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Art et Culture

Ousmane Kane présente son "Histoire intellectuelle de l’Islam en Afrique de l’Ouest": Ce que les vieux manuscrits m’ont dit ...
Publié le lundi 29 aout 2016  |  Sud Quotidien
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© aDakar.com par DF
Pr Ousmane Kane présente son dernier livre
Dakar, le 26 août 2016 - Le Professeur Ousmane Kane, enseignant à l`université de Harvard aux États-Unis a présenté son dernier ouvrage: "Beyond Timbuktu". La cérémonie s`est déroulée au Codesria.




Son intérêt pour la «production intellectuelle des arabisants» est une vieille histoire. Il y a 15 ans, il en avait d’ailleurs fait son sujet de recherches, mais à ses «heures perdues». Ousmane Kane, qui enseignait à l’époque à l’Université Gaston Berger (Ugb) de Saint-Louis, est aujourd’hui titulaire de la Chaire Islam et sociétés musulmanes contemporaines à l’université américaine de Harvard. L’ancien professeur des universités de Yale et Columbia vient de publier un ouvrage intitulé «Beyond Timbuktu : An Intellectual History of Muslim West Africa», un texte de 208 pages que l’auteur a présenté ce jeudi 25 août au Codesria. Ousmane Kane a aussi annoncé que la version française du livre, qu’il a lui-même traduit, serait bientôt disponible.

Tout commence à l’époque, il y a une petite dizaine d’années, par ce que l’on appelle dans le jargon un «livre vert», un document conceptuel, qui ouvre un champ de recherche, ou pour faire court, un document de travail. En 2003, c’est au Codesria, le Conseil pour le développement de la recherches en sciences sociales en Afrique, que le Pr Ousmane Kane publiait un texte de près de 80 pages consacré à ceux qu’il appelait alors les «Intellectuels non europhones». Un petit livre qui aiguisera très vite l’appétit de la très prestigieuse université américaine de Harvard, où il n’enseignait pas encore, qui lui demandera d’en faire quelque chose d’un peu plus consistant. Aujourd’hui, le voilà titulaire de la Chaire Islam et sociétés musulmanes contemporaines à Harvard, et c’est cet ouvrage, suite logique de son livre vert, qu’Ousmane Kane présentait dans l’après-midi de ce jeudi 25 août, où le public du Codesria a donc découvert les 208 pages d’un bouquin édité par la Harvard University Press, et publié en anglais sous le titre «Beyond Timbuktu : An Intellectual History of Muslim West Africa» ; ou pour les francophones, «Au-delà de Timbuktu : une histoire intellectuelle de l’islam en Afrique de l’ouest».

La résidence d’al-Azhar

Le livre, explique son auteur, raconte en fait une histoire aussi «longue» que celle de «l’érudition islamique en Afrique subsaharienne», et qui remonterait à quelque chose comme huit siècles. Des «manuscrits en langue arabe, ou en langues africaines transcrites en caractères arabes», il y en a eu des «milliers» ; en plus de tous les récits de ces «nombreux Européens qui ont visité l’Afrique de l’ouest» à l’époque, et qui ont aussi évoqué «cette tradition africaine d’érudition».
Ousmane Kane donne encore l’exemple de cette «résidence» qui accueillait, déjà au 13ème siècle, les étudiants ouest-africains de l’université d’al-Azhar au Caire. Et à côté de cette maison, on trouvait de très nombreux centres d’érudition islamique, celui de Tombouctou en l’occurrence.

Au-delà de Tombouctou…

Mais des espaces comme celui-là, il y en avait ailleurs, dans d’autres régions d’Afrique de l’ouest : Pire Sagnokhor au Sénégal, Kano au Nigeria… Et c’est justement pour cette raison que le titre de l’ouvrage lui-même propose d’aller voir bien «au-delà» de Tombouctou, tristement célèbre pour avoir récemment vu la destruction de plusieurs de ses précieux manuscrits.
Si tout le monde ou presque connaît Tombouctou dit l’auteur, on connaît un peu moins «la longue tradition de cette érudition», une histoire malheureusement «occultée par la colonisation occidentale et par les modèles épistémologiques qui se sont imposés au 20ème siècle». Avec le 21ème siècle naîtront «plusieurs dizaines d’universités en Afrique subsaharienne», et c’est cette histoire qu’Ousmane Kane dit avoir voulu raconter, entre autres pour corriger cette «perception» qui ferait de «l’Afrique noire un lieu d’oralité».
Quand on prend la peine d’analyser le contenu de cette «bibliothèque islamique», on trouve des «textes à caractère historique», comme on trouve des ouvrages pédagogiques, des récits de voyage, des «écrits laudatifs» ou poétiques, des textes polémiques, sur les rivalités entre confréries par exemple, des écrits politiques etc.

L’équation Boko Haram

Pour le Pr Boubacar Barry du département d’Histoire de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad), qui a laissé entendre que la mission n’était pas «terminée», justement parce que plusieurs autres manuscrits «périssables» dormiraient quelque part, le livre d’Ousmane Kane a le mérite de montrer que «l’Afrique de l’ouest n’est pas à la périphérie du monde musulman». Et en plus d’aborder des questions comme l’esclavage, «la justification ou non du djihad», l’auteur revient sur la crise au Mali et sur la façon dont Boko Haram «se développe» au Nigeria. Sans vouloir jouer les spécialistes, Ousmane Kane expliquera que Boko Haram devenait de plus en plus difficile à cerner, surtout dans cette façon que le groupe a de recruter, que ce soit «des combattants chrétiens (ou) des soldats de l’armée nigériane».

«Fondé à l’origine par des diplômés de l’université de Médine», le mouvement évoluera «pour devenir ce qu’il est», un groupe «hybride» tellement «hétérogène», que l’on a du mal à savoir si c’est…un «groupe religieux».

Au Senegal
Khalima Diakhaté Kala, Cheikh Ahmadou Bamba, Seydi El Hadj Malick Sy. Tout le monde connaît Cheikh Ahmadou Bamba et Seydi El Hadj Malick Sy, mais très peu de Sénégalais, surtout ceux formés à l’école occidentale, savent qu’ils sont eux-mêmes descendants d’une longue lignée d’érudition. C’est dire que cette tradition d’érudition est ancienne et reste méconnue.
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