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Ouverture mouvementée du procès de l’ancien Président tchadien : Habré torture la Cour
Publié le mercredi 22 juillet 2015  |  Le Quotidien
Ouverture
© aDakar.com par DF
Ouverture du procès de Hissène Habré
Dakar, le 20 Juillet 2015 - Le procès de l`ancien président tchadien Hissène Habré s`est ouvert, ce matin, à Dakar. L`ancien chef d`État réfugié au Sénégal depuis 1990 est jugé pour "crimes contre l’humanité, crimes de guerre et crimes de torture".




Ce sera sans doute un procès polémique. D’entrée de jeu en effet, l’on assiste à un incident d’audience avant même l’ouverture officielle du procès. Hissein Habré, qui a donné l’ordre à ses avocats de boycotter les audiences, a surpris Me Clédor Ly en train de parler avec la presse en se faisant passer pour son avocat depuis 10 ans. Habré, qui visiblement n’a pas apprécié, a crié au scandale et traité la robe noire de faux avocat, créant du coup un incident avant l’audience.

Hissein Habré est loin de baisser les bras. Il va combattre jusqu’au bout. C’est du moins ce qu’il laisse voir à l’ouverture de son procès qui s’est tenu hier. Alors que les Forces de l’ordre, le personnel pénitentiaire, les journalistes, les avocats, les victimes s’affairaient dans la salle pour suivre l’audience qui devait commencer, l’ex-homme fort du Ndjamena se fait remarquer par un spectacle digne d’un film hollywoodien.

Ciré Clédor… traité de «faux avocat» par Hissein Habré
Pourtant, ses avocats étaient absents de la salle aux premières heures. Une absence vite remarquée et qui suscite des commentaires, mais ce n’est point une surprise pour ceux qui sont au fait de ce dossier. Les avocats de l’ancien Président du Tchad jugé pour crime de guerre, crime contre l’humanité, avaient en effet reçu mandat de leur client de boycotter les audiences.
Mais contre toute attente, Ciré Clédor Ly, avocat de Habré, absent de la phase d’enquête et de la phase d’instruction, réapparaît subitement. Il est vêtu de sa robe noire et revendique devant les journalistes son statut de conseiller de Habré depuis 10 ans. Il s’assoit sur le banc réservé aux conseils de Habré et commence à donner des interviews aux journalistes. Il raille les Chambres africaines extraordinaires, allant jusqu’à dire que les Cae sont une farce, une comédie. Mais mal lui a pris. Habré, qui écoutait religieusement ses propos, s’est retourné et a crié : «Qui est-ce qui parle à mon nom ? Qui est-ce qui parle derrière moi ? C’est un faux avocat. Un faux avocat. C’est un impérialiste. A bas l’impérialisme ! Allakhou Akbar ! Hissein Habré n’a pas d’avocat», tonne-t-il.

«A bas l’impérialisme !»
Les gardes pénitentiaires le retiennent. Ils veulent le calmer, mais c’est sans compter avec la détermination de Habré qui résiste. Il soulève la main en signe de victoire. «A bas l’impérialisme», répète-t-il. N’ayant pas trop le choix, la sécurité le porte et l’amène dans le box des accusés. C’est le désordre partout. Ses inconditionnels se lèvent et crient : «Vive Habré ! vive Habré ! Président, nous sommes avec toi. Il ne t’arrivera rien», lance un homme hors de lui.
Ensuite, c’est un autre homme vêtu tout de blanc qui continue le spectacle. Gagné par la colère, il vitupère : «Ce n’est pas sérieux. Vous avez vu se qui se passe. C’est un procès ça. Le sort de Habré est déjà scellé. Vous avez entendu Mbacké Fall, le procureur des Cae. Il a dit que Habré va être emprisonné 30 ans.»
Les gardes pénitentiaires s’emploient à vider les perturbateurs de la salle. Ils demandent aux autres de regagner leur place pour que le calme revienne dans la salle. Ciré Clédor Ly, visiblement très atteint par l’attitude de Habré, fait profil bas. Il enlève sa robe d’avocat et se confond anonymement aux nombreux spectateurs venus assister à l’audience. Mais d’autres, ayant l’esprit assez «tordu», voient dans cet incident une orchestration pour que l’accusé puisse se retirer et ne pas assister à l’arrivée de la Cour. Pourtant avant cet incident, Hissein Habré était sagement assis sur son fauteuil égrenant un petit chapelet gris, habillé en blanc, le visage enturbanné…
Après cet incident, Habré a été amené dans une salle à l’intérieur du box des accusés. Il n’a pas assisté à la cérémonie d’ouverture du procès, mais le président de la Cour, Gberdao Gustave Kam, a demandé aux gardes de le faire venir pour comparaître sans violence. Mais Habré a refusé de suivre les gardes pénitentiaires qui devaient l’accompagner jusqu’à la salle d’audience pour sa comparution.
Pour autant, le président des Chambres africaines extraordinaires n’a pas dit son dernier mot. Il a convoqué les articles 275 et 276 du Code de procédure pénale et commet Me Faye Fall d’adresser à l’accusé une sommation à comparaître immédiatement avant de suspendre la séance jusqu’à 15 heures.



Réactions…Réactions…Réactions…

Aboubacry Mbodji, secrétaire général de la Raddho
«Un jour, Deby peut être rattrapé par son passé et sera jugé»
«Pour nous, c’est un jour historique doublement. D’abord pour les victimes qui attendent depuis 15 ans ce procès. Historique également pour le Sénégal et l’Afrique. Parce que pour la première fois dans l’histoire du continent africain, un Etat africain juge un chef d’Etat africain d’un autre Etat africain. Pour nous organisation de défense des droits de l’Homme, c’est une grande victoire pour la manifestation de la vérité. Une grande victoire pour tester la justice pénale africaine. Parce qu’on a l’habitude de dire que les chefs d’Etat africains sont jugés par la Cour pénale internationale (Cpi) dictée par l’Occident. Aujourd’hui, ce sont les Africains eux-mêmes qui vont juger les Africains. Ce procès c’est un avertissement solennel aux autres chefs d’Etats africains qui sont en exercice, pour leur dire qu’aujourd’hui, ils doivent respecter les droits humains et la dignité humaine et qu’ils peuvent rendre compte s’ils commettent des crimes graves.
C’est normal qu’on parle de Deby parce que c’est lui qui avait en charge l’Armée. On peut même dire qu’il était le bras armée de Hissein Habré au moment des faits. Mais en Afrique, compte tenu de l’évolution de la justice surtout de la justice pénale africaine, les Prési­dents en exercice bénéficient d’immunité. Mais peut-être qu’un jour, quand il ne sera plus Président du Tchad et que des victimes portent plainte en ce moment, nous organisations de défense de droits humains nous accompagnerons les victimes.»

Jacqueline Moudeina, avocate des victimes
«C’est un procès exceptionnel, inédit et sans précédent»
Le procès tant attendu de Hissein Habré s’est enfin ouvert à Dakar. L’ex-homme fort de Ndjamena a été extrait très tôt de sa cellule pour qu’il assiste à l’audience sous bonne escorte, selon Mbacké Fall, procureur près les Chambres africaines extraordinaires, afin qu’il puisse comparaître. A 8 heures du matin, Ha­bré était déjà dans la salle, vêtu tout de blanc, chapelet à la main, attendant sagement le dé­marrage du procès. Quelques minutes après, ce sont les avocats de la partie civile qui font leur entrée dans la salle. Jacqueline Mou­deina, Assane Dioma Ndiaye, Georges-Henri Beauthier, des piles de dossiers sous le bras.
Pour le coordonnateur des avocats de la défense, Me Moudeina, «c’est un procès exceptionnel, inédit et sans précédent». Prenant la parole, elle souligne que c’est avec «une immense émotion» qu’elle représente 4 445 victimes. «Je suis aujourd’hui le mandataire, le porte-voix des sans voix, des morts et des suppliciés. Je mesure la tâche immense qui est le fruit de lutte, d’obstination. Pendant trois semaines seront mis à jour et détaillé les agissements de Habré qui a été bourreau de son propre Peuple, le chef d’orchestre, le donneur d’ordre de cette machine répressive.»
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