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Art et Culture

Célébration - Journée mondiale du théâtre à Sorano : Mbagnick Ndiaye annonce 17 millions pour relancer le 4e art
Publié le mercredi 30 mars 2016  |  Le Quotidien
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© aDakar.com par DF
La Chine célèbre la proclamation de la République Populaire
L`Ambassade de la République Populaire de Chine au Sénégal a célébré l`accession à l`indépendance de la Chine, le 1er Octobre 1949. Photo: Mbagnick Ndiaye, ministre de la culture




Le lancement officiel de la Journée mondiale du théâtre a eu lieu ce dimanche à Sorano. Pour redynamiser ce secteur et davantage intéresser les jeunes aux arts scéniques, le ministre de la Culture et de la communication, Mbagnick Ndiaye, a promis une somme globale de 17 millions de francs Cfa. 4 millions iront à l’Association des artistes et comédiens du théâtre sénégalais (Arcots), 10 millions serviront à instituer une coupe de théâtre et les 3 millions restants à développer le 4e art dans les écoles élémentaires au niveau des régions de Kédougou et de Kaolack.

Les comédiens sénégalais considèrent que le théâtre est négligé sous nos cieux par les autorités. Le ministre de la Culture et de la communication compte bien changer la donne. Il se fait un point d’honneur à redynamiser et à relancer cet art partout au Sénégal. Aussi, a-t-il annoncé dans son discours à l’occasion de la Journée mondiale du théâtre une subvention de fonctionnement de 4 millions de F Cfa à l’Association des artistes et comédiens du théâtre sénégalais (Arcots). «Avec cette argent, vous devez chercher un siège social et un personnel permanent pour qu’on puisse vous y trouver. Cet espace sera également pour vous un lieu de rencontre entre artistes», a déclaré le ministre Mbagnick Ndiaye. Il a également émis l’idée de relancer le théâtre dans les écoles primaires. «Lorsque j’étais à l’école primaire, vers les après-midi, on organisait des concours», a-t-il rappelé, annonçant que son ministère a décidé de subventionner la relance du théâtre à partir de deux régions : «La région de Kédougou où nous allons mettre 1,5million de F Cfa, et la région de Kaolack où le même montant sera mis.»
M. Ndiaye a par ailleurs indiqué que le chef de l’Etat a mis en place une «coupe destinée au théâtre» d’une valeur de 10 millions de francs Cfa. «Il appartiendra à la direction des Arts et au Bureau national des arts de voir les modalités pratiques de mise en place de cette décision», a-t-il indiqué. Ces mesures surviennent peu de temps après que la Sodav ait été mise en place et que les acteurs culturels bénéficient à présent d’une Mutuelle de santé pour leur couverture maladie. Ces mesures, a noté l’autorité, contribueront à améliorer petit à petit la condition des comédiens. Aussi pour Mbagnick Ndiaye, cette Journée mondiale du théâtre est-elle partie pour être le déclic du théâtre dans l’espace sénégalais. Un avis qui ne semble pas rassurer tous les comédiens. Ceux-ci ont en effet une kyrielle de complaintes.

Les complaintes des acteurs
Le comédien Pape Faye, président de l’Arcots Dakar, estime que les 4 millions octroyés par le ministère sont insignifiants et qu’il «faut aller au-delà». «Au niveau des Arcots, on n’était pas moins de 1 000 membres. Maintenant, nous en sommes à 3 000. Le théâtre prend de l’espace et de la grandeur et on a besoin de moyens... Notre théâtre va mal. Il souffre de manque de subventions ; ce qui fait que parfois on a du mal à créer, car une création a besoin de moyens. Ça demande de l’argent (...)», a expliqué Pape Faye. Il poursuit : «Le ministre dit que nous allons être subventionnés à hauteur de 4 millions de F Cfa. C’est bien. Je dis merci M. le ministre, mais 4 millions pour une association qui fait 3 000 membres, ce n’est rien.» A l’en croire, «l’Association des artistes et comédiens du théâtre sénégalais existe dans toutes les régions du Sénégal et 4 millions de F Cfa à partager entre nous à travers le Sénégal, c’est insignifiant. Chaque association régionale n’aura que 200 mille F Cfa». Pour lui, cela pose problème.
«Cette somme ne servira qu’aux frais de fonctionnement du bureau. Le ministre peut aller au-delà. Là où la culture urbaine bénéficie de 300 millions de F Cfa et le cinéma d’1 milliard F Cfa, le théâtre n’a que 4 millions F Cfa. Est-ce que vous pensez que 4 millions peuvent faire quelque chose ? Jugez-en vous-mêmes», interpelle le comédien qui insiste qu’«il va falloir faire des efforts en ce sens pour augmenter la mise». Parce que, poursuit-il, «sur certaines questions liées à l’organisation de festivals de théâtre dans les différentes régions, les questions de couverture sociale, on pourrait faire des sauts énormes avec une subvention beaucoup plus importante».

Prix et mentions
Cette Journée mondiale du théâtre fut aussi l’occasion pour la presse culturelle (Apcs) de rendre hommage aux comédiens qui se sont particulièrement distingués dans le milieu du 4e art, autant pour leur parcours que pour leurs actions. Le comédien Lamine Ndiaye a ainsi reçu le prix de reconnaissance de l’Apcs tandis que Ibrahima Mbaye Sorano, Ibrahima Mbaye Sopé et le doyen Mamadou Diop ont eu des mentions spéciales pour leurs contributions à l’émergence du secteur. Tous sont d’avis à l’instar de Pape Faye que «le théâtre souffre» et qu’il est important de lui redonner du dynamisme.

REACTIONS… REACTIONS… REACTIONS…

Pape Faye, président Arcots : «Nous avons la rage de voir se réhabiliter un vrai théâtre»
«La Journée mondiale du théâtre est perçue comme une plateforme de revendication et de discussion. Le métier, quoique difficile, connaît une crise interne. Le théâtre n’est pas en décadence, ni en léthargie. Il a été laissé pour son propre compte. Notre cri du cœur n’est guidé que par le souci de bien faire, la rage de voir se réhabiliter un vrai théâtre coupé de ses racines. Depuis plus de 10 ans, nous assistons à la naissance d’une multitude de troupes de théâtre qui émergent, mais se débattent comme elles peuvent dans un contexte économique très difficile.»

Lamine Ndiaye, comédien et lauréat du prix de l’Apcs : «Notre métier est mal considéré et cela me révolte»
«La Journée mondiale du théâtre n’est pas une journée spéciale pour moi parce que chaque jour que Dieu fait, je vis le théâtre, je suis le théâtre et je fais du théâtre. J’ai passé de nombreuses Journées mondiales de théâtre. Mais j’ai l’impression qu’on redit les mêmes choses. Certains discours sont corsés, mais la réalité voudrait que la famille artistique se penche sur sa vie et sur beaucoup de choses qui la concernent. C’est plus important que de fêter une journée tout simplement. Fêter pour fêter, ce n’est plus mon dada. En faisant la lecture du théâtre sénégalais actuel, je constate que nous sommes au rabais. Les discours vont bon train, mais en réalité notre métier est mal considéré. Est-ce que les autorités pensent que le théâtre est un métier ? Aujourd’hui, on organise une journée, mais les autres journées ne s’animent pas comme le voudrait le théâtre. Cela me révolte. On se focalise sur une journée alors que les gens, eux-mêmes, vivent le théâtre chaque jour sans le savoir. Le théâtre vit en nous-mêmes, dans chaque maison, dans chaque place. Alors passer une journée à déblatérer sur des choses : on aurait fait ceci, on aurait fait cela, il faut maintenant le faire. Cela fait des années qu’on parle des mêmes choses. Et depuis, il n’y a rien, on ne voit rien. Je salue cependant la presse qui, elle, nous reconnaît au moins avec notre mérite. Il y a au moins là une idée novatrice que la presse culturelle de ce pays a mise dans cette journée. C‘est ce qui fait aujourd’hui plaisir.»

Ibrahima Mbaye Sopé, comédien : «Je me réjouis de la mention spéciale que la presse culturelle m’a décernée»
«La Journée mondiale du théâtre est un évènement heureux pour nous comédiens. C‘est l’occasion pour nous de nous congratuler, d’être ensemble, de parler, d’avoir des perspectives sur le plan national, voire international. Cela ne nous empêche pas aussi de jauger le niveau du théâtre sénégalais, de faire un diagnostic. Pour nous, le théâtre souffre toujours de défaut de production, de diffusion, de financement et de formation. Cette année, l’École nationale des arts a recouvert sa section art dramatique. C‘est déjà une avancée pour nous. Le ministre vient également de dire qu’il y a des subventions qui seront allouées de part et d’autre. Cela nous réjouit, mais l’essentiel pour nous, c’est que cette politique culturelle puisse continuer et surtout régler le problème du statut de l’artiste, de diffusion, mais également des problèmes de production au niveau des festivals à l’extérieur. Parce que le Sénégal manque depuis un certain moment à de grands rendez-vous et pour nous ce n’est pas normal. Je me réjouis par ailleurs de la mention spéciale que la presse culturelle m’a décernée. La presse est une entité libre, elle est au diapason de tout ce qui se passe. Alors, j’imagine tout naturellement que le choix porté sur nous a été fait délibérément. Les comédiens et la presse, c’est un compagnonnage de très longue date. Je souhaite que la collaboration continue et avec la presse culturelle et avec la direction des Arts.»

Ibrahima Mbaye Sorano, comédien : «Il faut propulser notre théâtre pour construire une industrie théâtrale...»
«(...) On célèbre le théâtre comme on l’a toujours fait. Je ne cesse de lancer un appel : le théâtre que nous exerçons, nous devons le propulser. Il faut qu’on construise aujourd’hui une industrie théâtrale. Mais cela passe d’abord par une révision de certains critères, notamment le statut de l’artiste. J’espère qu’avec la nouvelle société (Ndlr, Sodav), on prendra acte de tout cela. Il émerge des talents de part et d’autre, mais il nous faut canaliser et maîtriser cette énergie de manière saine. C’est parce qu’il y avait de la pratique, de l’ambition, que la troupe Daraay Kocc a pu exister parallèlement à la troupe de Sorano. Cheikh Tidiane Diop était un éminent créateur (...) Aujourd’hui, nous devons retourner à cette base. Repenser le théâtre, s’il faille même organiser des assises du théâtre pour camper certaines choses. Il faut qu’on le fasse. Le directeur de l’Ena qui s’est battu aux cotés de Mamadou Diop pour la réouverture de la section art dramatique au niveau de l’école, je le félicite et appelle les jeunes qui veulent faire du théâtre à rejoindre l’Ena où d’autres troupes privées qui ont de l’expérience et qui ont à leur tête des gens expérimentés peuvent leur enseigner le théâtre. Parce que pour moi, le théâtre c’est ou la formation ou la pratique.»
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