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Acte 3 de la décentralisation : la planification, une exigence pour la territorialisation des politiques publiques ?
Publié le mardi 26 novembre 2013   |  Dakaractu




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La politique de décentralisation au Sénégal relève d’une tradition très ancienne.Initiée bien avant les indépendances,elle s’est traduite,dès l’accession à la souveraineté nationale et internationale du pays à plusieurs initiatives visant à approfondir cette politique.Celles-ci ont débouché sur certaines mesures phares : ü La transformation, en 1960, des cercles, subdivisions et cantons, hérités de la colonisation, en régions, départements et arrondissements ; ü La mise en place,en 1966, du code l’administration communale qui,tout en dégageant un cadre d’exercice clair à ces collectivités, n’a pas étendu le droit commun à l’ensemble des communes ; ü L’adoption, en 1972, de la Réforme de l’Administration Territoriale et Locale (RATL) qui a consacré la mise en place des communautés rurales ; ü L’élargissement, en 1990, du statut de plein exercice à toutes les communes et de l’autonomie de gestion à toutes les collectivités locales ; ü L’adoption, en 1996, des lois et décrets de la régionalisation, consacrant, entre autres, l’érection de la région en collectivité locale et le transfert de certains domaines de compétence aux collectivités locales. En 2013, les autorités sénégalaises ont cependant manifesté la volonté de procéder à une réforme plus aboutie de la décentralisation. Celle-ci, improprement appelée Acte 3, au vu de l’histoire de cette politique au Sénégal, se confond déjà avec la territorialisation des politiques publiques, le concept pivot qui devrait structurer toutes les interventions en la matière. A la lumière des premières esquisses de la nouvelle politique de décentralisation, il ressort que plusieurs questions interpellent les pouvoirs publics. Parmi celles-ci la place de la planification, objet de la présente réflexion, constitue une interrogation de taille.

QUEL EST LE SENS DE LA NOUVELLE REFORME ?

La nouvelle réforme part de certaines défaillances notoirement constatées au niveau des collectivités locales et essaye d’apporter des rectifications aux travers observés. Des faiblesses manifestes notées dans l’exercice de la décentralisation D’année en année, plusieurs contraintes ont été pointées dans la prise en charge du développement au niveau local. Celles-ci ont trait entre autres : ü au manque d’attractivité de certaines collectivités locales déshéritées qui, en dépit des interventions des nombreuses agences et projets dédiés au développement local, ne disposent pas d’un niveau d’infrastructures et d’équipement critique leur permettant de soutenir un minimum d’activité économique (absence de secteur secondaire et de secteur tertiaire) ; ü à la modicité des ressources financières des collectivités locales caractérisées par des disparités énormes dans les budgets en milieux rural et urbain mais aussi entre grandes et petites entités ; ü aux déficiences dans le pilotage du développement au niveau local liés aux ressources humaines (management des collectivités locales, ressources humaines insuffisantes et sans qualification, bas niveau ou absence de formation des élus…) et aux outils (plans locaux parfois non intégrés et sans instrument d’opérationnalisation). De tels éléments, loin d’être exhaustifs, en vérité, sont sans doute à l’origine de la nouvelle inflexion prise par les autorités actuelles. Les mesures correctives esquissées par la nouvelle politique Partant des insuffisances dénoncées par les acteurs de la décentralisation, la nouvelle réforme met en avant le crédo de la territorialisation considérée, par l’autorité, comme une voie d’émergence des collectivités locales en ce qu’elle fait véritablement appel aux ressorts du développement local. En effet, la territorialisation des politiques publiques fait intervenir les deux leviers clés que sont l’aménagement du territoire et la planification qui semblent être des solutions appropriées aux difficultés rencontrées à la base. Au stade actuel de la formulation de cette politique, si l’on jette un regard rétrospectif sur les idées fortes dégagées par la réflexion antérieure et les mots-clés structurant le discours du chef de l’Etat, en prenant comme date repère son annonce de mars 2013, il ressort que les préoccupations relatives à l’aménagement du territoire sont réelles. Pour rappel, les mesures proposées tournent autour des points suivants : ü L’introduction de la notion de communalisation intégrale comprise ici comme un moyen de doter des fonctions urbaines à l’ensemble des collectivités locales du Sénégal. Celle-ci vise surtout à réduire, voire casser, le clivage entre les niveaux rural et urbain ; ü L’érection du département en collectivité locale est une innovation dans ce qui se faisait jusque là, ces entités se confondant seulement à des circonscriptions administratives regroupant les communes et les communautés rurales ; ü Un autre élément de taille introduit par la réforme concerne la notion de régions territoire qui insiste sur l’importance d’adosser l’identification de ce type de collectivité à des réalités composites tenant en compte l’économie, la géographie et la sociologie, triptyque garant de la viabilité de ce nouvel espace devant regrouper les départements et certaines régions telle que connues actuellement. Une telle mesure devrait permettre de revenir à un découpage du territoire à 7 régions, comme en 1960 au lieu des 14 actuels sur un territoire qui n’a pas connu d’extension ; ü Le dernier élément concerne un réexamen des compétences à attribuer aux collectivités locales afin de les rendre plus performantes dans la gestion du développement local. On remarquera que ces éléments relèvent uniquement de l’aménagement du territoire. La planification économique, second volet devant sous-tendre la territorialisation des politiques publiques, ne constitue pas un terrain défriché par la réflexion en cours. Pourtant, la volonté de l’autorité d’approfondir la décentralisation par la territorialisation des politiques publiques pour booster le développement local passe nécessairement par la planification.

DÉCENTRALISATION ET PLANIFICATION

Nous pouvons nommer décentralisation toute politique visant à ramener l’État au niveau du citoyen à travers les collectivités locales réputées être des institutions proches et accessibles aux populations, dotées d’une personnalité morale, avec un territoire, des compétences propres. Cela veut dire que la gestion du développement s’exerce au niveau local dans le cadre de la décentralisation. Qu’il y ait décentralisation ou non, les territoires des collectivités locales constituent toujours les véritables lieux d’application des politiques publiques que celles-ci soient d’initiative nationale ou locale. L’on a introduit le concept de territorialisation des politiques publiques pour mieux rendre compte de la responsabilisation de l’échelon local qui a lieu en cas de décentralisation. Il y a donc un lien très étroit entre les concepts de décentralisation et de territorialisation d’une part et celui de développement local de l’autre. Pour précisions, le développement local est considéré soit d’un point de vue technique, soit d’un point de vue politique. Sur le plan technique le développement local se définit comme un processus consensuel visant le développement global en rapport avec les besoins des acteurs à la base. D’un point de vue politique, il s’agit d’une volonté émise par des décideurs d’enclencher des dynamiques locales afin de stimuler le développement économique global d’un territoire. On voit bien que ces deux approches mettent en jeu des processus, des acteurs, un territoire et un projet. On retrouve les mêmes variables dans la compréhension que l’on peut avoir de la décentralisation et de la territorialisation des politiques publiques précédemment définies. Ces clarifications conceptuelles font clairement apparaître le rôle de la planification en tant que liant entre les différentes variables opérationnalisant les concepts. En effet les variables processus, acteurs, territoire et projet sont précisément celles qui définissent la planification. Cette dernière se conçoit, techniquement, comme étant le déploiement d’un projet sur un territoire donné avec des acteurs bien identifiés durant un temps déterminé. Malheureusement, cette dimension planification, pourtant essentielle à la mise en œuvre d’une politique de décentralisation réussie, est absente des discours actuels sur l’acte III de la décentralisation. La définition d’une technique de prise en charge du développement au niveau local est véritablement le chaînon manquant encore en souffrance dans les discours et dans les réflexions sur l’axe III. Dès lors, il est urgent et primordial de se focaliser sur la définition d’une politique de planification locale si l’on veut que cette phase d’approfondissement de notre décentralisation ne se limite pas uniquement à un réaménagement territorial sans effet sur le niveau de vie des populations. Dans ce qui suit, nous allons diagnostiquer l’existant en matière de planification locale avant d’esquisser des propositions destinées à faire des plans de développement au niveau local un instrument essentiel dans le succès de l’Acte III et dans l’amélioration de la vie des populations locales. QUELLE PLANIFICATION POUR L’AXE III ? Les collectivités locales étant le cadre naturel de déclinaison des politiques publiques, il est important de revenir sur les modalités de pilotage de la planification locale et sa mise en œuvre. Le principe de libre exercice des collectivités locales leur confère un rôle primordial dans le pilotage de la planification du développement local. Ces entités, dont la principale mission est d’animer le développement dans leur localité, disposent de plusieurs instruments de planification censés constituer des moyens privilégiés pour réaliser leur développement économique et social. Plusieurs outils cohabitent au niveau local. Si pour la région, le schéma régional d’aménagement du territoire et le plan régional de développement intégré, plans transversaux par excellence, irriguent ou s’inspirent des plans sectoriels, pour la commune il est surtout question du plan d’investissement communal et des plans d’urbanisme alors que la communauté rurale s’appuie sur le plan local de développement. Cette diversité des plans ne peut occulter le fait que la planification locale ne s’est jamais affirmée comme un creuset de cohérence dans lequel toutes les initiatives des acteurs du développement devaient être fédérées. Depuis leur adoption, les plans de développement des collectivités locales n’ont jamais été qu’un catalogue de projets. Ce n’est qu’avec la régionalisation qu’on a connu une réorientation de la planification. Malgré tout, l’adoption d’un niveau stratégique n’a pas toujours produits des résultats escomptés en raison même de la conception que les élus ont de cet instrument de politique économique qu’est le plan. De fait, la planification telle qu’elle s’est jusqu’ici pratiquée au niveau des collectivités locales a toujours fait apparaître ces entités comme des électrons libres sans aucun lien autre que financier avec l’Etat central. Les outils mis en place pour encadrer le développement n’offrent souvent aucune perspective à la collectivité puisqu’élaborés uniquement pour la forme et dans l’optique de capter des financements. Le niveau local sénégalais est actuellement caractérisé par un foisonnement d’intervenants qui ignorent sciemment les orientations définies au niveau des instruments de planification locale et encore plus des méthodes et du système en place. Ces intervenants sont d’autant plus à l’aise dans leur action solitaire que ni les élus ni les autorités déconcentrées ne se soucient de mettre en cohérence le dispositif de planification. Les types de projets répertoriés dans les instruments de planification ne sont pas non plus exempts de reproches. Il ne saurait en être autrement si l’on sait que la concertation nécessaire à la formulation des projets importants reste un vain mot et que les exemples d’intercommunalités sont rares. Pourtant, les dispositions ouvertes par les textes de la décentralisation encouragent les associations entre les différents ou mêmes ordres de collectivités locales, ce qui aurait dû favoriser la mise en œuvre de projets structurants et l’articulation des projets sur des territoires connexes. Sur d’autres aspects, les projets locaux ne sont pas pris en compte dans le cadre de planification national par les autorités dans le cadre de cette politique de territorialisation puisque les tentatives de régionalisation du Budget consolidé d’investissement (BCI) n’aboutissent pas encore. Une des raisons de cet échec tient au fait que les Plans triennaux d’Investissements des régions n’existent que dans deux ou trois régions et sont, dans l’essence, inutiles puisque les Plans d’Opération Régionaux (POR) de la Stratégie Nationale de Développement Économique et Social (SNDES) sont téléguidés depuis le niveau national, dans une approche top down, au lieu d’obéir à des logiques locales. La non inscription des projets des Plans régionaux de développement intégré (PRDI), fédérant les initiatives de l’ensemble des collectivités locales d’une région, dans le Programme triennal d’investissements publics (PTIP) demeure, dans le même ordre d’idées, une limite de taille à une bon développement des collectivités locales. La mise en œuvre optimale de ces instruments de négociation et de financement du développement régional et des plans des autres collectivités locales (communes et communautés rurales) est également obérée par la timidité des tentatives de mobilisation des ressources issues de la coopération décentralisée, par le niveau local. De même, les services de l’Etat dans les collectivités locales ne jouent pas encore pleinement leur rôle d’appui à ces entités. Or cette fonction d’appui est d’autant plus essentielle que les ressources humaines des collectivités locales sénégalaises sont notoirement sous-qualifiées. Il n’existe pas encore dans notre pays un corps de fonctionnaires territoriaux bien formés à l’instar des fonctionnaires de l’Administration centrale ni une normalisation des profils de fonction à l’échelon local. À tous ces problèmes s’ajouteront, à n’en pas douter, les nouveautés introduites par la politique de territorialisation des politiques publiques. Celles-ci tournent autour de la communalisation intégrale avec la transformation des anciennes communautés rurales en communes, le redécoupage des régions en entités plus viables et l’érection des départements en collectivités locales ; soit autant d’innovations qui appellent l’abandon du plan local de développement et l’adoption d’un plan pour le département.

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