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Douane/Commerçants: Les dessous du bras de fer
Publié le mercredi 19 juin 2019  |  Enquête Plus
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© aDakar.com par SB
Visite du Directeur de Dubaï Port World Dakar au niveau du terminal à conteneurs du Port autonome de Dakar
Dakar, le 20 décembre 2017 - Le Directeur de Dubaï Port World Dakar a effectué une visite au niveau du terminal à conteneurs du Port autonome de Dakar (PAD). Devant les journalistes, il s`est également prononcé sur la situation dans l`activité portuaire.
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Sous peu, manger, s’habiller, construire et même équiper sa chambre risque de devenir davantage compliqué pour les Sénégalais aux revenus modestes. C’est ce qu’il faut retenir des nouvelles procédures de tarification adoptées par la douane depuis le 31 mai et entrées en vigueur le 10 juin dernier, si l’on en croit certains privés s’activant dans le Commerce. Mais de l’avis de nos interlocuteurs de la Douane, tout ce bruit cache mal des intérêts inavoués. Que cache-t-on dans cette affaire ?

On en sait un peu plus sur le conflit latent entre la douane et certains privés qui s’activent au port autonome de Dakar. Avec la Tabaski qui profile à l’horizon, il ne faudrait pas s’étonner qu’il y ait une hausse vertigineuse et généralisée sur certains produits à grande consommation, notamment le tissu. Du basin simple au basin riche en passant par le wax, les cols, écharpes, foulards, la broderie, le khartoum, Pendjab, tissu jean, rideau velours… Bref, presque tous les types de tissus sont frappés de manière assez brutale par la hausse des tarifs douaniers entrainée par les nouvelles procédures douanières. Et parfois, les hausses dans certains produits peuvent aller du simple au double.

Selon certaines sources, certains conteneurs sont d’ailleurs bloqués au port autonome de Dakar à cause de ces augmentations que certains opérateurs économiques refusent catégoriquement de supporter. Touchés par cette mesure qu’ils jugent ‘’incompréhensible et injustifiée’’, certains commerçants, malgré le week-end, se sont rencontrés le dimanche pour protester vigoureusement. A cette occasion, ils avaient tout bonnement décidé de faire usage de tous les moyens que leur offre le droit pour se battre contre la décision. D’ailleurs à cet effet, ils avaient décrété un mot d’ordre de grève de 24 heures à partir de ce jour.

A l’examen du document controversé, il résulte que la ‘’hausse’’ n’épargne pratiquement aucun secteur. A titre d’exemple, pour ce qui est du tissu brodé, il fallait auparavant débourser 3 millions de francs Cfa pour un conteneur de 20 pieds. Cela revenait, expliquent certaines sources, à moins de 100 francs le yard pour certains types de tissu. Avec la hausse, il va falloir débourser jusqu’à 150 francs le yard. C’est le cas par exemple pour la broderie en pièce coton et synthétique d’origines turques et chinoises. Pour celle originaire d’Autriche, il faudra payer jusqu’à 3850 francs. Même tarif pour le basin riche toutes origines. Si l’on sait qu’un conteneur peut contenir des milliers et des milliers de yards, il convient de signaler que la hausse va simplement se chiffrer à des millions de francs Cfa.

Huiles, boissons alcoolisées, biscuits, bonbons, café, cigarettes…

En cette veille de tabaski, voilà de quoi donner des vertiges aux chefs de familles qui peinent à joindre les deux bouts, si rien n’est fait. Et comme pour couronner le tout, les hausses sont également ‘’excessives’’ sur les produits alimentaires. Les huiles, les boissons alcoolisées, les biscuits, les bonbons, le café, les cigarettes, le corn bœuf, la moutarde, le lait en poudre, le thé… La liste des produits qui risquent de voir les taxes y afférentes augmentés est loin d’être exhaustive. Pour le lait en poudre d’origine animale, il faudra payer 2200 francs le kg, 1400 francs pour le végétal.

Aussi, alors qu’on n’a pas fini d’épiloguer sur la hausse du ciment, de nouvelles augmentations vont également s’ajouter sur certains matériaux de construction, et de manière générale, sur plusieurs produits relatifs aux BTP ainsi que les produits informatiques. Notre interlocuteur de regretter qu’au moment où l’Etat étrangle les Sénégalais à travers des taxes, des études montrent qu’il accorde à tout-va des exonérations qui profitent surtout à des entreprises étrangères.

Mais le plus dirimant dans cette affaire, selon une source douanière, c’est que les nouvelles formes de tarification en plus d’être excessives sont également difficiles à mettre en œuvre. ‘’C’est comme si la douane, d’un coup, veut se substituer au commerçant en exécutant le rôle qui était jusque-là dévolu à ce dernier. Pour faire simple, avant, pour un conteneur qui contenait des carreaux ainsi que d’autres types produits, on le qualifiait ‘’carreaux plus’’ et le propriétaire payait 1,5 million. Pour un conteneur qui ne contenait que des carreaux, il paie 1 million. Maintenant, on veut qu’en plus des carreaux que l’on procède au dédouanement de chaque produit. Ce qui risque d’être très compliqué.’’

La douane parle de ‘’mesures correctives’’

Dans ses motivations, la douane parle plutôt de ‘’mesures correctives’’ et dit avoir constaté de nombreux ‘’dysfonctionnements’’ sur la détermination de la valeur en douane, lors du dédouanement. ‘’En effet, lit-on dans la note de service, des importateurs procèdent à des sous-évaluations de certaines marchandises importées. Cette situation porte préjudice aux intérêts du trésor public, met en péril une bonne partie du tissu industriel local et fausse les règles de concurrence.’’

De ce fait, la douane s’est voulue ferme, en enjoignant à ses services de veiller à ce que les contrôles physiques soient effectués par les vérificateurs, afin de s’assurer de l’évaluation correcte des marchandises. ‘’Il est formellement interdit de dédouaner les conteneurs sur la base de barèmes forfaitaires.’’ Des sources douanières se veulent toutefois assez sceptiques quant à l’applicabilité même de la mesure. Elles renseignent qu’en 2016 déjà, une initiative du genre avait été menée, mais s’était soldée par un échec. ‘’Les transitaires et commerçants avaient rué dans les brancards et l’Etat avait fini par reculer, parce que cela allait indubitablement impacter les prix à forte consommation. On se demande d’ailleurs pourquoi cette mesure, qui était rangée dans les tiroirs, a été remise sur la table’’, ont-ils fulminé.

Nébuleuse commerçante

En vérité, l’une des raisons de ce branle-bas réside dans le fait que les procédures de contrôle vont être plus strictes. Tout sera indexé sur la base des valeurs réelles des marchandises. ‘’Une bonne partie du problème réside dans le fait qu’une ‘’quantité industrielle’’ de ‘’containers fourre-tout’’ où du matériel de carrelage peut côtoyer le matériel électroménager, des produits alimentaires comme le poivre. Bref, toutes sortes de produits difficiles à évaluer, débarquent tous les jours au Port’’. Conséquence, la Douane, ‘’pour contourner ce problème, appliquait un barème approximatif, un taux global suivant le container qui ne reflète pas la vraie valeur de la marchandise’’. Or, ce qui change désormais, et qui, selon l’avis de la Douane, fait grincer les dents, c’est que ce taux global disparaît.

‘’Le dédouanement se faisant désormais suivant le groupe de marchandises à dédouaner, même si cela prend plus de temps, et selon leur valeur réelle. De ce fait, les containers fourre-tout, c’est fini’’, assène-t-on. Selon nos interlocuteurs, cela n’arrange pas certains commerçants de l’Informel pas plus que les ‘’passeurs de pièces’’ commis à ces taches de dédouanement. Les ‘’passeurs de pièces’’ sont des transitaires informels ne disposant pas d’agrément, mais qui ont assez d’entregent pour passer entre les mailles du filet et négocier avec certains douaniers des tarifs de dédouanement complaisants. Il ressort de nos investigations que les passeurs de douane sont beaucoup plus nombreux que les transitaires et déclarants en Douane en règle. Notre source est formelle : ‘’ils sont très actifs, liés à certains commerçants, ne respectent pas la loi et veulent continuer ainsi’’. Avec les nouvelles mesures, ils vont ‘’malheureusement pour eux disparaître’’. ‘’Ce sont des gens qui vivent de l’anarchie, certains sont d’anciens petits commerçants reconvertis…’’

Selon nos interlocuteurs douaniers, ‘’ce bruit procède de la protection d’intérêts indus. Il n’y aura aucune incidence sur les prix qui va découler de la responsabilité de la Douane. Les industriels, les commerçants organisés et les transitaires disposant d’agrément en bonne et due forme n’ont rien à craindre. Bien au contraire. Ce sont ceux qui vivent de l’anarchie qui ont des choses à craindre’’.

RENCONTRE DOUANE

Les quatre mesures phares pour calmer les ardeurs

Pour désamorcer la bombe, une réunion tripartite a été tenue, hier, à la Direction générale des douanes et a duré plus de trois tours d’horloge. Ont été présents le directeur général de la Douane avec 18 de ses collaborateurs, la délégation de Unacois yessal amenée par son directeur exécutif Alla Dieng, ainsi que des représentants des commissionnaires en douane ou transitaires. Dans l’ensemble, la réunion s’est bien déroulée, selon Idy Thiam, et quatre mesures phares ont été prises. D’abord, en ce qui concerne les nombreux conteneurs bloqués au port et qui sont entrés au port avant l’entrée en vigueur de la note de service, l’administration douanière, selon Monsieur Thiam, a admis leur dédouanement selon l’ancienne procédure.

Pour ce qui des nouvelles dispositions, il a été décidé de mettre sur pied une commission d’harmonisation des positions sur les valeurs. Cette commission va devoir présenter ses conclusions dans 45 jours. Elle sera composée de commerçants représentés par Unacois yessal, des représentants des transitaires, d’industriels, ainsi que de l’administration douanière. Pendant que les autres associations de commerçants ont préféré boycotté la rencontre, certaines en exigeant le retrait de la mesure administrative, l’Unacois yessal, elle, s’est faite porte-parole des commerçants. Son directeur exécutif se réjouit : ‘’Il faut préciser que l’objectif principal de cette note de service qui change les procédures de dédouanement est que les importations n’affectent pas nos produits locaux. Nous sommes entièrement parties prenantes et nous allons travailler avec l’Etat pour trouver ensemble les solutions les meilleures’’.

Les différents acteurs présents au rendez-vous se sont engagés à mettre en œuvre les conclusions qui seront issues des travaux de la commission mixte. Mieux, un comité de veille sera mis en place, renseigne Idy Thiam, pour s’assurer d’une mise en œuvre correcte des décisions. Aux commerçants qui ont décrété une journée morte dans les marchés du Sénégal, en ce jour de mardi, il rétorque : ‘’Tout le monde ira au travail demain. Ces gens ne peuvent pas parler au nom des commerçants’’.

M. AMAR
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