitement les réalités vécues par les populations de leur région. « Donc, nous pouvons facilement faire le lien entre les problèmes vécus et le droit », dit-il.

En effet, renseigne le coordonnateur technique du centre, Me Aboubacar Camara, les populations sont accueillies et écoutées. ‘’Nous leur expliquons par exemple le droit de la famille : mariage, séparation, divorce, pension alimentaire, filiation, curatelle, succession et le droit administratif. Notamment, le permis de séjour, permis de travail, les poursuites, les impôts. Mais aussi le droit des assurances sociales, à savoir accident, maladie, chômage, etc. et des assurances privées ». « Notre mission, poursuit le juriste, est d’informer, de conseiller et de régler à l’amiable tous les problèmes juridiques qui nous sont soumis. »

Le tribunal hérite des cas difficiles

Appuyé par l’Ambassade des Pays-Bas et soutenu par l’Union Européenne, le centre sert à l’éducation formelle et informelle au droit. Les usagers y sont orientés par les membres qui leur permettent de contrôler et d’évaluer les actions de leurs collectivités locales. Les problèmes abordés par le centre sont de tous ordres. Ils concernent notamment le mariage, les concessions, les relations de travail, les recouvrements de créances, les accidents de circulation, les litiges relatifs au droit pénal et divers. Toutefois, les questions relatives à la pension alimentaire et à la succession reviennent souvent.

« Nous constatons que les populations ont besoin de connaître leurs droits face aux devoirs qu’exige d’eux la société. Nous les appuyons dans la constitution et le suivi des dossiers dans les circuits administratifs et judiciaires, puisque la couche des populations bénéficiaires des prestations n’a pas la capacité de payer les frais de procédures et est illettrée », expliquent les membres du centre. Ces populations sont sensibilisées sur leurs droits. On leur explique la portée des lois et textes en vigueur et les aide à faire face aux tracasseries liées à certaines procédures. Dans le centre, on les pousse aussi à résoudre leurs problèmes à l’amiable. Les cas difficiles sont soumis à l’appréciation du tribunal par des requêtes rédigées par le centre.

Ce travail inlassable de fourni par les membres du centre a poussé la municipalité à leur octroyer un terrain. La pose de la première pierre a eu lieu, grâce à l’appui financier de l’Agence Espagnole de Coopération Internationale et de Développement (AECID).

Gouvernance et citoyenneté

Il faut dire que dans le centre, deux concepts sont développés. Il s’agit de « l’école citoyenne » et du « CGP mobile ». Leur objectif est d’outiller les citoyens sur des questions quotidiennes. « L’école citoyenne » est un programme qui forme des personnes ressources sur les modules de la gouvernance et de la citoyenneté. L’idée est qu’elles prennent en charge leurs propres problèmes et soient les interlocuteurs du consortium au sein de leur communauté. « Dans ce programme sont abordés divers thèmes : la bonne gouvernance, l’état civil, le foncier, la gouvernance environnementale, les passations de marchés publics, la lutte contre la corruption », explique Me Aboubacar Camara. En effet, les membres du centre se sont rendu compte, en côtoyant les organisations de femmes et les corps de métiers dans la région de Kolda, de leur ignorance de la réglementation. Que la violation des droits, surtout de ceux des couches vulnérables, est une réalité quotidienne.

« Ces situations créent un environnement informel d’injustices, de corruption, de désordre, de mal gouvernance qui constituent un blocage de toutes les initiatives de développement au niveau local », constate le coordonnateur du centre Ibrahima Seydi. Pour pallier ces problèmes, les membres du centre mènent des séances de conscientisation sur le terrain, avec ce concept appelé ‘’le CGP mobile’’. Cet outil leur permet d’offrir des services de proximité juridique, administrative et de gestion gratuite aux citoyens, organisations, autorités et leaders d’opinions pour l’émergence d’une conscience citoyenne. « Pour atteindre ces cibles, nous effectuons des descentes dans les zones les plus reculées de la région afin d’apporter notre service à la population locale », explique Me Camara.

Ce concept est une manière pour les membres du centre de mettre en place une approche inclusive et participative permettant à la zone sélectionnée d’exprimer elle-même ses besoins et/ou de choisir les thèmes à débattre. Ces rencontres sont des outils d’orientation et d’éclairage pour les habitants de la localité.

Le centre a fait des résultats probants

En plus de l’aide juridique gratuite apportée aux populations, le centre assiste financièrement les populations qui n’ont même pas de quoi subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs familles. Ainsi, pour les sortir de la pauvreté, les membres du centre participent à l’élaboration des projets de développement des groupements d’intérêts économiques (GIE) de femmes. A ce jour, 83 projets de développement ont été élaborés dans 5 communes de la région. Ces projets sont répartis comme suit : 18 projets à Salikégné, 22 à Madina Yoro Foula, 26 à Diaobé-Kabendou, 11 à Vélingara et 6 à Kolda commune. A cela s’ajoutent les 62 projets pour les jeunes désœuvrés et sans qualification du département de Kolda.

Ce n’est pas tout. Les membres du centre s’occupent également du problème de l’état civil qui reste une préoccupation majeure dans le système éducatif de Kolda. Pour preuve, en 2016, plus de 1 600 élèves ont été autorisés à passer le CFEE et l’entrée en 6e sans extrait de naissance. Fort de ce constat, les membres du centre ont pu constituer 278 dossiers dans la commune de Salikégné, 600 dans la commune de Diaobé et 128 dans le Médina Yoro Foula. En collaboration avec le tribunal d’Instance de Kolda, le centre a pu régulariser plus de 150 dossiers à Kolda commune.

« Nous ne comptons pas nous arrêter en si bon chemin. Nous effectuons des descentes dans les zones reculées de la région. Une fois sur les lieux, nous organisons de grandes séances de mobilisation sociale. Une manière pour nous de tenir un langage de vérité aux populations qui n’ont pas encore le réflexe d’enregistrer, au moment opportun, la naissance des enfants », nous dit Me Camara. D’après le juriste, ces rencontres leur permettent de sensibiliser les populations sur l’urgence et la nécessité de se rapprocher des centres d’état-civil pour déclarer la naissance de leurs enfants.

Dans le cadre de son assistance juridique, administrative et économique, le centre a obtenu des résultats probants. Il s’agit de ‘’plus de 3 000 personnes dont 1 633 pour les visites au centre ; 697 pour les causeries et 800 pour les ‘’CGP mobile’’ et les écoles citoyennes’’, renseigne le coordonnateur du centre, Ibrahima Seydi.
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