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Réduction du mandat du président de la République: La légalité censure la parole donnée
Publié le jeudi 18 fevrier 2016  |  Enquête Plus
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© Présidence par DR
Le président de la République Macky Sall renonce à réduire son mandat en cours




Tout ça pour ça, est-on tenté de dire ! Finalement, le Président Macky Sall ne réduira pas son mandat à 5 ans. Il va donc faire 7 ans, malgré les promesses réitérées pour le respect de la parole donnée. La victoire est donc revenue au camp des Farba Ngom, Cissé Lo, Cheikh Kanté et autres. Le Chef de l’Etat s’est voulu plus légaliste que moraliste. S’il l’avait dit dès le début, le Sénégal aurait sans doute économisé de l’encre et de la salive.

Enfin l’épilogue ! Le débat sur la réduction du mandat du président de la République de 7 à 5 ans a connu son clap de fin hier à 20h. Macky Sall a décidé de suivre l’avis du Conseil constitutionnel qui l’a déclarée non conforme. Mais avant, la question aura tenu le pays en haleine pendant près de 4 ans. En fait, la campagne électorale n’a jamais été close pratiquement. A peine deux mois après l’installation de Macky Sall, le problème a été soulevé, non pas par l’opposition, mais par le camp présidentiel. La coalition Macky 2012 a été la première à demander publiquement à Macky Sall de faire fi de sa parole pour respecter les 7 ans pour lesquelles il a été élu.

‘’Macky Sall est élu sur la base de la constitution de 2007 pour un mandat de sept (7) ans renouvelable une seule fois, et donc, devrait s'y conformer’’ disaient les ténors de la formation au pouvoir. Le Pr Malick Ndiaye n’y est pas allé par 4 chemins pour asséner ses vérités. ‘’Macky Sall exagère en promettant de réduire son mandat de deux ans. Il n'a pas le droit de réduire son mandat qui est réglementé par la Constitution qu'il a juré de respecter et de faire respecter'', soutient-il. ‘’Ce serait une violation flagrante de la Constitution que de toucher à la durée du mandat présidentiel sans passer par le Parlement’’, renchérit Mously Diakhaté.

Le palais avait alors envoyé Abdou Aziz Diop, lui aussi Conseiller du Président, pour réitérer l’intention du chef de l’Etat de respecter sa parole. Une façon de dire également que ceux qui parlent le font à leur nom et non à celui de Macky Sall. Le débat va très vite gagner le parti présidentiel qui se divise en deux tendances. D’un côté les partisans du respect de la parole donnée, de l’autres ceux qui se disent légalistes, c'est-à-dire ceux qui donnent la primauté à la Constitution.

Le camp du wax waxeet est composé de gens très influents dans le parti. Moustapha Cissé Lo (sa nomination au Parlement de la Cedeao en est une preuve), Cheikh Kanté, Directeur du très stratégique Port autonome de Dakar ainsi que l’influent griot du Président Farba Ngom se disent contre. Pas plus tard que le 10 janvier 2016, le maire de Agnam avait réitéré sa position. ‘’J’ai commencé à battre campagne pour que personne ne le suive. J’invite à voter non. C’est ma position et je l’assume’’, disait-il. Quelques jours après, c’était au tour de Moustapha Cissé Lo. ‘’Je suis pour un septennat et je voterai contre la réduction du mandat’’, affirmait celui qui a tout dernièrement changé de position pour soutenir l’initiative.

Seydou Guèye : ‘’Macky va tenir sa promesse’’

Ils ne sont pas les seuls. Daouda Dia, 1er questeur de l’Assemblée Nationale ainsi que Youssou Touré, secrétaire d’Etat à l’alphabétisation, se sont eux aussi exprimés contre la réduction. Ce dernier soutenait ce qui suit : ‘’L’appliquer en l’état serait violer la Constitution. Il faut faire la part des choses entre la volonté politique du Président et les limites de la loi. Personne n’est au-dessus de la Constitution.’’.

Face aux partisans du non, il y a l’autre camp, celui du pour. Qu’il suffise de citer Seydou Guèye, Mimi Touré l’ancien premier ministre, Luc Sarr, Conseiller du Président et d’autres caciques de l’Apr. En avril 2015, Seydou Guèye qui n’en voulait plus s’est emporté sur les ondes de la RFM. ‘’Il y a trop de débats au sein de notre parti. Il faut que les camarades cessent d’alimenter inutilement ce débat qui rend perplexes les Sénégalais’’, s’offusquait le porte-parole, ajoutant que ‘’dans tous les cas, Macky Sall va tenir sa promesse car l’homme, c’est sa parole. Le reste, c’est Dieu qui en décidera’’.

Outre les positions des partisans du même bord, il y a les adversaires. L’opposition qui a grossi ses rangs entre-temps avec de nombreux départs de la coalition Benno bokk Yaakaar en a fait un sujet majeur. Du Pds à Rewmi en passant par les mouvements et coalitions de circonstance, on ne rate pas une occasion pour rappeler à Macky Sall que la matérialisation de la promesse a trop longtemps attendu. Ce débat à d’ailleurs obligé le Président à faire des sorties régulières pour affirmer et réaffirmer sa volonté de respecter sa parole. Devant ses militants, lors d’adresses à la nation, à l’occasion d’une rencontre avec la presse, au cours d’une visite religieuse et même sur les plateaux de télé ou à travers les colonnes des médias français.

Dans un premier temps, il s’est limité à formuler des intentions. Par la suite, il a été amené à siffler la fin de la récréation dans son camp (sans succès cependant). ‘’Je ne peux pas accepter que l'Apr (parti présidentiel) mène le débat. La réduction du mandat ne dépend plus du président de la République. Cessez ces caaxaaneries (enfantillages). Soyez disciplinés, vous ne pouvez pas me mettre la pression’’, s’énervait-il. ‘’Arrêtez, ça suffit !’’ avait apostrophé encore Macky Sall.

20 mars 2016, date du référendum

A Kaffrine, lors d’un Conseil des ministres décentralisé, le président revient sur le sujet. Cependant, c’était juste pour mieux dégager sa responsabilité. ‘’Ce n’est pas à moi de prendre un décret. Même pour respecter son engagement, il y a une procédure. Soit passer par un référendum ou par voie parlementaire. Le débat n’est pas simple. On ne peut pas s’amuser parce que tout simplement, le président a dit ; donc voilà : sa parole, c’est l’Evangile ou la Bible ou le Coran, non. La volonté, elle est restée ferme, la décision qui m’appartient sera de proposer le débat selon les règles et les formes que la Constitution permet’’. Et comme pour dire qu’il en a assez, Macky Sall déclarait avoir ‘’épuisé son latin’’.

Pour l’opposition et une partie de l’opinion, c’était le premier acte d’une tragi-comédie qui finirait par le wax waxeet. Le 31 décembre 2015, le deuxième acte est posé. Dans son adresse à la Nation, il annonce 15 mesures pour une réforme institutionnelle. Parmi les 15, il y a la réduction du mandat et la saisine du président de l’Assemblée nationale et du Conseil constitutionnel. Quelques jours après, son conseiller juridique Ismaëla Madior Fall affirme que l’Avis du Conseil lie le président de la République. Un ballon de sonde ? Qu’importe ! Puisque la réaction n’a pas tardé du côté de l’Université.

Tous ses collègues qui se sont exprimés lui ont apporté le démenti, à l’exception de Mounirou Sy. Même le Pr Amsatou Sow Sidibé qui était à l’époque Conseiller du chef de l’Etat s’est inscrite en faux contre l’affirmation. Depuis lors, les voies ne se sont jamais retrouvées. Spécialistes, politiques et citoyens se sont divisés sur la question. Mais Macky lui avait trouvé sa voie : celle de la légalité au détriment de la parole. Les réactions vont se multiplier pour aller dans tous les sens, mais il faudra attendre le dimanche 20 mars 2016 date du référendum. Ce jour-là, le peuple choisira son camp. La victoire du Oui sera celle de la légalité, et la victoire du Non, celle de la morale !
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