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Plaidoiries dans le procès Aïda Ndiongue: La défense démonte l’accusation
Publié le lundi 4 mai 2015  |  Enquête Plus
Aïda
© Autre presse par DR
Aïda Ndiongue, ex-sénatrice




L’ex-sénatrice libérale, en prison depuis décembre 2013, va être fixée sur son sort à la fin de ce mois, le 29 mai prochain. Son pool d’avocats a livré une dizaine de plaidoiries avant-hier, après celles de la partie civile. Ils demandent la relaxe pure et simple de leur cliente.



Une défense en léger retard en début d’audience, mais revancharde dans les débats, s’est présentée à la barre jeudi pour la suite et fin des plaidoiries de l’affaire Aïda Ndiongue, mise en délibéré le 29 mai prochain. Des conseils sûrs de leur bon droit et incisifs, à l’image de Me Abdou Dialy Kane, qui n’a pas épargné l’autre camp. ‘‘Ma seule crainte est celle que le ministère public m’inspire de demander une peine de 10 ans. Il a quitté sa posture de serviteur de la loi, pour être serviteur de l’Etat’’, a dénoncé l’avocat dans une plaidoirie qui a tenu en haleine toute la salle. Un monologue dans lequel il a essayé de démontrer que sa cliente n’est rien de plus qu’une victime de ‘‘l’exorcisme judiciaire dans l’air du temps, depuis 2 ans’’, et que l’accusation n’a prouvé à aucun moment l’escroquerie sur les deniers publics qu’on lui impute.

Les livraisons fictives dont est accusée sa cliente ne sont également pas fondées, car ‘‘David Hubert Thioune a signé sans aucune forme de réserve le bordereau de livraison’’, a-t-il déclaré. Cette affaire est au pire des cas un contentieux de marché public, selon lui. L’avocat a invité l’accusation à plus de logique, car le nœud-gordien de cette affaire, le contrôleur des opérations financières (COF) Khady Sy Diop n’est pas inquiétée. ‘‘Comment condamner cette dame, alors que le COF n’est pas poursuivi ? ’’ s’est-il demandé. Quant à l’exercice illégal de commerce par un fonctionnaire, Me Abdou Dialy Kane a soutenu qu’Aida Diongue a quitté la fonction publique il y a 30 ans, en demandant une disponibilité. Le seul fait qu’aucun corps de contrôle de l’Etat ne l’ait épinglée prouve de la bonne foi de sa cliente.

Procédure défaillante

Me Abdou Gningue s’en est lui pris aux vices de procédure qui ont entaché cette affaire. Pour lui, la mise en branle de la machine judiciaire, à cause des accusations d’un ‘‘lanceur d’alerte qui serait tombé sur des copies de chèques procède d’un désir de s’acharner sur Aida Ndiongue’’. L’avocat a aussi décrié le fait que l’ordonnance de renvoi ne respecte aucune des exigences fixées par le Code de procédure pénale. Un argumentaire étayé par le fait que cette ordonnance reconnaît l’effectivité de toutes les réceptions du matériel incriminé. ‘‘On a déposé une fiche de suivi et d’évaluation. On y a indiqué les noms, les lieux, et les personnes témoins citées, dont le chauffeur qui dit avoir livré les motopompes’’, s’est emporté le conseil de l’ex-sénatrice libérale. Il a voulu démontrer que l’accusation a essayé de se réajuster, à chaque fois qu’une de ses stratégies semblait infructueuse. Pour lui, opter pour ‘‘la falsification intellectuelle’’ est tout aussi aléatoire que la tentative d’établir ‘‘la falsification matérielle’’, puisque la livraison du matériel est effective. ‘‘ Où sont les preuves de faux? ’’ s’est demandé l’avocat pour qui il n’existe rien de bien solide que les formulations générales et péremptoires de l’instruction.

Des preuves, Me Demba Ciré Bathily estime qu’il n’en existe pas, mais seulement ‘’des faits inexacts qu’on veut prendre pour des faits exacts’’. Pour la simple raison que, selon Me Seydou Diagne, ’’les faits commencent par des accusations de trafic de devises et blanchiment de capitaux pour aboutir au détournement de deniers qui n’existe même pas’’. Tout cela, se désole l’avocat, résulte ’’de l’initiative personnelle et individuelle du Procureur de fouiller dans les affaires d’une personne’’. Et la religion de Me Baboucar Cissé est toute faite dans cette affaire. Selon lui, ’’l’ordonnance de renvoi relève plus de la littérature que du droit’’.

Son confrère Me Ndiaga Sy considère que le juge devait faire une expertise pour évaluer la quantité des produits manquants, s’il en existe réellement. Me Bathily a abondé dans le même sens pour révéler que même la Chambre d’accusation avait recommandé au juge d’instruction de faire des investigations sur les lieux de stock des produits manquants. ’’On a refusé volontairement de faire ces investigations pour rendre les contestations mieux constantes’’, a accusé le conseil qui reproche au procureur de mettre en cause la régularité des marchés gagnés par Aïda Ndiongue, alors qu’il n’en a pas les prérogatives. Abondant dans le même sens, Me Borso Pouye considère que le fait pour Aïda Ndiongue de faire gagner des marchés à ses proches n’est pas un délit.

‘‘…En 2004, elle avait 55 ans…’’

Pour leur part, Mes Ciré Clédor Ly et Doudou Ndoye ont beaucoup insisté sur le délit d’exercice illégal de commerce par un fonctionnaire. Selon Me Ly, ’’c’est par fraude que ce délit a été greffé dans l’ordonnance de renvoi, car il n’y a pas eu d’instruction dans ce sens’’. Par conséquent, la relaxe s’impose. Mieux, l’avocat a relevé qu’au moment où Aïda Ndiongue a gagné les marchés, elle était supposée à la retraite.’’ Déjà en 2004, elle avait 55 ans, or elle a gagné l’ensemble des marchés, en 2010’’, a-t-il précisé. Evoquant le texte relatif à la Fonction publique, Me Ndoye a indiqué qu’un fonctionnaire qui quitte son poste pendant trois ans est considéré comme démissionnaire.

Me Ly est revenu sur le réquisitoire du parquet qui a demandé 10 ans contre tous les prévenus et la confiscation des biens d’Aïda Ndiongue. ’’Nous sommes dans le cadre d’un hold-up d’Etat, car la loi dit que si le prévenu a un descendant, la confiscation ne peut se faire que sur le 1/5 de ses biens et Aïda Ndiongue a un fils’’, a asséné la robe noire. Qui se demande: ‘’Comment la même somme peut être détournée et escroquée par des personnes différentes et au préjudice d’une seule personne?’’.

Fort de tous ces arguments, la défense a plaidé la relaxe pure et simple d’Aïda Ndiongue, Abdoul Aziz Diop, Amadou Ndiaye et Modou Sall, accusés d’avoir détourné 20 milliards issus des marchés des tentes, bacs à ordures et motopompes destinés au plan Jaxaay. Ils sont inculpés, depuis décembre 2013, pour escroquerie portant sur des deniers publics, faux et usage de faux, et complicité.
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