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Réactions à la condamnation à perpétuité de l’ex-Président tchadien : Satisfaction des parties civiles et des observateurs
Publié le mercredi 1 juin 2016  |  Le Quotidien
Ouverture
© aDakar.com par DF
Ouverture du procès de Hissène Habré
Dakar, le 20 Juillet 2015 - Le procès de l`ancien président tchadien Hissène Habré s`est ouvert, ce matin, à Dakar. L`ancien chef d`État réfugié au Sénégal depuis 1990 est jugé pour "crimes contre l’humanité, crimes de guerre et crimes de torture". Photo: Aboubacry Mbodj, secrétaire général de la Raddho




Des victimes de Hissène Habré à leurs avocats en passant par les défenseurs des droits humains et autres observateurs avertis du dossier judiciaire de l’ex-Président tchadien, ils ont été nombreux à réagir, à l’issue du prononcé du verdict des Chambres africaines extraordinaires d’assises. Chacun y va de ses commentaires et autres suggestions pour l’avenir judiciaire des dirigeants africains -chefs d’Etat et de gouvernement- «qui, par leurs actes de tous les jours, commettent des crimes».

Aboubacry Mbodji, Sg de la Raddho : «Que l’Afrique ait sa propre justice pénale pérenne qui permettrait aux Afri­cains de juger les Africains»
«Pour la première fois dans l’histoire du continent africain, un chef d’Etat africain est jugé dans un pays africain. L’habitude que nous avions, c’est de voir nos chefs d’Etat extradés vers la Coup pénale internationale. Mais l’Afrique est en train de gagner en maturité après avoir créé les Chambres africaines extraordinaires. Certes, c’est un pas qui n’est pas encore suffisant parce que nous voulons que les Cae se transforment aujourd’hui en justice pénale africaine pérenne. Parce qu’après ce procès, les Chambres disparaissent. Mais nous, nous voulons que l’Afrique ait sa propre justice pénale pérenne qui permettrait aux Africains de juger les Africains sur le sol africain. Nous voulons que les victimes soient réhabilitées, indemnisées et compensées par rapport au préjudice subi. Si nous avons une justice pénale internationale africaine pérenne, il sera très rare de voir un chef d’Etat africain extradé vers la Cpi. Parce que la Cour pénale internationale n’intervient que là où les juridictions nationales ou continentales ne peuvent pas faire le travail dans les situations de crise. Mais si nous avons des juridictions qui fonctionnent normalement comme au Sénégal, on n’a pas besoin de la Cpi. Que tous les chefs d’Etat, les commanditaires des crimes contre l’humanité, crimes de génocide, des crimes de masse sachent qu’ils peuvent être jugés par la justice pénale africaine.»

Abdourahmane Guèye, victime sénégalaise de Habré : «Je regrette de n’avoir pas à mes côté mon compatriote Demba Gaye»
«Avec tous les combats qu’on a menés depuis des années, la seule chose que je regrette c’est de n’avoir pas à mes côté mon compatriote Demba Gaye qui est décédé dans les geôles de Habré. Je suis satisfait du verdict. Je rends un hommage à mon Peuple, à mon Président Macky Sall qui a accepté que Habré soit jugé à Dakar. Ce n’était pas facile. Je voulais la justice, elle m’a été rendue. Gloire à Dieu !»

Todd F. Buchwald, coordonnateur spécial pour la Justice pénale internationale : «Nous travaillons avec nos partenaires pour le futur»
«Nous avons été les témoins de quelque chose de très émotionnel qui s’est passé à l’intérieur. Les Etats se félicitent du verdict contre les crimes contre l’humanité, l’homicide, l’esclavage forcé, les exécutions sommaires, la torture, le viol. Les Etats-Unis sont prêts à recevoir des requêtes, d’évaluer ces requêtes et, si des appels sont nécessaires pour ce procès, nous travaillons avec nos partenaires en incluant le Tchad, l’Union africaine pour évaluer quel genre d’assistance serait possible pour le futur.»

Reed Brody, porte-parole de Human right watch : «Le signal qu’aucun Prési­dent n’est au-dessus de la loi»
«Immense victoire pour les survivants, les victimes de Hissein Habré qui n’ont jamais perdu espoir de trouver justice un jour. Ce jour sera gravé dans l’histoire comme le jour où un groupe de survivants déterminés ont réussi à traduire en justice leur dictateur. Le fait que Habré ait été condamné non seulement pour crimes contre l’humanité, torture mais aussi pour viol, pour avoir personnellement perpétré le viol d’une femme, cela est le signal qu’aucun Président, aussi puissant qu’il soit, n’est au-dessus de la loi. Et aucune femme, aucune fille n’est en dessous de la loi. Après, il y aura des audiences sur la réparation. Les victimes, en plus de cette con­dam­nation, vont demander à être indemnisées pour ces viols, ces disparitions, ces exécutions. C’est donc le combat pour la réparation qui continue. Demain commence la bataille pour la réparation.»

Me Assane Dioma Ndiaye, avocat des victimes : «Qu’on ne nous parle plus de procès téléguidé par la France, les Etats-Unis»
«C’est la fin d’une longue période de déni de justice pour ces victimes. Nous saluons leur obstination, leur abnégation qui ont fini par payer. Le déni de justice est la pire des choses. Etre victime d’un fait et être dénué du droit d’ester en justice et aujourd’hui, ces victimes peuvent crier victoire et non pas vengeance. Elles peuvent faire leur deuil, dormir tranquillement, se re­cueil­lir demain devant la tombe de leur parents car elles savent le coupable, le bourreau de ce qui leur est arrivé. Mais au-delà de ces victimes, c’est l’Afrique qui marche lentement mais sûrement et obstinément vers le combat de l’éradication de l’impunité. C’est un exemple très fort lancé à tous les tenants du pouvoir en Afrique et à tous ceux qui aspirent à un pouvoir. Aujour­d’hui, on ne peut plus commettre de violations massives de droits humains en toute impunité et dormir tranquillement.

Tout le monde doit se convaincre de la motivation adoptée par ces juges. Chaque fois qu’ils n’ont pas eu la certitude d’une culpabilité, ils ont relaxé pour un chef ; mais chaque fois qu’ils ont été convaincus par un chef d’inculpation, ils ont condamné. Et aujourd’hui ceux qui disaient que ce procès a été jugé d’avance doivent se terrer. Que ce soient le Burundi, la Gambie, la Centra­frique, soyez rassurés que tous les crimes qui sont commis et qui seront commis ne resteront pas impunis. (…) Nous avons fait déplacer des témoins, nous avons fait des expertises graphologiques, archéologiques pour dire la vérité. Qu’on ne nous parle plus de procès téléguidé par la France, les Etats-Unis. Nous sommes soulagés et heureux d’être Africains.»

Me Jacqueline Moudeina, avocate des victimes : «Que du bonheur !»
«Nous avons attendu plus d’une vingtaine d’années. L’Afri­que vient de juger l’Afrique. C’est le jour de la victoire pour les victimes qui étaient en quête de justice depuis plus d’une vingtaine d’années. Nous venons de gagner. Nous avons gagné sur toute la ligne. Tout a été pris en compte. C’est la joie pour les victimes. Aujourd’hui, nous pouvons dire : «Enfin, des efforts de 20 années ont produit un résultat, un résultat positif.» Nous n’avons pas trimé pour rien. Nous avons fait l’objet de mépris, de railleries et aujourd’hui, nous avons gagné. Que du bonheur !»

Clément Abaifouta, pdt Association des victimes de la répression du régime de Habré : «L’histoire nous a donné raison»
«La folie de la joie. Après 26 ans d’humiliation, de sacrifice, l’histoire nous a donné raison. On n’invente pas l’histoire, on ne fabrique pas de victimes, ni de preuves. Hissein Habré a fait du mal à son Peuple et l’histoire nous a donné raison. Je suis fou de joie. Hissein Habré ne s’imaginait pas qu’un jour, il serait devant un Tribunal. Nous nous sommes battus et nous sommes arrivés à la victoire, houra pour nous.»

Alioune Tine, directeur Bureau Afrique de l’Ouest et du Centre d’Amnesty international : «Un message aux chefs d’Etat et de gouvernement qui commettent des crimes»
«Nous sommes extrêmement satisfaits. Car avec ce verdict, nous pouvons dire qu’en Afrique que nous avons la capacité de juger les auteurs de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et de torture. A partir d’aujourd’hui, on lance des messages aux chefs d’Etat et de gouvernement qui, par leurs actes de tous les jours, commettent des crimes : «Demain aussi, vous pouvez être jugés.» Nous avons aussi une alternative à la Cpi, c’est la construction d’une souveraineté judiciaire qui nous permet de faire face à ces situations. C’est une façon de dire, nous pouvons libérer désormais nos juridictions, les rendre beaucoup plus indépendantes.»
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