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Bouna Sarr, Bayern Munich: “La CAN qui arrive va me permettre d’avoir du temps de jeu avec le Sénégal”
Publié le lundi 20 decembre 2021  |  Autre presse
Bouna
© Autre presse par DR
Bouna Sarr, joueur de football
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L’ancien latéral droit de l’OM raconte son atterrissage au Bayern, surprenant et difficile, mais aussi ses convictions et son choix de rejoindre la sélection sénégalaise.

Rendez-vous était pris pour un appel en visio, mais il ne fallait pas trop durer. L’OM s’apprêtait à aller défier Nantes à la Beaujoire (victoire des Phocéens 1-0, le 1er décembre), et Bouna Sarr ne manque jamais un match de son ancienne équipe. La saison dernière, il avait envoyé une cinquantaine de maillots floqués et dédicacés aux joueurs, staff et salariés marseillais. La nostalgie le guette parfois quand il repense à la campagne de Ligue Europa en 2018, jusqu’ à la finale, mais elle s’évapore quand on lui parle du Bayern. Il est déterminé à bousculer les plans de Julian Nagelsmann.

À l’automne 2020, vous passez de l’OM au Bayern, transfert sans doute le plus inattendu de ce mercato. Racontez-nous les dessous…

On a affront é les Munichois en amical, pendant l’été. Le lendemain, un analyste vidéo de l’OM, Anthony Santiago, m’envoie un message pour me dire que j’ai plu à pas mal de dirigeants du Bayern assis à côté de lui en tribunes. Pour moi, c’est anodin, je ne calcule pas. Il reste cinq ou six jours de mercato. Un beau matin, Touti (Patrick Mendy), mon agent, m’appelle tôt. Je dois aller en soins. À l’époque, j’ai des problèmes à un genou, ça m’a gêné pendant ma préparation, et privé du Classique. Moralement, c’est compliqué, j’ai envie de revenir vite. Bref, ce matin-là, il m’appelle vers 8 heures et me demande : ”Est-ce que tu serais apte à passer une visite médicale ? ” Étonné, je réponds : ”Oui, pourquoi ? ”. Il enchaîne : ”Le Bayern veut te prendre ”. Généralement, Touti ne me prévient que s’il y a du concret, il ne s’avance jamais. Je viens de me réveiller, je raccroche. Puis, quelques minutes après, je le rappelle : ”Attends, tu m’as dit quoi déjà ? Le Bayern !? ” Tout s’est enchaîné, j’ai signé le dernier jour du mercato. J’avais cette petite crainte que l’OM me bloque, mais après cinq saisons au club, tout le monde était gagnant, j’ai été récompensé de mon sérieux. C’est aussi valorisant pour l’OM qu’un joueur file au Bayern, le coach Villas-Boas était fier de moi.

’’AVB’’, qu’avait-il de si spécial ?

Pour moi, il était le coach parfait. À l’OM, il prenait les joueurs avec leur personnalité, leur caractère. Avec lui, j’étais moi-même. Il voyait que j’étais dans l’univers américain, la façon de m’habiller, de m’exprimer… Ça l’amusait. Sur Instagram, il commentait mes récits, on s’amusait. Quand on était dans une bonne dynamique, il nous donnait quatre jours libres lors de la trêve internationale. Je partais à Barcelone avec mes amis, je lui envoyais des snaps dans des restaurants ambiancés, je n’avais pas peur de lui montrer que je profitais de mes congés. Normalement, tu n’envoies pas ce type de vidéos persos à ton coach ! Mais il savait qu’à la reprise, je serais le premier à 100 %, que je n’abuserais jamais de notre relation. Sur le terrain, s’il m’engueulait, je ne boudais pas. Il aurait pu me gifler, je fermais ma gueule. Il était le boss. Il a vu que j’entraînais les autres, il m’a mis dans le clan de ses trois capitaines avec Payet et Mandanda, pour cimenter le vestiaire.

Au Bayern, vous d ébutez quelques rencontres à l’automne, puis la situation se complique. Pourquoi ?

Je suis mis dans les meilleures conditions. Le coach Flick me dit : ”Tu es le profil que j’attendais. Je ne t’ai pas pris pour être une doublure, mais un n°1 bis. Si tu es bon, tu vas jouer.” En Coupe d’Allemagne, ça se passe bien, je fais deux passes décisives à Choupo (Moting). J’intègre la rotation, ”Benji”(Pavard) est blessé. Ce que les gens ne savent pas, c’est que je joue en serrant les dents, j’ai mal au genou, je prends mon anti-inflammatoire avant chaque match. La veille du Klassiker contre Dortmund, je me fais mal à l’entraînement. Il n’y a pas d’autre latéral droit, je suis obligé de jouer malgré la douleur. Une prestation vraiment très moyenne, on gagne 3-2. Je me dis en rentrant chez moi : ”Mais comment je vais faire ? Je n’ai pas été bon aujourd’hui, j’ai encore mal au genou, comment va se passer la suite ? ”

Elle est encore étonnante.

Deux jours après le Klassiker, un des adjoints de Didier Deschamps m’appelle : ”Tu es où ? Tu fais quoi ? Il faut que tu nous rejoignes ce soir.” Johannes, qui gère la logistique pour les joueurs du Bayern, me dit : ”Je suis au courant, je suis en train de parler avec les médecins, ils vont te déconseiller d’y aller.” D’un côté, j’ai l’équipe de France qui me dit de rappliquer, de l’autre, les docs du Bayern qui hésitent… Je retourne à l’hôtel faire ma valise et lorsque j’arrive à l’aéroport, le docteur des Bleus, Franck Le Gall, que j’ai connu à l’OM, m’annonce : ”Je pense que ce n’est pas une bonne solution que tu viennes. Au Bayern, ils m’ont dit que ça pouvait être dangereux, que tu ne pourrais pas être à 100 %.” Ils n’avaient pas tort : aller chez les Bleus, ne pas être bon à cause d’un genou, ne pas être rappelé, tout en me mettant à dos le Bayern alors que je viens d’arriver… J’ai vite digéré cet épisode-là, je me suis concentré sur le Bayern, même si ce pépin m’a pourri ma première saison ici.

N’est-ce pas un rêve qui s’envole ce jour-là, quand même ?

Forcément, mais pas seulement. À l’automne 2017, alors que je suis repositionné latéral droit, je suis le suppléant de Sakai (à l’OM), je me bagarre à l’entraînement pour obtenir plus de temps de jeu. Le coach (Rudi) Garcia me fait surtout entrer au poste d’ailier sur des fins de matches, pour fermer le couloir. Je suis en salle de muscu avec le préparateur Paolo Rongoni, toujours élogieux quant à mes qualités athlétiques. Il me dit : ”Écoute-moi, toi, je vais t’emmener en équipe de France !” Autour de nous, Payet et Jordan (Amavi) entendent, et ces grands moqueurs se pressent de répandre ça dans le vestiaire : ”Vous savez quoi ? Paolo est en train de prendre Bouna pour un con !” J’en rigole avec tout le monde, je ne suis qu’un remplaçant. Alors je ne suis pas allé chez les Bleus, mais ce que Rongoni voyait, c’est que j’étais capable d’exploser à ce poste-là. Cette saison de Ligue Europa (2017-2018) m’a beaucoup servi. Au début, le club n’était pas contre un départ ou un prêt. À la fin, je prolonge ! Tout peut aller très vite. Si je l’ai fait à l’OM, je peux le faire au Bayern. Je crois en mes qualités. Si je ne crois pas en moi, qui d’autre aura la foi ?

Pensez-vous à un départ du Bayern en janvier ?

À aucun moment, ça ne m’a traversé l’esprit. Je ferai un point en juin avec le Bayern. L’année dernière a peut-être compté aux yeux des gens, mais pour moi, elle était tronquée par la blessure. Je ronge mon frein, mais j’ai déjà connu ça à Marseille. Le Bayern est un club d’un grand standing, il y a moins d’indulgence. D’un match à l’autre, il faut être toujours au top. J’ai conscience que je dois aller chercher cela, faire penser au staff : ”Ne vous focalisez pas sur la saison dernière, il faut me donner de la confiance, du crédit. Si le Bayern m’a recruté, ce n’est pas pour rien.” La CAN qui arrive va me permettre d’avoir du temps de jeu avec le Sénégal, je vais me servir de cette compétition pour montrer de quoi je suis capable’’.

La communauté francophone du Bayern s’élargit chaque année…

Benji (Pavard) le rigolo, King (Coman), si mature, Coco (Tolisso), le petit Nianzou (Kouassi), Lucky (Hernandez), Micka (Cuisance), le calme et posé Upa (Upamecano) depuis cet été... Pour un vestiaire d’un club aussi prestigieux, c’est assez fou. On passe beaucoup de temps ensemble avec Hernandez, il organise des repas chez lui pour la bande des Français, des raclettes par exemple avec le froid actuel ! Il aime accueillir, c’est un peu notre restaurant chez lui.

En septembre, vous annoncez votre choix de représenter le Sénégal, à 29 ans. Vous aviez été contacté dès le début d’année 2018.

L’année de la Coupe du monde en Russie, je recevais des pré-convocations pour l’équipe de France, j’y pensais. J’ai aussi été opéré en mai de l’épaule, j’enchaînais les luxations. Je n’étais pas prêt pour le Sénégal, tout simplement. J’ai fait beaucoup plus de voyages là-bas après le Mondial russe. Ça m’a permis d’avoir plus d’attaches avec le pays de mes parents - ils y finiront leur vie -, d’en tomber amoureux. J’en ai parlé avec Kalidou Koulibaly, avec Édouard Mendy, et j’ai ciblé le rassemblement d’octobre dernier.

Vous avez retrouvé les Marseillais Bamba Dieng et Pape Gueye. En attendant Bouba Kamara ?

J’espère ! Je lui ai écrit récemment pour lui dire qu’on l’attendait. J’en ai déjà parlé à Édouard, qui l’a connu à Marseille… On aimerait que les meilleurs joueurs d’origine sénégalaise viennent renforcer l’équipe. Il faut lui laisser du temps pour mûrir sa réflexion. Il doit gérer sa situation contractuelle, savoir où il sera l’année prochaine… »
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