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Assasinats, kidnapping de journalistes en Gambie: Yaya Jammeh, un ‘’serial killer’’ sans frein
Publié le mardi 14 juillet 2015  |  Enquête Plus
Ouverture
© Abidjan.net par Atapointe
Ouverture du 44è sommet de la CEDEAO à Yamoussoukro en présence de 14 chefs d`Etat
Le 44è sommet ordinaire de la Communauté économique des Etats de l`Afrique de l`Ouest (CEDEAO) s`est ouvert, vendredi, dans la capitale politique et administrative de la Côte d`Ivoire, Yamoussoukro en présence de 14 Chefs d`Etat de la sous-région ouest-africaine. Photo: Yaya Djammeh, président de la République du Gambie




Cela fait maintenant dix jours que Alagie Ceesay, un journaliste de la radio Teranga Fm en Gambie, a disparu après être allé à la rencontre de deux agents des services de renseignements gambiens (Nia). Ces derniers demandaient à le voir devant les locaux de sa radio à Kanifing. Une disparition qui rappelle la phobie du Président gambien pour les radios qui diffusent des informations autres que celles voulues par le palais présidentiel de Banjul.


Comme la défunte radio Citizen Fm, la radio Teranga est populaire en Gambie, en raison notamment de la traduction quotidienne en langues nationales des nouvelles publiées par les journaux gambiens. Elle avait été fermée en septembre 2012 à la suite de l’exécution de neuf condamnés à mort, avant d’être rouverte. En janvier 1998, la radio privée Citizen Fm qui diffuse des informations et de la musique dans Banjul et sa banlieue est attaquée et pillée par des individus armés et masqués se réclamant des jeunes miliciens du July 22nd Movement chargé de veiller aux ‘’idéaux de la révolution’’, telle que théorisés par Yaya Jammeh. La radio continue d’émettre malgré tout et un mois plus tard, Baboucar Gaye son propriétaire est arrêté par la police et gardé à vue pendant plusieurs jours.

Les ailes de Citizen Fm coupées en plein vol

En réalité, c’est surtout la revue de presse locale en mandingue, la langue la plus parlée en Gambie, qui dérangeait Yahya Jammeh et ses hommes, tous convaincus que les mandingues forment le noyau dur de l’opposition à leur accession au pouvoir. Le régime de Jammeh qui, à peine dirigeait la Gambie depuis trois ans et demi, était alors éclaboussé par des scandales de détournements de deniers publics soutirés des aides et de grandes quantités de pétrole à enlever en provenance du Nigeria. L’autre sujet chaud qui faisait les choux gras de Citizen Fm était le projet de code liberticide de la presse que Jammeh voulait imposer aux journalistes indépendants. A la suite de l’arrestation de Baboucar Gaye, la radio Citizen Fm est fermée et son matériel, confisqué. Six mois plus tard, le régime de Jammeh accuse la radio d’émettre sans autorisation. Un tribunal kangourou ordonne à Baboucar Gaye de payer une amende et de remettre tout l’équipement restant de Citizen Fm radio aux autorités de la junte. Baboucar Gaye fait appel sans succès. C’était donc la ‘’condamnation à mort’’ de ce canal d’information qui avait fidélisé la majorité des auditeurs dans le Grand Banjul.

Radio One Fm brûlée et contrainte de se taire

L’attaque la plus choquante contre une radio privée gambienne est sans aucun doute celle perpétrée contre Radio One Fm dans la nuit du 10 août 2000. La Gambie était alors secouée par les suites de la répression d’une marche d’élèves au cours de laquelle une douzaine d’enfants et un journaliste de la radio Sud Fm de Banjul sont froidement abattus par l’armée gambienne à Kanifing. Radio One Fm était au cœur des révélations qui ne cessaient de se succéder sur ce drame de l’histoire moderne de la Gambie sous Jammeh. C’est ainsi que des individus encagoulés se revendiquant des ‘’Green Boys’’, l’autre milice violente du régime, mettent le feu au bâtiment de Radio One Fm et chargent toute personne qui tente d’échapper aux flammes. Plusieurs journalistes dont George Christensen, le propriétaire, sont gravement blessés et ne doivent leur salut qu’à l’intervention des populations du voisinage. La radio cesse d’émettre pendant deux jours puis reprend du service avec des moyens très réduits. Les menaces devenues de plus en plus précises, le propriétaire profita des dégâts causés par une tempête sur son antenne pour définitivement fermer Radio One Fm.

Sud Fm Banjul et sa revue de presse réduites au silence et forcées à remballer

Dans l’après-midi du 22 octobre 2005, des policiers débarquent dans les studios de la radio Sud Fm ouverte par le Groupe Sud communications à Banjul. Ils ordonnent de cesser d’émettre jusqu’à nouvel ordre. Pendant huit jours, aucun motif officiel n’est avancé pour expliquer la mesure dictée par la police de Banjul. C’est au neuvième jour qu’un communiqué laconique du gouvernement a été lu sur la radio nationale expliquant que la fermeture de la radio Sud Fm à Banjul vise à préserver les relations entre la Gambie et le Sénégal. Mais cette explication n’est qu’une musique déjà jouée aux oreilles des auditeurs de Banjul, Serrekunda, Brikama, Barra ou encore Amdalaye. La vérité est que les autorités gambiennes avaient une peur bleue de la multiplication de bulletins d’informations quotidiens et d’émissions sociopolitiques diffusées en anglais, en wolof et en français où les Gambiens exprimaient des points de vue divergents sur la marche de leur pays.

Mais l’autre grande menace qui terrorisait le régime du président Jammeh, c’est la popularité acquise chez les Gambiens de la revue de presse en wolof de Sud Fm Dakar diffusée en synchronisation avec la station de Banjul. Or, l’homme fort de Banjul craignait un effet contagion sur les radios locales émettant sur son territoire. Car, pendant cette revue de presse en wolof de Sud Fm Dakar, la liberté de ton dans les critiques contre la personne et le régime d’Abdoulaye Wade en place au Sénégal était appréciée partout en Gambie où la situation calamiteuse de la liberté de la presse ne cessait de se dégrader. Dès lors, Sud Fm était devenue la tribune des journalistes et des organisations de la société civile gambienne qui se battaient contre un projet de loi très liberticide sur le code de la presse gambien.

La tension fut plus vive lorsque le journaliste Deyda Hydara est abattu le 14 octobre 2005 par les ‘’Jungullars’’, l’équipe de tueurs du régime Jammeh. La radio Sud Fm était seule à diffuser le concert de condamnations à la suite de ce meurtre, car plus aucune radio ne diffusait des informations en Gambie. Toutes les radios dites privées sont de fait, condamnées à l’autocensure au risque de subir les attaques des ‘’fous’’ de l’homme fort de Kanilai. Une règle dont Teranga Fm semble s’être soustraite d’où la furie du régime de Jammeh et le kidnapping de Alagie Ceesay.
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