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Son patron et un employé en garde à vue
Publié le mercredi 8 fevrier 2023  |  Enquête Plus
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© Autre presse par DR
Un tailleur accusé d’avoir violé sa colocataire
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Du nouveau dans l’affaire de la jeune étudiante sénégalaise violée en Turquie. Selon les informations glanées par ‘’EnQuête’’, les auteurs de cet acte qui secoue le pays sont son patron et l’un de ses employés. Ils ont été interpellés et placés en garde à vue. La jeune fille est en état de choc.

Il y a à peine huit mois qu’Amy (appelons-la ainsi) âgée d’une vingtaine d’années, a quitté le Sénégal pour se rendre en Turquie, dans l’optique d’y terminer ses études. Dans ce pays, la coutume veut que l’étudiant étranger qui souhaite y poursuivre ses études, fasse une année préparatoire en turc, afin de montrer qu’on maitrise cette langue.

Selon nos sources, après avoir franchi cette première étape importante du cursus universitaire turc à l’université Karabûk, Amy a décidé de se rendre à Istanbul pour y exercer un petit boulot, en attendant la prochaine rentrée universitaire prévue au mois de février. Huit heures de route en bus séparent les deux villes.

Selon nos interlocuteurs, Amy a obtenu un poste dans une fabrique, le mardi dernier. Soixante-douze heures plus tard, c’était le début de ses déboires. Des proches racontent : ‘’Son patron et l’un des employés lui ont envoyé un message, à l’heure de la descente, pour lui dire qu’ils ont besoin d’elle. Ils ont abusé d’elle, une fois qu’ils se sont retrouvés seuls. Ils ont voulu la forcer à passer la nuit avec eux, mais elle a refusé. Pour échapper à leurs griffes, elle leur a promis de revenir le matin pour continuer son travail. C’était juste un prétexte pour être relâchée. Une fois libre, elle est allée avertir ses proches. Ces derniers l’ont conduite à l’hôpital pour être consultée. Dans l’établissement sanitaire, elle a rencontré une Gambienne qui l’a incitée à venir passer la nuit chez elle. Avant de partir, les toubibs en charge de son dossier ont effectué des prélèvements dans le souci d’avoir des preuves de ce qu’elle venait de subir.’’

Arrestation et état de détresse de la jeune étudiante

Le lendemain samedi matin, vers 6 h, l’ambassadeur du Sénégal en Turquie a été avisé de la nouvelle. Vers 9 h, elle a été emmenée au niveau de la police où une enquête a été ouverte. Ensuite, soufflent nos interlocuteurs, Amy a été conduite à nouveau à l’hôpital pour des prélèvements. ‘’Puis, elle a été amenée dans un centre de détention. Cette arrestation s’explique, selon les hommes de tenue, par le fait qu’elle ne devait pas travailler, vu qu’elle n’a pas de permis de travail, encore moins le droit de quitter la ville où elle étudie. Après la médiation de l’ambassadeur qui s’est rendu sur place, elle a été libérée aujourd’hui dimanche (hier) en fin de matinée’’, indiquent nos sources.

Nos interlocuteurs ajoutent qu’à sa sortie du centre de détention, elle était dans un état de détresse total. La fatigue et l’inquiétude se lisaient dans ses yeux. Elle marchait difficilement. Elle ne s’arrêtait pas de pleurer, précisent nos informations. Elle a perdu l’appétit et est devenue fébrile. ‘’Elle souffre. Certes, elle a été relâchée, mais nous voulons que les deux coupables payent pour ce qu’ils ont fait. Il est hors de question qu’ils s’en sortent. Ce qu’ils ont causé à cette fille est ignoble. Ils l’ont traumatisée. Ils doivent être traqués, interpelés et jugés. Ils doivent purger leur peine, car ce sera un précédent dangereux, s’ils s’en sortent indemnes. Cette affaire ne doit pas être rangée aux oubliettes. Nous ne voulons pas de simples arrestations, mais que la justice aille jusqu’au bout’’, déclarent nos interlocuteurs.

Aux dernières nouvelles, selon des proches de la victime, les deux suspects ont été interpellés et sont en garde à vue dans un poste de police.

‘’Quand nous allons à l’université, on nous harcelle’’

Il faut dire que cette affaire a permis de lever le voile sur le calvaire que vivent les étudiants étrangers en Turquie.

Selon des confidences, ils vivent dans des conditions difficiles. ‘’Nous vivons le calvaire ici en Turquie. Quand nous allons à l’université, on nous harcelle. Même sur les réseaux sociaux, on nous mène la vie dure. On n'est pas à l’abri. Sur Instagram, nous recevons en moyenne une dizaine de messages par jour qui nous proposent des choses indécentes. Ils nous appellent par téléphone ou nous écrivent des messages sur WhatsApp, pour nous faire des propositions que la morale nous interdit de dire ici. Ils ont sûrement nos numéros, quand nous faisons des livraisons. Ils se passent nos numéros. Il y a pire, quand ils viennent sonner à la porte de nos appartements pour nous draguer. Sur la route, ils nous poursuivent. On est vraiment fatiguées de cette situation, nous les jeunes filles étudiantes. Les jeunes Sénégalais, aussi, on les exploite, quand ils partent dans les fabriques pour travailler’’, témoigne une étudiante qui vit en Turquie.

Pour mettre fin à ce calvaire, elles lancent un message fort aux autorités sénégalaises. ‘’Que nos autorités prennent leurs responsabilités. Ce qu’elles nous avaient promis et ce que nous vivons, c’est diamétralement opposé. Tout est flou ici. Notre vie ici se résume à un calvaire. Nous souhaitons qu’on nous respecte. Que les Turcs nous lâchent les baskets. Ils pensent que toutes les femmes noires sont des objets ou bien que nous sommes venues ici pour nous prostituer. Qu’ils arrêtent leurs harcèlements. Qu’on nous aide à ne plus vivre ce traumatisme. Que l’ambassade se déplace dans les autres villes pour s'enquérir de la situation des étudiants. La ville de Karabûk, avec son université, est l’endroit où il y a plus d’étudiants sénégalais, après Istanbul. Qu’il vienne les voir pour constater la situation que ces étudiants sont en train de vivre ; cela leur fera plaisir’’, lancent des compatriotes établis au pays de Recep Tayyip Erdogan.

Les services d’Aïssata Tall Sall annoncent la commission d’un avocat

Hier en fin de matinée, le ministère des Affaires étrangères et de Sénégalais de l’extérieur (MAESE), à travers sa cellule de communication, a publié un communiqué sur cette agression. ‘’Devant ce crime odieux et insupportable, le MAESE a immédiatement réagi par les services de l'ambassade du Sénégal à Ankara, d'abord, en apportant l'assistance nécessaire à notre compatriote, mais surtout, en intervenant auprès des autorités turques afin que les auteurs du forfait, déjà mis en état d'arrestation, soient jugés et sévèrement punis. Un avocat a été commis à cette fin. Le MAESE tient à appeler la communauté sénégalaise de Turquie au calme et au respect de la vie privée de la victime. Le MAESE voudrait surtout assurer à tous de sa disponibilité et de son ouverture à communiquer avec l'ensemble de nos compatriotes sur le suivi régulier de ce dossier’’, renseigne la note.

CHEIKH THIAM
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