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Affaire Habré : Une jurisprudence des tribunaux internationaux
Publié le jeudi 3 septembre 2015  |  Le Quotidien
Ouverture
© aDakar.com par DF
Ouverture du procès de Hissène Habré
Dakar, le 20 Juillet 2015 - Le procès de l`ancien président tchadien Hissène Habré s`est ouvert, ce matin, à Dakar. L`ancien chef d`État réfugié au Sénégal depuis 1990 est jugé pour "crimes contre l’humanité, crimes de guerre et crimes de torture".




La commission d’office d’avocats pour défendre Hissein Habré obéit à une jurisprudence des tribunaux pénaux internationaux. Selon la pratique internationale et le droit sénégalais, Hissein Habré ne pourra pas récuser les avocats commis d’office afin d’assurer à la fois «un procès équitable» et «une bonne administration de justice».

Récemment, Hissein Habré, en détention à la prison du Cap Manuel, a éconduit les trois avocats commis d’office pour sa défense par les Chambres africaines extraordinaires (Cae), lors du deuxième jour de son procès ouvert le 21 juillet dernier. L’inculpé, qui a choisi de ne pas se faire assister au procès par ses conseillers, a ainsi décidé de récuser Mes Mbaye Sène, Mounir Ballal et Abdou Gningue commis par la Cour. Il faut dire que la stratégie de Habré n’est pas nouvelle. Déjà avant lui, beaucoup d’anciens dirigeants, poursuivis par des tribunaux internationaux, ont cherché à défier la Cour en la caractérisant de justice «politique» ou en s’attaquant à sa légitimité. Mais l’histoire a montré que cette méthode n’a jamais permis d’éviter un procès.

Les exemples sont nombreux. Radovan Karadzic, président de la République Serbe de Bonie, «artisan» du massacre de Srebrenica, poursuivi par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougosla­vie pour génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre, en est un. Il avait d’abord boycotté le Tribunal en refusant de comparaître, puis avait voulu assurer sa défense tout seul, sans avocat. La Cour avait commis d’office un conseiller chargé de représenter les intérêts de la justice au procès.
Il y a aussi le cas de Slobodan Milosevic, l’ancien Président serbe accusé de génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie. Remettant en cause l’intégrité du Tribunal, il avait décidé d’assurer lui-même sa défense, sans avocat. La Cour avait accepté, tout en nommant un conseiller, un «amici curiae» devant s’assurer que les droits de l’accusé étaient respectés. Ce conseiller a pu déposer des requêtes et des conclusions dans l’intérêt de la justice.
Charles Taylor, l’ancien Président du Liberia, accusé entre autres de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre par le Tribunal spécial pour la Sierra Leone, avait lui aussi déclaré au début de son procès : «Je ne bénéficierai pas de procès équitable devant le Tribunal spécial.» Par conséquent, au premier jour de son procès, il avait révoqué son avocat. Mais après quelques jours, il avait accepté que la Cour nomme d’office un avocat et avait finalement coopéré avec le Tribunal. On voit bien que ces trois suivent une jurisprudence constante des tribunaux pénaux internationaux et que la décision de Gberdao Gustave Kam n’est pas un acte isolé. Le droit international rend possible, voire nécessaire la nomination d’avocats par la Cour, même contre la volonté de l’accusé. C’est d’ailleurs ce qu’avait prononcé le président de la Chambre d’assises des Chambres africaines extraordinaires le 21 juillet : «Au-delà des faits qui sont dans le dossier, il y a également la responsabilité, leur responsabilité (aux avocats commis d’office) de veiller à ce que la loi pénale soit respectée dans toute sa rigueur et également de cela ils contribueront, en tout cas en ce qui les concerne, à sauvegarder les intérêts de Monsieur Hissein Habré, même si c’est contre son gré. (…) Nous la Chambre, nous pensons qu’il faut aller en tout cas vers un procès qui serait impartial, équitable, où les règles de droit, les règles de procédure seront respectées.» En revanche, Hissein Habré, en bon combattant, ne va pas se laisser faire et livrer son destin à la Cour. Il est fort probable qu’à la reprise des audiences, le 7 septembre prochain, qu’il tente de révoquer les trois avocats commis d’office.

Le droit sénégalais ne le lui permet pas
Seulement le droit ne lui permet pas. En témoigne la jurisprudence internationale suscitée. Aussi le droit sénégalais ne donne pas la possibilité à un accusé d’être jugé sans la présence d’un avocat. L’article 273 du Code de procédure pénale prévoit : «A l’audience, la présence d’un défenseur auprès de l’accusé est obligatoire. Si le défenseur choisi ou désigné conformément aux articles 101 et 2 du présent code ‘’lors de l’entretien de première inculpation’’ ne se présente pas, le président en commet un autre d’office.»
D’autre part, l’article 14 de la loi du 4 janvier 1984 portant création de l’Ordre des avocats du Sénégal, modifiée par les lois du 28 décembre 1987 et 8 juillet 2009, ne lui autorise pas de révoquer les avocats commis d’office : «Ces derniers ne peuvent être révoqués que par le président du Tribunal ou le bâtonnier. S’ils décident de ne pas défendre l’accusé sans avoir au préalable obtenu l’approbation du magistrat commettant ou du bâtonnier, ils encourent des sanctions disciplinaires.»
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