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CAE - Le procureur requiert la perpétuité : Habré plongé dans la piscine
Publié le vendredi 12 fevrier 2016  |  Le Quotidien
Ouverture
© aDakar.com par DF
Ouverture du procès de Hissène Habré
Dakar, le 20 Juillet 2015 - Le procès de l`ancien président tchadien Hissène Habré s`est ouvert, ce matin, à Dakar. L`ancien chef d`État réfugié au Sénégal depuis 1990 est jugé pour "crimes contre l’humanité, crimes de guerre et crimes de torture". Photo: Mbacké Fall, Procureur général des Chambres Africaines Extraordinaires




Si la Chambre d’assises des Cae suit les réquisitions du Parquet général, l’ancien Président du Tchad prolongera son séjour au Cap manuel à vie. Il a requis la perpétuité et la confiscation de tous ses biens.

Après les plaidoiries des avocats des parties civiles, c’était hier au tour du Parquet général de faire son réquisitoire dans le procès qui l’oppose à l’ancien Président du Tchad. Le Procu­reur général, Mbacké Fall, et ses adjoints pensent que «la responsabilité de Hissein Habré doit-être retenue». Car «son comportement criminel a été appréhendé sous l’angle de sa responsabilité pénale». «Il doit-être poursuivi pour torture, crime autonome, crime contre l’humanité, et crime de guerre», a martelé le procureur Fall qui trouve que son silence devant la barre des Chambres africaines extraordinaires traduit une lâcheté et non une stratégie de défense. «Face aux témoignages des victimes, il a répondu par le silence. Aucun mot de repenti, aucun regret», se désole Mbacké Fall qui s’interroge. «Je me demande ce qu’il a à la place du cœur ? Nous avons du mal à croire qu’il s’adonnait à la lecture du Coran. Je me demande s’il a bien médité le verset 74 de la sourate Al Bakara qui parle des cœurs endurcis.» Selon le procureur Mbacké Fall, Hissein Habré mérite une condamnation à la hauteur des crimes qu’il a commis. Le maître des poursuites pense qu’il ne peut pas bénéficier de circonstances atténuantes. Car «les crimes qu’il a commis ont porté atteinte aux valeurs humaines fondamentales et qu’il a tué des milliers de pères de famille». Avant de requérir à l’encontre de l’ancien homme fort de Ndjamena, la prison à perpétuité et la confiscation de tous ses biens.Toutefois, il pense que quelle que soit la peine qui lui sera infligée, l’ancien Président du Tchad fera bonne fortune alors que beaucoup de victimes n’ont pas encore fait le deuil de leurs parents. Mbacké Fall trouve, en outre, que c’est «par son pouvoir exorbitant, que Hissein Habré a désarticulé le Tchad». Et pour asseoir la thèse de sa culpabilité, le Procu­reur général et ses adjoints ont démontré, avec la force des arguments conçus dans un document de 210 pages, son implication et sa responsabilité criminelle.

Habré accusé de tous les péchés du Tchad
Prenant en premier la parole, le procureur Fall estime que c’est l’échec des accords de Lagos qui devaient unifier le pays, qui a conduit à la guerre contre le Gunt. Et c’est suite à cet échec, que Habré a mis en place la Dds en utilisant des moyens illégaux pour mater la population. Le Tchad, pendant le règne de Hissein Habré, est marqué par la guerre. Parce que dès que Habré a pris le pouvoir, «Goukini et ses alliés se sont repliés vers le Nord pour mener une guerre pour la reconquête du pouvoir», a rappelé le procureur selon qui, le Gunt se déclarait seul détenteur du pouvoir au Tchad et considère Hissein Habré comme un usurpateur. Il s’en est suivi des recrutements massifs de combattants en novembre 1988. Hissein Habré fit appel à ses alliés africains en brandissant le spectre de la guerre. Ainsi, il réussit à reprendre les localités perdues le 30 juillet 1983. Pourtant, précise Mbacké Fall, malgré la guerre, des tentatives de réconciliation entre les tendances dissidentes ont été menées. Mais, elles se sont toutes soldées par des échecs. Car, le Gunt considérait le pouvoir de Hissein Habré comme illégitime.
Hissein a essayé aussi de reconquérir le Sud. Dès le 6 septembre 1982, tout le Sud est conquis par les Fant qui s’adonnent à des exactions. La désertion fut donc massive vers la République centrafricaine. Ha­bré a réagi par des exactions en créant la Dds. Ce que le procureur ne voyait pas comme un inconvénient. «La création de centrale de renseignement est l’apanage de tous les Etats. Ce n’est pas un crime de créer une centrale, le crime c’est d’utiliser cette centrale pour tuer des individus», dit-il. D’après lui, cette Dds est directement rattachée à la Présidence à raison de son caractère confidentiel. Elle était l’œil et l’oreille du président de la République qui avait une démarche de répression. «Les conséquences des crimes étaient désastreuses à l’endroit des populations et des ennemis de Habré. La torture était systématiquement utilisée», renseigne-t-il. A l’en croire, Habré n’ignorait pas l’existence des établissements pénitentiaires. Mieux, il avait les instruments juridiques pour pouvoir conduire la personne suspectée devant les juridictions. Mais, il ne le faisait pas parce qu’il voulait garder secrète la détention. C’est pourquoi il a créé la Dds et réfectionné des locaux en désaffection comme l’ancien mess et l’ancienne piscine, accuse le procureur. «C’est dans ces mouroirs que les exactions ont été plus massives, c’étaient de grands lieux de criminalité jamais connus dans l’histoire de l’humanité», ajoute-t-il en soulignant que «la Dds était considérée comme une maison bien cloîtrée où l’information ne filtrait pas».

Plus de 1000 documents adressés à Habré
Et comme dans la politique, c’est Habré qui nommait les agents, il ne pouvait rien ignorer, tempête-t-il. Dans ces centres de détention qu’il dénombre à sept, il y avait le non-respect des normes applicables en matière de détention. Ainsi, la mort, les maladies sévissaient dans ces centres de détention. Pour Mbacké Fall, c’est ce qui explique tous les dégâts qui ont été constatés dans ces prisons et confirmés par les dépositions de tous les témoins survivants. «Habré a traité les populations civiles en les considérant comme des ennemis du régime», dit-il. C’est le cas des Zaghawas, des Adja­raïs, arabes suspectés de soutien réel au Gunt, poursuit M. Fall : «La répression s’est manifestée par des arrestations et des exécutions sommaires. Les arabes étaient toujours assimilés à des opposants politiques. Et l’ordre d’arrêter les arabes venaient toujours du Président qui n’avait pas aussi épargné les Zagha­was.» Rappelant la déposition d’un témoin fondamental, Khadija Assane Djida, le procureur pense que Habré est coupable. «Khadija dite La rouge a été arrêtée en 1987. Elle a déclaré avoir été violée à quatre reprises par Hissein Habré et poignardée alors qu’elle tentait de s’échapper», a-t-il souligné. Pour lui, ce témoin est crédible et est corroboré par la déposition d’autres témoins, a-t-il soutenu en évoquant les éléments constitutifs du viol et des tortures qui n’ont pas fait défaut. Mbacké Fall prend Habré pour coupable parce qu’il «avait la capacité juridique d’agir pour faire respecter les obligations découlant des conventions de Genè­ve». Il pense qu’il doit être déclaré coupable d’avoir participé de manière conjointe à différents crimes, conseille-t-il.
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