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Passe d’armes autour de la préférence nationale : Le privé étale le gouvernement
Publié le jeudi 31 decembre 2015  |  Le Quotidien
Amadou
© Autre presse par DR
Amadou Bâ, ministre de l`économie et des finances




Amadou Ba qui rencontrait hier les organisations patronales a appelé le privé national à être aux avant-postes de la création de richesses pour l’année 2016. L’appel du ministre de l’Economie, des finances et du plan en direction du secteur privé a eu un écho très critique de la part des patrons sénégalais. Si Mansour Cama insiste sur la nécessité d’inscrire le patriotisme économique dans le Pse, Baïdy Agne soutient que l’Etat ne comprend tout simplement pas son rôle.

Pour maintenir ou aller au-delà des performances économiques du Sénégal, l’Etat a choisi de se reposer sur le secteur privé pour créer davantage de croissance. Amadou Ba, ministre de l’Economie, des finances et du plan, a ainsi exhorté hier les organisations patronales à être aux avant-postes de la création de richesses.
Mais cet appel de l’argentier de l’Etat sénégalais n’est pas loin d’être passé dans des oreilles de sourds. Le secteur privé sénégalais, représenté par ses grands patrons, s’est montré un tantinet critique. C’est le président du Conseil national du patronat (Cnp) qui lance la charge en posant un débat sémantique sur ce qu’il faut appeler secteur privé national. Selon Baïdy Agne, ne peut être qualifiée de privé national qu’une société contrôlée à 51% par des nationaux sénégalais. «Il faut qu’on parle des même choses quand nous dialoguons», rectifie M. Agne, qui souligne la nécessité de redéfinir cette notion. Selon le président du Cnp, si les critères de nationalité venaient à être redéfinis, les opportunités pour le secteur privé dans le budget pourraient bien être considérablement réduites. Beaucoup moins nuancé, le président de la Confédération nationale des employeurs du Sénégal (Cnes) demande tout simplement que «le patriotisme économique soit inscrit dans le Pse». Mansour Cama poursuit en soulignant qu’au Sénégal, «les entreprises ne sont pas protégées». «Très souvent, on a l’impression que l’on privilégie les importations au détriment de la production intérieure et des exportations. Quand je vois le directeur des Douanes afficher ses recettes douanières, on comprend parfaitement que cela provient des importations. Mais alors, quel paradoxe avec un Pse qui prétend apporter un changement structurel et donner un accent prioritaire à l’industrialisation. Il faut commencer par-là. (…) Je ne vois pas comment les investisseurs dans le secteur industriel, des entreprises qui existent déjà, sont protégés», insiste M. Cama.
Cette franchise n’a pas beaucoup été appréciée par le ministre en charge du Pse. «Le secteur privé devrait moins se lamenter vers l’Etat et porter plus son agressivité vers la concurrence et la compétitivité», recadre Abdoul Aziz Tall. Mais pour le président Baïdy Agne, c’est plutôt à l’Etat de revoir sa copie. «L’Etat doit quand même se mettre à l’idée que le secteur privé n’est pas en opposition avec son Etat. Qu’un Etat dise : je donne des choses à mon secteur privé, c’est comme s’il nous fait des cadeaux. Mais c’est sa responsabilité. C’est la responsabilité d’un Etat de faire de sorte que son économie devienne la plus puissante possible pour non seulement occuper le marché intérieur et pour exporter, mais créer plus de valeurs, plus de croissance et plus d’emplois. Ce n’est pas un cadeau au secteur privé, c’est normal. Il faut que nos Etats comprennent mieux leur rôle qui est de renforcer leur économie», note M. Agne à l’issue de la rencontre. Il souligne ainsi la nécessité de faire davantage d’efforts en direction des secteurs en difficultés comme le tourisme par exemple. «Il y a des secteurs qui souffrent et d’autres qui se redressent», précise M. Agne, qui ne semble pas transporté par l’optimisme des autorités. «Il ne faut jamais perdre de vue que la croissance tout court n’est pas un élément de mesure intégrale de la performance d’une économie. Comme on dit, si on bombardait un pays et qu’il est détruit, on aura, parce qu’il est reconstruit, un taux de croissance de 20% l’année suivante. C’est dire la relativité de cela», conclut M. Agne.
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