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Serigne Mboup, PCA de la SAR: "Les opérations étant défiscalisées en d’exploration - production, il ne peut y avoir d’évasions fiscales"
Publié le samedi 10 septembre 2016  |  Sud Quotidien
Serigne
© Autre presse par DR
Serigne Mboup, président du Cnbs




Il est incongru de parler d’évasions fiscales au stade actuel dans la découverte de pétrole et de gaz au Sénégal. Ce, pour la bonne et simple raison nous sommes en phase d’exploration-production, soutient le président du conseil d’administration de la Société africaine de raffinage (SAR). Selon Sérigne Mboup «toutes les opérations sont défiscalisées» à cet étape. Dans l’interview accordée à Sud Quotidien, l’ancien président du CNBS est revenu largement sur le contrat qui lie le Sénégal à Petro Tim et les différents changements intervenus dans cet accord qui suscite des interrogations.

L’or noir est considéré comme une fatalité dans certains pays. La découverte du pétrole et du gaz fait déjà grincer les dents au Sénégal avec des accusations et des réactions épidermiques des tenants du pouvoir. Pensez-vous vraiment que le Sénégal puisse faire l’exception à cette règle qui a gangréné certains pays, notamment au niveau des Grands Lacs ?

C’est sûr que l’or noir sera une bénédiction dans notre pays. Pourquoi ? D’abord, parce que nous sommes un pays de confession religieuse très forte et nous croyons que l’or noir qui existe depuis des centaines de millions d’années, comme le démontrent les géologues et qui n’a pas jailli qu’aujourd’hui n’est pas le fruit du hasard. D’abord, par la perspicacité des techniciens ingénieurs de Pétrosen qui, depuis des décennies, avec dévouement, acharnement, loyauté, compétence, ont travaillé pour amener des compagnies qui puissent opérer dans ce sens là. Mais aussi, parce que, le Sénégal est une démocratie consacrée. Il a des outils, des instruments de gouvernance, avec une société civile en ébullition. Donc, tous les ressorts qui permettent de faire à ce que la bonne gouvernance et la gestion transparente des ressources naturelles soient garanties au Sénégal. Le dernier élément, est la volonté politique affichée par tous : c’est le fait que le Sénégal est un membre de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE) et qu’il est même en phase de devenir Etat conforme lors du prochain conseil d’administration.

Pour autant, il y a beaucoup de membres de la société civile qui tirent la sonnette d’alarme. Surtout sur le contrat de Petro Tim et sa cessation à Timis Corporation puis à Cosmos.

Il faut d’abord comprendre comment ça marche. Il faut toujours revenir à la législation du Code pétrolier qui est une loi 98-05 du 8 janvier 1990. C’est une loi qui définit clairement le cadre dans lequel les contrats de recherche pétrolière se font. Cette loi contient deux éléments importants. C’est un modèle du contrat que l’on peut signer sur le contrat partage de production, en l’occurrence pour le Sénégal. Et un autre document très important qui est l’accord d’association ; qui est une sorte de pacte d’actionnaires que les sociétés se partagent. Le contrat de partage de production, ce que l’Etat du Sénégal juge une superficie, la donne à un groupe de sociétés. Ces dernières doivent obligatoirement s’associer à Pétrosen et faire tous les investissements nécessaires pour rechercher des hydrocarbures. Donc, quand ils découvrent des hydrocarbures, le principe est que toute la découverte appartient à l’Etat.

L’Etat a ensuite pour l’obligation de rembourser les investissements et de partager le reste de la production avec les compagnies. Il faut savoir qu’immédiatement, après que ce contrat est signé, il y a ce qu’on appelle l’accord d’association. Tous les associés à qui l’Etat a donné ce contrat, signent. Ce contrat devient une sorte de régulateur, comme dans une société, le pacte d’actionnaires. Ce document décrit clairement les mécanismes de gestion de l’actif, qu’est le projet de recherche au Sénégal, définit clairement les mécanismes d’entrée, de sortie, d’ajout d’un autre actionnaire, ou comment un actionnaire peut vendre ses actions. C’est décrit dans la loi, et c’est très clair. Il faut savoir que le Sénégal est un pays qui n’a pas une tradition de découverte pétrolière.

C’est à dire que si la moyenne mondiale peut être de 8 découvertes sur 10 puits forés, au Sénégal la chance est estimée à une découverte sur 10 puits forés. Cela veut dire que vous forez 10 fois et vous n’avez qu’une chance de découverte. On a une tradition de découverte extrêmement faible. Dans tous les pays du monde, c’est les petites compagnies qui sont audacieuses, qui viennent prendre les permis de recherche et qui font les premières prévisions des données, les traitements géologiques, géophysiques etc. Quand elles ont maintenant espoir, ou des résultats probants, des compagnies encoure plus importantes en terme de capacité financière viennent les rejoindre. Le principe c’est de céder les actions et de continuer dans l’association. C’est ce qui s’est fait entre Pétro Tim et Cosmos.
Donc, c’est le principe de l’exploration où les petites compagnies viennent en premier lieu souvent. Les grands majors n’interviennent que quand le pétrole est là ou bien dans des zones de traditions pétrolières comme l’Angola, le Nigeria pour parler de l’Afrique. Mais dans les pays comme le nôtre où on cherche encore, c’est plutôt des petits orpailleurs qui ouvrent la voie avant que les majors n’interviennent.

Mais, les sorties de l’ancien Premier ministre, Abdoul Mbaye et celles du désormais ex-inspecteur principal des impôts et domaines, Ousmane Sonko ainsi qu’une partie de la société civile qui ont tous accusé le jeune frère du président de la République laissent planer des doutes sur une éventuelle opacité ?

Écoutez, pour l’ancien Premier ministre, je ne pense pas qu’il ait soulevé un problème.

Il a posé beaucoup de questions ?

Il a posé des questions mais, il n’a pas soulevé de problèmes particuliers. Vous savez, c’est plus facile de répondre quand on pose un problème. Pour moi, c’est un peu flou parce qu’il a soulevé des problématiques en soutenant n’avoir pas compris à l’époque tout ce qu’il y avait derrière. On ne peut répondre à ça.

Vous soutenez qu’il n’y aucune nébuleuse ?

Pour moi, il ne peut pas y avoir de nébuleuse parce que le code pétrolier est extrêmement clair. Je vous ai dit tout ce que dit le code pétrolier. Ensuite, il se peut que ce ne soit pas Cosmos qui va développer. Peut-être que ce sont des compagnies plus grandes telles que Chevron, Exon mobile ou Shell, Total qui viendront faire le développement parce que c’est des milliards d’investissements. À mon avis, les gens se sont empressés à parler d’un métier dont ils ne maitrisent pas les techniques.
Car, ce qui s’est passé entre Petro Tim, Timis corporation et Cosmos est une opération banale dans l’exploration pétrolière. Les choses ont toujours passé ainsi et, elles continueront à se passer comme ça.
Mieux, je vous dis que je ne serai pas surpris de voir des sociétés plus grandes venir se rajouter à ce processus. Parce que malgré tout, les compagnies qui ont découvert le pétrole et le gaz sont certes importantes mais ne sont pas des majors pétroliers comme Sinopec Group, Exon Mobile...

Dites à nos lecteurs ce qu’est passé alors ?

Le contrat a été signé en janvier 2012. Et, il faut savoir que ce contrat provient d’un processus extrêmement compliqué de négociations menées par Petrosen pour ce qui est technique, le ministère des Finances qui reçoit les dossiers et qui les valide, le tout sous la supervision de la tutelle, le ministère de l’Énergie. C’est après que ce contrat qui est adossé à la loi est signé par le ministre de l’Énergie, le président de la République, la société Petrosen et le représentant des compagnies étrangères. Et pour ce cas précis, c’est le président Wade, le ministre d’État, Karim Wade, le directeur général de Petrosen et le représentant de Petro Tim à l’époque, qui l’ont signé.

C’est déjà clair. C’est le président Wade qui a signé ce contrat pendant que Macky Sall était candidat pour être le prochain Chef de l’Etat. Je ne pense pas qu’à ce moment-là, quelqu’un ait pu penser que ce contrat est destiné au frère du président, (Aliou Sall, ndlr). Il faut dire les choses telles qu’elles sont. À son arrivée au pouvoir, le président Macky Sall n’a fait qu’approuver ce contrat qui est figé. Toutes les parts, les engagements de travaux, financiers, tout est décrit dans le contrat et on ne peut rien y changer.
Le décret signé par le président Sall ne sert qu’approuver en reprenant les grandes lignes des engagements négociés par le régime Wade avec les sociétés.

Ce décret devait être signé par le président Wade et son Premier ministre mais comme il y’a eu un deuxième tour probablement, ils n’ont pas pu le faire. C’est la raison pour laquelle, le président Sall quand il est venu avec le Premier ministre, Abdoul Mbaye, ont signé le document d’approbation du contrat engagé par le président Wade.
Il faut qu’on explique aux Sénégalais que c’est le président Wade et les autorités qui étaient en place qui ont signé ce contrat. Et, c’est après qu’Aliou Sall est intervenu comme représentant de cette société parce que le gouvernement souhaite que toute société sous contrats dispose d’une adresse au Sénégal.

C’est seulement dans ce cadre qu’il (Aliou Sall, Ndlr) a été recruté par cette société parce qu’il faut noter qu’il venait de démissionner de la fonction publique parce que son frère était candidat et pour des raisons d’éthiques, il ne voulait pas gêner. Il cherchait du travail dans le secteur privé.

Il a été recruté pour être représentant de cette société non seulement au Sénégal mais dans d’autres pays. Et, ça c’est une fonction que n’importe quel intellectuel, cadre supérieur peut assumer parce que c’est une fonction de représentation administrative qui consiste en phase de recherche à être l’interface en terme de courrier entre Petrosen, la société et l’État du Sénégal. On n’a pas besoin d’être expert pétrolier pour l’être.

C’est ça qui a amené le frère du président à être cité dans ce dossier. Toutefois, ça ne lui donne pas le droit d’être actionnaire ou associé de cette société. Que je sache, il ne l’est pas dans Petro Tim, lui-même a fait une déclaration sur l’honneur pour dire qu’il n’est pas membre de cette société. En plus Petro Tim Sénégal n’est rien d’autre qu’une société d’exécution qui n’a pas une assise financière importante dans la mesure où l’apport technique et la capacité financière sont fournis par la maison-mère lors de la signature du contrat.

Quid de la transaction entre Petro Tim–Timis Corporation ?

(Il coupe !) C’est une transaction normale ! Petro Tim a le bloc. Timis corporation qui est un groupe mondial, a créé Petro Tim pour gérer ses actifs au Sénégal. Donc, il possède 90% de Petro Tim Sénégal qui s’est associé avec Petrosen. Sur l’actif que l’État du Sénégal leur a donné, il possédait 90%, Petrosen 10%. Et, à un moment donné, en face des engagements de travaux que Petro Tim avait souscrit, ils sont arrivés à un niveau où ils avaient besoin d’une compagnie plus forte, financièrement, pour porter ces travaux. Ils leur ont cédé 60% des actions contre un engagement de faire le financement des engagements de travaux. Autrement dit, les forages qui ont été faits et qui ont conduit à ces découverts et qu’ils deviennent donc des sociétés portées. Donc, ce n’est pas de l’argent qu’elles ont donné mais c’est une substitution de responsabilités, d’engagement de travaux, obligatoires à faire au Sénégal.

Et, comme Petrosen ne payait rien, Petro tim, aujourd’hui, s’est vu diluer de 90% à 30% mais en ne payant rien. C’est ça la transaction financière dont on parle. Comme Cosmos est une société cotée en bourse aux États-Unis qui étend ses actifs donc, cette transaction et cet engagement de milliards dont vous entendez parler sont clairement établis aux États unis et ce sont des données publiques accessibles à tous.

Pourquoi parle-t-on d’évasions fiscales alors ?

Il n’y a pas d’évasions fiscales. Parce que cette transaction entre les associés (Petrosen, Petro tim, Cosmos) est validée par le gouvernement du Sénégal. C’est l’État du Sénégal qui a accepté le principe qu’un actionnaire vend ses actions à un autre parce que la loi, le code pétrolier dispose que pendant la phase exploration-production, toutes les opérations et transactions sont totalement défiscalisées. Elles bénéficient du régime hors taxe, hors douane.

Donc, il n’y a pas de transactions à payer. Il y a une substitution d’engagements de travaux d’investissements à faire au Sénégal. Ces investissements ont été faits, ce sont les forages qui ont conduit à la découverte de gaz. C’est cet argent que certains ont pensé que c’était de l’argent liquide qui devait être imposé. Or, ce n’est pas de l’argent liquide mais plutôt le montant des investissements qu’il fallait faire et pour lesquels, une garantie bancaire a été déjà déposée.

La deuxième chose est qu’en phase d’exploration, tout est totalement hors taxe. Tous les spécialistes du secteur en particulier les inspecteurs des impôts et domaines le savent parce que c’est de leur ministère que dépend le code pétrolier qui est une loi à laquelle tout le monde peut accéder.

M. le président, d’aucuns s’interrogent sur l’utilité de la Société africaine de raffinerie (Sar). Certains demandent même sa suppression. Qu’en dites-vous ?

(Il coupe). La suppression de la Sar en ce que je sache a été demandée par l’ancien Premier ministre. Nous travaillons ici depuis longtemps. Nous sommes toujours contre la suppression de la Sar qui est un outil de souveraineté. Le président Senghor qui est un grand visionnaire avait voulu la créer, le président Diouf, le président Wade, l’ont tous soutenu. Le président Sall est le premier président né après les indépendances, premier ingénieur qui, plus est pétrolier, a été administrateur de la Sar, directeur de Petrosen, ministre de l’Énergie, Premier ministre. Donc, il connait l’utilité de la Sar. C’est pourquoi d’ailleurs, il s’est opposé de façon catégorique à sa fermeture. Et les faits lui ont donné raison. Car, si on avait fermé la Sar, aujourd’hui, le pétrole devait aller à l’étranger et nous revenir sous forme de produit fini. Qu’est-ce qu’on aurait dit ? En plus, la Sar est une entreprise rentable qui a connu des difficultés, des mutations.
Aujourd’hui, on a fait un bénéfice de net de 15 milliards. On est le deuxième ou le premier chiffre d’affaires de ce pays. Nous avons 259 travailleurs exclusivement sénégalais et aucun expatrier. Nous assumons notre rôle dans l’équilibre énergétique de ce pays. Nous avons pour ambition justement de renouveler et d’augmenter les capacités de la raffinerie mais en plus de la pérenniser. Si nous sommes à ce stade, c’est grâce à la clairvoyance du président de la République. C’est le lieu pour moi, au nom de tous les travailleurs de lui remercier pour cette lucidité et cette capacité à défendre les intérêts stratégiques de ce pays.
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