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Le Soleil N° 13131 du 3/3/2014

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Le sort malheureux des fistuleuses de Matam
Publié le lundi 3 mars 2014   |  Le Soleil


Eva
© Autre presse par DR
Eva Marie Coll Seck, ministre de la Santé et de l’Action sociale


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FistuleUne campagne de réparation de fistules obstétricales a permis à une équipe de médecins venus de Dakar de rendre la dignité à 11 femmes de la région de Matam. Après guérison, elles ne vivront plus isolées de leurs familles.

Le Centre hospitalier régional de Ourossogui, au Nord du Sénégal, grouille de monde le 27 novembre 2013. Les patients, en particulier les femmes, originaires de plusieurs localités, notamment les plus reculées de la région de Matam, ont pris d’assaut leur principale structure de santé. Parmi ces femmes, des porteuses de la fistule obstétricale. Cette dernière survient quand, au moment de l’accouchement, « la pression continue de la tête de l’enfant sur les tissus mous de la vessie ou du rectum aboutit à la formation d’un trou : la fistule ». Cela fait que la mère n’est plus capable de contrôler l’écoulement de l’urine et/ou l’excrétion des matières fécales.

Isolées ou exclues de la famille et de la société, des fistuleuses de la région de Matam ont bénéficié d’une intervention chirurgicale de spécialistes en urologie de l’Hôpital général de Grand-Yoff aidés par des médecins régionaux. Couchée sur un petit lit, le regard fixé sur le mur, Aminata Kamara vient de subir une opération de réparation de la fistule. Cette dame âgée de 30 ans a contracté la fistule lors d’un accouchement compliqué et pénible. Accueillant à bras ouvert une équipe de journalistes, elle confie : « Je suis victime de fistule à la suite de mon dernier accouchement. Quelques jours après, j’ai senti des urines qui sortaient de manière permanente. Malgré les efforts, je n’arrivais plus à les retenir et à me maîtriser. J’essayais de cacher ma maladie à mon mari et à mes parents. Malheureusement, je n’y arrivais pas, puisque les urines sortaient sans arrêt. J’étais obligée de quitter le domicile conjugal pour rentrer chez ma mère. C’est elle qui m’a orientée vers l’hôpital, parce qu’elle a entendu qu’une femme qui avait cette maladie était guérie après une opération ». Poursuivant, Aminata Kamara déclare : « mon mari et mes beaux parents ne savent pas que je suis venue à l’hôpital pour faire cette opération. C’est dur de cacher cette maladie aux membres de sa famille ».

Abandonnées par leurs maris
En face d’elle, Bineta Samb (nom d’emprunt). Agée de 40 ans, elle vient de subir sa quatrième opération de réparation d’une fistule obstétricale. Allongée, elle implore le bon Dieu pour que cette énième opération soit la bonne. La dame a révélé qu’elle a été elle aussi victime de cette maladie après son accouchement. A cette époque, elle était âgée seulement de 16 ans. « Depuis 24 ans, je vois les urines couler sans cesse. Pis, elle dégage une mauvaise odeur. Je suis alors obligée de vivre isolée des membres de ma famille », soutient-elle. Abandonnée par son époux, cette mère qui a fait 7 couches, dont seulement 2 enfants en vie, a vu ses droits bafoués. « Depuis que mon mari a été mis au courant de ma maladie, il a interdit à mes enfants de venir me rendre visite. C’est dur pour moi ! » confesse-t-elle.

Dans la région de Matam, les femmes victimes de la fistule vivent isolées. Elles se cachent. Elles ont peur du regard des autres. Il faut les convaincre pour qu’elles se rendent dans une structure de santé afin de se faire examiner, explique Ibrahima Aly Sow, coordonnateur régional de l’Alliance des femmes pour la santé, l’éducation et les stratégies de prévention. Cette Ong a pour mission de faire comprendre aux femmes que la fistule est curable. C’est dans ce cadre que Alimatou Bâ (nom d’emprunt) a été convaincue. Victime de fistule après un accouchement compliqué, cette dernière a été délaissée, quelques jours après, par son mari. « Il m’a même traitée de sorcière », dit-elle, les larmes aux yeux. « Heureusement, indique-t-elle, mes parents ne m’ont pas abandonnée. Je bénéficie du soutien financier et moral de mes frères ».

L’intervention chirurgicale qu’elle vient de subir fait renaître en elle un espoir. Celui de se remarier et d’avoir des enfants. « J’espère que cela va marcher, car mon rêve est de me remarier et d’avoir des enfants », souhaite-t-elle. Alimatou Bâ est néanmoins consciente que sa maladie est survenue, faute d’un bon suivi prénatal.

Mariée à l’âge de 17 ans, Mariama Kâ (nom d’emprunt) est rattrapée par la fistule deux ans seulement après son union. En plus de perdre son premier bébé, elle vit isolée, même si son mari ne l’a pas abandonné et pour que sa belle-famille ne découvre pas sa maladie, elle a été obligée de quitter son foyer pour aller vivre avec sa maman. « D’ailleurs, c’est ma mère qui m’a orientée vers cette structure de santé lorsqu’elle a été informée que la fistule est curable. J’espère que je vais m’en sortir », prie-t-elle.

Dans la région de Matam, où l’on note un manque criant d’infrastructures de santé, les femmes sont souvent victimes de ce genre de pathologie, à cause de l’absence d’un bon suivi prénatal, mais aussi des accouchements à domicile non assistés par un personnel qualifié. Le médecin-chef de région, Dr Yankhoba Dial, conscient de cela, a invité les autorités à construire plus de structures de santé et à affecter plus de praticiens.

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