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Enquête Plus N° 948 du 12/8/2014

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Entretien... Moustapha Diakhaté, président du groupe parlementaire BBY: ‘’Le Président Macky Sall subit des pressions’’
Publié le mercredi 13 aout 2014   |  Enquête Plus


Moustapha
© Autre presse par DR
Moustapha Diakhaté, président du groupe parlementaire Benno Bokk Yaakaar


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La décision du président de la République de ne pas donner une suite favorable à certains dossiers serait liée aux pressions qu’il subit. L’explication est du président du groupe parlementaire BBY. Dans cet entretien accordé à EnQuête, Moustapha Diakhaté se prononce sur le procès de Karim Wade, le fonctionnement de l’Assemblée, entre autres questions.

Le procès de Karim Wade s’est ouvert sur fond de polémiques et de déballages. Cela vous surprend-il ?

Pas du tout. Ceux, comme moi, qui sont habitués à ces types de procès, savent qu’ils tournent autour de polémiques, d’invectives. J’ai eu la chance d’assister au procès d’Abdoulaye Wade, en 1988, l’affaire Me Sèye en 1993, l’affaire Idrissa Seck… Ce sont des procès très polémiques. Les avocats de la défense ont tendance à politiser les procès ; ce qui fait que les débats virent à la polémique. Ce n’est pas une bonne chose. Nous sommes écoutés par le monde, notamment en Afrique où des pays ont été victimes de pillage de la part de leurs gouvernants. Aujourd’hui, le Sénégal donne l’exemple pour éradiquer les pratiques de corruption des deniers publics et d’enrichissement illicite. J’invite les uns et les autres à faire preuve de beaucoup plus de sérénité

Les avocats de la défense parlent de procès politique. Selon eux, sur une dizaine de dignitaires de l’ancien régime, seul Karim Wade est attrait en justice.

Non ! Karim Wade n’est pas poursuivi pour des délits politiques, mais pour des délits d’enrichissement illicite qui, de mon point de vue, sont des délits détachables de la fonction politique. Parler de procès politique, c’est faire un mauvais procès à la justice. Je comprends l’attitude des avocats de la défense, car c’est une stratégie pour sauver leur client. Je crois qu’il y a des limites à ne pas dépasser. Parce que politiser à outrance ce procès peut avoir comme conséquence la remise en cause de la crédibilité de notre justice

Le Président Macky Sall, depuis les Etats-Unis, avoue avoir mis sous le coude des dossiers de justice concernant des dignitaires de l’ancien régime. C’est quand même grave…

De mon point de vue, c’est une phrase malheureuse. Le Président Macky Sall a été élu dans un contexte particulier. C’est après 12 ans de pillage des ressources du Sénégal, 12 ans de détournement de deniers publics que les Sénégalais ont décidé à plus de 65% de fermer la page de cette pratique. Le principal cahier des charges de la nouvelle alternance, c’est d’améliorer les conditions de vie des populations, engager des réformes institutionnelles, mais c’est surtout combattre les détournements de deniers publics et le pillage des biens de la nation. L’une de nos missions, c’est de permettre à la justice de disposer de tout document lié à des faits délictuels. Au Sénégal, à chaque fois qu’un dossier judiciaire est soulevé, ce sont des pressions qui viennent de toutes parts. Si on ne fait pas attention, on risque de céder à ces pressions.

Vous pensez que le Président est sous la pression ?

Bien sûr qu’il subit des pressions. C’est normal qu’il soit sous la pression.

D’où viennent ces pressions ?

De lobbies de toutes sortes. C’est pourquoi nous qui sommes avec lui et tous les Sénégalais qui ont le souci de la bonne gouvernance, devons servir de bouclier au président de la République afin de combattre avec fermeté ces pratiques. S’il est laissé à lui-même, je crois qu’il va abdiquer, comme l’a fait Abdou Diouf, il y a quelques années, avec la CREI. Parce qu’il était seul.

Vous semblez rejoindre le Pr Malick Ndiaye qui, dans son livre ’’ Où va le Sénégal ?’’, décrit ces genres de pratiques et qui a été limogé.

Ce qui me pose problème avec le livre de Malick Ndiaye, c’est que je lui ai rendu visite et on avait échangé sur la nouvelle alternance, le PSE et sur l’acte 3. A l’issue de cette rencontre, j’ai estimé qu’il était utile que le Président le rencontre. J’ai fait des démarches et le Président l’a reçu en ma présence. Malick Ndiaye avait effectivement parlé d’un livre qu’il devait sortir, mais qui devait faire l’apologie du PSE et ce qu’il peut apporter à notre pays. Il avait sollicité le concours du président de la République pour que ce livre puisse sortir. Je ne comprends pas ce qui s’est passé pour qu’il y mette des éléments d’accusation de la mal gouvernance.

Est-ce que cela ne traduit pas un certain malaise dans les rapports entre le président de la République et ses collaborateurs, dont certains peinent même à le rencontrer ?

C’est possible qu’il y ait des frustrations dans l’espace présidentiel. Peut être des conseillers pensent qu’ils ne sont pas suffisamment écoutés, ou consultés. Mais ce n’est pas une raison pour faire des déballages, d’autant que, pour ce qui concerne Malick Ndiaye, le Président l’a reçu. Mais il n’avait pas évoqué ces questions de mal gouvernance. Le courage intellectuel voudrait que s’il est en face du président de la République et qu’il ait des choses à lui dire, qu’il le lui dise de vive voix.

Au delà de la démarche, Malick Ndiaye pose des questions de fond comme l’immixtion de la famille du Président. Ce que semble confirmer le ministre Magnick Ndiaye quand il dit avoir été nommé ministre grâce à la première Dame

Les gens font beaucoup de tort à la première Dame et lui imputent des responsabilités qu’elle n’a pas. Il arrive que certains, voulant parler d’elle en bien, passent complément à côté. C’est le cas du ministre Magnick Ndiaye qui nous fait croire que s’il a été nommé ministre, c’est grâce à la première Dame. C’est faux. Par contre, il y a des éléments qui me gênent dans le livre de Malick Ndiaye, terriblement.

Lesquels ?

C’est quand il accuse le Président Macky Sall de faire du parti-pris dans ses nominations, en faveur des Hal pulaar. C’est scandaleux ! Je n’ai jamais entendu les intellectuels lui faire un tel reproche. La presse encore moins. Tous les présidents qui se sont succédé à la tête de ce pays ont eu à nommer des gens de leur communauté, mais personne ne s’en est offusqué. Pour quelle raison devrait-on s’offusquer du fait que Macky Sall nomme des Hal pulaar à des fonctions ministérielles ou de direction ? Sur ce point, Malick Ndiaye est allé trop loin. On ne peut pas accepter des dérives ethniques et des dérives claniques. Ce type de débat, le Sénégal l’a dépassé.

Vous aviez déclaré récemment que l’Assemblée nationale n’a apporté aucune valeur ajoutée dans cette 12e législature. Quelle est votre part de responsabilité ?

Nous avons hérité d’une Assemblée qui est née dans un contexte particulier. Après les événements de 1962, l’Exécutif a pris le dessus sur le Législatif. Depuis lors, l’Assemblée nationale est restée un vassal du pouvoir exécutif. Elle a des missions de vote des lois, de représentation du peuple sénégalais, de contrôle de l’action du gouvernement. Sur la dernière mission, l’Assemblée s’est singularisée par son absence. Rares sont des commissions d’enquête qui sont mises en place ; rares sont des commissions d’enquête qui aboutissent à des rapports ; rares sont des rapports qui ont donné des résultats. Avec la 12e législature, aucune initiative allant dans le sens d’exercer notre mission de contrôle de l’action du gouvernement n’a abouti

A qui la faute?

Je ne fais pas de l’imputation ; je fais de la constatation. La responsabilité est globale. Mais tous les députés sont d’accord avec moi que la valeur ajoutée de la 12e législature est proche de zéro. J’ai l’impression, que dans toutes les législatures, il y’a une autocensure des députés.

Pour quelle raison ?

Le plus souvent, les députés pensent qu’en contrôlant l’action du gouvernement, cela peut déboucher sur une tension entre le Législatif et l’Exécutif. Notre législature doit rompre avec cette mentalité.

L’ancien député Moussa Tine pense qu’il faut modifier la constitution qui limite les pouvoirs de l’Assemblée. Quel commentaire en faites-vous ?

La Constitution n’empêche pas la création d’une commission, encore moins de demander une audition. Il n’y a pas d’obstacle à ce niveau.

La Constitution dit qu’une proposition de loi doit être d’abord soumise à l’appréciation du président de la République qui peut ne pas lui donner une suite. Qu’en est-il exactement ?

La recevabilité d’une proposition de loi ne doit pas relever du président de la République. Le Sénégal dispose d’un Conseil constitutionnel. Si un député introduit une proposition de loi, pour quelque nature que ce soit, son rejet doit émaner du Conseil constitutionnel et non de l’Exécutif. C’est ce lien de subordination qui nous met dans cette situation. Le problème fondamental, c’est l’autocensure que les députés se font.

Mais quand les postes de responsabilité à l’Assemblée sont distribués à partir de la Présidence, est-ce qu’ils peuvent faire autrement ?

N’oubliez pas que Macky Sall est le président de l’APR et le leader de la coalition BBY. Dans tous les pays du monde, les postes de responsabilité au niveau de l’Assemblée nationale sont politiques. Evidemment, nous devions améliorer notre fonctionnement pour que, de moins en moins, l’Exécutif ait une mainmise sur l’Assemblée nationale. (…)

Le Président Macky Sall a réaffirmé sa volonté de réduire son mandat de 7 à 5 ans. Mais l’on note des résistances au sein de son parti, l’APR. Certains sont pour le statu quo.

C’est normal qu’il y ait des résistances. L’APR est un parti démocratique. Nous ne sommes pas sous la dictature de la pensée unique. Le Président s’est engagé à réformé la Constitution en deux directions principalement : la réduction de son mandat de 7 à 5 ans, ensuite la limitation du nombre de mandats à deux. Ce n’est pas une bonne chose d’habituer les gens au pouvoir. Deux mandats de 5 ans me semblent largement suffisants. Faire 18 ou 20 ans au pouvoir est révolu. Ça ne correspond pas au profil démocratique du pays et n’apporte aucune valeur ajoutée aux défis que nous nous sommes fixés. Je me félicite qu’il ait choisi de passer par la voie référendaire.

Certains observateurs souhaitent que Macky Sall règlent une bonne fois pour toutes la question de la réforme des institutions dont le travail a été confié à la CNRI. Etes-vous de cet avis ?

Ces observateurs parlent pour ne rien dire. Le Président a mis en place la CNRI. C’est lui-même qui l’a commandée. La CNRI a remis un rapport qui ne lie pas le Président. Il en prendra ce qui lui semble pertinent. S’il n’avait pas la volonté de réformer les institutions, il n’allait pas créer la CNRI. C’est un mauvais procès que de douter de la sincérité du Président.

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