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Sud Quotidien N° 6395 du 26/8/2014

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Entretien avec le président Alpha Condé: "Je ne peux être au pouvoir en Guinée et avoir un problème avec le Sénégal"
Publié le samedi 27 septembre 2014   |  Sud Quotidien


Alpha
© Autre presse par DR
Alpha Condé, président de la République de Guinée


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Le président de la République de Guinée, le Pr Alpha Condé a nié l'existence d'une brouille avec le Sénégal, même s'il estime que la fermeture des frontières par notre pays a été faite sous le coup de la panique. Dans cet entretien, le Président Condé est revenu sur l'affaire du transfert de l'argent via Dakar, et fait aussi le point sur la fièvre Ebola « qui est maîtrisée à Conakry où il ne reste que six cas », selon lui.

Il y a beaucoup de supputations ces derniers temps au sujet des relations entre la Guinée et le Sénégal, à la suite de l’apparition de la fièvre Ebola. Qu’en est-il réellement ?

Je pense qu’il faut d’abord faire un peu d’histoire, parce que les gens ne connaissent pas mes relations avec le Sénégal. Quand moi je suis rentré en Guinée pour la première fois en 1991, à cette époque le Président Lansana Konté n’acceptait pas le multipartisme. J’ai eu beaucoup de difficultés. Et comme il voulait m’assassiner, c’est à l’ambassade du Sénégal que je me suis réfugié, pas dans une autre ambassade. C’est à l’ambassade du Sénégal. (Ndlr : Makhily Gassama était l’ambassadeur du Sénégal en Guinée à l’époque. Il a osé s’interposer. Une première en Afrique). Et le président Diouf a négocié et a envoyé son avion militaire me chercher. Et à partir de ce moment, jusqu’au départ du Président Diouf, nous avons lié amitié. Je venais à Dakar, il me donnait un véhicule. Et avec ça, j’allais voir mes amis opposants : les Landing (Savané), même Wade, etc. Et lorsqu’il arrêtait Dansokho (Amath) et Landing, je suis allé le voir pour lui dire : « Mon grand frère tu ne peux pas arrêter Wade et Landing pour le moment ». Ensuite, quand j’ai été emprisonné, les avocats africains se sont mobilisés. Parmi eux, trois sénégalais dont Me Ousmane Ngom. Le collectif était dirigé par Me Boucounta Diallo. Et toute la population sénégalaise m’a soutenue. La preuve, Ousmane ngom est descendu dans la rue pour crier : «On a libéré Alpha. On a libéré Alpha ». Ensuite, vous vous rappelez, quand je suis venu à Dakar, Albert Bourgi et Babacar Touré l’actuel Président du CNRA(Conseil National de Régulation de l’Audiovisuel ) ont organisé une rencontre au niveau de la place de l’indépendance et toute la classe politique était là, opposition et mouvance présidentielle confondues. Donc moi, j’ai une histoire avec le Sénégal. Je ne peux pas être au pouvoir en Guinée et avoir un problème avec le Sénégal.

Vous savez, avec l’Ebola, il y a une panique générale. Donc, je comprends bien les gens qui prennent des décisions parfois irrationnelles. Cela peut se comprendre. Seulement, ce que j’ai expliqué, à partir d’un moment donné, il faut quand même que la raison revienne. Il y a Air France qui fait un vol quotidien sur la Guinée. Brussels Airlines fait trois vols par semaine. Royal Air Maroc la même chose. Le Mali qui a une plus longue frontière avec la Guinée que le Sénégal n’a pas fermé ses frontières.
Le Sénégal, au début, à cause de la panique a pris des mesures. Mais, je pense qu’il est plus simple de prendre des mesures à l’aéroport. Par exemple, personne ne peut monter, en avion, en Guinée, sans avoir subi trois contrôles de température : un premier avant d’accéder à l’appareil de contrôle , un deuxième avec un ordinateur et le dernier avant de monter dans l’avion. Avec la compagnie, on prend votre température et on marque ça sur votre carte d’embarquement. Même si vous avez 37,7° de fièvre, vous ne montez pas dans l’avion.

Mais la fermeture des frontières par le Sénégal vous a un peu perturbé. N’est-ce pas ?

Prenons les frontières terrestres, vous savez que quand vous fermez les frontières les gens passent par la brousse. Et ce sont les mêmes populations des deux côtés. Est-ce que vous pouvez mettre des gendarmes tout au long de la frontière, et des brousses? Il est mieux de faire des passages sécurisés, au moins les malades ne pourront pas passer. Mais ce qui me gêne le plus, c’est l’aéroport et le port. Personne ne peut prendre l’avion en Guinée s’il a 37,5 de température. Et au Port, on a pris les mêmes mesures. Donc, aujourd’hui les bateaux qui partent de la Guinée ne peuvent plus s’arrêter à Dakar. Cela veut dire qu’on tue notre économie. Maintenant pour aller à Conakry à partir de Dakar, vous êtes obligés d’aller à Paris, et de Paris venir à Conakry en passant par Casablanca. Alors qu’on est à une heure de vol. Maintenant, la panique est passée. Je pense que les gens commencent à comprendre que l’Ebola ne se transmet que quand le malade est au dernier stade. La preuve, il n’y a aucun cas d’Ebola en France, en Belgique et au Mali …

Je pense qu’on va revenir à la raison. D’abord, le Sénégal n’a jamais envoyé un avion en Guinée. On a dit seulement, si vous devez envoyer quelqu’un, laisser nous prendre les dispositions médicales pour que si le gosse vient, qu’on le prenne en charge pour voir s’il est vraiment guéri ou pas. Ce que j’ai appris à travers le ministre des affaires étrangères, c’est qu’ils l’ont déposé à Kédougou. C’est un peu gênant pour nous parce qu’on ne sait pas par où il est entré en Guinée. Parce qu’on doit le prendre en charge pendant quelques jours, pour être sûr qu’il est guéri. Maintenant, les gens racontent n’importe quoi, mais ce n’est pas grave. Moi, je pense qu’il y a des gens qui cherchent à créer des troubles entre la Guinée et le Sénégal. Moi, je ne suis pas fou.
Même quand j’ai eu des problèmes avec Me Abdoulaye Wade, je n’ai jamais perdu de vue que nous sommes juste de passage, et que seuls les peuples sénégalais et guinéen demeurent. Donc, moi je ne peux pas faire de polémiques avec tout ce que le peuple sénégalais a fait pour moi.

Tout laisse penser qu’il existe de petites divergences avec le président Macky Sall. Avez-vous envisagé de prendre langue avec lui pour dissiper les nuages d’incompréhension ?

Je l’ai appelé pour qu’il accepte que Brussels Airlines atterrisse à Dakar, si les passagers viennent de Guinée. Qu’ils prennent leur température. Il m’a répondu qu’il va voir. Je l’ai rappelé, je ne l’ai pas eu. Ensuite, il m’a rappelé lui-même. On a discuté. Il m’a dit : on va voir. J’ai préféré attendre pour que les esprits se calment. Je vais l’appeler. Je voulais d’abord m’expliquer devant le peuple Sénégalais. Quand les gens désinforment le peuple sénégalais, il faut que je m’adresse d’abord au peuple.

La presse a fait état de transfert d’argent en provenance de la Guinée, via Dakar. Quel commentaire ?

Comment voulez vous qu’on envoie l’argent par Emirates, si Emirates ne vient plus en Guinée ? Vous faites vos transactions financières avec la banque de France ? Quand le Sénégal doit payer 100 millions de Dollars de marchandises en Chine, comment vous faites ? Ce n’est pas la banque de France qui verse les devises. Nous avons notre monnaie (ndlr, sylli)? On n’est pas de la zone CFA. En Guinée, on a l’unité de Caisse. Seule la Banque centrale détient les devises. Aucune banque commerciale n’est autorisée à avoir les devises. Donc, quand ils commandent, ils donnent l’argent guinéen à la banque centrale qui paie aux clients. Pour ça, il faut que la banque centrale ait de l’argent dans les différentes banques. C’est un B.A BA. Quand l’argent vient à Dakar, il vient avec toutes les garanties de la Banque centrale. La preuve, le gouverneur de la banque centrale a fait une conférence de presse pour dire qu’il peut envoyer tous les documents.

Pour ce qui est de la fièvre Ebola, pouvez-vous nous faire le point de cette épidémie dans votre pays ?

Ebola a commencé en Guinée. C’est une maladie grave, mais pas une fatalité. Ensuite, lorsque le malade est pris en charge assez tôt, il a 70% de chances de guérisons. Nous, on était presque arrivé à la fin. On voulait fermer le centre, mais l’Ebola s’est développé au Libéria et en Sierra Leone. Vous savez, ce sont des pays qui étaient en guerre. Donc, il y a des régions qui étaient des zones rebelles, il n’y a pas encore beaucoup de structures. Et comme les gens ne peuvent pas se soigner là-bas, ils traversent la frontière et viennent chez nous. C’est comme ça qu’Ebola est revenu en passant par la forêt. Et comme les médecins avaient pensé que la maladie était maîtrisée, ils se sont laissé aller. Et il y a un malade qui est venu de Bo, en Sierra Leone, a contaminé les médecins qui ne se sont pas protégés. Et c’est reparti. C’était maitrisé complètement. C’est maitrisé. La preuve, à Conakry il n’y a que six cas. Le tort que l’on a eu, c’est de mettre le centre à Conakry. Il va être délocalisé. Conakry n’abritera plus de centres de soins pour les malades d’Ebola. Par contre, maintenant nous devons aider le Liberia. Même si je maitrise l’épidémie en Guinée, il faut que j’aide le Liberia. La preuve, je n’ai pas fermé les frontières. Les malades traversent pour venir chez nous parce qu’ils n’ont pas de laboratoires là-bas.

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