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Enquête Plus N° 970 du 8/9/2014

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Mutisme de Karim Wade: Un couteau à double tranchant, selon des magistrats
Publié le mardi 9 septembre 2014   |  Enquête Plus


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© aDakar.com par DF
Le procès de Karim Wade s`est ouvert à Dakar
Dakar, le 31 Juillet 2014 -Karim Wade, le fils de l`ex- président de la république du Sénégal, a fait face aux juges de la Cour de Répression de l`Enrichissement Illicite (CREI). Ancien ministre durant le règne de son père, Karim Wade est accusé de s`être enrichi de façon illicite.


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Depuis l’ouverture de l’instruction d’audience, dans le procès de Karim Wade, les magistrats de la Cour de répression de l’enrichissement illicite ainsi que les avocats de l’Etat se heurtent au silence de Karim Wade et Pape Mamadou Pouye. ‘’EnQuête’’ a donné la parole à des professionnels du droit qui, dans l’ensemble, désapprouvent la stratégie de défense du fils de l’ex-président Wade.

‘’Nous irons à fond dans le fond’’, avait lancé Karim Wade au président de la Cour de répression de l’enrichissement illicite (CREI). Au finish, l’ancien ministre des Transports et des Infrastructures s’est contenté de lire une déclaration, avant de se réfugier derrière son présumé complice Ibrahim Aboukhalil dit Bibo Bourgi. Karim Wade refuse systématiquement de répondre aux questions des juges et des conseils de l’Etat, dans le cadre de son procès pour enrichissement illicite.

‘’Je ne répondrai à aucune de vos questions, tant que Bibo Bourgi ne sera pas soigné et en état de comparaître’’, est le refrain qu’il entonne, depuis que les débats sur le fond ont démarré. Son ami d’enfance et co-détenu Pape Mamadou Pouye a, lui aussi, adopté la même stratégie de défense, mais sur les questions qu’il juge en relation avec Bibo Bourgi.

Quid des conséquences du silence des prévenus ? ‘’Il n’en existe pas’’, selon des magistrats. ‘’Dans le cas où il y a une enquête préliminaire suivi d’une instruction, la juridiction de jugement a déjà des éléments d’appréciation de base’’, explique un conseiller à la Cour d’appel. Selon ses explications, la stratégie du silence est un couteau à double tranchant. ‘’Le risque pour Karim Wade, dit-il, est que les éléments de sa déclaration peuvent être utilisés contre lui’’.

Notre interlocuteur de poursuivre : ‘’S’il pense mettre la Cour mal à l’aise, même si par ailleurs celle-ci aurait aimé un débat contradictoire pour que la lumière jaillisse, il se trompe. La Cour est obligée de s’en tenir aux éléments du dossier ainsi qu’aux déclarations des témoins et co-prévenus’’. D’après toujours notre interlocuteur, cette démarche de Karim Wade aurait pu avoir l’effet escompté s’il n’y avait pas de témoins et si le prévenu n’avait pas fait de déclaration à l’enquête et à l’instruction. ‘’Dans ce cas, les seules accusations du parquet spécial ne suffisent pas à la Cour pour prendre une décision’’.

‘’Une très bonne stratégie et très bien murie’’

Et pourtant, un avocat inscrit au barreau de Dakar considère qu’il s’agit là ‘’d’une très bonne stratégie, très bien murie’’. Selon ses explications, ‘’une stratégie de défense dépend toujours de ce que l’on veut’’. Par conséquent, souligne-t-il, ‘’comme l’Etat a voulu faire de ce procès un procès politique, il est normal que Karim Wade adopte cette attitude’’. Pour lui, le fils de l’ex-président est très ‘’cohérent’’ dans sa démarche. ‘’D’abord, il se présente comme un prisonnier politique ; ensuite, il s’excuse auprès de ses amis et demande que Bibo Bourgi soit soigné. Ainsi, il cherche à décrédibiliser la CREI par rapport à son attitude et il va essayer de se faire passer pour un martyr’’, explique la robe noire.

Un de ses confrères constitué pour un des présumés complices de Karim Wade abonde dans le même sens. ‘’C’est une attitude légitime, dans la mesure où ils déclarent que 90% du patrimoine qu’on lui attribue appartiennent à Bibo Bourgi’’, soutient notre interlocuteur qui requiert l’anonymat. Il se désole que les gens se focalisent ‘’trop sur le fond’’ or, dit-il : ‘’la forme est une sorte de pont qui mène vers le fond’’.

A son avis, la démarche de Karim Wade se justifie par une violation de la procédure ‘’de bout en bout’’. Toutefois, la robe noire estime que l’attitude de Pape Mamadou Pouye est beaucoup plus ‘’réfléchie’’. ‘’Pouye a refusé de répondre aux questions en relation avec Bibo Bourgi. Donc, Karim Wade aurait dû donner des explications sur les 10% qui représentent son patrimoine’’, souligne l’avocat. ‘’Ce n’est pas toujours évident qu’on s’en tire parce qu’on a répondu aux questions des juges’’, fait remarquer un autre avocat qui ne voit aucune objection par rapport à la stratégie de défense des prévenus.

‘’C’est une très mauvaise stratégie et c’est enfantin’’

L’avis de ces trois avocats est loin d’être unanime. D’autres juristes interrogés ne cautionnent pas la stratégie du silence. ‘’C’est une très mauvaise stratégie et c’est enfantin’’, soutient d’un ton ferme un avocat. Avant de poursuivre : ‘’Dans un procès pénal, il faut toujours se défendre, car le silence peut être considéré comme une acceptation tacite des charges, surtout lorsqu’il y a des témoignages à charge’’. Il pense de ce fait que Karim Wade, qui considère que les 90% du patrimoine qu’on lui impute appartiennent à Bibo Bourgi, devait se prononcer au moins sur le reliquataire de 10%. Ne serait-ce qu’au ‘’nom de la transparence et de l’opinion qui l’écoute’’.

D’après son analyse, cette attitude de l’ancien ministre ne peut pas être mise sur le registre de la notion de ‘’défense de rupture’’. Créée par le célèbre avocat français Jacques Vergès, la défense de rupture se définit comme la stratégie judiciaire consistant à opposer l'opinion publique à l'institution de la justice. Dans le cas de Karim Wade, l’avocat considère qu’il s’agit tout simplement ‘’d’une fuite en avant’’ et une façon pour le prévenu de se dédire, après des déclarations faites à l’enquête préliminaire et à l’instruction. ‘’On aurait pu le comprendre, s’il avait fait comme Hissein Habré, en refusant de parler depuis l’enquête’’, déclare la robe noire, convaincu que Wade sera pris dans son propre piège, car il sera obligé de répondre aux accusations des témoins.

Une stratégie adoptée ‘’tardivement’’

La même position est dégagée par un magistrat en service à la Cour d’appel de Dakar. ‘’S’il est en train d’imiter Hissein Habré, il faut qu’il sache que l’ancien président tchadien n’a jamais accepté de parler et c’est une constante chez lui’’, constate le juge qui pense que Karim Wade a adopté cette stratégie ‘’tardivement’’. Mieux, notre interlocuteur estime que cette attitude serait beaucoup plus acceptée si elle émanait des présumés complices.

‘’La complicité, c’est un délit d’emprunt. Donc, sa démarche serait compréhensible si Bibo était désigné comme l’auteur principal’’, révèle le juge. A son avis, le procès devait être pour Karim Wade ‘’une occasion pour édifier l’opinion’’, à moins que, lance-t-il, ‘’Karim Wade ait peur d’être confronté aux témoins publiquement’’.

Un autre magistrat en service au Palais de Justice considère le silence de Karim Wade comme ‘’une méthode fallacieuse pour ne pas aller au fond’’. Pour lui, Karim Wade et ses avocats sont ‘’en train de s’amuser’’ avec le peuple et lui manquent de respect. Car, dit-il : ‘’s’ils ne sont pas contents de la décision qui sera prise à l’issue du procès. Ils peuvent faire un recours à la Cour suprême’’.

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