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Entretien avec le Colonel Babacar Faye du programme Sida des armées: "300 malades suivis ... zero décès"
Publié le samedi 31 octobre 2015  |  Sud Quotidien
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© aDakar.com par DF
Le Sénégal célèbre son indépendance par une prise d`armes
Dakar, le 4 Avril 2015 - Le chef de l`État Macky Sall a présidé à la prise d`armes marquant la célébration du 55e anniversaire de l`indépendance de la République du Sénégal.




Le programme Sida des armées, sur un peu plus de 300 malades suivis, a enregistré seulement une dizaine de personnes qui a arrêté le traitement, pour zéro décès noté dans la période 2014-2015. Une situation due selon le point focal, le colonel pharmacien, Babacar Faye de l’hôpital militaire d’Ouakam, à une meilleure prise en charge de ces personnes considérées comme vulnérables à cause de leur mobilité. Pour un taux de prévalence de 0,7 légèrement inférieur à la population générale (0,74%), ledit programme met l’accent sur les nouvelles infections. Entretien…

Pourquoi un programme Sida pour les armées ?

Au niveau national, il y a eu une approche multi sectorielle avec une instance de coordination qui est le Centre national de lutte contre le Sida (Cnls) logé à la primature et chaque ministère a son programme pour s’occuper de ses problèmes spécifiques à sa cible. Pour le ministère des forces armées, il est composé de l’armée et de la gendarmerie. Au Sénégal, le taux de prévalence est bas au niveau de l’armée que chez la population en générale. Mais, le militaire comme le gendarme, demeurent une cible vulnérable, de par leur mobilité. Ils sont souvent projetés dans des pays hors du Sénégal où la prévalence est très élevée et où, ils vont séjourner pendant une année. Deuxièmement, ils demeurent dans la partie méridionale à Ziguinchor où on constate que les prévalences au niveau national sont les plus élevées. Il y a de facto, un fort lien entre la sécurité, la capacité opérationnelle et le VIH. L’objectif et la mission de ce programme est le maintien de la capacité opérationnelle des forces avec une prévalence qui doit être inférieur à 2%.

Quelles sont les grandes pistes du programme ?

Le programme est structuré en beaucoup de composante. Prévention sexuelle qui consiste à lutter contre les nouvelles composantes, en essayant de sensibiliser la cible pour avoir un bon comportement à moindre risque. Transmission mère enfant qui est un volet, ainsi que les accidents sanguin. C’est des volets qui entrent dans la prévention. Il y a l’aspect laboratoire qui prend en charge les dépistages et le suivi. La prise en charge psychosociale et le volet leadership management

Comme ça se passe sur le terrain ?

Vous allez dans une population, vous dépistez les gens, d’un côté, il y a ceux qui sont positifs, heureusement qu’ils ne sont que peu. En ce moment, il faut les prendre en charge. Et l’objectif de cette prise en charge est double. C’est le fait de sauver une personne infectée de manière individuelle. Mais l’expérience a montré que le fait de soigner quelqu’un et de diminuer la quantité de sang dans le virus, c’est-à-dire la charge virale, amoindrit la probabilité qu’il aille infecter quelqu’un. C’est ce qui expliqu’au niveau mondial, on voit qu’il y a peu de décès dû au Vih pour la simple raison que les gens sont bien traités et vivent avec le virus. L’autre partie, c’est justement quand vous dépistez la grande majorité, il faut continuer à sensibiliser ceux qui ne sont pas infectés pour qu’ils le demeurent. C’est ce qu’on appelle la lutte contre les nouvelles infections. Dans les structures comme l’armée, l’approche et l’innovation que l’on est en train de faire, c’est d’impliquer davantage le chef militaire qu’on trouve, qui parle mieux aux hommes de troupe. On peut donner un contenu sur les messages, mais le chef parle mieux à ses hommes.

Quelle est la transmission la plus présente dans l’armée ?

Disons que forcément, c’est la transmission sexuelle et cela n’est pas spécifique à l’armée, mais plutôt à l’Afrique. Si vous prenez le nombre de nouvelles infections, on peut dire que la majorité est liée à une transmission qui est sexuelle. La transmission mère enfant est minime, car les femmes sont dépistées, font un bilan et sont très tôt prises en charge. Au niveau de la transmission sanguine, quand on prend du sang de quelqu’un, on est obligé de faire toute la qualification nécessaire.

Quelle est la situation actuelle au sein de l’armée ?

Le taux de prévalence selon une étude qui a été faite en 2006 était de 0,7% là où la population était à 0.74%, légèrement inférieur à la population générale. Le taux de prévalence est bas, mais le militaire demeure vulnérable à cause de sa mobilité et cette année, on est sur le point de faire une autre étude pour voir les tendances et actualiser les chiffres.

Quid de la charge des malades ?

Il faut saluer les efforts qui ont été faits à l’échelle nationale. Au niveau de l’hôpital militaire, depuis que j’ai pris les reines du programme, c’est un volet où on n’était pas très fort. Et j’avais comme mission prioritaire de le développer. Actuellement, on a pu développer cet aspect, car les médicaments sont disponibles, les antirétroviraux (Arv) sont gratuits, les tests qui permettent de voir, si on doit traiter ou pas la charge virale de ces cas est disponible, même le test qui permet d’évaluer efficacité du traitement. Tout l’accompagnement avec les médecins et les médicaments sont disponibles, ainsi que tout le test biologique qui permet de poser le traitement, de l’évaluer et même en cas d’urgence, de l’adapter. La prise en charge se porte bien et c’est une de mes satisfactions depuis que j’ai pris le programme en main. Maintenant, on voit qu’il y a une forte affluence. Ce qu’on peut voir comme difficulté dans cette prise en charge, c’est que la stigmatisation reste un problème réel. Les gens préfèrent que l’on ne connaisse pas leur statut ou que des militaires aillent se faire suivre ailleurs. Il y en a très peu.

Avez-vous des cas de d’abandon de traitement ?

Le personnel soignant est très souvent submergé par la prise en charge des malades. Mais il y a des aides sociaux qui nous accompagnent. Quand on fixe un rendez-vous à un malade et qu’il ne vient pas pour sa prise de sang ou faire des paramètres biologiques ou encore pour aller se faire suivre, le médecin passe automatiquement à autre chose. Mais l’avantage que l’on a, c’est qu’on a justement des assistants sociaux, les gens que l’Ancs a mis à notre disposition. Ainsi, dés qu’il y a ce cas, le médecin est en relation directe avec la cellule et du coup, il y a la recherche de perdu de vue. Comme exemple, sur quelque chose comme 300 malades suivis au niveau de ce centre, il y avait une dizaine de perdus de vue. Dix qu’on pouvait dire, en un certain moment, qu’ils ne respectaient pas leur rendez vous.

Quel est le taux de mortalité ?

Mais justement, c’est devenu insignifiant. Pour cette année (2014-2015), on eu zéro mort. Tout simplement parce que les gens sont assidus et respectent les rendez-vous. Maintenant, c’est là qu’il faudrait continuer à sensibiliser les gens, car beaucoup sont infectés et ignorent leur statut et continuent à infecter. Mais eux, quand ils sont malades en phase terminal, là quand même ça pose problème. Plutôt ils viennent, plutôt connu, mieux sait. Car cela permet de les sauver.

Et le taux de suivi ?

Il reste élevé avec peu de décès, peu de perdus de vue parce qu’il y a un accompagnement. Pour ce qui est des gens qui sont infectés, l’on donne à leurs enfants des kits scolaire jusqu’en classe de terminal. Et cette année, on en avait pour 150 kits. Il y a juste une chose que les gens on arrêté, concernant l’accompagnement, c’est l’allaitement, à savoir le lait qu’ils donnaient aux enfants. Encore jusque là, il y a des bailleurs qui nous accompagnent et qui donnent des kits alimentaires. Il y a tout un environnement qui est non médical et qui consiste à l’alimentation, à l’accompagnement psychologique. C’est quand même quelque chose qui remonte le moral aux gens.

Quelle est la région la plus touchée ?

Disons que les gens parlent de Kolda avec 3%, Ziguinchor, Sedhiou et Kédougou. C’est la zone méridionale qui est la plus touchée.

Qu’est-ce qui explique cela ?

Les pays frontaliers peuvent être une explication à ça. Quand vous allez à Kolda, il y a le marché de « Diaobé » avec un brassage, à Kédougou les zones aurifères, il y a une dizaine de nationalités et en plus de la prostitution.

Pour sensibiliser les hommes de troupes, vous avez tout récemment misé sur vos épouses. Pourquoi ce choix ?

Pour une simple raison. Pendant longtemps, on a fait le focus sur le militaire. Ce qu’on oublie, quand le militaire revient à la maison, il est avec son épouse. Je pense que, quand on regarde comment est structurée la société sénégalaise, la femme est au centre de tout. La femme peut parler à son mari, à ses enfants, mais à tous ceux qui gravitent autour d’elle. Les femmes constituent ainsi des relais puissants qui peuvent parler à toutes les personnes. Ceci permet justement de prendre comme partenaires nos femmes, non seulement en les sensibilisant, mais aussi faire d’elles des relais pour parler au sein des associations féminines.

Quels sont les autres moyens de sensibilisation ?

Pour la sensibilisation, ce qu’on fait d’habitude, c’est quand les contingents partent à l’extérieur, les militaires sont préparés au niveau de Thiès pendant des mois. On n’y va déjà pour dépister, après il y a des conférences qui sont fait pour le (Hiv), la violence sexuelle parce que c’est des choses qu’on ne pardonne pas sur le terrain des Nations Unies. On les sensibilise pour qu’ils ne s’adonnent pas à ces pratiques. En dehors de ça, on va périodiquement voir les recrues qui sont à Dakar Bango à l’entrée, non seulement on fait des bilans, on les sensibilise sur la maladie et les moyens de protection. A Kolda, on a organisé une grande rencontre où il y avait près de 700 femmes, à Saint Louis aussi.

Vous avez décidé d’organiser une randonnée pédestre, demain samedi. Pourquoi ?

C’est toujours dans le cadre de la sensibilisation. A 9h le samedi, nous allons prendre départ devant le camp Dial Diop. On est certes parvenu à bien développer la prise en charge, à rendre accessibles tous les indicateurs biologiques qui permettent un bon traitement, c’est un acquis, mais il faut toujours revenir à la case de départ, à savoir lutter pour les nouvelles infections. Ma conviction, c’est que le chef militaire parle mieux à sa troupe que le corps médical. Nous pouvons donner le contenu du message mais la voie qui porte mieux c’est justement celle du chef. Et c’est dans ce cadre là, que l’on a essayé de mettre sur pied cette activité qui est la randonnée pédestre qui sera présidée par le Cemga, par le haut commandant de la gendarmerie avec la partie américaine.
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