Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Annonces    Femmes    Nécrologie    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Politique
Article
Politique

Cheikh Oumar Hann à la tête de l’enseignement supérieur - Une nomination qui passe mal…
Publié le mercredi 10 avril 2019  |  Enquête Plus
Cheikh
© Autre presse par DR
Cheikh Oumar Hann, nouveau ministre de l’Enseignement supérieur
Comment


L’Enseignement supérieur change de ‘’tête’’. Le réformateur Mary Teuw Niane laisse sa place à l’ex-directeur du Coud (Centre des œuvres universitaires de Dakar). Une nomination surprenante pour certains et décevante pour d’autres. Pour beaucoup, le nouveau ministre ne ferait pas le poids.



Le remaniement ministériel du président Macky Sall fait jaser. Et c’est le chamboulement à la tête du secteur de l’enseignement supérieur qui enregistre le plus de commentaires. Etudiants, professeurs et citoyen lambda sont depuis hier partagés entre ‘’surprise’’ et ‘’déception’’, vu les profils du ministre sortant et de son successeur. L’ancien directeur du Centre des œuvres universitaires de Dakar (Coud), Cheikh Oumar Hann, est loin de faire l’unanimité au sein du campus. Et pour cause, ‘’sa mauvaise gestion du personnel’’ et le flot de critiques quant à l’exercice de ses fonctions depuis 2014. ‘’Il refuse la prise en charge sanitaire du personnel du centre. Les vacataires et autres temporaires sont mal payés’’, renseigne un agent du Coud.

Les plus déçus par cette nomination ne sont autres que les étudiants. Dans les jardins, devant les amphis, ils discutent de ce changement qui, selon eux, est mal pensé. ‘’Cheikh Oumar Hann peine à résoudre le problème du logement sur le campus. Plusieurs chambres sont occupées par des étudiants qui ne le sont que de nom. Les étudiants membres de l’Apr font la loi avec son aval. Certains ont même des postes au Coud. Franchement, il a échoué en tant que directeur du Coud. Je me demande comment il va gérer un ministère’’, s’interroge Ousmane Diop, étudiant en Licence de droit public. Tout comme lui, beaucoup reprochent au maire de Ndioum d’avoir installé un climat de tension politique entre les étudiants, dès son arrivée sur le campus.

Pour d’autres, Cheikh Oumar Hann n’a ni la trempe ni la poigne de Mary Teuw Niane pour diriger un secteur perpétuellement en zone de turbulences. ‘’Il méritait de rester dans le gouvernement, vu toutes les réformes qu’il a apportées dans le but d’assainir l’enseignement supérieur. Sous son mandat, il y a eu morts d’étudiants certes, mais je pense que Mary Teuw Niane avait les compétences requises. Il évoluait dans un secteur qu’il maitrisait très bien. C’est dommage’’, se désole Cheikh Tidiane Sy, étudiant à la faculté des Lettres.

Ainsi, les pensionnaires du temple du savoir regrettent déjà celui dont ils demandaient la tête en mai 2018, suite à la mort de Fallou Sène, tout simplement parce que son successeur ne serait pas à la hauteur du chantier qui l’attend et que, malgré tout, Niane lui dame le pion en termes de compétence.

Toutefois, des avis divergents, il y en a. Certains pensent que Macky Sall veut passer de la bureaucratie aux affaires techniques. C’est le cas de Jules Sabaly, entrepreneur, qui pense ‘’qu’il faut un technicien pour régler le problème des étudiants. Ils ont besoin d’une bonne formation axée sur les besoins du marché et non de chapitres qui datent de l’Antiquité qu’ils récitent à longueur de journée. Que leur a apporté le système Lmd ? C’est toujours des diplômes classiques. Un ministre ne doit pas forcément être un académicien’’. Pour lui, chaque Sénégalais devrait d’abord observer la méthode de travail du nouveau venu, avant toute critique.

Le poids de leurs parcours

Si Mary Teuw Niane s’est fait connaitre du grand public par ses compétences intellectuelles, sa culture de l’excellence des années 1990 à nos jours, l’instigateur des grandes réformes de l’enseignement supérieur cède sa place à Cheikh Oumar Hann dont le nom est inéluctablement rattaché à un rapport de l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption (Ofnac). En mars 2017, il a largement été cité dans un rapport évaluant sa gestion entre 2014 et 2015. L’office a révélé de graves irrégularités : cumul de fonctions, octroi de subventions irrégulières, fractionnement dans les commandes de marché, pratiques de détournement de deniers publics. En outre, les enquêteurs de l’Ofnac ont souligné avoir mis la main sur des ‘’indices graves et concordantes de faux et usage de faux’’. La presse d’alors avait même prévu son emprisonnement, surtout que Nafi Ngom Keita, Chef de l’Ofnac, exigeait qu’il soit relevé de ses fonctions de directeur du Coud et que des décisions fermes soient prises pour qu’il n’ait plus à charge un organe public.

Le dossier, bien que remis à l’autorité judiciaire, n’a fait l’objet d’aucune poursuite et l’intéressé n’a point cessé de clamer son innocence. Il sera une deuxième fois rattrapé, un mois plus tard, par de nouvelles accusations, cette fois-ci de l’Autorité de régulation des marchés publics qui a constaté une cession illégale de marché à des prestataires privés quant à la restauration sur le campus. Ce fait aurait privé les étudiants de repas, l’année suivante, n’eût été l’indulgence de l’Armp.

‘’Comment peut-on gérer des étudiants avec de telles accusations sur le dos ?’’

Bref, ce cumul de malversations avérées fait tache sur son Cv qui, pour certains professeurs de l’Ucad, pose un problème d’éthique. ‘’Comment peut-on gérer des étudiants avec de telles accusations sur le dos ?’’, s’étonne l’un d’eux qui a préféré garder l’anonymat. Pour ce dernier, Cheikh Oumar Hann est bien loin de la grandeur de Mamadou Seck, Président de l’Assemblée nationale de 2008 à 2012, qui a eu à démissionner en raison de ses démêlés avec la justice. Il reviendra plus tard à son poste, après avoir été blanchi par une enquête. Niane et son successeur sont de purs produits de l’université sénégalaise et sont tous deux scientifiques et docteurs dans leur domaine d’études. Le premier est mathématicien, le second ingénieur en sciences physiques option génie des procédés. S’ils partagent aussi des années d’enseignement universitaire, leurs parcours cependant diffèrent.

Le ministre sortant a consacré toute son énergie à l’enseignement supérieur et à la recherche. De plus, l’ancien recteur de l’université de Saint-Louis a profondément réformé le système universitaire, non sans se heurter à des représailles et à des bavures. Son successeur, lui, a plutôt occupé des postes techniques : directeur général de l’Agence sénégalaise pour l’innovation technologie, conseiller technique au ministère des Mines, de l’Industrie et de l’Artisanat, ministre conseiller du président Abdoulaye Wade. Pourtant, aujourd’hui, à l’heure du bilan, Niane tire son épingle du jeu, contrairement à Hann.

Qui sait ? C’est sûrement ce profil technique que recherche le président Macky Sall. Sauf que, pour l’heure, les multiples affaires dans lesquelles il est impliqué lui ont fait perdre toute crédibilité.

EMMANUELLA MARAME FAYE
Commentaires

Dans le sous-dossier