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Roger Nkodo Dang, Pdt du Parlement de l’UA : «Il faut une loi commune contre le terrorisme»
Publié le mercredi 12 aout 2015  |  Le Quotidien
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© aDakar.com par DR
Le président Macky Sall prend part au 25e sommet de l`Union Africaine
Johannesburg, le 14 Juin 2015 - Le chef de l`État a pris part au 25e sommet de l`Union Africaine. Le président Macky Sall a conduit la délégation sénégalaise.




Le président du Parlement de l’Union africaine veut rapprocher, comme le veulent les missions de son institution, les peuples du continent par l’intégration. Mais le Camerounais Roger Nkodo Dang, élu le 27 mai dernier à Midrand, en Afrique du Sud, pour un mandat de trois ans, dit avoir l’impression que les recommandations du parlement qui siège à Johannesburg «ne sont pas suivies d’effets». Il plaide également la ratification du protocole de Malabo par les Etats-parties, car seul le Mali l’a fait jusqu’ici.

Quel est l’objet de votre visite au Sénégal ?
Je suis au Sénégal pour trois raisons. La première, c’est pour présenter le Parlement panafricain au Peuple du Sénégal. C’est un organe qui n’est presque pas connu des populations africaines de manière générale. Le Parlement panafricain siège en Afrique du Sud avec une représentation égale de 5 députés par pays dont le Sénégal. Je précise que parmi les cinq, il y a une femme. C’est un Parlement constitué qui tient deux sessions par an, avec à sa tête un bureau composé d’un président et de quatre vice-présidents représentant les régions d’Afrique, un secrétariat avec un secrétaire général et deux adjoints, et dix commissions permanentes. C’est dire que c’est très important pour l’Afrique de savoir qu’il y a un organe qui, demain, s’il est doté de pouvoirs législatifs, pourra légiférer pour l’ensemble du continent.
La deuxièmement raison de ma visite à Dakar, c’est de suivre le processus de ratification des instruments juridiques de l’Union africaine, particulièrement du parlement. La troisième raison, ce sont les relations entre le Parlement panafricain et celui du Sénégal. Il s’agit de voir la coopération entre ces deux institutions. Et sur ce point, il faut relever qu’en tant que président du Parlement panafricain, j’ai de très bonnes relations avec le président de l’Assemblée nationale du Sénégal. Je précise d’ailleurs que le Sénégal est toujours présent, aussi bien dans les réunions de commissions que dans les sessions, par ses fortes délégations qui prennent part à toutes les délibérations. L’un de ses membres, l’Honorable Ndiaye, dirige d’ailleurs l’importante commission Education, culture et tourisme. Sans oublier l’Honorable Aïssatou Sow qui est Rapporteur du Caucus régional Afrique de l’Ouest.

Le débat sur la parité dans le Parlement panafricain a été posé au Sénégal. Qu’en dites-vous ?
Le protocole instituant le Parlement panafricain avait déjà réglé ce problème. Pour chaque délégation, il faut au moins une femme. Ce protocole est allé plus loin d’ailleurs en stipulant que chaque délégation devra comporter au moins deux femmes. Je rappelle que le parlement a été mis en place en 2004 à Addis-Abeba. Nous avons 11 ans d’existence aujourd’hui. Et l’année dernière, nous avions fêté les 10 ans. Seulement, personne ne connaît encore le parlement, alors que nous avons les mêmes missions qui pourraient contribuer au bien-être des populations du continent. Nous intervenons aussi dans la pacification et la démocratisation du continent par exemple.

Comme la question des mandats de trop en Afrique...
Le parlement effectue des missions d’information dans tous les pays en difficulté. Et nous faisons des recommandations à la conférence des chefs d’Etat. Nous avons effectué des missions au Burundi, au Mali, au Soudan, etc. pour proposer des solutions aux conflits. C’est que les gens connaissent beaucoup plus la Commission de l’Union africaine. Pourtant, dans l’Acte constitutif de l’Ua, du point de vue protocolaire, la Commission vient en 5ème position. Malheureusement, c’est elle qui gère les ressources humaines et financières ; ce qui fait qu’elle est plus connue que les autres organes. Donc, nous transmettons nos recommandations via la commission et nous avons l’impression qu’elles ne sont pas suivies d’effets. Qu’à cela ne tienne, nous continuons à jouer ce rôle à travers également les missions d’observation des élections. Au départ, celles-ci étaient indépendantes, mais on nous a associés aux missions d’observation des commissions ; ce qui pose un problème. Et d’ailleurs, à ce jour, une motion est déposée au niveau de l’assemblée pour demander la séparation des missions d’observation du Parlement panafricain de celles de la Commission de l’Union africaine. Il faut savoir que nous sommes des élus alors que la commission représente l’Exécutif. Comment est-ce que, en matière d’élections, on peut mettre et l’Exécutif et le Législatif ? Donc, nous sommes en train de nous battre pour sortir de cette situation. Le gros problème qui se pose, c’est que nous ne disposons pas de moyens suffisants pour notre politique. Tout de même, nous continuons à accompagner la commission dans les missions d’observation des élections, ce qui n’est pas juste.

Parlez-nous un peu de ce protocole qui devrait être ratifié et signé par les Etats membres…
Le premier protocole qui avait institué le Parlement panafricain stipulait que l’organe allait exercer dans les cinq premières années de son existence un mandat consultatif. Et qu’au bout des cinq, il fallait le réviser pour lui conférer les pouvoirs législatifs. Ce qui a été fait puisqu’en 2009, les plénipotentiaires ont commencé. Ces propositions de révision ont été mises à la disposition de la Commission de l’Ua où siègent les organes délibérants de l’institution, c’est-à-dire le Corem (Comité de représentants des ambassadeurs) et le Conseil exécutif composé des ministres des Affaires étrangères des Etats-parties. Lorsque la mouture est partie, elle a été examinée par le Corem, mais on l’a encore envoyée au Comité technique spécialisé (Cts) des organes de l’Ua. Ce comité est composé des ministres de la Justice et des procureurs généraux pour s’assurer de la constitutionnalité des actes qui peuvent être pris et partant, éviter que ces mêmes actes de l’Ua aillent contre les constitutions des Etats. Ces ministres de la Justice et ces procureurs généraux ont adopté ce protocole qui est montré à la conférence pour la première fois au sommet de 2012 à Addis-Abeba. Cependant, le texte avait été adopté moyennant deux articles : l’article 8-1-a et l’article 8-2 qui parlaient justement du pouvoir législatif et du pouvoir de contrôle dont devait être doté le Parlement panafricain. Ces deux articles ont été finalement repoussés pour une large consultation. C’est ainsi que deux ans plus tard, au sommet de Malabo de juin 2014, les chefs d’Etat ont adopté les deux articles qui stipulent désormais que le Parlement panafricain va légiférer sous le contrôle de la Conférence des chefs d’Etat. Ceci est d’autant plus compréhensible qu’il n’y a pas eu entre-temps la mise en place d’un Gouvernement d’union qui devait servir d’Exécutif au parlement. Donc, ce sont les chefs d’Etat qui deviennent ainsi l’organe exécutif et le parlement devait voter les lois-types. On donnait aussi l’initiative au parlement de proposer les projets de lois-types à la conférence. Une fois adoptées par les chefs d’Etat, elles vont rentrer dans les parlements nationaux pour être ratifiées et appliquées à l’ensemble de l’Afrique. Nous avons le problème du changement climatique, du commerce intra-Etats, des migrations et d’autres domaines sur lesquels le parlement peut légiférer sans remettre en cause la souveraineté des Etats.

Est-ce que le parlement peut légiférer sur la question du terrorisme qui touche aujourd’hui plusieurs pays africains ?
Oui, le parlement peut prendre des lois dans ce sens parce qu’en Afrique, chaque Etat a son plan de lutte contre le terrorisme. Mais nous pouvons voter une loi commune. Je peux vous parler du cas de Boko haram que je connais bien : Entre le Cameroun et le Nigeria, il n’y avait pas un accord de poursuites et quand les terroristes venaient attaquer au Cameroun, une fois qu’ils traversaient le Nigeria, l’Armée camerounaise n’avait plus la possibilité de les poursuivre. Nous pouvons légiférer dans ce domaine pour sortir une loi commune à même de faciliter la traque des terroristes dans tout le continent.

Donc, cette loi s’impose ?
L’urgence est de taille parce que c’est quand même un problème très grave. Aucun pays n’est à l’abri du terrorisme. Regardez ce qui se passe en Afrique Centrale, dans les pays du Lac Tchad, en Afrique de l’Est avec les Shebabs, en Afrique du Nord avec le Mali où un seul jour ne passe sans qu’il n’y ait une attaque. Alors, je crois que l’urgence est de mise pour les Etats africains d’avoir une institution forte et des hommes forts pour pouvoir diriger certaines institutions. Ce qui pose problème, c’est le régionalisme, l’appartenance ethnique, les clivages linguistiques et autres qui mettent en cause la compétence. Si je donne l’exemple du Parlement panafricain, il y a ce problème de rotation régionaliste qui ne devrait pas s’expliquer parce qu’une fois élus au Parlement panafricain, nous devons nous considérer comme des représentants du continent, détachés de nos parlements nationaux et de nos pays. Malheureusement dans le parlement, on a ce problème d’anglophones, d’arabophones, de lusophones, de francophones. Or, nous avons une histoire commune et nous devons combattre les maux qui minent notre continent.
A l’échelle locale, on parle d’indépendance ou d’autonomie du Législatif par rapport à l’Exécutif. Est-ce que la question se pose pour le Parlement panafricain.
Ecoutez, le parlement est un organe législatif qui doit être libre. Dans tous les cas, il doit collaborer avec l’Exécutif. Son rôle, c’est de légiférer, mais aussi de contrôler l’action de l’Exécutif parce que nous mettons les impôts des citoyens à sa disposition pour régler les problèmes sociaux qui peuvent se poser dans nos Etats. Donc, je pense que le problème de l’indépendance se pose surtout dans la mission du parlement de contrôler l’utilisation de ces ressources. Mais je voudrais rassurer qu’au regard de ce que le protocole nous assigne, ces missions ne pourront pas entraver la bonne marche des Etats. Ensuite, le pouvoir qu’on nous a donné ne porte pas atteinte à la souveraineté des Etats.
Les chefs d’Etat ont adopté le Protocole à Malabo en 2014. Mais pour qu’il entre en vigueur, il nous faut 28 signatures. Et à ce jour, le Mali est le seul pays à l’avoir signé et ratifié. Donc, si 14 ou 15 mois après la signature de ce protocole nous continuons sur ce rythme, nous aurons un protocole signé et ratifié au bout de 28 ans. Ce qui retarde l’intégration du continent. Et justement, je suis venu au Sénégal pour essayer de rencontrer les hautes autorités du pays pour savoir où en est-on avec l’ensemble des instruments juridiques de l’Union africaine, particulièrement avec ce protocole. Parce que quand on ratifie, les instruments sont déposés à la Commission de l’Ua. Et moi, président du parlement, je ne peux pas vous dire aujourd’hui quelle est la situation du Sénégal.

Le Sénégal est-il un bon élève en matière de ratification ?
Je crois que cela ne devrait pas poser un problème pour le Sénégal puisque c’est un pays où la culture démocratique est très avancée. Je ne pense pas qu’il puisse avoir peur de mettre en place une institution de contrôle démocratique.
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