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Accord avec l’union Européenne : Les pêcheurs passent à la vitesse supérieure
Publié le samedi 5 decembre 2020  |  Enquête Plus
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© Autre presse par DR
Accord de pêche renouvelé avec l’U.E : L’Espagne chasse les migrants sénégalais mais envoie 29 navires pêcher dans les eaux du Sénégal.
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Les acteurs de la pêche comptent paralyser le secteur durant trois jours. Et ce depuis hier. En conférence de presse, ils ont demandé au gouvernement de surseoir à l’accord de pêche avec l’Union européenne. Une marche est prévue aujourd’hui à la place de la Nation, pour dénoncer les nombreuses difficultés que rencontrent les pêcheurs sénégalais.


Les pêcheurs sénégalais en ont marre et ils comptent bien se faire entendre. Cet après-midi à 15 h, tous les acteurs du secteur de la pêche, soutenus par le mouvement Noo Lank, organisent une marche pour dire ‘’Ça suffit ! Basta !’’ à l’Etat du Sénégal.

En effet, à la rareté du poisson, s’est ajouté un accord avec l’Union européenne qui assombrit l’horizon de ces professionnels de la pêche. ‘’Nous allons vers un moment historique, pour ne pas dire une première dans le secteur de la pêche. Certes, l’Union nationale des pêcheurs artisanaux du Sénégal (Unapas) a déjà eu, par le passé, à organiser des manifestations revendicatives dans les différents quais de pêche. Mais aujourd’hui, nous avons décidé de bloquer nos pirogues. Nous avons décidé, en accord avec nos frères mareyeurs, de fermer les camions et de venir tous ici à Dakar. Tous les acteurs font un arrêt de travail de 72 heures, pour venir dire la situation exacte que vit le secteur de la pêche’’.

‘’Les pirogues n’iront pas en mer, à partir d’aujourd’hui (hier jeudi). Aucun mareyeur ne va acheter du poisson. Donc, comprenez que les marchés ne seront pas alimentés en poisson. Cela, pour qu’on nous entende, pour qu’on nous écoute’’, fait savoir le secrétaire général de l’Unapas. Considérant que la pêche constitue la première source de devises pour le Sénégal, sans compter son rôle crucial dans l’alimentation des Sénégalais, Moustapha Dieng appelle tous les corps de métier et toutes les couches sociales à sortir massivement, cet après-midi.

‘’Ne l’oublions pas, poursuit-il, les ressources halieutiques appartiennent à tout le peuple sénégalais. Cela est consacré par notre Constitution. Donc, ce combat n’est pas seulement celui des pêcheurs, l’heure est venue d’attirer l’attention de nos gouvernants sur la situation qui prévaut dans le secteur de la pêche. La campagne de l’année dernière a été catastrophique. La conséquence, vous l’avez vue : les pêcheurs ont repris les pirogues pour l’Espagne. Cette présente campagne n’augure rien de bon et c’est grave. Une pirogue, c’est un investissement de plus de 60 millions qui emploie 100 personnes, et qui peut consommer entre 400 000 et 600 000 F CFA de frais d’essence par jour. Cela successivement pendant une dizaine de jours en mer. Mais elle ne peut ramener aucun poisson. C’est pourquoi nous décidons de descendre dans la rue, battre le macadam pour conscientiser nos autorités, car la Convention des droits de la mer des Nations Unies dit que tout pays qui n’a pas un excédent, n’a pas le droit de vendre ses ressources’’.

‘’Nous ne comprenons pas le type de pêche...’’

Le Réseau des CLPA (conseils locaux de la pêche artisanale), la Confédération nationale des entreprises artisanales patronales (Conapas), l’Union nationale des mareyeurs du Sénégal (l’Unams) sont unanimes : l’accord de pêche entre le Sénégal et l’Union européenne enfonce le clou. Et pour cause ! Les navires étrangers pratiquent en mer la pêche électrique, chose pourtant interdite en Europe. Elle consiste à envoyer du courant électrique à travers les mailles d’un filet, ce qui permet au chalutier de paralyser les poissons et donc de les récupérer plus facilement.

De l’avis de Moustapha Dieng, la responsabilité de l’Etat est engagée. ‘’Nous ne comprenons pas le type de pêche qu’ils sont en train de mener au large et qui fait que le poisson n’arrive plus au niveau de nos côtes. Le poisson est capté au large par ces grands bateaux. Il n’arrive plus à la hauteur de la pêche artisanale. Pour régler ce problème, il faut que l’Etat commence par surseoir à ces accords avec l’UE. Nous marchons pour cela. Pour que l’Etat renforce la surveillance de nos zones économiques et de survie et lutte contre la pêche illégale, non-autorisée, non-réglementée. Quand tu ouvres ta zone et que tu laisses n’importe quel bateau entrer, n’importe quand et pêcher n’importe comment, la résultante, c’est ce que nous vivons actuellement et nous voulons que ça cesse’’.

En guise de réponse à la polémique autour de cet accord de pêche, la tutelle a fait savoir que les navires européens s’attaquent à des poissons qui n’entrent pas dans les prises de la pêche artisanale. Difficile à croire, quand on sillonne les plages de Soumbédioune, Yoff ou encore Yarakh. Les pêcheurs sénégalais débarquent journellement du thon et du merlu, des espèces en voie de disparition dans leurs périmètres. ‘’EnQuête’’ avait consacré à la problématique un dossier intitulé ‘’Pêche sénégalaise : poissons en eaux troubles’’.

Le Sénégal, estime M. Dieng, pourrait se passer de ces bateaux étrangers dans son approvisionnement. ‘’Nous avons entendu la déléguée de l’UE riposter, mais nous lui disons que nous sommes indépendants et c’est ce poisson qui nous fait vivre. Vous fermez vos frontières, vous refusez que nos enfants entrent chez vous et pendant ce temps, vous envoyez 45 de vos navires. Si l’Etat accepte de doter sa population de pêcheurs de moyens conséquents, nous n’aurons jamais besoin d’aller faire appel à l’Europe pour pêcher le thon’’, insiste-t-il.

‘’Il faut qu’on arrête de sénégaliser les bateaux étrangers’’

Par ailleurs, l’Unapas exige la baisse du prix des moteurs de pirogue, ainsi que la libéralisation du marché d’importation de ces moteurs qui est actuellement aux mains de l’entreprise française CFAO. Le syndicat insiste également sur le renforcement de la recherche, afin de connaître l’état de la ressource. Le porte-parole du jour ajoute ‘’qu’il faut qu’on arrête de sénégaliser des bateaux étrangers. Nous demandons que le Code la pêche soit révisé, car il confère que tous les pouvoirs sont entre les mains du ministre. En tant qu’acteurs, nous ne pouvons pas être exclus des centres de décision et donc, par rapport aux licences de pêche, il faut que la commission consultative devienne une commission délibérative, dans laquelle les pêcheurs, les mareyeurs et les femmes transformatrices auront leur mot à dire’’.

Ses membres déplorent, en outre, le niveau de compensation attribuée au secteur par le Fonds de riposte à la Covid-19. Elle n’a pas été à la hauteur des dégâts subis par la pêche sénégalaise. Toutefois, Moustapha Dieng précise : l’Unapas n’est pas une association politique. Nous sommes des professionnels de la pêche. Nous défendons notre métier. Nous n’en voulons à personne, nous ne combattons personne, nous défendons notre métier et nous sommes prêts à tout. Alors, attendez-vous à une étape supérieure. Nous voulons simplement sauvegarder nos emplois. Nous ne voulons rien d’autres et nous pensons que c’est un droit. Il y a, au Sénégal, plus de 20 000 pirogues et chacune est une entreprise. La pêche est le secteur qui emploie le plus de personnes, parce qu’en amont comme en aval de l’activité de pêche, il se crée énormément d’emplois connexes et ce sont des millions d’emplois qu’on va perdre’’.

Du côté des femmes transformatrices du secteur, la mobilisation est de mise. Celles du Réseau des femmes de la pêche artisanale du Sénégal sont à Dakar uniquement pour la manifestation du jour. ‘’Nous n’avons pas l’habitude de manifester. Si on nous entend aujourd’hui, c’est parce que l’heure est grave. Là où les pêcheurs souffrent, nous souffrons cinq fois plus. Des centaines d’emplois dépendent de nous. Une activité qui nous rapportait entre 600 000 et 700 000 F CFA nous fait gagner aujourd’hui 50 000 F CFA. Trop, c’est trop’’, lance, révoltée, la présidente Aissatou Faye.

Le professeur Malick Ndiaye, pour sa part, rappelle aux Sénégalais que le poisson, c’est l’affaire de tous. De l’enseignant au médecin, en passant par l’étudiant ou le mécanicien.
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