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Le Soleil N° 13239 du 14/7/2014

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Consommation de viande : Le marché dans l’effervescence des prix
Publié le lundi 14 juillet 2014   |  Le Soleil


La
© aDakar.com par MC
La promotion du consommer local au coeur du "Louma agricole"
Dakar, le 3 Mai 2014- L`agence nationale d`insertion et de développement agricole (ANIDA) a ouvert, ce samedi matin, ses loumas agricoles. La grande innovation de cette année est la décentralisation. D`autres loumas (marché) ont été ouverts, outre à Dakar, à Kaolack et à Thiès.


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Pourquoi, presque chaque année, à l’arrivée de l’hivernage, les prix de la viande partent en flèche. Dans cette enquête, on note que l’hivernage qui tarde à s’installer sur tout le territoire sénégalais prive les bêtes d’herbe fraiche. Le marché est mal approvisionné en bétail de qualité. Les bouchers disent se livrer à des calculs d’épicier pour s’en sortir à cause de la cherté des bêtes. Dans les foirails, les éleveurs décrient la lourdeur des charges liées à l’aliment et le transport du bétail, mais aussi la présence des intermédiaires. Autant de facteurs qui expliquent le renchérissement des prix. Ceci, au grand dam des ménages qui en consomment moins de viande.

Les ménages revoient leur consommation à la baisse
C’est l’effervescence sur le marché de la viande dont le kilogramme de bœuf a atteint 3.000 FCfa tandis que celui de chèvre est cédé à 3.400 FCfa. Les ménagères jugent ce prix trop « élevé » avec la conjoncture économique.
Depuis quelques mois, on a noté une augmentation du prix de la viande dans les marchés dakarois. Une situation qui ne laisse pas indifférentes les femmes. « Actuellement, la viande coûte cher et les temps sont durs. J’ai juste acheté 750 grammes à 2.000 FCfa. Or, c’était le prix du kilogramme. C’est vraiment dur. La viande devient de plus en plus rare, ce qui nous oblige à limiter nos achats. Avec le ramadan, nous aimons préparer des plats copieux. Mais avec la cherté de la viande, rien n’est possible », s’est désolée, Boury Mbaye, résidente à Thiaroye Sur Mer. Trouvée au marché « Séras » à Yarakh, cette femme, la quarantaine, a la même complainte. « La viande est trop cher. Si c’est à cause du prix des bœufs, il faut que les éleveurs le diminuent pour permettre aux bouchers de s’en sortir. Nous sommes très fatiguées avec la conjoncture économique. Nous essayons de joindre les deux bouts pour nous en sortir », a-t-elle renchéri sous le couvert de l’anonymat. Ici, c’est au bout d’un rude marchandage que les femmes finissent par acheter la viande. « Je n’aime pas cette viande, il y a trop d’os », ce sont les mots qui reviennent dans les échanges entre les bouchers et les clients.
« Nous n’avons pas les moyens d’acheter de la viande. Un kilogramme de viande coûte 3.000 FCfa. Il faut des légumes et les autres condiments pour préparer le repas. Avec la conjoncture économique, aucun homme ne peut donner 5.000 FCfa comme dépense quotidienne. C’est vraiment dur », a ajouté cette dame. Plus loin, Mme Diouf, foulard à l’épaule, cure-dent à la main, marchande la viande de mouton. « Si l’on ne marchande pas, l’on ne va pas s’en sortir », dit-elle en souriant. Ces femmes soutiennent, à l’unanimité, que la situation est inquiétante surtout avec l’approche de la fête de Korité, synonyme de consommation importante de viande.
Les bouchers entre perte et hausse des prix
A écouter les bouchers se plaindre du prix auquel ils acquièrent les bêtes, on a l’impression qu’ils ont une alternative : vendre la viande à perte ou augmenter les prix pour s’en sortir. Entre ces deux options, le choix est vite fait, ils augmentent les prix.
Alors que les ménagères se plaignent de la cherté de la viande, les bouchers, de leur côté, sont loin de tirer profit de cette situation. Pour les vendeurs de viande, actuellement, il est « difficile » de faire de bénéfices, la plupart d’entre eux soutiennent qu’ils enregistrent des pertes. « Nous sommes obligés d’augmenter le prix de la viande car nous achetons un mouton à 60.000 FCfa. A ce prix, il nous sera difficile de faire un bénéfice. Or, tout vendeur cherche un profit pour satisfaire ses besoins. Tant qu’il n’y a pas de pluies, il n’a y aura pas de bétail », estime Déguène Mboup, vendeuse de viande à la « Séras ».
Cette jeune fille, trentenaire, vend également de la viande grillée à côté de son étal. Le prix de celle-ci n’a pas augmenté, par contre, c’est la quantité qui a été revue à la baisse, explique-t-elle. De son côté, le boucher Baye Mbaye qui tient sa table à quelques pas de celle de Déguène, fait le calcul. « Nous achetons un bœuf à 600.000 ou 615.000 FCfa et après l’avoir abattu, nous nous retrouvons avec 206 kilogrammes de viande. Si je vends le kilogramme à 2500f, je me retrouverai avec 515.000 FCfa, soit une perte de 85.000, parfois 100.000 FCfa. Pour nous en sortir, nous sommes donc obligés de vendre le kilogramme à 2.800 ou 2900 FCfa », explique-t-il.

Craintes pour la Korité
Selon le jeune Baye, cette année, le prix de la viande est plus élevé par rapport à l’année dernière. «A la même période, le prix n’avait pas atteint ce niveau. Nous sommes à quelques jours de la fête de Korité et actuellement le kilogramme est à 3000 FCfa. Il faut noter que le jour de cette fête, le prix de la viande de bœuf va atteindre 3.500 voir 4000 FCfa», craint Baye Mbaye. Si Baye achète des bêtes auprès des éleveurs dans les foirails, il y a des vendeurs comme Bassirou Diop, qui s’approvisionnent en viande en gros auprès des bouchers dans les abattoirs. « J’achète le kilogramme à 2500 FCfa à l’abattoir de Rufisque. Il faut payer le transport pour venir à Diamaguène. Or, ici, le kilogramme de la viande est vendu à 2.700 ou 2.800 FCfa », informe ce dernier. Bassirou estime à 200 FCfa sa marge bénéficiaire sans calculer le prix du transport. S’il continue à vendre de la viande, avoue-t-il, c’est juste pour maintenir sa clientèle. « Sinon je risque de perdre mes clients si le prix revient à la normale », dit-il. Ainsi, Mame Mbaye Sarr, délégué du marché Foirail de Diamaguène, pense qu’il faut que l’Etat soit indulgent au niveau des frontières. « L’Etat doit ouvrir les frontières pour qu’il y ait une fluidité de circulation des bêtes. Le bétail qu’on a au Sénégal ne suffit pas pour la population. Il faut faciliter l’accès de notre marché aux éleveurs étrangers. Ils viennent souvent du Niger, du Burkina Faso, du Mali entre autres», soutient le délégué du marché Foirail. Le foirail de Diamaguène-Sicap Mbao est un marché très connu en banlieue dakaroise.
De nombreuses personnes viennent s’y approvisionner en chair, selon leurs besoins. Sur place, on trouve des femmes assises devant des marmites d’eau bouillante, qui s’activent à épiler les pattes de bœuf. A côté d’elles, les autres étalent les tas de viande sur des couvercles posés sur un récipient. Ces amas sont composés de boyaux et de quelques morceaux de chair. « Avant, l’amas était vendu à 100 FCfa, actuellement, il coûte 200 FCfa. La tête du bœuf qui coûtait à 1.000 FCfa le kg est à 1.600 FCfa. Et le bifteck qui était à 1. 500f coûte 3000 FCfa », compare Mame Mbaye Sarr.

RARETE DES BETES, COUT DE L’ALIMENT DE BETAIL, TAXES, FRAIS DE TRANSPORT… : La litanie des éleveurs pour justifier la hausse
La rareté du bétail, l’approche de l’hivernage, le coût de l’aliment, les taxes sont les principaux éléments qui, selon les éleveurs, ont causé l’augmentation du prix de la viande.
Selon Amadou Sy, les bêtes deviennent de plus en plus rares. « A cette période, il est rare d’avoir du bétail. Il ne pleut pas, alors les bêtes n’ont nulle part où trouver de l’herbe à brouter », explique M. Sy, vendeur de bétail au foirail de Sicap Mbao. Assis sous un abri en paille, Amadou et ses amis ajoutent qu’à côté de la rareté des bêtes, le prix du transport et les taxes sont trop élevés. «Pour amener nos bœufs de Djolof à Dakar, il faut au minimum 150.000 FCfa. Le prix du transport dépend du nombre d’animaux. Mais, un camion ne peut contenir que vingt têtes », révèle Samba Bâ, un autre éleveur assis à côté d’Amadou.
A Daara, ajoute Samba, «on donne 1.000 FCfa par jour aux jeunes qui nous aident à faire monter les bêtes. Sur la route, il y a trop de taxes. Une fois à Dakar, il faut entretenir le bétail. Nous dépensons au moins 2.000 FCfa par jour pour la nourriture d’un bœuf. Alors, avec 20 têtes, il faut débourser 40.000 FCfa par jour», explique-t-il. Ces bêtes se nourrissent d’un mélange de foin, de paille, de poudre de feuilles de baobab, de graines de coton, de vitamines, etc.
Selon cet éleveur, la plupart du bétail consommé à Dakar est constituée de bêtes de projets d’élevage provenant du Mali, de la Mauritanie, du Niger, de Kédougou, etc. « Le prix du bœuf est partout le même. Les bêtes qui sont sur le marché sont celles des projets. Les éleveurs achètent les bœufs dans les villages auprès des bergers et les confient à quelqu’un qui les entretient en leur donnant de la vitamine, des aliments etc., pendant trois mois », a-t-il fait savoir, avant de préciser que les bouchers préfèrent cette catégorie d’animaux. « En général, les bouchers n’achètent pas les bœufs ordinaires qui sont nourries de paille uniquement. Ils aiment une viande de qualité », renchérit Moustapha Baldé, un autre éleveur qui tient son activité au foirail de Yarakh.

Les rabatteurs indexés
Le foirail de Yarakh est situé à quelques encablures de la Société générale des abattoirs du Sénégal (Sogas, ex-Seras), derrière le marché au poisson de la localité. Ici, des troupeaux de moutons et quelques bœufs broutent la paille dans une atmosphère confuse. Chaque bête porte une marque sur elle pour éviter toute confusion. De temps à autre, un homme, bâton à la main, se lève parmi un groupe assis sous des abris en paille. Il se dirige vers les animaux. D’un coup de bâton, il sépare ceux qui quittent leur troupeau à la recherche d’une femelle ou d’aliment. Dès qu’un probable client met les pieds dans le foirail, des hommes l’interceptent et le conduisent devant les troupeaux. « Il y a beaucoup de jeunes qui travaillent ici tous les jours comme « coxeurs » (rabatteurs). Ils interceptent les clients à l’entrée du foirail et proposent de les aider à acheter. Sur chaque vente, ils empochent au moins 10.000 FCfa. Si par exemple le vendeur fixe à 50.000 FCfa le prix de l’animal, les « coxeurs » diront au client que le dernier prix est 60.000 ou 70.000 FCfa », explique Moustapha, au milieu des bêlements des moutons. Selon lui, cette pratique des « coxeurs » influe sur l’augmentation du prix de la viande. « Il y a beaucoup de facteurs à enrayer pour que le prix de la viande revienne à la normale. L’Etat a son rôle à jouer en diminuant les taxes et le prix de l’aliment de bétail. Mais je crois que, nous les éleveurs et vendeurs d’animaux, nous devons mener 80 % du combat pour régler le problème de l’augmentation du prix de la viande », estime Moustapha qui, depuis plus de vingt ans, est au foirail de Yarakh. En général, d’après lui, dans les « darals », ou foirails, les propriétaires des animaux ne font pas une vingtaine. Il y a beaucoup d’intermédiaires qui assurent la vente. Ce qui a un impact sur le prix final de l’animal, puisque chaque intermédiaire demande sa part.

« Il y a trop de dépenses »
«Il y a un terme qu’on utilise entre nous : le « tégaay ». C’est ce que le propriétaire du bétail doit à l’intermédiaire sur chaque bête vendue. Cette somme varie entre 1.000 et 6.000 FCfa », dit Moustapha. Pour lui, ce sont ces facteurs qui font parfois que les étrangers, surtout les Maliens, n’amènent plus leurs animaux dans nos foirails. Ils préfèrent rester à la frontière ou aller dans des pays comme la Gambie. « Dans les normes, le bétail ne coûte pas cher. Tous ces frais ont un impact sur le prix de revient. Il y a trop de dépenses, l’aliment pour le bétail est trop cher et les animaux n’ont pas d’herbe à brouter. Si le prix de l’aliment était moins cher, on pourrait diminuer celui des bêtes », explique Amadou Hamath Sy, propriétaire d’un troupeau.
Le vieux Sy, en grand boubou blanc, chapelet à la main, fait partie de ceux qui confient leurs bêtes aux intermédiaires dans le foirail. Il vient de temps en temps récupérer l’argent pour aller à la recherche d’animaux dans les autres contrées du Sénégal ou dans la sous-région.

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