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Serigne Mbaye Thiam: (responsable socialiste): « Le Ps ne doit pas présenter une candidature socialiste que par orgueil »
Publié le jeudi 23 avril 2015  |  Enquête Plus
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© aDakar.com par DF
La BM s`engage pour une Approche systémique pour de meilleurs résultats en matière d`enseignement
Dakar, le 10 Mars 2015 - Le ministre de l`éducation nationale a participé à une rencontre organisée par la BM dans le cadre du programme "Approche systémique pour de meilleurs résultats en matière d`enseignement – Engager le secteur privé (SABER-ESP)". Photo: Serigne Mbaye Thiam, ministre de l`éducation nationale




Serigne Mbaye Thiam a beau être dans un gouvernement de Macky Sall, il ne partage pas pour autant la position du président de la République sur la transhumance, et il le dit haut et fort. Dans cette deuxième et dernière partie de l’entretien accordé à EnQuête, le responsable des élections du Ps par ailleurs ministre de l’Education nationale plaide pour une moralisation de la vie politique. «Le président Wade m’avait sollicité (…). Il m’avait reçu en audience et j’avais décliné son offre de transhumance», révèle-t-il. Mais s’il a été clair et sans ambages sur cette question, il a évité de personnaliser la question de la candidature du Ps en 2017, préférant attendre ‘’le moment opportun pour en débattre’’. En attendant, dans la perspective de la prochaine présidentielle, il met toutes les options sur la table, sauf une candidature d’orgueil ou d’émotion du Ps.



Le bureau politique du Ps s’est démarqué ce week-end des propos du Président Macky Sall sur la transhumance. Pourquoi avez-vous tenu à exprimer votre désaccord sur ce sujet ?

En le faisant, le Ps agit d’abord en partenaire franc, loyal et sincère, et en parti souverain. Le Ps ne serait d’aucune utilité au President Macky Sall s’il acquiesçait à tout. Le bureau politique du Ps n’est pas du tout en phase avec le président de la République sur cette question de la transhumance et l’a clairement indiqué. En ce qui me concerne, j’ai rappelé qu’en mars 2001, à la veille des législatives qui ont suivi la dissolution de l’Assemblée nationale, le président Wade m’avait sollicité alors qu’il venait d’accéder au pouvoir depuis un an pour que je travaille avec lui. Il avait demandé à me recevoir en audience et ma réponse a été de décliner son offre.

Ce qui veut dire que, par ma position personnelle déjà, je ne suis pas en phase avec cette pratique qui consiste à être au pouvoir et, une fois celui-ci perdu, à aller rejoindre le parti nouvellement en charge des affaires du pays. Les gens peuvent être libres de leurs choix politiques et moi, je respecte les choix personnels. Mais on peut constater qu’en général, la transhumance, c’est dans un seul sens, de l’opposition vers le pouvoir, et elle a une acception au Sénégal. C’est le fait d’avoir exercé le pouvoir, d’être en position de responsabilité et une fois qu’on a perdu le pouvoir, d’aller rejoindre le nouveau régime. Et sous cet aspect-là je crois que la classe politique doit avoir des normes en termes d’éthique, de déontologie militante et de valeurs à donner en exemples, normes qui permettent au citoyen d’avoir confiance à la politique et aux hommes politiques. D’ailleurs, ce n’est pas pour rien que la Constitution et le règlement intérieur de l’Assemblée nationale disposent qu’un député qui démissionne de son parti perd son mandat. C’est dire qu’il y a eu un consensus constitutionnel sur cette question.

Donc la massification du parti présidentiel ne peut pas être un justificatif à votre avis ?

A mon sens, non ! Et puis, je ne pense pas que cela soit utile pour la conservation du pouvoir. Quand le Ps était au pouvoir, il y avait des gens qui quittaient l’opposition pour venir rejoindre ses rangs. Le Ps était au pouvoir pendant des décennies, des personnes avaient décidé de quitter l’opposition pour le rejoindre. Cela n’a pas empêché le Ps de perdre le pouvoir en 2000. Mais ce qui s’est passé après 2000, c’est que des personnalités marquantes étaient au pouvoir avec des responsabilités étatiques et politiques à un niveau très élevé, ont combattu farouchement Abdoulaye Wade et le Pds, et les ont rejoints aussitôt l’alternance intervenue. Cela n’a pas empêché le Pds de perdre le pouvoir en 2012. Pour conserver le pouvoir, il faut plutôt des réalisations concrètes et des politiques de rupture en direction des populations. Sur ce plan-là, les premières réalisations du Président Macky Sall sont palpables et le gouvernement est en train de travailler pour pouvoir présenter un bilan à la hauteur des attentes des populations au terme du mandat. C’est surtout à ce niveau-là qu’il faut travailler plutôt que de débaucher. Parce que si la transhumance servait à quelque chose, le Ps n’aurait pas perdu le pouvoir, Abdoulaye Wade n’aurait pas perdu le pouvoir.

Ne pensez-vous pas que la transhumance s’explique par le fait que les partis ou les individus s’allient avec n’importe quel autre parti ou individu en dépit des idéologies ?

Je ne le pense pas. Parce qu’en 2000, année à laquelle on a assisté à une très grande vague de transhumance après la défaite du Président Diouf, il y avait bien d'un côté les libéraux au pouvoir et de l’autre les socialistes dans l’opposition. Il y avait certes des alliés de la gauche avec les libéraux. Mais, ces lignes de fracture idéologique n’ont pas empêché des personnes de transhumer. Et on le constate aussi dans d’autres pays africains. En Afrique centrale, ils appellent cela le vagabondage politique. Maintenant des circonstances historiques tenant à l’intérêt général peuvent amener des partis d’obédiences différentes à s'allier pour l’exercice du pouvoir, sans que cela ne gomme leur identité propre. La transhumance est due parfois à une catégorie de personnes qui pensent que la politique est le seul moyen de se réaliser personnellement. Et peut-être qu’ils n’ont pas d’autres perspectives de carrière, de développement professionnel en dehors de la politique. Peut-être que maintenant il y a des personnes qui rejoignent un parti pour des raisons de conviction ; mais nul n’est dupe : pour la grande majorité, c’est pour continuer à jouir de privilèges attachés à l’exercice du pouvoir.

Comment voyez-vous le compagnonnage entre le Ps et l’Apr ?

Je vais juste reprendre les termes du chef de l’Etat lorsqu’il a été interviewé récemment à Kaffrine. Nous sommes en coalition. Nous sommes dans le gouvernement et à l’Assemblée nationale. Ce sont les deux stations à partir desquelles il faut faire un jugement sur notre collaboration. Dans le gouvernement, nous travaillons correctement. Qu’on soit ministre issu du Parti socialiste, de l’Apr ou autres, on est tous ministres de la République. Nous travaillons en solidarité et il n’y a pas de difficultés du fait de nos origines politiques. A l’Assemblée nationale également, on a une majorité homogène qui vote les lois, qui se concerte, bref, qui est dans un même groupe parlementaire. Donc on peut dire que dans la coalition, les choses fonctionnent correctement.

Il y a tout de même des responsables de l’Apr qui vous accusent de profiter de votre fonction de ministre de l’Education nationale pour implanter le Ps dans le Saloum.

Jusqu’à présent, ils n’ont pas fourni de preuves et ils ne pourront jamais en fournir. En ce qui me concerne, j’ai une haute idée de la charge républicaine que j’exerce au service de l’intérêt général. Je fais marcher ce ministère en tenant compte de ces critères d’intérêt général, d’équité, de transparence, de service public. Maintenant, dans tous les partis, il y a des francs-tireurs. Il y en a au Ps comme il y en a à l’Apr et dans les autres partis. Il y a même des tiraillements au sein d’un même parti politique, a fortiori au sein d’une coalition de coalitions. Quand vous décidez de vous engager en politique, ce ne sont pas ces gesticulations-là qui peuvent vous perturber.

Le bras de fer sur l’emprunt obligataire entre la mairie de Dakar et le régime n’a-t-il pas vicié le compagnonnage ?

Pas du tout ! Le Parti socialiste a exprimé son point de vue sur la question. Mais nous, en tant que membres du gouvernement, nous avons d’autres canaux pour essayer de régler ces questions-là. Nous nous y investissons. Ce qu’il faudrait, c’est que ces questions soient traitées de façon impersonnelle. Bien sûr, c’est une nouveauté au Sénégal. Le ministre des Finances et la mairie de Dakar ont tous avancé des arguments. Je pense que comme la question est traitée actuellement entre les deux parties, il faut laisser à ces deux entités le soin de trouver des solutions qui prennent en compte leurs préoccupations mutuelles. C’est une question qui ne peut pas vicier les relations entre le Ps et l’Apr, c’est entre deux organes de l’Etat.

Lorsque l’Afp a décidé de soutenir la candidature de Macky Sall, il a été demandé au Ps de se déterminer. Est-ce que dans votre parti, vous envisagez d’avoir un candidat ou alors êtes-vous prêts à porter celui de l’Apr ?

Au Parti socialiste, nous n’avons pas les mêmes procédures que les autres. Le Ps a été le premier parti du Sénégal à avoir lancé des primaires. En 2007, pour aller à l’élection présidentielle, on avait lancé un appel à candidature et toutes les coordinations du Sénégal avaient voté. Quand en 2009 aussi il s’est agi d’aller aux élections locales, nous avons demandé à toutes les instances du Parti au niveau des collectivités locales de voter pour savoir si on y allait seul ou dans le cadre de l’alliance Front Siggil Sénégal. Toutes les collectivités locales avaient voté, on a dépouillé et publier les résultats au comité central. C’est sur cette base qu’on est allé en alliance avec le Front Siggil Sénégal devenu Benno Siggil Sénégal par la suite.

En 2007, lorsqu’il s’est agi de désigner le secrétaire général du parti, on a lancé un appel à candidature. En 2012 également. Donc pour la décision de savoir quelle sera la stratégie pour la prochaine élection présidentielle, nous procéderons de la même façon. Nous allons d’abord interroger la base du parti sur tout le territoire national pour savoir quelle est la stratégie à adopter. Dire que le parti socialiste doit avoir nécessairement un candidat est une expression impropre, parce qu’on l’aura nécessairement. Même si on investit une personnalité d’un autre parti, ce sera notre candidat. Si les militants veulent dire maintenant que le candidat sera nécessairement socialiste, le choix se fera par l’organisation de primaires après un appel à candidature. Tout responsable pourra se présenter et les militants voteront librement. Donc, Tout ce bruit n’est pas utile et n’est pas nécessaire.

Quand est-ce qu’on peut s’attendre à cela ?

Je pense que cette question ne peut être agitée qu’après le référendum. On ne peut pas préjuger des résultats du référendum. Le peuple sénégalais peut décider que c’est 2017 ou bien 2019. En fonction des résultats du référendum et de l’analyse qui en sera faite, de la configuration des forces politiques et sociales et d’autres paramètres comme le bilan du Gouvernement, la stratégie de chaque parti politique peut changer. Il y a beaucoup de facteurs, non prédictibles tous, qui peuvent changer. Donc, il faut attendre le moment opportun pour traiter cette question. Et à mon sens, le moment n’est pas opportun.

En dehors de Khalifa Sall, y a-t-il d’autres candidats déclarés au sein du Ps ?

Je ne connais aucun candidat déclaré. Aucun responsable du Ps ne s’est encore déclaré candidat.

Aucun ?

Aucun ! Je n’ai entendu pour le moment aucun responsable du parti socialiste dire : je suis candidat pour 2017 ou je suis candidat à la candidature du Ps. Maintenant, j’entends des militants, des citoyens ou la presse évoquer des noms, au Ps ou ailleurs. Mais ce qui me désole, c’est qu’on évoque des noms comme si c’est une question de personnes, alors qu’elle doit être une question d’idées, de débats sur les politiques publiques, de projets, de programmes. Quand on pense que quelqu’un doit être candidat, on doit reconnaître à la personne des idées développées sur le plan des politiques économiques, sociales, sur l’agriculture, l’énergie, l’éducation et j’en passe. Ce débat doit primer sur celui relatif aux personnes.

Il y a quand même des faits qui font souvent qu’on se focalise sur certaines personnes. Par exemple, pour le poste de secrétaire général du parti, Khalifa Sall le chargé des affaires politiques a mis un terme à la compétition entre Aïssata Tall Sall et Tanor. Deuxièmement, Aminata Mbengue Ndiaye est promise numéro deux de fait. Comment pouvez-vous expliquer de telles décisions ?

Déjà lors du congrès de 2007, le mouvement national des femmes du Ps avait demandé qu’Aminata Mbengue Ndiaye soit le numéro deux du parti et beaucoup de responsables étaient acquis à cette idée. D’abord pour ce qu’elle représente elle-même au sein du parti, au sein du mouvement des femmes, et aussi au nom de la parité. Personne dans le parti n’a contesté le choix d’Aminata Mbengue Ndiaye comme numéro deux. Personne. Elle le mérite amplement.

Et la perte de vitesse d’Aïssata Tall Sall ?

Si vous pensez au poste de porte-parole, je peux vous dévoiler que déjà en 2007, ce poste ne l’avait pas emballée. Lors de la campagne présidentielle de 2012, elle était pressentie en plus de porte-parole du parti, pour être le porte-parole du candidat. Elle n’en avait pas voulu. J’étais directeur de campagne. Donc je sais bien ce dont je parle. Et tout le monde peut constater qu’elle s’est de plus en plus détachée du poste de porte-parole. Donc, ce n’est pas une sanction, cette décision correspond à son vœu de ne plus exercer cette fonction. Et naturellement, Abdoulaye Willane qui était son adjoint et qui mérite ce poste et à toutes les qualités aussi a été retenu pour lui succéder.

Comment expliquez alors ses absences répétées en bureau politique ?

Ça, c’est elle qui peut l’expliquer. Je ne connais pas les raisons de ses absences.

C’est un secret de polichinelle que Khalifa Sall va être candidat. Et l’on évoque de plus en plus votre départ du gouvernement. Quand exactement ?

Je ne veux pas faire de conjectures. Je ne suis pas au courant qu’un responsable soit candidat, parce que si c’est le cas, la première instance qu’on informe, c’est son parti. Et le Ps n’a désigné personne comme candidat.

Mais il y a des mouvements périphériques qui ont déjà investi Khalifa Sall comme candidat du Ps à la future présidentielle.

Au Parti socialiste, nous n’avons pas de mouvements périphériques, nous avons des organes et des instances réguliers qui viennent d’être renouvelés. Maintenant oui, Il y a effectivement des mouvements qui travaillent à porter diverses candidatures. Mais pour le Ps, et comme Tanor l’a bien précisé, aucun mouvement ne peut imposer au parti son agenda ou son candidat. Mais tant que le débat n’est pas posé dans le parti, en tant que secrétaire national chargé des élections, je ne peux pas me prononcer sur des supputations. En 2007, on avait dit que Tanor ne pouvait pas être candidat naturel du Parti. Vous comprenez que quelqu'un d’autre ne puisse pas l’être si le secrétaire général lui-même n’avait pas ce privilège. Et au Ps quand même, nous avons la chance de compter plusieurs présidentiables. Donc, si les militants décident que le Parti doit avoir son propre candidat Ps, nous n’aurons que l’embarras du choix.

Est-ce qu’on peut s’attendre à ce que Tanor laisse la place au plus jeune si jamais le Ps doit avoir un candidat ?

Ce n’est pas à Tanor de laisser la place ou de ne pas laisser la place. Le mot appartiendra aux militants du Ps qui vont voter à bulletin secret et désigneront le candidat. Il y a des militants qui pensent que le Ps doit avoir un candidat issu de ses rangs parce qu’il a amené le pays à l’indépendance, parce qu’il a eu toujours un candidat… donc il n’est pas imaginable que le Ps n’ait pas son propre candidat. D’abord, en le disant, ils excluent le fait que le Ps, même en coalition avec d’autres partis, puisse s’entendre avec ses alliés sur une candidature autre que celle du Ps. Nous leur disons donc que même si vous venez en coalition avec nous, c’est nous Ps qui devons désigner le candidat. Le Ps ne peut pas dire, même avec l’Apr, je ne suis pas un souteneur, et dans le cadre d’une autre coalition, demander aux autres partis d’être ses souteneurs.

Donc il n’est pas exclu que le président Macky Sall soit votre candidat ?

On n’en est pas encore là. Le moment venu, le débat sera posé dans le parti et sera tranché par les militants. A ce moment, il sera posé sur la table toutes les options et stratégies possibles de reconquête du pouvoir. Et en fonction de ces options et stratégies, prendre une décision en fonction de l’intérêt du pays et du Parti. Parce qu’on est en coalition avec un président et on doit nécessairement le soutenir pour renouveler son mandat n’est pas un dogme. Parce qu’on est le Ps avec son histoire et donc on doit nécessairement présenter un candidat n’est pas non plus un dogme. Mais dans tous les cas, le Ps ne peut pas être un parti souteneur. Il ne peut être qu’un parti partenaire, que ce soit avec l’Apr ou d’autres. Mais quand on est des partenaires, on se respecte. Le Ps ne peut pas non plus traiter cette question avec de l’émotion ou de la nostalgie parce que justement on est le Ps ; nous ne pouvons pas nous permettre d’avoir une candidature de témoignage ou d’orgueil. Nous devons réfléchir froidement en fonction des intérêts de notre pays et de notre parti.

Parmi les différentes options possibles, quelle est celle qui vous semble être la plus appropriée pour passer du septennat au quinquennat ?

C’est une question technique. Il y a des gens dont c’est le métier : ce sont les constitutionalistes. Et il y a une institution dont c’est la mission et qui doit se prononcer le moment venu : c’est le Conseil constitutionnel. Dans un Etat de droit, on doit respecter les prérogatives des différentes institutions. Donc il faut laisser au Conseil constitutionnel le soin de trancher cette question sur le plan juridique. Et à partir de ce moment, tous les Sénégalais respectueux de l’Etat de droit doivent se conformer à la décision ou à l’avis du Conseil constitutionnel.
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