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Sud Quotidien N° 6395 du 26/8/2014

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Pr Ababacar Guèye sur la révision de l’article 27 de la Constitution: Macky Sall peur faire comme Wade
Publié le mercredi 3 septembre 2014   |  Sud Quotidien


Le
© aDakar.com par DF
Le Tribunal du Cored installé en présence du chef de l`Etat
Dakar, le 27 Août 2014- Les membres du Tribunal des pairs du Conseil pour l`observation des règles d`éthique et de déontologie dans les médias (CORED) ont été officiellement installés mercredi à Dakar au cours d`une cérémonie solennelle présidée par le chef de l`Etat, Macky Sall, en présence de représentants de plusieurs segments de la société sénégalaise. Phot: Macky Sall, président de la République


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Le président de la République, est obligé de passer par la voie référendaire pour réviser l’article 27 de la Constitution. Toutefois, d’autres pistes s’offrent à Macky Sall même si, juridiquement, il va violer allégrement la loi fondamentale, comme son prédécesseur l’avait fait en 2008. C’est ce que le Professeur de droit public, Babacar Guèye, appelle, le cas échéant une «révision pirate».

Sidy Lamine Niass a jeté un pavé dans la marre, en rappelant dans son éditorial d’hier, que l’ex-président de la République avait allégrement violé la Constitution en 2008, pour modifier l’article 27 sans passer par la voie référendaire, comme l’exige un des alinéas de cette disposition.

Abdoulaye Wade avait usé et abusé de sa majorité mécanique, pour modifier l’article 27 qu’il a fait passer de deux à trois alinéas. Créant ainsi un flou artistique, sujette aujourd’hui encore à interprétation.

La clameur des juristes et des droits de l’hommiste d’alors, n’avait pu arrêter la volonté du pape du Sopi, rappelle le professeur Babacar Guèye que nous avons joint au téléphone hier, lundi 1er septembre.

«Il y a eu un débat à l’époque. J’ai, moi-même, élevé la voix pour dire qu’ils (les libéraux, Ndlr) ont violé la Constitution. Et lorsque le pouvoir viole la constitution, le seul recours possible, c’est d’introduire un recours en inconstitutionnalité devant le Conseil Constitutionnel ». Or, regrette le professeur du droit public, à l’Université Cheikh Anta Diop, «tout le monde n’a pas la possibilité, au Sénégal, d’aller devant le Conseil Constitutionnel, dans une procédure de contrôle par voie d’action».

«Cela veut dire, qu’avant promulgation de la loi, seul le président de la République et l’Assemblée Nationale, ont la possibilité de saisir le Conseil constitutionnel pour faire déclarer la loi inconstitutionnelle, et paralyser la loi qui est sur le point d’être adoptée par l’Assemblée nationale», indique-t-il.

«Or, semble se désoler le Pr Guèye, l’Assemblée nationale d’alors, complètement dominée par le Président Wade, n’allait pas le faire».

Quid de la minorité d’alors ? Le professeur Babacar Guèye répond qu’elle «savait à l’avance que le conseil constitutionnel se déclarerait incompétent, s’il était saisi, parce qu’il n’entre pas dans les attributions du conseil constitutionnel de contrôler la constitutionnalité d’une loi constitutionnelle».

«C’est pour cela que les participants aux Assises nationales, souligne-t-il, ont voulu réviser les compétences du conseil constitutionnel pour les élargir».

Et d’expliquer, «le conseil constitutionnel peut contrôler la constitutionnalité d’une loi ordinaire, mais pas d’une loi constitutionnelle. Voilà pourquoi, il ne servait à rien d’attaquer cette loi devant le conseil constitutionnel». «C’est pourquoi Sidy Lamine Niass, au fond, a raison, parce que le conseil constitutionnel s’est toujours déclaré incompétent», confie-t-il.
«Vous avez souvent entendu le conseil dire : «Je suis incompétent». C’est pour cette raison-là, puisqu’on lui soumettait des lois constitutionnelles qu’il ne pouvait pas examiner».

MACKY PEUT CLONER WADE

A la question de savoir, si Macky Sall peut, à son tour, ne pas passer par la voie référendaire dans un contexte économique morose, en décidant de violer la constitution pour un acte démocratique consolidant, le juriste estime que c’est possible.

Mais s’empresse-t-il de préciser : «c’est ce que j’appelle, moi, une révision pirate, parce qu’il le ferait, en sachant tacitement qu’il viole la constitution».

«Mais ajoute-t-il, il le fait pour la bonne cause. On pourra le justifier sur le plan politique et éthique, mais sur le plan juridique, ce n’est pas acceptable».

«Cependant, comme moi, les puristes en droit, ne regardaient pas cela d’un bon œil. Mais, le sénégalais lambda, qui a des problèmes pour finir les mois, en sachant qu’il a des parents en brousse, et qui ont du mal à s’en sortir, pourra dire : «cet argent qu’on met dans le référendum, on pourra le mettre dans la campagne».

«Donc, c’est justifié du point de vue politique et éthique parce qu’il le ferait pour la bonne cause, mais du point de vue du respect de l’Etat de droit, ça serait problématique».

INTERPRETATION LITTERALE : WADE OFFRE A MACKY LA SOLUTION

En charcutant l’article 27 de la Constitution, le président Abdoulaye Wade a rajouté une confusion dans laquelle Macky Sall pourrait s’engouffrer pour éviter le poids économique du référendum.

«Sur le plan juridique, il peut s’accrocher à une interprétation littérale», a également confié le Pr Babacar Guèye.
En effet, le juriste fait savoir que l’article 27 comprend désormais 3 alinéas.

L’alinéa 1er stipule que «la durée du mandat du président de la République est de cinq (5) ans».
Le 2e alinéa indique que «le mandat est renouvelable une seule fois».

Et le 3e alinéa dira que «cette disposition ne peut être modifiée que par voie référendaire».
«La préposition «cette» disposition, elle s’adresse au 2e alinéa ou à l’ensemble de l’article ?», s’est interrogé le Pr Guèye.

Et de répondre : «on peut faire une interprétation littérale, en disant que «cette», s’adresse à l’alinéa qui précède immédiatement. Et donc, le 1er alinéa n’est pas concerné. Or, le 1er alinéa, traite de la durée du mandat et, à contrario, on pourrait dire qu’on peut modifier sans passer par le référendum».

Mais, s’est-il là aussi empressé de dire que «c’est une explication que je considèrerais comme «tirée par les cheveux». Ce n’est pas une bonne argumentation sur le plan juridique».

Le Professeur de droit a tenu à souligner que «la première version que nous avons rédigée ne comportait que 2 alinéas, et cette disposition concernait l’ensemble, à la fois la durée et le mandat. Le véritable esprit de cette disposition était d’éviter qu’un président de la République fasse plus de 10 ans à la tête de l’Etat».

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