Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Femmes    Pratiques    Le Mali    Publicité
aDakar.com NEWS
Comment

Accueil
News
Société
Article
Société

Avis d’inexpert: L’éthique du journaliste face au danger de mort
Publié le mardi 29 mars 2016  |  Enquête Plus
L`adoption
© aDakar.com par MC
L`adoption du code de la presse continue de faire débat au Sénégal
Photo: Revue de presse; Journaux




Le secret professionnel obtenu par un journaliste dans le cadre d’un reportage, collecte de l’information, est-il opposable à la sécurité collective ou d’un individu ? Autrement dit, le journaliste qui découvre un danger de mort doit-il avertir les services de sécurité ou alerter les populations au risque de contrevenir à un article de la Charte des devoirs des journalistes qui dispose que ‘’le journaliste digne de ce nom garde le secret professionnel’’.

L’information sur un danger de mort encouru par des communautés et détenu par le seul journaliste doit-elle être tue par ce dernier arguant des raisons liées à l’éthique et à la déontologie de sa profession ? Ces questions et tant d’autres du même ordre doivent être posées et discutées par ces temps où le danger du terrorisme djihadiste rôde partout (et sa prochaine cible présumée serait le Sénégal). Le chef de la police judiciaire belge, Claude Fontaine, s’est plaint sur Radio France Internationale du fait que le Nouvel Observateur et la chaîne de télévision Bfm Tv, ont publié sur le djihadiste de Molenbeck des informations qui auraient obligé les services antiterroristes à avancer leur assaut avec le risque que Salah Abdeslam se fasse exploser avec un ceinture d’explosifs ou qu’il prenne des otages ou tire dans le tas tuant plusieurs personnes.

Le journal devait-il diffuser ces informations vitales ? La réponse a été donnée sur le site du journal par Matthieu Croissandeau qui soutient que ‘’prétendre aujourd’hui que la divulgation de cette information aurait permis à Salah Abdeslam de comprendre que l’étau se resserrait est une vue de l’esprit. Notre article n’a rien appris au terroriste qu’il ne savait déjà : ni que la police le recherchait, ni qu’il avait pu laisser des traces de son passage dans l’appartement de Forest, ni même que l’enquête avançait, compte tenu de la fusillade qui a éclaté lors de la perquisition à Forest. Prétendre par ailleurs que nous aurions mis en danger les personnes présentes au moment de son arrestation est tout aussi infondé puisque nous n’avons pas écrit qu’une opération était en cours pour l’interpeller’’.

Nous avons, à notre tour, posé la question à un éminent journaliste professionnel, Mame Less Camara, formateur en journalisme, qui se demande ‘’au nom de quelles éthique ou déontologie le journaliste laisserait-il des djihadistes tuer des innocents ?’’ ‘’Une information peut être tue si sa rétractation peut entraîner la perte de vies humaines’’, ajoute Mame Less Camara qui plaide pour ‘’une application humaine et intelligente des principes d’éthiques et de déontologie’’.

Des journalistes ont eu à recevoir de fort bizarres offres ‘’d’échanges d’informations’’ de policiers qui souhaitaient obtenir des renseignements sur un gang contre l’offre de scoop à ces journalistes ! Mais, le journaliste ne saurait être un auxiliaire de police. Et ce sont des cas de ce genre comparés à celui d’une menace terroriste réelle qui font que la déontologie et l’éthique peuvent être modulables selon les situations.

Faut-il être patriote ou journaliste à tout crin ? Lors de l’intervention sénégalaise en Guinée Bissau en 1997-98, une radio dakaroise annonça qu’ ‘’un bateau rempli de munitions avait quitté Dakar à destination de Bissau’’. Certes c’était une information croustillante, mais si les mutins du général Ansoumane Mané avaient envoyé le bateau par le fond ? Les conséquences, le deuil, auraient-ils épargné cet organe de presse puisque son journaliste et sa radio auraient eu sur la conscience la mort de plusieurs compatriotes ? Dans les années 1990, confronté au contenu des articles de presse nationale sur la guerre en Casamance, le gouvernement organisa, les 13 et 14 mai 1995, un séminaire sur l’information sensible.

Une rencontre initiée par la Direction de l’information et des relations publiques de l’Armée (Dirpa). ‘’Ce séminaire, rappelle le chercheur et universitaire Momar Coumba Diop dans son livre Le Sénégal à l'heure de l'information : technologies et société (éditions Karthala), placé sous l’égide de l’Etat-major particulier du président de la République, avait regroupé en plus des hauts fonctionnaires de la défense nationale des représentants des corps constitués, des membres du gouvernement, du Syndicat des professionnels de l’information et de la communication du Sénégal (Synpics) et de la plupart des organes de presse’’.

Le séminaire travailla à partir d’une communication préliminaire présentée par le Pr Djibril Samb.

‘’Au terme de la rencontre, souligne M. Diop, un comité de suivi fut érigé pour élaborer un rapport de synthèse. Mais, avant l’adoption du texte, ledit comité mit un terme à sa participation pour ne pas outrepasser son mandat. Les journalistes étaient hostiles à une législation et réglementation en matière de traitement de l’information vers lesquelles s’acheminait le Comité de suivi’’.

Plus de vingt ans après ces assises se pose encore (et toujours) la question du traitement de l’information sensible dans et par la presse.

Commentaires