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Ndiaga Sylla, expert en questions électorales: "La cohabitation est bien envisageable dans notre schéma politique"
Publié le mercredi 15 juillet 2015  |  Sud Quotidien
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© aDakar.com par MC
Les Sénégalais aux urnes pour élire leurs conseillers municipaux et départementaux
Dakar, le 29 juin2014- Le Sénégal élit les conseillers municipaux et départementaux de ses différentes collectivités. Plusieurs personnalités ont accompli ce matin leur devoir citoyen.




Le système politique sénégalais basé sur le présidentialisme n’exclut pas le régime de la cohabitation, selon l’expert des questions électorales Ndiaga Sylla, par ailleurs ex-vice président du Jef Jel. Interrogé par Sud quotidien, l’ancien plénipotentiaire du Pôle des non-alignés à la dernière revue du code électoral analyse par ailleurs froidement les scénarii qui pourraient guetter le Sénégal, en cas de bouleversement de la donne politique, en perspective des prochaines échéances électorales.

Avec la tournure actuelle du débat sur la réduction du mandat présidentiel, certains observateurs pensent de plus en plus que Macky risque de revenir sur son engagement. Partagez-vous ce sentiment ?

Il est vrai que la réduction du mandat prend de plus en plus des tournures inquiétantes au fur et à mesure que l’on s’évertue à mener un débat en profondeur. Et ce qui semblait au début évident ne l’est plus. C’est sous ce rapport qu’il faudrait inscrire ce qu’il conviendrait désormais de considérer comme une tergiversation du chef de l’Etat sur le sujet. Même si l’option référendaire semble la voie royale pour réviser la Constitution à propos de la durée du mandat du président de la République, nous gagnerions, à mon avis, à envisager l’hypothèse où au lieu d’une réduction, il s’agirait de consulter le peuple souverain pour augmenter un mandat en cours. Ainsi la question devrait être abordée avec moins de passion dans une perspective consolidante pouvant assurer une meilleure stabilité de nos institutions.

Pour répondre précisément à la question posée, je me permettrais d’affirmer que le Président ne peut faire volte face quand bien même l’engagement serait une absurdité. Par conséquent, il se doit, à l’image du Président De Gaulle, de contourner le Conseil constitutionnel et de consulter le peuple souverain même si cela constituerait un précédent dangereux. Toute initiative contraire jetterait le discrédit sur son action politique et compromettrait sa marche vers une gouvernance de rupture et de vertu. La parole du Prince reste toujours sacrée sous nos cieux !

Comment va-t-il faire, en cas de rétraction, pour continuer à conserver sa majorité d’autant plus que le mandat des députés pend fin en 2017 ?

En application des dispositions des articles L.149 et L0.150 du code électoral, les élections des députés à l’Assemblée nationale auront lieu dans la période incluse entre le 07 mai et le 04 juin 2017. Il est certain qu’au cas où le septennat serait maintenu pour la présidentielle, la situation se compliquerait davantage pour le Président. D’abord, sa première mission sera de tenter de maintenir la cohésion au sein de sa majorité, encore fragile, et qui va crescendo à l’approche des échéances. Ensuite, il va devoir convaincre le peuple sur le bien fondé de la nouvelle tournure. Enfin, la grande équation à résoudre est celle de sa capacité à se réconcilier avec le peuple des Assises, attaché du reste à la réforme des institutions. C’est dire que la mise en œuvre des réformes institutionnelles est devenue irréversible. Peut-être que le peuple se satisferait de l’adoption d’une nouvelle Constitution et ne se focaliserait pas uniquement sur la question du mandat…

Une prorogation jusqu’en 2019 du mandat des députés peut-elle être envisageable ?

Cela n’est nullement envisageable ! Sinon, cela pourrait provoquer une situation qui serait largement préjudiciable à la stabilité politique et sociale du pays.

Pourrait-on aller vers un couplage des élections législatives et de la présidentielle, en 2019 ou non ?

Au fond, je viens de répondre à cette question. C’est non ! Mais le couplage des élections présidentielle et législatives est plus que probable en 2017 comme je l’ai démontré dans une de mes contributions. En effet, ces deux consultations, en principe, ne seront séparées que par un intervalle de deux à trois mois sans compter que les investitures et le dépôt des candidatures aux législatives se feront en pleine campagne électorale ou entre les deux tours de la présidentielle, dès lors qu’en application des dispositions de l’article L.170 du code électorale, les listes de candidatures doivent être déposées soixante-dix (70) jours au moins et soixante-quinze (75) au plus avant la date du scrutin.

En cas de respect du calendrier électoral et d’organisation des Législatives en 2017, que risquerait Macky si l’opposition gagne les élections ?

Par le respect du jeu démocratique, l’opposition, renforcée par certains alliés du Président pourrait se retrouver majoritaire à l’Assemblée nationale. Mais il va falloir au regard du mode d’élection en vigueur constituer de grandes coalitions pour remporter le scrutin au niveau départemental. De toute façon, ce serait la voie vers la cohabitation forcée si l’on sait que la dissolution de l’Assemblée nationale n’est pas possible durant les deux premières années qui suivent les élections législatives.

Une cohabitation est-elle envisageable dans le schéma politique sénégalais ?

Elle est bien envisageable. Toutefois, il faut l’envisager soit dans le cadre du système politique actuel qui tend plus vers du présidentialisme, soit avec l’adoption d’une nouvelle Constitution appliquant les conclusions de la Commission Nationale de Réforme des Institutions (CNRI) et qui instaure le semi-parlementisme. Dans les deux cas de figures, le Président serait dans l’obligation de jouer le jeu de la majorité parlementaire même s’il garde sa prérogative de nommer le Premier ministre. Sinon, on s’acheminerait vers une instabilité du gouvernement. Il faut reconnaître que la conjonction est déterminante pour la classification de la nature du régime politique. Mais il y a lieu de croire que la maturité démocratique de nos acteurs politiques et le génie du peuple sénégalais permettraient de surmonter cette séquence dans la vie démocratique.

En définitive, il revient au président de la République qui en a la prérogative constitutionnelle, de soumettre un projet ou une proposition au référendum. Toutefois, il ne serait pas indifférent d’ouvrir des consultations à propos de la démarche car il s’agirait de refuser l’enfermement ou d’éviter de réduire une question aussi essentielle à un niveau strictement personnel. Il me semble important pour l’homme d’Etat de se focaliser toujours sur l’enjeu véritable, autrement dit, ce que le Peuple gagne ou perd dans toute initiative.
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