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Dr Abdou Diaw, expert en finance islamique : «Le waqf doit être géré par une administration crédible»
Publié le mercredi 22 juillet 2015  |  Le Quotidien




Dans le cadre de la campagne de sensibilisation sur la loi relative au waqf adoptée par l’Assemblée nationale depuis mai dernier, le ministère de l’Economie, des Finances et du Plan a organisé mardi dernier un atelier sur cet instrument solidaire islamique à l’intention des membres du Collectif des journalistes économiques du Sénégal (Cojes). En marge de cette rencontre d’échange et de partage, Dr Abdou Karim Diaw, expert en finance islamique, est revenu sur le sens de cettenouvelle loi.

Le Sénégal a adopté il y a de cela quelques mois une loi relative au waqf. Mais qu’est-ce que le waqf ?
Le waqf peut être décrit comme une aumône durable. L’aumône est un acte surérogatoire, c’est-à-dire qui n’est pas obligatoire. Elle peut prendre plusieurs formes. Le waqf est une forme particulière de l’aumône dans le sens où elle est censée être perpétuelle.

Quels seront les impacts de cette loi sur l’économie du Sénégal ?
D’abord avec cette loi, il y a le souci de sécuriser les waqf que l’on constitue. Ensuite, ça crée un mécanisme d’incitation pour pousser les gens à le faire. Quand vous faîtes le waqf, vous ne payez pas d’impôts. Vous bénéficiez d’une déductibilité, d’une réduction d’impôts. Avec le waqf, il y a possibilité d’augmenter le volume des investissements dans l’économie. Si le volume des investissements augmente, la production va augmenter. Lorsque la production augmente, la croissance suit. Il y a cet impact-là sur le plan macroéconomique. Un autre impact, c’est la redistribution des richesses. Lorsqu’on parle de waqf, c’est en général des gens qui sont très riches qui décident de se départir d’une partie de leurs avoirs en faveur des couches les plus démunies. Cela permet à la richesse de circuler dans l’économie et ça permet aussi à ces couches vulnérables de disposer de moyens supplémentaires pour augmenter la consommation. Et lorsque la consommation augmente, la production va augmenter. Ensuite, il y a la création d’emplois avec le waqf. En effet, le waqf doit être géré par une administration parce que lorsqu’on parle d’investissement, il faut recruter des personnes pour prendre en charge cette production-là. Donc, le waqf aura un impact sur la création d’emplois.

Y a-t-il un lien entre le projet de modernisation des daara du gouvernement sénégalais et cette loi sur le waqf ?
Certainement. A l’origine, il y avait un lien entre cette loi sur le waqf et la modernisation des daara dans le sens où la Bid (Banque islamique de développement : Ndlr) qui est l’un des partenaires du Sénégal par rapport à la loi sur le waqf et la modernisation des daaras avait fait de sorte que les revenus qui seront générés des biens constitués par le waqf dans le cadre du building que la Bid va construire seront consacrés aux daara. Mais lors de la formulation de la loi sur le waqf, les fonctionnaires du ministère de l’Economie et des Finances en particuliers de la Dmc (Direction de la monnaie et du crédit : Ndlr) ont eu une vision beaucoup plus globale. Ainsi, cette loi ne sera pas restreinte au projet de modernisation des daaras. Cela permettra à beaucoup de Séné­galais ici ou établis à l’étranger de faire le waqf à d’autres fins. Par exemple, on peut le consacrer au domaine de la santé, de l’éducation, de la lutte contre la pauvreté, etc. Il y a plusieurs applications possibles avec la loi que l’Assem­blée nationale vient de voter.

Quelle est la particularité de cette loi par rapport à celle existant dans d’autres pays comme la Guinée, entre autres ?
Si vous prenez l’exemple de la Guinée, leur loi est trop proche du projet Bid. C’est comme si c’est une loi qui est motivée par un seul projet. Si vous prenez la loi sénégalaise, c’est beaucoup plus général, plus global. Le projet de modernisation des daara y est pris en compte, mais il y a d’autres applications possibles. Si vous prenez le Maroc, ce pays a une longue tradition de waqf. Il y a même un ministère qui dépend directement du roi qui prend en charge le wafq. On l’appelle ministère des Habous. Le waqf au Maroc est beaucoup plus avancé qu’au Sénégal. C’est tout à fait nouveau pour nous. Pour les pays de l’Uemoa, nous sommes les premiers à avoir adopté cette loi. La nouveauté se trouve dans le sens où on est dans un pays laïc et on a pu trouver la possibilité d’intégrer un concept du droit musulman de manière harmonieuse.

Après l’adoption de la loi, quels sont maintenant les défis à relever ?
Le premier défi, après avoir adopté une telle loi, c’est la mise en place d’une administration de gestion du waqf qui est non seulement professionnelle, compétente et crédible, donc intègre aux yeux des potentiels donateurs. C’est le point le plus sensible. Les personnes qui vont composer cette administration du waqf doivent être exemptes de tout reproche. Elles doivent être intègres, connues et crédibles. L’autre élément, c’est la communication. Il y a des gens, s’ils connaissent l’intérêt, le potentiel du waqf, n’hésiteraient pas à le pratiquer. Déjà dans le pays, il y a beaucoup de gens qui ont eu à le faire de manière individuelle. Si l’on parvient à sensibiliser les gens, à avoir une communication effective envers les potentiels donateurs, le waqf pourrait connaître un développement fulgurant dans les années à venir.
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