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Forte médiatisation de la campagne: Un appât de gain, une communication déséquilibrée
Publié le vendredi 18 mars 2016  |  Sud Quotidien
L`adoption
© aDakar.com par MC
L`adoption du code de la presse continue de faire débat au Sénégal
Photo: Revue de presse; Journaux




Depuis l’entame de la campagne pour le référendum le 12 mars dernier, les partisans du Oui et leur adversaire du Non se livrent à une véritable bataille médiatique. Cependant, ceux favorables à l’adoption de la réforme constitutionnelle sont beaucoup plus présents dans les médias. Plus outillés financièrement, ils font usage de tous les moyens de communication pour le triomphe du Oui au soir du 20 mars. Alors que ce recours aux supports médiatiques génère des profits aux différents groupes de presse, des professionnels des médias interrogés sur cette présence médiatique en déduisent une violation de la loi.

L’ouverture de la campagne référendaire est marquée par une ruée vers les médias. Télévisions, radios et sites internet sont très prisés par les deux camps. Et, dans cette bataille médiatique, les partisans du Oui s’illustrent le plus. Le citoyen assis devant son poste téléviseur est très vite attiré par un spot qui vante les mérites du projet de la réforme constitutionnelle. Si ce n’est le cas, c’est une explication des quinze points qui est passée en boucle sur le petit écran.

Les partisans du non s’efforcent également à véhiculer leurs messages. Invités sur les plateaux de télévision ou sur les ondes radiophoniques, ils décortiquent les points de la réforme pour en ressortir une nébuleuse. Les télévisions, qu’elles soient privées ou publiques, sont en plein dans ce référendum. Un engagement qui n’est pas sans conséquence car, il faut constater que les publireportages sont payés à chaque diffusion. En plus du support audiovisuel, les radios aussi tirent profit de cette campagne référendaire. L’explication des quinze points du référendum est diffusée avant les grandes éditions d’information sur les chaines radiophoniques.

Mieux, les émissions avec un auditoire important sont précédées par la diffusion de spots sur le référendum. Ce sont les partisans du Oui, le camp présidentiel, qui s’y illustrent le plus. En dehors de la télévision et la radio, les sites d’information ont aussi leur part du butin. Nombreux sont les responsables politiques, directeurs de société ou simple souteneurs de la réforme présidentielle qui achètent une bande publicitaire pour réaffirmer leur engagement et leur fidélité au président de la République, Macky Sall, initiateur du référendum.

D’autre part, la campagne médiatique s’illustre par un appel à voter Oui de responsables politiques, mouvements ou coalitions qui, sans doute, devraient déboursé une forte somme d’argent pour s’accaparer de la page d’accueil de sites internet. En dehors de cette publicité, des responsables politiques ont profité de la campagne pour se faire inviter sur les plateaux télévisés. Les émissions politiques les plus suivies font l’objet de convoitise. Cette communication très outrance et qui est le plus souvent à sens unique, n’est nullement conforme à la loi selon des spécialistes des médias interrogés.

IBRAHIMA BAKHOUM, JOURNALISTE-FORMATEUR : «Le jeu démocratique est enterré»

Pour le journaliste-formateur, Ibrahima Bakhoum, la communication faite sur le référendum est peu conforme à la norme. «Pendant la campagne, les médias doivent veiller à l’équilibre. En termes de propagande, les parties doivent avoir un égal accès aux moyens de communication de base. Il faut un traitement équilibré dans une démocratie. Par contre, ce que nous constatons est un déficit criard d’équité», a-t-il soutenu. Les manquements dans la couverture médiatique du référendum ne sont pas seulement constatés dans les médias publics. Pour le journaliste-formateur, il y a aussi des organes privés qui accordent plus de temps aux partisans du Non.

Mais, précise Ibrahima Bakhoum, «le déséquilibre est beaucoup plus criard dans les médias publics qui ont pourtant l’obligation première de veiller à l’équilibre». Eu égard à ces manquement, le journaliste trouve que «le jeu démocratique est enterré dans cette campagne référendaire». Par ailleurs, il dénonce «un recours excessif à la force» dans le sens où «des responsables politiques payent des spots sur les sites internet avec l’argent du contribuable pour amener le citoyen à aller dans un sens ou l’autre». Les médias sont aussi responsables de cette situation. De l’avis d’Ibrahima Bakhoum, «le diffuseur doit avoir la responsabilité d’éviter une violation de la loi».

MOR FAYE, PROFESSEUR DE SOCIOLOGIE DES MEDIAS : «C’est une violation de la loi»

L’accaparement des médias pendant cette campagne référendaire n’est pas conforme à la loi, estime le professeur de la sociologie des médias Mor Faye. «La loi est extrêmement claire en matière de couverture électorale. Il faut l’équité et l’égal accès de toutes les parties aux médias. Mais, apparemment, les gens sont en train de contourner le dispositif légal. Cette situation installe les candidats dans une situation d’inégalité», trouve-t-il. Pour le professeur de sociologie des medias, les organes de presse doivent prendre les dispositions légales en mettant en bas de leurs publications «publireportages». Et, même dans ce cas, souligne-t-il, seuls quelques Sénégalais sont en mesure de décortiquer le message.

Pour Mor Faye, la recherche de profits ne doit pas pousser les médias à occulter l’obligation de respecter la loi. «Pendant les moments des campagnes électorales, les médias sont astreints à une situation d’éthique», dit-il. Le professeur de sociologie des médias est d’avis qu’il faut un Code de conduite pour amener les médias à se conformer à la règle. «C’est la loi qui doit dire aux médias d’arrêter. Si on les laisse à eux-mêmes, ils vont prendre tout l’argent qu’on leur propose». A en croire le spécialiste de la sociologie des médias, une campagne avec des publireportages est un moyen de contourner le dispositif normatif. «Ceux qui ont les moyens vont y aller à fond et ceux qui n’en ont pas ne pourront pas y arriver». Suffisant pour que le spécialiste de la sociologie des médias en appelle au Conseil national de régulation de l’audiovisuel (Cnra) qui doit renforcer le cadre juridique pour obliger les organes de presse à se conformer à la norme.

LES DISPOSITIONS DU CNRA PAR RAPPORT A LA COUVERTURE MEDIATIQUE : Tous tenus au respect rigoureux des règles d’équité et d’équilibre

Dans un communiqué rendu public dès l’entame de la campagne référendaire, le Conseil national de régulation de l’audiovisuel a rappelé à l’ensemble des médias audiovisuels, presse écrite et en ligne que, conformément à l’article L 61 du Code électoral, les médias sont appelés à faire un traitement impartial. Ainsi, il a été interdit l’utilisation, à des fins de propagande, de tout procédé de publicité commerciale par voie de la presse, de la radiodiffusion et de la télévision. Mieux, le Cnra avait indiqué aux médias publics ou privés de l’audiovisuel, de la presse écrite ou utilisant tout autre support qui traitent de la campagne qu’ils sont tenus au respect rigoureux des règles d’équité et d’équilibre dans le traitement des activités des courants pendant la campagne référendaire.
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