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Adama Gaye écrit à l’Onu
Publié le mardi 24 septembre 2019  |  Rewmi
Adama
© Autre presse par DR
Adama Gaye, journaliste
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Cher Monsieur Antonio Gutteres, j’aurais du être en ce moment précis à New York pour participer, comme l’an dernier, et comme tant d’autres fois avant, à la Session de l’Assemblee Générale de l’organisation des nations unies (onu). En votre qualité de Secrétaire Général chargé d’en impulser la marche, je tiens à vous informer que, pour des raisons indépendantes de ma volonté, je me vois contraint hélas d’être réduit, retenu au Sénégal, de vous saisir par voie épistolaire -devrais-je dire techtonicstolaire?), afin de vous secouer un peu. Ce, après l’avoir fait par message privé, hier, à votre représentant en Afrique de l’Ouest, Mohamed Ibn Chambas que je connais depuis 1992.
Vous vous souviendrez que vous et moi-même avons partagé la conférence de Chatham House, à Londres, en juin 2016. Ce jour-la, vous ne pouvez l’oublier, alors que vous y étiez venu faire campagne pour obtenir votre poste actuel, je fus celui qui était intervenu pour mettre en garde la prestigieuse audience contre une possible victoire de Donald Trump, à l’élection présidentielle américaine qui devait se tenir en novembre de la même année. Toute la salle misait sur un triomphe de Hillary Clinton. “Si ce que Adama dit se confirme, il nous faudra revoir notre grille de lecture”, s’écria le brillant Sashi Tharoor, ancien numéro 2 de l’ONU, réalisant la gravité du débat soulevé. Sylvie Goulard, la nouvelle Commissaire Européenne aux politiques industrielles, était avec lui, dans l’un des nombreux panels. Ma prédiction devint réalité avec le retournement électoral des pronostics: la victoire de Trump…
Depuis lors, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts dans une Maison Blanche Trumpienne fort agitée alors que l’ONU ronronne dans une inertie rarement vue.
Or, c’est dans un tel contexte, son avenir en pointillés, qu’elle tient demain, sa 74eme Assemblée Générale annuelle sur un thème fourre-tout autour d’un développement durable plus incertain que jamais.
Tous les amis et observateurs de notre instance universelle sont inquiets quant à sa situation actuelle, au point que nombreux ne la voient plus que dans un état comateux final.
Espace de blablas sans morsure sur le vécu de peuples -Nous les peuples, édicte pourtant sa charte, dès le départ- qui guettent le moindre signe de pertinence de sa part. Tous s’étonnent que trente ans après la chute du mur de Berlin suivie d’une explosion des rêves de libertés publiques et individuelles, elle n’est plus que ce machin désincarné dont De Gaulle, sarcastique, se moquait naguère.
Demain, quand, un à un, les chefs d’états et de gouvernement, et leurs suites, défileront à sa tribune, après avoir engorgé les rues avoisinant le Hudson River, il y a fort à parier que verbiage et grand-standing seront à l’ordre du jour.
Monsieur Antonio Gutteres, qu’avez-vous fait de cette organisation? J’avais cru, en entendant votre voix de ténor, à Chatham House, que vous étiez capable de lui redonner le lustre qu’elle a perdu. Je pensais que vous aviez un projet pour elle.
A l’évidence, vous semblez vous contenter de recevoir ses couronnes mortuaires.
L’ONU est marginalisée, sa voix inaudible, son poids faible: les affaires du monde se jouent loin de ses travées et de ses salons feutrés.
Elle incarne désormais un monde révolu. La vitesse d’un monde mutant la laisse à la case obsolescence. En êtes-vous conscient?
Il y a plus grave: elle est frappée par un soupçon montant d’une culture de la corruption et de l’immixtion à des fins crapuleuses dans des histoires éloignées de ses missions. Il n’est que de vous rappeler ses magouilles sénégalaises autour d’une coûteuse et criminelle PUDC qui mouille l’une de vos agences, le Pnud, pour ne pas le nommer, pour mesurer la perte d’âme qui la frappe. Le savez-vous?
Il y a encore pire, et c’est le but de cette lettre. Quand je me suis engagé à écrire sur l’ONU, y compris jusqu’à être l’un des acteurs décisifs dans l’élection du premier africain au sud du Sahara à sa tête, en la personne de Kofi Annan, en menant campagne pour lui aux côtés de deux de mes amis, Chambas et l’alors Président du Ghana, Jerry Rawlings, ce n’était sûrement pas pour la voir devenir ce qu’elle est aujourd’hui: une institution aphone et muette sur les vrais enjeux de nos sociétés.
La mère de mes enfants, qui a été l’une des principales assistantes de Annan pendant son magistère peut témoigner qu’à chaque fois que ce dernier me faisait l’amitié de me contacter mes positions, comme il le disait lui-même, relevaient de préoccupations légitimes sur sa marche.
Mais me voici contraint de vous demander une question simple: pourquoi est-elle restée sans voix ni action lorsqu’il y a deux mois, pris en otage, jeté dans une prison, illégalement, simplement parce que je ne faisais qu’exercer mes droits constitutionnels, je suis devenu la dernière des victimes d’un terrorisme etatique prospérant sous les ailes subjuguées de la moribonde organisation que vous dirigez?
Savez-vous que tout ce qui m’est reproché était couvert par mes droits constitutionnels, notamment par mon devoir de dire ce que je pense, en des termes vifs, sur la prédation de notre souveraineté sur nos ressources naturelles, notre souveraineté sur nos données de citoyen et même notre liberté d’exposer les frasques, en tous genres, de celui qui gouverne ce pays -au nom de l’ardente obligation du pluralisme démocratique?
Ou bien, comme j’en ai peur, êtes-vous de cette engeance cynique et détachée qui préfère tourner la tête pour ne rien voir? Faites-vous partie de ceux qui refusent de voir les faits en déblatérant sur des jugements de valeur, prétexte pour ceux qui veulent étouffer le droit inexpugnable des peuples à la liberté d’expression ?

Autant vous dire donc que, demain, sans espoir, quand sonnera le coup d’envoi de son Assemblée générale, je fais le pari que dans vos échanges onctueux, vous n’aurez pas le cran de demander à Macky SALL, l’un de vos hôtes, ce qu’il a fait bon dieu des acquis démocratiques et des libertés de notre pays.
J’ai déjà posé cette question à Chambas.
Ce matin, je la soulève ici publiquement, en vous disant que même si vous choisissez de n’être que le croque-mort de l’ONU, je tiens à me faire le devoir de vous envoyer des chrysanthèmes commentés…

Monsieur Gutteres, avez-vous du cœur?
Celui de l’ONU est en état ectoplasmique. Ne précipitez pas son arrêt par vos ondulations verbales et votre dos rond.

Ce monde, plein d’innovations technologiques, avec une jeunesse qui rêve, mérite mieux que ce cirque, faisant du surplace, que vous avez fini de faire de l’ONU.

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