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Débat sur l’universalité de la justice internationale: ‘‘L’Afrique n’est pas contre la CPI’’, selon Sidiki Kaba
Publié le mardi 3 novembre 2015  |  Enquête Plus
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© aDakar.com par DF
Le ministre de la justice s`exprime sur la condamnation de Karim Wade par la CREI
Dakar, le 23 mars 2015 - Le ministre de la justice, Garde des sceaux, Sidiki Kaba a tenu une conférence de presse pour aborder la décision rendue par la Cour de répression de l`enrichissement illicite sur le dossier Karim Wade.




L’association des anciens élèves de l’Ecole nationale d’administration de France (Asena) a organisé son troisième dîner-débat vendredi dernier sur le thème ‘‘justice internationale : justice universelle ou justice raciale’’. Malgré les récriminations sur les poursuites contre les dirigeants africains, la Cour pénale internationale (CPI) tend à son idéal de justice égalitaire et universelle, à en croire le ministre de la justice Sidiki Kaba qui a animé les discussions en compagnie du professeur Abdallah Cissé et du politologue Yoro Dia.



Thomas Lubanga, Laurent Gbagbo, Uhuru Kenyatta, Omar el Béchir, etc., les dirigeants de l’Afrique sont-ils les têtes de turc de la justice internationale ? ‘‘C’est le type de débat stérile qu’il ne faudrait pas encourager. C’est une discussion qui mène à l’impasse’’, estime l’ancien recteur de l’université de Bambey, le professeur Abdallah Cissé qui parle même d’une insulte à la conscience universelle et un mépris pour les victimes. A la place de l’intitulé initial, il a préféré reformuler le sujet en ‘‘l’universalité de la justice en question : justice égalitaire ou discriminatoire ?’’

Même si ce principal intervenant pense que la consécration de la CPI constitue un immense progrès pour la justice internationale, ‘‘un outil de sauvegarde de la dignité humaine’’, il n’en estime pas moins que c’est une ‘‘justice discriminatoire’’ au regard de sa pertinence. Des Etats membres du Conseil de sécurité de l’ONU (Etats-Unis, Russie) ne l’ont pas ratifié, alors que la Chine ne l’a même pas signé. L’Inde et la plupart des pays asiatiques non plus ; la Tunisie et la Jordanie étant les deux seuls pays arabes à avoir signé. Le professeur estime que la CPI est un instrument dissuasif de la récidive de crimes graves malgré beaucoup de points à améliorer.

‘‘Quels sont les critères à respecter pour que cette justice devienne égalitaire et non discriminatoire ? ’’ se demande le professeur Cissé, invitant à approfondir la réflexion. Le ministre de la Justice, Sidiki Kaba, a tenté d’expliquer cette tendance. ‘‘Effectivement, ce sont des Africains qui sont actuellement poursuivis. Mais 34 Etats africains ont ratifié le Statut sur 54, ce qui veut dire que le continent n’est pas contre la CPI. Il faudrait dépasser cette période pour que d’autres ressortissants d’autres régions du monde puissent être poursuivis, pour qu’on ne se dise pas qu’il n’y pas que seule une catégorie qui est poursuivie’’, s’est-il défendu.

Quant à l’analyste politique Yoro Dia, il est d’avis que ces actions devraient susciter une introspection chez les Africains et non une fuite en avant. ‘‘Si les gens ont l’impression que la CPI ne poursuit que des Africains, ces derniers devraient se poser des questions. Ce qui se passe sur le continent ne se passe nulle part ailleurs’’, renchérit-il. Mais selon le président des Etats-parties de la CPI, l’évolution des rapports expliquent l’implantation d’une justice universelle. ‘‘Le crime est devenu mondial, il a fallu, pour le juge, un droit mondial’’, déclare Sidiki Kaba ajoutant que malgré son caractère international, la justice n’a pas encore atteint une vocation universelle.

‘’La peur a changé de camp’’

Aux yeux du ministre de la justice du Sénégal, le débat doit plutôt tourner autour des victimes. Il faut tenir compte des victimes, elles ont droit à la justice. ‘‘La CPI est une juridiction de dernier ressort ; elle ne juge que lorsqu’il n’y a pas justice à la maison. Au nom du principe de complémentarité, tous les Etats doivent renforcer leurs systèmes nationaux et disposer d’acteurs judiciaires de qualité pour que justice soit rendue’’, a-t-il plaidé. Abondant dans le même sens, le président de l’Asena Yoro Dia estime : ‘‘la peur a changé de camp sur le continent.’’

Il en veut pour preuve le comportement des hommes en tenue au pays des hommes intègres durant la dernière crise politique. ‘‘Si les militaires n’ont pas tiré sur la foule au Burkina Faso, c’est qu’ils ont pensé aux conséquences avec la CPI. Si Yaya Jammeh est ‘’sage’’, ce n’est pas qu’il est vertueux, mais il sait qu’il sera rattrapé par la CPI en cas de crime de masse. Avant la chute du mur de Berlin, la raison d’Etat était le moteur de l’histoire, on pouvait massacrer, commette des génocides, car il y avait la non-ingérence dans les affaires intérieures d’un Etat. Après 1989, le moteur est la défense des droits de l’Homme’’, analyse-t-il.

Ainsi, à l’en croire, Hissein Habré, qui appartient au monde de la Raison d’Etat, a été rattrapé par celui de la défense des droits de l’Homme. ‘‘C’est ce qui a changé ; c’est que désormais les crimes de guerre, de torture, de droit de l’Homme sont imprescriptibles. Dans l’ancien monde, un président de la République était une sorte de zone de non-droit. Ils ne sont pas devenus plus vertueux, mais l’effet dissuasif de la CPI fait qu’ils ont peur pour leur après-présidence’’, a conclu Yoro Dia.
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